| POSSESSION, subst. fém. I. − Fait de posséder. A. − Fait de posséder quelque chose. 1. Fait d'avoir à soi, de disposer en maître de (quelque chose) et pouvoir en tirer profit et jouissance. Synon. détention.J'adorai ce meuble. J'ouvrais à chaque instant ses portes, ses tiroirs; je le maniais avec ravissement, goûtant toutes les joies intimes de la possession (Maupass.,Contes et nouv., t.2, Chevel., 1884, p.938).J'ai doté ma fille aînée, doté mon fils aîné, j'ai constitué mon apport personnel en terre, estimant que rien ne stabilise comme la possession d'un bien au soleil (Pesquidoux,Livre raison, 1925, p.135).La possession d'un cheval témoignait d'une promotion sociale, comme celle d'une automobile aujourd'hui (P. Rousseau,Hist. transp., 1961, p.164). − Loc. verb. ♦ Être en possession de + subst. Synon. posséder, détenir.Il était en possession d'une petite fortune (Drieu La Roch.,Rêv. bourg., 1937, p.34). ♦ Avoir (quelque chose) en sa possession. Synon. détenir.Il essaya alors de se souvenir de ce qui s'était passé tandis qu'il avait eu en sa possession les clefs de la caisse, et chercha à sonder cet horrible mystère (Ponson du Terr.,Rocambole, t.1, 1859, p.273). ♦ Prendre possession de + subst. Devenir le possesseur, le propriétaire de. Mon père était mort, et m'avait laissé cette petite maison avec les terres qui l'entourent; j'en pris possession (Dumas père, Jones, 1838, ii, 3, p.150). ♦ Entrer, rentrer en possession de + subst. Devenir le possesseur, le propriétaire de. Synon. recouvrer.Il avait exprimé, en cinq lignes, son refus catégorique et à peine motivé d'entrer en possession de sa part d'héritage (Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p.116).Il implorait qu'un jour ou l'autre, seulement, et quand Thomas l'en jugerait digne, il rentrât en possession de son or (Queffélec,Recteur, 1944, p.40). ♦ Mettre (quelqu'un) en possession de + subst. Rendre possesseur, propriétaire de. La mort de son père l'avait mise en possession d'une fortune considérable (Stendhal,Abbesse Castro, 1839, p.215). ♦ [Avec un sens passif] . Être en la possession de (quelqu'un). Être possédé, détenu par (quelqu'un). Ce manuscrit est, aujourd'hui, en la possession de Cécile (Duhamel,Terre promise, 1934, p.99). a) DR. CIVIL
α) Fait de se comporter vis à vis d'un bien comme si on en était propriétaire. La possession est la détention ou la jouissance d'une chose ou d'un droit que nous tenons ou que nous exerçons par nous-mêmes, ou par un autre qui la tient ou qui l'exerce en notre nom (Code civil, 1804, art. 2228, p.408). ♦ En fait de meubles, possession vaut titre. ,,Présomption de propriété, établie en faveur du possesseur, laquelle n'admet aucune preuve contraire, si ce possesseur a acquis la chose de bonne foi d'un non-propriétaire, pourvu que celui-ci ne se la soit pas procurée par suite d'une perte ou d'un vol`` (Réau-Rond. 1951). Quatre-vingt-mille francs comptant, et vous me laisserez les diamants, ajouta-t-il (...). En fait de meubles, la possession vaut titre (Balzac,Gobseck, 1830, p.414). ♦ Envoi en possession. ,,Acte judiciaire par lequel les ayants droit sont mis en possession de ce qui leur est dévolu`` (Ac. 1935).
β) Possession d'état. ,,Apparence d'un état donné (dans le droit de la famille)`` (Jur. 1971). Il ne lui manque que l'investiture et la possession d'état; mais voilà, il ne les aura jamais, et il le sent (Arnoux,Crimes innoc., 1952, p.148). ♦ Possession d'état (d'enfant légitime). Fait, pour un enfant, d'être élevé et traité par des gens mariés comme leur enfant légitime, de porter le nom du mari et de passer aux yeux du public pour l'enfant des époux (d'apr. Lemeunier 1969): 1. ... la légitimité des enfans ne peut être contestée sous le seul prétexte du défaut de représentation de l'acte de célébration, toutes les fois que cette légitimité est prouvée par une possession d'état qui n'est point contredite par l'acte de naissance.
Code civil, 1804, art. 197, p.38. b) [Le compl. du nom désigne un pouvoir, un droit] Fait de posséder, de jouir de. Synon. jouissance.Si les libres enfants de l'Amérique n'obtenaient pas de leurs magistrats protection et justice, ils rentreraient dans la possession de leurs droits naturels (Taine,Notes Paris, 1867, p.102): 2. ... il y a un autre devoir qui est imposé à une opinion qui est devenue gouvernement; ce devoir est celui-ci: c'est de ne pas abuser des moyens que la possession du pouvoir met entre ses mains...
Thiers, 1864ds Doc. hist. contemp., p.28. − Loc. verb. ♦ Être en possession de + subst. Posséder, détenir. Souvenez-vous de ne laisser jamais personne plus d'un an, en possession de la charge d'avoyer (Michelet,Chemins Europe, 1874, p.400).Tout citoyen de l'un ou l'autre sexe, majeur, en possession de ses droits civils et politiques peut donc être élu (Vedel,Dr. constit., 1949, p.427). ♦ Prendre possession de + subst. Devenir le possesseur de, être investi de. Le nouveau roi prenait possession de sa charge (Fustel de Coul.,Cité antique, 1864, p.222). ♦ Entrer, rentrer en possession de + subst. Devenir le possesseur de, être investi de: 3. Que les évêques le sachent cependant, nulle loi n'empêche qu'ils ne s'assemblent selon les ordonnances des canons; il suffit qu'ils le veuillent pour rentrer en possession de ce droit...
Lamennais,Religion, 1826, p.13. ♦ Mettre qqn en possession de + subst. Rendre possesseur de, investir de. On s'acheminait ainsi vers un état de choses où le peuple serait remis en possession de ses droits (De Gaulle,Mém. guerre, 1959, p.106). ♦ Être en possession de + inf. Être en droit, en état de. À Brest, quatre ou cinq familles sont en possession, par la faveur des ministres, d'occuper des places de municipalité et de judicature (Le Moniteur, t.2, 1789, p.222).Le théâtre de Carinthie avait alors pour directeur Bernardone Curtz, célèbre Arlequin, en possession de charmer le public par ses calembours (Stendhal,Haydn, Mozart et Métastase, 1817, p.39). 2. P. méton., le plus souvent au plur. a) La chose possédée. Synon. avoir, biens, terres.Je vis apposer les scellés chez moi; j'appris qu'ils avoient été mis sur mon hôtel à Paris et sur les autres possessions de mon époux (Fiévée,Dot Suzette, 1798, p.79).Dans une société organisée, et par conséquent solidaire, il se peut que les uns possèdent, travaillent et consomment, tandis que les autres n'auraient ni possession, ni travail, ni pain (Proudhon,Syst. contrad. écon., t.2, 1846, p.54): 4. L'unique héritière de Niéser était une fille dont l'innocence et la beauté auraient pu (...) paraître une dot suffisante, sans la perspective attrayante des possessions de son père.
Nerval,Nouv. et fantais., 1855, p.3. b) En partic. [Le plus souvent suivi d'un adj. indiquant le pays d'appartenance] Dépendance coloniale d'un état. Le grand-père de mon amie lui remit un atlas scolaire dans lequel l'Angleterre et toutes les possessions britanniques dans le monde avaient été effacées (Cendrars,Bourlinguer, 1948, p.379).La France combattante étendait son autorité à tout l'ensemble des possessions françaises dans l'Océan Indien (De Gaulle,Mém. guerre, 1956, p.54). 3. En partic. [Dans un cont. milit.] Fait de posséder, de disposer d'un territoire reconnu pour ses qualités stratégiques. La possession incontestée du front Damvillers (...) était nécessaire pour permettre la sécurité de nos débarquements (Joffre,Mém., t.1, 1931, p.177): 5. La capitale du Wurtemberg sera, en effet, pour nos troupes la porte ouverte vers le Danube, la Bavière, l'Autriche. Sa possession nous assurera, en outre, un gage important pour soutenir nos desseins quant à la zone d'occupation française.
De Gaulle,Mém. guerre, 1959, p.168. − Loc. verb. Prendre possession de (+ subst. désignant une position stratégique). S'emparer de, occuper. Les Anglais prenaient possession de la ville. On voyait un peu partout des troupes d'Allemands qui s'étaient cachés et qui se rendaient au passage des soldats (Van der Meersch,Invas. 14, 1935, p.412). ♦ P. ext. [Le compl. désigne un lieu] [Le suj. désigne une pers.] S'installer dans, sur. Les bouquinistes ne tardèrent pas à reprendre possession des quais (A. France,P. Nozière, 1899, p.84).J'avais imaginé que rentrant chez lui ce jour-là, le garçon y trouvait la jeune femme reprenant possession de son ancienne chambre (Green,Journal, 1949, p.276).[Le suj. désigne un animal, un végétal ou un élément naturel] Envahir. Ainsi tout torrent laissé à lui-même arrive-t-il (...) à une sorte d'équilibre, qui permet à la végétation de prendre possession de ses rives (Lapparent,Abr. géol., 1886, p.24).Dès octobre, les pluies et les brouillards prennent possession de la contrée (Vidal de La Bl.,Tabl. géogr. Fr., 1908, p.280).Mites, mouches, souris, poussière, ont pris possession des couloirs (Martin du G.,Vieille Fr., 1933, p.1047).Au fig. Envahir. À mesure qu'ils s'éloignaient de la fanfare et des détonations, le silence reprenait possession de la ville (Camus,Exil et Roy., 1957, p.1679). − Loc. nom. Prise de possession. Fait de s'emparer, d'occuper (une position stratégique). Ce projet a pour point de départ la prise de possession de Djibouti par les Forces Françaises Libres (De Gaulle,Mém. guerre, 1954, p.339). 4. GRAMM. Mode de relation exprimé par différents procédés: complément de nom, adjectifs et pronoms possessifs, pronom en, article en relation ou non avec le, lui, se (d'apr. J. Pinchon, Morphosyntaxe du fr., Paris, Hachette, 1986, p.105): 6. Un complément du nom indique la possession [it. ds le texte] quand il peut être le sujet d'une phrase sous-jacente avec le verbe avoir; celui-ci a pour objet le nom qui devient complément dans la phrase réalisée. Dans «le chapeau de Pierre, Pierre indique la possession [it. ds le texte]».
Ling.1972. B. − Fait de posséder quelqu'un. 1. [La pers. possédée est assimilée à un bien matériel] Fait d'avoir à soi, de disposer en maître de (quelqu'un) et pouvoir en tirer profit et jouissance. Ma mère était à moi, personne ne m'en contestait la tranquille possession (...) on m'épargna ce dur apprentissage, la jalousie (Sartre,Mots, 1964, p.17). − Loc. verb. ♦ Avoir (qqn) en sa possession. Avoir quelqu'un avec soi, profiter et jouir de la compagnie de. Je serais aussi bien contente de voir cette enfant, de la tenir sur mes genoux, de la caresser, de l'embrasser, de l'avoir en ma possession pour quelques jours (E. de Guérin,Journal, 1835, p.64). ♦ [Avec un sens passif] Être en la possession de (qqn). Appartenir à (quelqu'un); être sous sa domination. Seulement, qu'il ne me parle plus de lui devoir mes moyens d'existence. Cela, c'est fini, je ne veux plus retomber en sa possession, je veux m'appartenir (Sand,M. Sylvestre, 1866, p.4). − En partic. [La pers. possédée est une maîtresse, un amant] Je passais dans le cabinet d'études, en L, et je volais un volume. Je ne saurais exprimer la passion avec laquelle je lisais ces livres (...). Je devins fou absolument, la possession d'une maîtresse réelle, alors l'objet de tous mes voeux, ne m'eût pas plongé dans un tel torrent de volupté (Stendhal,H. Brulard, t.1, 1836, p.197). ♦ Loc. verb. Être en possession de (qqn). Posséder, avoir pour soi. Plus tard après déjà des aventures, me voici employé boulevard Voltaire, 137, et en possession d'une jeune femme (Jacob,Cornet dés, Petit hist., 1943, p.10).Prendre possession de (qqn). Se l'approprier. La famille était là qui s'extrayait du fourgon-limousine Borniol, la veuve de mon ami venue reprendre possession de son mari, plus encombrante et déplaçant plus d'air que jamais (Cendrars,Bourlinguer, 1948, p.52).[Avec un sens passif] Être en la possession de (qqn). Être sous la coupe de (quelqu'un), lui appartenir. Elle aimait s'éveiller la première, surprendre son amant endormi, examiner, tout à loisir, le front sans rides, et la bouche assoupie (...) c'est à ces moments-là seulement qu'elle le sentait en sa possession (Martin du G.,Thib., Été 14, 1936, p.584). 2. [En parlant d'un homme] Possession d'une femme. Fait d'avoir avec elle des rapports charnels. Elle était de celles dont on ne supporte pas l'idée de rester l'ami et dont la possession devient un désir furieux (Feuillet,Veuve, 1884, p.168).Il se promit, dans son héroïque frivolité, de terminer dignement sa vie heureuse par la possession de cette jeune femme qu'il appréciait (...). Il déploya pour la prendre les roueries les plus savantes (A. France,Lys rouge, 1894, p.27). − [Sans compl. du nom] Satisfaction des désirs sexuels. L'ange désirait cette femme autant que jamais, mais son désir avait perdu par la possession le venin de la curiosité (A. France,Révolte anges, 1914, p.360).Le sentiment de l'amour, que la possession exténue, la perte et la privation le développent. Posséder, c'est n'y plus penser; mais perdre, c'est posséder indéfiniment en esprit (Valéry,Variété[I], 1924, p.84). 3. [Le compl. du nom désigne Dieu] Fait de posséder, de pouvoir jouir de la présence divine en soi. Il n'y a qu'une seule de ces joies qui ne trompe pas, c'est la vue ou la possession de Dieu au dedans de nous-mêmes (Maine de Biran,Journal, 1820, p.269). C. − Au fig. 1. [Le compl. du nom désigne une notion abstr.] Fait de posséder, de pouvoir jouir de. Synon. jouissance.C'est alors à la dernière seconde que la possession du bonheur nous est enlevée, ou plutôt c'est cette possession même que par une ruse diabolique la nature charge de détruire le bonheur (Proust,J. filles en fleurs, 1918, p.624).Il y a des lois immuables qui gouvernent la possession de la gloire, comme la rencontre de l'amour, comme l'acquisition du bien-être (Barrès,Cahiers, t.13, 1921, p.101). − Loc. verb. ♦ Être en possession de. Posséder, jouir de. Au milieu des accidents et des catastrophes de la vie commune, on est en possession de certaines joies intimes et pures qui sont bien l'idéal de celui qui les savoure (Sand,Hist. vie, t.4, 1855, p.268). ♦ Prendre possession de. Pouvoir jouir, tirer profit de. Les poilus placés tout d'un coup dans l'enchantement d'une ville (...) jouissent de mieux en mieux du beau décor net et invraisemblablement propre. Ils reprennent possession de la vie calme et paisible, de l'idée du confort et même du bonheur pour qui les maisons, en somme, ont été faites (Barbusse,Feu, 1916, p.324). ♦ Mettre (qqn) en possession de. Pouvoir le faire jouir de. Otto, tout en considérant cette roue d'or immobile, se livrait à une rêverie si vive et si impatiente, qu'elle semblait le mettre par avance, en possession du bonheur auquel il songeait (Bourges,Crépusc. dieux, 1884, p.221). 2. [Le compl. du nom désigne un sentiment qu'une pers. peut ressentir à l'égard d'une autre pers.] Fait de posséder, de pouvoir bénéficier de. Possession de l'amour, de l'estime de qqn: 7. ... telle est la comtesse; tout conspire chez elle à interdire tout espoir à votre amour (...) pouvez-vous vous dissimuler que votre espoir ne se borne pas à vous présager la seule possession de son coeur.
Sénac de Meilhan,Émigré, 1797, p.1804. − Loc. verb. Être en possession de. Posséder, jouir de. J'apprécie (...) autant que je le dois (...) toute la distance qui me sépare des écrivains en possession de l'admiration publique (Stendhal,Racine et Shakspeare, t.1, 1825, p.78).Quand mademoiselle Marie voulut bien paraître dans le salon de famille (...) elle y trouva M. de Réas déjà acclimaté, et en possession manifeste des bonnes grâces de madame Fitz-Gerald (Feuillet,Mariage monde, 1875, p.40). 3. [Le compl. du nom désigne une qualité mor.] Fait de posséder, d'être pourvu de. M. Gagnon avait une sorte d'aversion pour son fils, Romain Gagnon, mon oncle, jeune homme brillant et parfaitement aimable. C'est la possession de cette qualité qui brouillait, ce me semble, le père et le fils (Stendhal,H. Brulard, t.1, 1836, p.80). − Loc. verb. Être en possession de. Être pourvu de, détenir. Les consolations et les maximes de la philosophie stoïcienne peuvent être bonnes pour les forts, pour ceux qui sont en possession des grandes qualités de l'âme et du caractère (Maine de Biran,Journal, 1819, p.242).Si je n'étais pas en possession de la vertu, du moins j'étais et je suis encore, j'espère, dans le chemin qui y mène (Sand,Hist. vie, t.4, 1855, p.481). 4. [Le compl. du nom désigne une matière que l'on a dû apprendre] Fait de posséder, d'avoir une bonne connaissance de. Synon. maîtrise.Possession d'une science, d'une langue. Bien que la rédaction d'un catalogue de manuscrits exige du bibliothécaire la possession de plusieurs sciences, elle n'en demeure pas moins un art (Civilis. écr., 1939, p.52-7).Il n'était plus question pour une petite Française d'aller apprendre l'allemand en Allemagne, et (...) pourtant la possession de cette langue gardait un intérêt, tant de scolarité que de culture (Romains,Hommes bonne vol., 1939, p.52). II. − Fait d'être possédé. A. − THÉOL. CATH. État d'une personne qui se sent habitée et dirigée par un être surnaturel et maléfique. Synon. envoûtement.Je subis le phénomène que les thaumaturges appelaient la possession. Deux esprits se sont emparés de moi (Sand,Elle et lui, 1859, p.278).Tous les jours (...) les mêmes profils d'animaux se dégagent lentement des faces entrevues (...). C'est une possession, que veux-tu? (Lorrain,Sens. et souv., 1895, p.168). − Loc. verb. Prendre possession de. S'emparer de. Le diable, qui avait de moi pris possession, est assez fort et assez subtil pour tromper mes sens, égarer mon jugement, mêler le vrai au faux (Bernanos,Soleil Satan, 1926, p.269). B. − PSYCHOPATHOL. (Délire de) possession. ,,Forme de délire au cours duquel le malade se croit habité par un être surnaturel (démon surtout: démonopathie), qui parle par sa bouche, mobilise sa langue malgré lui, dirige ses mouvements. Cet état est conditionné par un sentiment de dédoublement de la personnalité`` (Porot 1975). Il en est de même des délires de possession corporelle par des animaux (ou zoopathie), dont les plus célèbres sont les lycanthropies ou le sujet se croit transformé en loup garou (Laplantine1974, p.154). III. − Fait de se posséder. − Possession de soi. Fait d'avoir la maîtrise, le contrôle de soi. Synon. calme, domination.Il parlait posément (...) achevant ses phrases avec (...) calme (...). L'extraordinaire possession de soi dont il faisait preuve achevait de m'exaspérer (Gide,Symph. pastor., 1919, p.902). ♦ Loc. verb. Reprendre possession de soi. Recouvrer la possibilité d'être soi-même. En dehors des contraintes indispensables de la guerre, chaque Français, chaque Française, a repris possession de soi-même, recouvré la possibilité de penser, de parler (De Gaulle,Mém. guerre, 1959, p.420).Se sentir, être en (pleine) possession de soi, de ses moyens, de ses facultés. Se sentir, être maître de soi; jouir de toutes ses capacités intellectuelles. Je commence l'année en pleine possession de moi (Gide,Journal, 1928, p.868).Malgré ses quatre-vingts ans sonnés, il était encore d'une merveilleuse activité, en pleine possession de ses facultés (Foch,Mém., t.1, 1929, p.252). Prononc. et Orth.: [pɔsεsjɔ
̃], [-se-]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Mil. xiies. possessïun «ce qu'on possède, propriété» (Psautier Cambridge, 2, 8 ds T.-L.); b) 1549 (Est.: L'art de musique est devenue en la possession de peu de gens); 2. a) fin xiiies. «folie» (La Desputoison du uin et de l'iaue ds Jubinal, Nouv. rec., t.1, p.306), attest. isolée; b) 1679 «emprise d'une personne sur les sentiments d'une autre» (Sévigné, Lettres, éd. M. Monmerqué, t.6, p.20); c) 1694 «état d'une personne possédée par le démon» (Ac.); d) 1903 pathol. (Nouv. Lar. ill.). Empr. au lat. possessio «fait d'être en possession, jouissance, propriété; prise de possession» et p.ext., au plan spirituel en lat. chrét., «fait d'être possédé par le démon». Fréq. abs. littér.: 3092. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 4599, b) 3834; xxes.: a) 3830, b) 4866. DÉR. 1. Possessionné, -ée, adj.,vx. Qui a des possessions, des terres (dans un pays). Derrière nous tout le cercle des puys avec le long plateau noble de Gergovie que l'on voit superbement. Pays riche, végétation luxuriante de châtaigniers, mûriers, noyers. Les bourgeois de Clermont étaient «possessionnés» ici (Barrès,Cahiers, t.7, 1908, p.46).Hist. ,,Vassaux des anciens empereurs allemands dont la paix de Westphalie (1648) réunit les domaines alsaciens à la France, et qui jouirent dans ce pays de certains droits d'autonomie que la révolution refusa de reconnaître`` (Quillet 1965). Lorsque l'Assemblée Nationale législative ayant sommé les électeurs de Trèves et de Mayence de dissiper chez eux les rassemblements d'émigrés, ces électeurs s'y refusèrent et demandèrent le rétablissement des princes allemands possessionnés en Alsace (Erckm.-Chatr.,Hist. paysan, t.1, 1870, p.448).− [pɔsεsjɔne], [-se-]. − 1resattest. xves. «qui a des possessions (dans un pays)» (Généalogie de la maison de Waziers Wavrin, ms. Tournai 221 ds Gdf. Compl.), attest. isolée, à nouv. au xviiies. (1776 Voltaire, Lett. Dupont ds Littré), rare; de possession, suff. -é*, cf. lat. médiév. possessionatus adj. ou subst. (1345 ds Latham). 2. Possessionnel, -elle, adj.,dr. Qui marque la possession. Acte possessionnel. (Dict. xixeet xxes.). − [pɔsεsjɔnεl], [-se-]. − 1reattest. 1836 (Ac. Suppl.); de possession, suff. -el*. BBG. −Quem. DDL t.15. |