| POPULATION, subst. fém. A. − Vx. Action de peupler, peuplement. La fin de tout gouvernement doit être plutôt d'empêcher le désordre, que de hâter la population, et que c'est moins d'hommes en général que d'hommes bons et heureux qu'il faut peupler la société (Bonald, Législ. primit., t.2, 1802, p.75). − P. anal. [En parlant d'animaux, de végétaux] La nature (...) sait mettre un frein à la population des animaux qui rempliraient en peu d'années tout l'océan (...) de leurs générations (Bern. de St-P., Harm. nat., 1814, p.172). B. − 1. Ensemble des personnes occupant un lieu quelconque. Population aisée, arriérée, bruyante, dissolue, évoluée, grossière, grouillante, opprimée, pauvre, saine, tranquille, turbulente; appel, avis à la population; décimer la population. Les destinées du monde tiennent plus qu'on ne l'imagine à cette intéressante population qui peuple les rez-de-chaussée de la capitale. Les invasions, les révolutions, ne se font pas sans elle; il faut, en toutes choses, compter avec ses passions, avec ses préjugés, avec ses intérêts (Reybaud, J. Paturot, 1842, p.158).Je me suis promené autrefois dans ce Valais, où Saint-Preux rêvait à sa Julie: il y a des villages croupissants, une population abrutie depuis des siècles par l'ivrognerie, la crasse et l'inceste (Chardonne, Épithal., 1921, p.366): 1. Je ne comprends plus ces populations des trains de banlieue, ces hommes qui se croient des hommes, et qui cependant sont réduits, par une pression qu'ils ne sentent pas, comme les fourmis, à l'usage qui en est fait. De quoi remplissent-ils, quand ils sont libres, leurs absurdes petits dimanches?
Saint-Exup., Terres hommes, 1939, p.238. ♦ Épater, étonner les populations (fam.). Épater, étonner les gens. Charpentier va le mois prochain publier dans la Vie moderne le Château des Coeurs avec les dessins des décors faits par des décorateurs de théâtre, affiches sur les murs pour épater les populations (Flaub., Corresp., 1879, p.263).Elle voulait faire appel aux sentiments d'humanité qui pouvaient exister chez ce singulier individu, dont le melon, les noires bacchantes et les verres fumés ne semblaient pas étonner les populations (Queneau, Zazie, 1959, p.77). ♦ [Désigne un groupe partic.] À Paris, chaque ministère est une petite ville d'où les femmes sont bannies; mais il s'y fait des commérages et des noirceurs comme si la population féminine s'y trouvait (Balzac, Cous. Bette, 1846, p.253).Admirable promenade à Châteauneuf, station de rhumatisants où tout le monde boite. Rien de plus drôle que cette population de béquillards! (Maupass., Contes et nouv., t.1, 25 jours, 1885, p.713): 2. ... une grande partie de la population croyante tenait pour demi-péché de confier ses rhumatismes, ses rétrécissements utéraux et ses diarrhées opiniâtres au Dr Barbentane, qui était maçon, et dont on racontait mille horreurs...
Aragon, Beaux quart., 1936, p.37. ♦ Populations laborieuses. Travailleurs. Les Anglais emploient leurs capitaux dans l'industrie, tandis que nos laborieuses populations réservent les leurs à l'épargne (A. France, Anneau améth., 1899, p.33).M. Obregon vous a parlé, il y a six mois, de ces renseignements sur l'état d'esprit des populations laborieuses (Duhamel, Passion J. Pasquier, 1945, p.152). 2. P. anal. Ensemble d'animaux, de végétaux ou d'objets divers regroupés dans un espace quelconque. À terre, c'était un grouillement repoussant et horrible: la fuite précipitée de toute une population de crabes bleus, qui à notre approche se hâtaient de rentrer dans leurs demeures souterraines (Loti, Mariage, 1882, p.92).Une population de statues blanches anime le décor de feuillage [parc de Versailles] (Hourticq, Hist. art, Fr., 1914, p.234).Sur les bords mêmes où Ophélie s'est enfin amarrée, de lourdes populations de soldanelles agitent leurs couronnes bleues et les carex à flocons déroulent l'hermine légère de leurs fleurs de neige (Giono, Eau vive, 1943, p.149). C. − 1. [En parlant de l'effectif total] a) Ensemble des habitants (quels que soient leur âge, leur sexe et leur origine) d'un espace quelconque (pays, région, ville, terre). Quand tu liras cette lettre, la paix avec la Prusse et la Russie sera conclue, et Jérôme reconnu roi de Westphalie, avec trois millions de population (Napoléon Ier, Lettres Joséph., 1807, p.154).La population du globe est aujourd'hui de 10 pour cent supérieure à ce qu'elle était avant la seconde guerre mondiale (Perroux, Écon. XXes., 1964, p.352): 3. ... le massacre n'a pas même signification pour un peuple qui se raréfie que pour un peuple très prolifique. L'Allemand qui saigne un village sait qu'il peut le repeupler; l'excès de population invite au massacre; il faut faire devant soi «de la place».
Gide, Journal, 1914, p.499. b) Spécialement − DÉMOGR. Ensemble d'individus, ayant des conditions d'existence (économiques et culturelles) communes, habitant un espace défini par des limites administratives ou politiques (province, département, État), ou géographiques (région, ville, agglomération). Si l'on met en regard des statistiques détaillées de population avec des cartes également détaillées (...) il est possible, par un travail d'analyse, de discerner des correspondances entre les rassemblements humains et les conditions physiques (Vidal de La Bl., Princ. géogr. hum., 1921, p.10): 4. L'énoncé d'un chiffre de population appelle la considération d'un espace statistiquement défini comme base du comptage, dénombrement et recensement de population.
George1970, p.338. ♦ Population résidente. Ensemble des personnes dont la résidence habituelle se trouve dans une zone géographique donnée. Population présente. Ensemble des personnes présentes à un instant donné dans une zone géographique précise. Sauf dans quelques cas particuliers (stations balnéaires ou de sports d'hiver, villes d'eau, etc.), la notion de «population présente» n'offre pas un très grand intérêt. Il convient cependant de noter que les données statistiques relatives à la population présente seraient beaucoup plus simples à recueillir que celles relatives à la population résidente (Bern.-Colli1981, p.1032). ♦ Population maximale. ,,Plus grand nombre d'êtres humains qu'il est concevable de faire vivre sur un territoire, compte tenu des ressources offertes par celui-ci et du niveau de vie minimale admissible pour le ou les peuples considérés`` (Méd. Biol. t.3 1972). Population minimale. ,,Plus petit groupement d'êtres humains qui soit compatible avec la survie du groupe`` (Méd. Biol. t.3 1972). ♦ Population stable, équilibrée. Population dans laquelle décès et émigrations sont compensés par les naissances et les immigrations. Population optimale. Population qui assure le meilleur rendement économique. L'optimum de population (...) se [réfère] à un modèle théorique visant à déterminer l'effectif ou le mouvement démographique le plus souhaitable (sur une population en fonction d'objectifs donnés) (Thinès-Lemp.1975). SYNT. Population d'une agglomération, d'un bourg, d'un pays, de la terre, d'un village, d'une ville; accroissement, augmentation, composition, dimension, diminution, état, évolution, fluctuation, limitation, migration, mobilité, mouvement, rajeunissement, structure, variation, vieillissement de la population; exode, transfert de population; dénombrer, recenser la population; Ministère de la Santé et de la Population; densité de population. − SC. NAT. Ensemble des individus d'une même espèce trouvés dans une station donnée, de sorte qu'il y a presque certitude pour qu'ils soient apparentés. La population, composée d'individus ayant chacun leurs caractéristiques personnelles, évolue dans le temps; cette évolution en relation étroite avec la fécondité, l'âge et le sexe des individus qui composent la population constitue la dynamique de la population qui est caractérisée par différents taux: natalité, mortalité, et croissance (Husson1970). 2. [Désigne une partie de l'effectif global déterminée par le mode d'habitat, des aspects ethnographiques, ethnologiques, socio-professionnels ou géographiques] Ensemble des individus qui, dans un espace donné, forment une catégorie particulière. Population à haut risque. Le mouvement économique n'a pas à la campagne la même forme qu'à la ville (...) la population rurale diminue, tandis que la population urbaine s'accroît (Jaurès, Ét. soc., 1901, p.3).L'un des éléments statistiques les plus essentiels (...) est le rendement de l'ouvrier, c'est-à-dire le rapport du tonnage effectif de l'extraction à la population ouvrière (Haton de La Goupillière, Exploitation mines, 1905, p.395). ♦ Population active. Ensemble des personnes exerçant habituellement une activité professionnelle (en incluant celles qui se trouvent momentanément sans travail pour une cause indépendante de leur volonté). On considère comme population active: −Les salariés, fonctionnaires et assimilés −Les employeurs de main-d'oeuvre professionnelle et les travailleurs indépendants (Guide pratique du chef de famille, 1950, p.120). SYNT. Population agricole, maritime, ouvrière, scolaire; population côtière, insulaire, montagnarde; population allogène, aborigène, autochtone, éparse, groupée, immigrée, indigène, nomade, sédentaire; population adolescente, adulte, jeune; population carcérale. 3. P. anal. a) STAT. Ensemble limité d'individus, d'unités de même espèce, soumis à une étude statistique. De ses applications démographiques (...) la statistique a gardé l'habitude de nommer «population» tout ensemble d'objets quelconques soumis à son analyse et «individu» chacun de ces objets, chacun des éléments de l'ensemble (Muller1968ds Gilb. 1980). b) PHYS. Population d'un niveau d'énergie. Ensemble des particules ayant la même énergie interne dans un ensemble important de particules identiques. (Ds Lar. encyclop. Suppl. 1968 et Rob. Suppl. 1970). c) ASTRON. Population stellaire. ,,Ensemble d'étoiles ayant, d'un point de vue statistique, des propriétés intrinsèques et cinématiques communes`` (cilf 1980). REM. 1. Populationnisme, subst. masc.Doctrine des partisans de l'accroissement de la population considérée comme étant une source de richesse. Anton. malthusianisme.Populationnisme moral. La théorie mercantile prolonge tout naturellement le populationnisme politique et a pour aboutissement Colbert. C'est une position nationaliste, expansionniste, qui vise à accroître à la fois l'activité et le nombre des hommes (Hist. sc., 1957, p.1603). 2. Populationniste, subst. et adj.Partisan du populationnisme; qui est inspiré du populationnisme, qui l'applique. Argument, concept, doctrine populationniste. Saavedra Faxerdo, résolument populationniste, dénonce les causes de la dépopulation: guerres, émigrations coloniales, fiscalité excessive (Hist. sc., 1957, p.1604).Des gouvernements pratiquèrent une politique «populationniste» consistant à aider financièrement les familles nombreuses, ou bien parce que certains peuples ont pris conscience du danger de la dénatalité (Lesourd, Gérard, Hist. écon., 1966, p.488). Prononc. et Orth.: [pɔpylasjɔ
̃]. Att. ds Ac. dep. 1798. Étymol. et Hist.1. 1335 m. fr. «présence d'habitants, habitants» (A. N. JJ 69, fo101 rods Gdf. Compl.); 2. 1682 «peuplement» (A. Lemaistre, La Métropolitée, Amsterdam, Balthes Boekholt, p.142); 3. 1755 «ensemble des habitants (d'un pays, etc.)» (Mirabeau, L'Ami des hommes, t.1, p.18). Empr. au lat. populatio «population, gens, peuple, foule» en lat. tardif (Blaise) et «peuplement, colonisation» en lat. médiév. (Nierm.). Au sens 3, repris à l'angl. population de même orig. att. dep. 1612 pour désigner la quantité des habitants d'un pays, puis, plus gén., l'ensemble des habitants (v. NED où le sens de «peuplement» n'est att. que dep. 1776). Fréq. abs. littér.: 2794. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 4549, b) 4056; xxes.: a) 2205, b) 4501. Bbg. Dub. Pol. 1962, pp.380-381. _ Furukawa (N.). Le Nombre gramm. en fr. contemp. Tokyo, 1977, pp.127-128. _ Gohin 1903, p.267. |