Police de caractères:

Surligner les objets textuels
Colorer les objets :
 
 
 
 
 
 

Entrez une forme

options d'affichagecatégorie :
POISSER, verbe
A. − Empl. trans.
1. Enduire, frotter de poix ou de toute autre matière analogue:
1. [Le cordonnier] prend son morceau de poix. Il poisse les fils tout du long, les collant ensemble, faisant ainsi le fil à coudre du cordonnier qu'on appelle «ligneul»; il amincit les deux bouts, les roulant entre son pouce et son index comme on ferait à quelques fines longes de moustaches... Giono,Triomphe vie, 1941, p.73.
2. Imprégner, couvrir, salir d'une matière visqueuse, gluante. Un verre de chartreuse renversé venait de poisser la nappe, toute noircie de la cendre des cigares (Zola,Pot-Bouille, 1882, p.191).Je l'ai entendu courir sur le trottoir, sous une pluie fine et collante qui poisse le pavé et mouille l'appui de la fenêtre (Colette,Vagab., 1910, p.148).Il reste un peu de vin au fond des quarts, un vin blond, un peu trouble, qui poisse les doigts et caresse la gorge (Dorgelès,Croix de bois, 1919, p.240).
Au fig., pop. Être importun, collant; ennuyer quelqu'un. Il en parlait dans des termes assez peu amoureux; il disait: −Oh! j' l'aime bien, mais elle' m'poisse!... J'espère qu'elle r'viendra pas d'si tôt (Benjamin,Gaspard, 1915, p.146).
3. Pop. Poisser qqn. Prendre, arrêter, attraper quelqu'un. Et si que ça me chantait de te faire poisser comme déserteur (...) mais ne t'occupe pas! (Carco,Équipe, 1919, p.50):
2. Il me dit: «Ils [les gendarmes] m'ont poissé un coup, mais je me suis promis de les baiser et je tiens parole. Ils m'ont foutu en cabane. C'est en cabane que j'ai appris à les baiser. Ils m'ont eu parce qu'à l'époque, j'étais un pauvre minus, un trou du cul immonde. Maintenant, ils peuvent s'aligner!» Giono,Gds chemins, 1951, p.236.
B. − Empl. intrans. [Corresp. à A 2 supra] Être, rendre collant, visqueux; au fig., contrarier par sa présence continue, sa constance. Un ciel gris et bas à toucher avec les parapluies, un temps mou qui poisse, le gâchis, la boue, rien que de la boue, en flaques lourdes (A. Daudet,Nabab, 1877, p.249).Dès l'entrée, l'escalier étroit et raide, avec ses marches malpropres qui collent aux semelles et sa rampe humide qui poisse aux mains, vous souffle un air empesté au visage, une odeur de plombs et de cabinets, et vous met, dans le coeur un découragement (Mirbeau,Journal femme ch., 1900, p.287).La guerre alors se met à coller. On l'a quittée, mais elle ne consent pas si aisément à la démobilisation, elle s'accroche, elle poisse (Arnoux,Contacts all., 1950, p.70).
REM. 1.
Poissant, -ante, adj.Synon. de poisseux.Ils étaient les végétations de ce pavé gras du quartier des Halles, où, même par les beaux temps, la boue reste noire et poissante (Zola,Ventre Paris, 1873, p.785).Cela était épais, sirupeux, poissant comme j'imagine qu'est le jus filandreux des mandragores et cela avait la saveur de la gentiane (Cendrars,Bourlinguer, 1948, p.312).Au fig. Et il revenait encore, toujours, incolore et sirupeux, poissant (La Varende,Bric-à-brac, 1953, p.37).
2.
Poisserie, subst. fém.,hapax. État de ce qui poisse. La divine exhalaison du papier bleu gras à tracer les broderies, qui console de la poisserie écoeurante des parfums et des savons (Colette,Cl. Paris, 1901, p.38).
3.
Poissé, -ée, part. passé en empl. adj.Qui rappelle l'état visqueux de la poix. Quand Lewis se réveille il n'a pas les paupières chargées des buveurs de bourgogne dont les reins, toute la nuit ont travaillé, ni les yeux rouges des liseurs, ni ces cercles violets des amoureux, anneaux nuptiaux, ni les mèches poissées des danseurs au lendemain d'un bal (Morand,Lewis, 1924, p.87).
4.
Poissure, subst. fém.Synon. de poisserie.Sous la tonnelle vide, des guêpes volaient lourdement autour de la poissure des verres de champagne et du sucre resté dans les tasses (A. Daudet,N. Roumestan, 1881, p.235).
Prononc. et Orth.: [pwase], (il) poisse [pwas]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. «enduire de poix» [cf. le dér. repoissier 1380, doc. ds Gdf.] 1538 (Est., s.v. piceus, pico); 1606 vaisseaux poissez (Nicot); 2. a) 1690 «enduire, salir de matière collante» doigts tout poissez (de sucre, de confiture) (Fur.); b) 1765 intrans. abs. «être gluant» (Encyclop.: ce corps poisse); 1873 part. prés. adj. boue poissante (Zola, loc. cit.). B. Fig. 1. 1753 poissant «(en parlant d'une personne) collant, importun» (ap. C. Piton, Paris sous Louis XV, t.5, p.103 ds Brunot t.6, p.2124); 1915 «importuner par une présence assidue» (arg. des voyous, d'apr. Esn.); 2. a) 1800 arg. «voler» (Leclair, Hist. des bandits d'Orgères ds Sain. Sources Arg. t.2, p.94); b) 1872 «surprendre, arrêter (un malfaiteur)» se faire poisser (Larch.); 1881 être poissé (Rigaud, Dict. arg. mod.); 3. 1865 se poisser «s'enivrer» (mot pop. d'apr. Esn.); 1872 (Larch.). Dér. de poix*; dés. -er. Les accept. de B 1-2, en réf. au caractère collant, gluant de la poix qui retient ce qui a contact avec elle, cf. pègre*; B 3 est rapproché par Esn. de l'arg. noir* «ivre», en réf. à la couleur de la poix, mais il est plus prob. dû au fait que l'homme ivre paraît englué, pâteux dans sa parole et dans ses mouvements. Poisser a évincé l'a. fr. poier «enduire de poix» (1160-74 «couvrir d'un emplâtre de poix» Wace, Rou, éd. A. J. Holden, III, 9639), issu du lat. picare «poisser». Fréq. abs. littér.: 76.