| PHYSIQUE2, adj. et subst. masc. I. − Adjectif A. − 1. Qui a trait à la matière, à la nature, aux corps en général, à la réalité matérielle perceptible par les sens ou qui peut être observé objectivement. Agents, moyens, phénomènes, règles, théories physiques; grandeurs, unités physiques; image physique d'un objet (sur la rétine). Descartes (...) attribuait à une grâce sans cesse renouvelée de la Providence la régularité du monde physique, et la continuation des mêmes effets (Bergson, Essai donn. imm.,1889, p.161).Problèmes naturels qui s'offrent à tout homme qui vient en ce monde: les phénomènes, l'univers physique, les êtres vivants (Valéry, Variété IV,1938, p.231): 1. On considère souvent le signal comme une donnée brute (support physique de l'information), le signe comme quelque chose de mental, et le symbole comme un signe encore plus abstrait.
Coyaud, Introd. ét. lang. docum.,1966, p.13. ♦ Loi physique. La loi physique d'un phénomène est la détermination exacte des conditions de son accomplissement, ce qui permet d'en prédire les détails pour un cas quelconque, et d'en développer toutes les analogies (Littré-Robin1855).Les échanges entre le milieu où ils [les gaz] sont en solution et l'atmosphère sont réglés par les lois physiques (Plantefol, Bot. et biol. végét.,t.1, 1931, p.315). ♦ Propriétés physiques. Propriétés que nous percevons à l'aide de nos sens. C'est donc aux voyageurs à reconnaître la vertu des plantes dont la saveur et les autres propriétés physiques pourront leur fournir quelques lumières (Voy. La Pérouse,t.1, 1797, p.191).Étude de la conductibilité électrique et thermique des métaux, et de différentes propriétés physiques des cristaux (Hist. gén. sc.,t.3, vol. 2, 1964, p.233). 2. Sciences physiques (p.oppos. à sciences naturelles). Sciences relatives à l'étude de la nature (à l'exclusion des êtres vivants). La physique (...) et la chimie, sont souvent réunies sous le nom de sciences physiques (par opposition aux sciences biologiques, appelées aussi sciences naturelles) (Lal.1968). − [En parlant d'une discipline sc.] Qui concerne l'objet de la physique comme science. Les sciences physiques pour l'ingénieur. Les disciplines particulières qu'englobe la géographie physique (climatologie, hydrologie, géomorphologie...) (Colloque géogr. appl.,1962, p.21). ♦ En partic. ,,Qui concerne des corps réels, et non des abstractions schématiques`` (Lal. 1968). [P. oppos. à mathématique] Optique physique (v. Lal. 1968). V. optique2A 1 ex. de Ruyer.[P. oppos. à rationnel] Mécanique physique (Lal. 1968): 2. La mécanique physique souffre d'autre part d'une difficulté logique considérable (...). Pour conduire jusqu'au bout ces calculs où elle prétend rejoindre les résultats de la mécanique analytique, elle est obligée de transformer tôt ou tard les sommes discrètes en intégrales...
Hist. gén. sc.,t.3, vol. 1, 1961, p.115. 3. P. ext. Qui est matériel, effectif, fondé sur un fait d'expérience. Anton. mathématique, métaphysique, moral. ♦ Certitude physique (p.oppos. à certitude morale (v. certitude II B)). Là [dans l'étude des êtres organisés], surtout, l'analogie fournit de ces probabilités irrésistibles que l'on doit assimiler à la certitude physique (Cournot, Fond. connaiss.,1851, p.69). ♦ Impossibilité physique. On admet l'impossibilité physique que la sphère ne prenne pas un mouvement de rotation sur elle-même en même temps qu'un mouvement de translation (Cournot, Fond. connaiss.,1851p.44). B. − [P. oppos. à moral, mental, psychologique, psychique] Qui est relatif au corps humain. Handicapé physique; être en mauvais état physique. 1. Homme physique. Homme considéré dans son aspect physique (v. homme I B 1). L'homme moral devient de plus en plus inséparable de l'homme physique (Hist. sc.,1957, p.1470). 2. DR. [P. oppos. à personne morale] Personne physique. Personne individuelle. Avant l'abolition de la contrainte par corps, il devait répondre lui-même, sur sa personne physique, de toute sa dette (Jaurès, Ét. soc.,1901, p.248).Toute personne physique ou morale peut former, dans les mêmes conditions, un recours contre les décisions dont elle est le destinataire (Traité euratom, 1957, p.359). 3. En partic. a) Relatif au corps humain considéré dans son aspect extérieur. Ressemblance physique. Dans Athènes, l'on ne cherchait pas tant de nuances, de délicatesse. La beauté physique obtenait un culte partout où elle se rencontrait (Stendhal, Hist. peint. Ital.,t.2, 1817, p.131).Mais malheureusement je ne me fais pas d'illusion sur les défauts de ma personne physique (About, Roi mont.,1857, p.177).La danse, faite des gestes, des détentes et des élans expressifs du corps, doit faire appel à la beauté physique naturelle (Bourgat, Techn. danse,1959, p.32). b) Qui concerne la formation ou le développement de tout ou partie du corps humain par l'exercice (d'apr. Petiot 1982). Exercice physique. L'effort physique non suivi d'une détente musculaire complète est préjudiciable à toute forme d'entraînement (Cortot, Techn. pianist.,1928, p.2).Youpa-la, appareil pour le développement physique des enfants (Catal. jouets(Bon Marché), 1936). − SPORTS ♦ Culture physique. Bousculant les couvertures il se jeta hors du lit et fit sa demi-heure de culture physique avec manipulation d'haltères et d'extenseurs (Queneau, Loin Rueil,1944, p.26). ♦ Éducation physique. [L'URSS et la Pologne] faisant d'un nombre important de leurs athlètes des étudiants en éducation physique et sportive (Jeux et sports,1967, p.1236).P. anal., MUS. L'éducation physique de la voix est une gymnastique musculaire rendue consciente par un travail analytique progressif (Arger, Init. art chant,1924, p.12). c) Physiologique, organique. Faiblesse, santé physique; les besoins, les fonctions physiques de l'organisme; le déclin des forces physiques; jouir de l'intégrité de ses facultés physiques et morales. Enfin le taureau s'arrêta , et Alban ne poursuivit plus, parce qu'il était dans la nécessité physique de respirer (Montherl., Bestiaires,1926, p.556).Toute une journée de diète et à la chambre. Résultat: douleurs beaucoup moins vives. J'avais donc besoin de ce repos physique complet (Larbaud, Journal,1935, p.357).Elle n'a jamais donné d'explication sur la cause de la brutale interruption du Concerto, au beau milieu de la cadence. Inhibition physique? (Arnoux, Crimes innoc.,1952, p.256). − En partic. ♦ Qui est ressenti par l'homme dans son corps, dans sa chair. Il y a donc une maladie originelle comme il y a un péché originel; c'est-à-dire qu'en vertu de cette dégradation primitive, nous sommes sujets à toutes sortes de souffrances physiques en général (Maistre, Soirées St-Pétersb.,t.1, 1821, p.82).Sa pensée, comme engourdie par l'excès de la douleur physique, ne se fixait plus (Bernanos, Soleil Satan,1926, p.149): 3. La journée avait été très dure à vivre; hors dix minutes de détente ce matin et l'heure qui a suivi où ma douleur n'était pas morte, mais enchantée. Le souvenir de mon mal physique était encore sur moi, dans mes mâchoires qui tremblaient...
J. Bousquet, Trad. du sil.,1936, p.59. ♦ [En parlant de réactions spontanées de l'homme] Qui n'est pas contrôlé par la volonté; qui est de l'ordre du réflexe. Est-ce que l'esprit et les sens ont leur domaine à part? Grande question! On la résoudra peut-être, si l'on considère la peur physique comme une fièvre qui, malgré le moral, ne saurait manquer d'avoir son cours (Dusaulx, Voy. Barège,t.1, 1796, p.134).Ce n'était que dans ces rêves-là, sauf une ou deux légères exceptions, qu'entraient les circonstances de l'horreur physique. Mes terreurs jusqu'alors n'avaient été que morales et spirituelles (Baudel., Paradis artif.,1860, p.431).Il n'éprouve pas l'horreur physique de la mort parce qu'il n'est avide que de l'âme (Durry, Nerval,1956, p.149). ♦ C'est physique. Rirette détestait les impuissants, c'était physique (Sartre, Mur,1939, p.104).Elle ne pouvait pas supporter la grossièreté; c'était physique (Beauvoir, Invitée,1943, p.88): 4. Je montrai le malheureux (...) reculant, de tout son instinct d'honnête homme, devant la prison qui allait s'ouvrir. C'était physique, ce recul! C'était la marque même de la vertu!
Vercel, Cap. Conan,1934, p.85. d) Relatif au corps humain considéré dans son comportement instinctif, sensuel (p.oppos. à sentimental). Non, la musique n'est pas un instrument de plaisir physique. La musique est un des produits les plus délicats de l'esprit humain (Saint-Saëns, Harm. et mélod.,1885, p.10).Baigné de la faible lumière de la lampe placée à la tête de la couchette, il s'abandonna quelques minutes au plaisir physique d'être allongé dans des draps (Peisson, Parti Liverpool,1932, p.175).L'art découvre progressivement toutes les joies que l'on peut attendre d'une ligne. Joie physique parfois; joie intellectuelle aussi, et souvent l'une et l'autre (Huyghe, Dialog. avec visible,1955, p.166). − [En parlant de relations amoureuses, sexuelles] Amour, plaisir physique. Amour charnel, plaisir des sens. Dans l'amour physique les paroles ne servent plus à rien (Vailland, Drôle de jeu,1945, p.104).J'éprouvais, en dehors du plaisir physique et très réel que me procurait l'amour, une sorte de plaisir intellectuel à y penser (Sagan, Bonjour tristesse,1954, p.137).V. amour ex. 106 et 134. II. − Subst. masc. A. − Ce qui est physique. Dans les emplois pratiques ou abstraits du langage, la forme c'est-à-dire le physique, le sensible, et l'acte même du discours ne se conserve pas; elle ne survit pas à la compréhension; elle se dissout dans la clarté; elle a agi; elle a fait son office (Valéry, Variété V,1944, p.144). B. − 1. Ce qui concerne le corps. a) Constitution, état de santé. Sa conscience, bourrelée, se révoltait. La fièvre la prit le lendemain. Elle se mit au lit. Elle mourait de honte, littéralement. Le moral tuait le physique: la lame usait le fourreau (Villiers de l'I.-A.,Contes cruels,1883, p.16). b) Au physique. En ce qui concerne le physique, le corps. Au physique, nous trouvons [chez la race germanique] une chair plus blanche et plus molle [que chez les peuples latins] (Taine, Philos. art,t.1, 1865, p.227).[Mitoufle] offrait avec Rappart un contraste frappant, au moral comme au physique (A. France, Pt Pierre,1918, p.75).V. moral2A ex. de Bernanos. 2. Aspect général, physique (de quelqu'un). Ils rencontrèrent dans une allée du bois une dame d'un physique fort agréable (Feuillet, Sibylle,1863, p.155).Elle a un physique sérieux de femme pauvre, entendue et courageuse (Frapié, Maternelle,1904, p.81).J'étais harcelée d'observations et de remarques peu flatteuses sur mon physique (Gyp, Souv. pte fille,1928, p.308).V. moral2ex. − (Avoir) le physique de l'emploi. (Avoir) un physique qui convient à son rôle, et, p.ext., un physique évocateur de son métier, de son activité. Frantz: Si l'on t'offrait de devenir gentilhomme par un coup de baguette, tu accepterais donc? Spiegel: Dame! si le coup de baguette pouvait, en même temps, me donner le physique de l'emploi (Augier, Pierre de touche,1854, p.96).Bocardon, à part, regardant Vernouillet. Il a tout à fait le physique de l'emploi (Labiche, Célimare,1863, i, 11, p.37). − Avoir un physique de théâtre. Prononc. et Orth.: [fizik]. Ac. 1694-1762, adj.; dep. 1798, adj. et n. masc. Étymol. et Hist.I. Subst. fém. A. 1. Ca 1160 fusique «médecine» (Eneas, éd. J. J. Salverda de Grave, 2207); 2. [1165 fisique «connaissance des choses de la nature» (s. réf. ds FEW t.8, 407a; = peut-être Chr. de Troyes, G. d'Angleterre, éd. M. Wilmotte, 1362, mais fisique y a le sens de «médecine»)] ca 1265 phisique «connaissance des choses de la nature» (Brunet Latin, Trésor, éd. F. J. Carmody, I, 3, p.19); 3. 1688 «ouvrage qui traite de physique» (Miege ds FEW, loc cit.). B. 1. 1708 «science qui a pour objet l'étude des propriétés des corps et des lois qui tendent à modifier leur état ou leur mouvement sans modifier leur nature (Lar. encyclop.)» (Fontenelle, Hist. du renouvellement de l'Ac. royale des sc., Préf. sur l'utilité des math. et de la phys., p.[30]: la Physique sistématique [...] la Physique experimentale); 1721 physique corpusculaire (Trév., s.v. corpusculaire); 1740 physique astronomique (Ac.); 1839 physique mathématique (A. Cauchy ds C. r. de l'Ac. des sc., t.8, p.374); 1839 physique moléculaire (ibid., p.375); 1930 physique relativiste (Ruyer, Esq. philos. struct., p.48); 1931 physique classique (Lar. mens., p.754c); 1947 physique microscopique (L. de Broglie, Phys. et microphysique, II, VII, p.154 ds Rob., s.v. indéterminisme); 1948 physique quantique (Gds cour. pensée math., p.207); 1948 physique nucléaire (ibid., p.506); 1949 physique atomique (Nouv. Lar. univ.); 2. a) 1749 «application de cette science à un objet particulier» (Buffon, Preuves de la théorie de la terre, I ds Hist. nat. t.1, p.129: la Physique de la terre tient à la Physique céleste); b) 1797 physique du globe (Voy. La Pérouse, t.1, p.48); c) 1801 physique amusante (Comus, Physique amusante, Paris ds Gde Encyclop., t.26, p.834a); d) 1961 physique des très basses températures (Hist. gén. sc., t.3, vol. 1, p.262); e) 1962 physique des états condensés (Rob.). II. Adj. A. 1. 1487 phisique «naturel» (Vocab. lat.-fr., Genève, L. Garbin ds FEW t.8, p.410a); 2. 1651 physique «qui est de l'ordre de la nature» (Pascal, Préf. sur le traité du vide ds OEuvres compl., éd. J. Mesnard, t.2, p.779: les matières physiques); 1721 géographie physique (Trév., s.v. géographie); 1730 science physique (Du Marsais, Tropes, p.266); 1751 propriété physique (Encyclop. t.1, p.474a: le vivant et l'animé [...] est une propriété physique de la matière); 3. 1694 impossibilité physique (p.oppos. à impossibilité morale) (Ac.); 1721 certitude physique (p.oppos. à certitude morale et certitude métaphysique) (Trév., s.v. certitude); 4. 1791 propriétés physiques (Volney, Ruines, p.130); 5. 1792 sciences physiques (Condorcet, Organ. instr. publ., p.466: les sciences physiques et mathématiques). B. 1. a) 1727 «se dit de ce qui est ressenti par l'être humain dans sa chair» (Ramsay, Les Voyages de Cyrus, t.2, p.185: le mal physique est nécessaire pour guérir le mal moral, et la souffrance est l'unique remede du péché); 1754 (Bonnet, Essai de psychol., p.127: des plaisirs et des douleurs purement physiques ou corporels); b) 1746 «se dit de l'être humain considéré dans ce qu'il a de matériel, de charnel (p.oppos. à moral) (Montesquieu, Corresp., t.1, p.425: je ne sais si c'est une chose que je dois à mon être physique ou à mon être moral); 1755 l'homme physique (Rousseau, Discours sur l'inégalité, p.141); c) 1796 «se dit de réactions spontanées de l'être humain (peur, horreur, dégoût)» (Dusaulx, loc. cit.: la peur physique); 1837 horreur physique (Barb. d'Aurev., Mémor. 1, p.185); 1897 expr. c'est physique (Renard, Journal, p.454: Cyrano l'agace. C'est physique, chez lui); 2. 1733 «relatif au corps humain» (Dubos, Réflexions crit., t.2, p.76); 1733 éducation physique (Id., ibid., p.309); 3. 1745 spéc. «relatif au corps humain considéré dans son comportement sexuel» (Maupertuis, Vénus physique ds Cioranescu 18e, cf. Littré); 1761 amour physique (Robinet, De la nature, p.105); 4. 1901 dr. personne physique (p.oppos. à personne morale) (Jaurès, loc. cit.). III. Subst. masc. A. 1. 1733 «ce qui est physique» (Dubos, op. cit., p.310: c'est le physique qui donne la loi au moral); 1755 au physique (p.oppos. à au moral) (Mirabeau, Ami des hommes, t.1, p.134); 2. [1748 spéc. «ce qui est charnel, attrait charnel» (Montesquieu d'apr. Lar. Lang. fr.)] 1755 (Rousseau, op. cit., p.157: le physique est ce désir général qui porte un sexe à s'unir à l'autre). B. 1. 1763 «aspect général, apparence extérieure» (Marmontel, Poétique fr., t.1, p.393); 1813 au physique (Jouy, Hermite, t.4, p.320: au physique, elle est laide); 2. a) 1842 théâtre, ici au sens fig. (Reybaud, J. Paturot, p.334: le physique du rôle; p.358: si le physique est assorti à l'emploi); 1854 le physique de l'emploi (Augier, loc. cit.); b) 1863 théâtre, au sens propre (Gautier, Fracasse, p.122). I du lat. physica «la physique, les sciences naturelles», empr. au gr. η
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́ «l'observation ou l'étude des choses de la nature», fém. subst. de φ
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ς «qui concerne la nature ou l'étude de la nature», dér. de φ
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ς «origine, naissance; forme naturelle, constitution; ordre naturel», en philos.: «nature créatrice, la Nature personnifiée; création, créature; univers». II du lat. physicus «physique, naturel, des sciences naturelles», empr. au gr. φ
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κ
ο
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ς (supra I). III empl. subst. de II. STAT. −Physique1 et 2. Fréq. abs. littér.: 7343. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 11551, b) 9740; xxes.: a) 7725, b) 11507. BBG. −Gohin 1903, p.230, 359. _Quem. DDL t.13, 28. |