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PENSER1, verbe
I. − Empl. intrans.
A. − HIST. DE LA PHILOS. Exercer son esprit; mettre en oeuvre sa conscience. Le mot pensée (...) comprend dans son acception toutes les facultés de l'entendement et toutes celles de la volonté. Car penser, c'est sentir, donner son attention, comparer, juger, réfléchir, imaginer, raisonner, désirer, avoir des passions, espérer, craindre (Condillac, La Log. ou les premiers développemens de l'art de penser, 1789, p.74):
1. ... sentir des sensations, sentir des souvenirs, sentir des rapports, et sentir des desirs, c'est toujours sentir. Quoique je ne vous l'aie pas encore démontré, je vous ai annoncé que ces quatre facultés composaient notre faculté de penser tout entière... Destutt de Tr., Idéol. 1, 1801, p.79.
[P. allus. à l'argument développé par Descartes dans le Discours de la Méthode puis dans les Méditations métaphysiques] [Descartes] produisit une grande sensation en appelant de toutes les vérités reçues à l'examen de la réflexion; on admira ces axiomes: Je pense, donc j'existe; donc j'ai un créateur (Staël, Allemagne, t.4, 1810, p.59).Par la pensée nous prenons conscience de l'être, mais inversement il faut déjà exister pour penser (Jankél., Je-ne-sais-quoi, 1957, p.60).[Empl. lexicalisé à la 1repers. du sing.] Le je pense. Trad. de cogito. Le «je pense» n'est pas un donné, il n'est pas une forme, il est un acte (G. Marcel, Journal, 1914, p.37).
B. − PHILOS., lang. cour.
1. Former des idées; concevoir par l'esprit, par l'intelligence. Être lent à penser. Nous ne pouvons parler sans penser, c'est-à-dire sans attacher une idée à nos paroles (Bonald, Essai analyt., 1800, p.224).Penser c'est, comme agir ou sentir, réagir au milieu (Lacroix, Marxisme, existent., personn., 1949, p.103):
2. ... malgré leur fusion dans l'absolu, le moi et le non-moi se posent séparément et contradictoirement dans la nature, et nous avons des êtres qui pensent, en même temps que d'autres qui ne pensent pas. Proudhon, Syst. contrad. écon., t.1, 1846, p.14.
Penser dans/en une langue. Former ses idées en utilisant les signes, les structures d'une langue particulière. Nous pensons en une langue, et, quand nous avons suffisamment l'habitude d'un code, il nous arrive de penser en mots codés qui deviennent pour nous et les quelques personnes connaissant également le code un langage particulier (Jolley, Trait. inform., 1968, p.90).
Vieilli. Machine à penser (log., informat.). Appareil analogue aux machines à calculer et qui tire les conséquences logiques des données qui lui sont fournies préalablement. Les machines à penser, ou les machines à comportement mécaniquement finalisé, semblent confirmer l'utopie philosophique de l'homme pur, comme «être raisonnable» et non plus «animal raisonnable» (Ruyer, Cybern., 1954, p.32).
2. Combiner, organiser des concepts, des idées, leur donner un sens; p.ext. exercer son sens critique, son jugement, élaborer des systèmes intellectuels, des théories. L'Empereur, à dix-huit et vingt ans, était des plus instruits, pensant fortement, et de la logique la plus serrée (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t.1, 1823, p.85).Picasso ne pense pas. Il est l'anti-intellectuel type, alors qu'on le charge d'intellectualisme. Il ne pense pas, ou plutôt, il pense en actes (Cocteau, Poés. crit. I, 1959, p.264):
3. Rester indifférent devant l'univers est chose impossible pour l'homme. Dès qu'il pense, il cherche, il se pose des problèmes et les résout; il lui faut un système sur le monde, sur lui-même, sur la cause première, sur son origine, sur sa fin. Renan, Avenir sc., 1890, p.18.
Maître à penser. V. maître1II C 2.
[P. allus. à La Bruyère (Caractères I, 1): Depuis qu'il y a des hommes et qui pensent] Si depuis 2 000 ans qu'il y a des hommes et qui pensent, il a toujours existé des poètes, des chroniqueurs, des conteurs, des romanciers pour donner aux hommes de la distraction et du rêve au milieu de leurs préoccupations, ces poètes, ces chroniqueurs, ces conteurs et ces romanciers n'ont jamais trouvé dans l'usage de leur talent une juste rémunération de leur travail (Arts et litt., 1936, p.84-1).
Penser sur + subst.Exercer son jugement, faire une construction logique, élaborer une théorie à propos d'un sujet déterminé. Tout de suite il [Malebranche] eut son système en philosophie, une manière générale de penser sur Dieu, sur le monde, sur la nature (Massis, Jugements, 1923, p.38).Le droit du journaliste à penser sur la chose publique (Morienval, Créateurs gde presse, 1934, p.58):
4. ... si l'on commence à penser sur la chaleur ou seulement sur les pressions, sans y être préparé par la considération des rapports plus simples, on risque de former des singes pensants; et l'on n'en voit que trop. Alain, Propos, 1921, p.322.
C. − Avoir une opinion. Vous avez peut-être raison de penser ainsi, mais vous n'avez pas raison de soutenir votre opinion contre un vieillard (Joubert, Pensées, t.1, 1824, p.223).Nous pensons l'un comme l'autre sur mon père, qui n'est plus l'homme que nous avons connu (Barb. d'Aurev., Memor. pour l'A... B..., 1864, p.415).La passion sans contre-poids de la justice rend l'homme injuste pour ceux qui ne pensent pas comme lui (Faure, Hist. art, 1909, p.115).
Loc. et expr.
Penser par soi-même. Avoir une opinion personnelle. Les esprits cultivés qui se piquent de penser par eux-mêmes (Arts et litt., 1936, p.42-5).
Bien/mal penser (souvent p.iron.). Avoir en matière de politique ou de religion, des opinions conformes ou non à celles du moment. Il prêta le serment et même fut grand-vicaire constitutionnel, homme qui s'est assis dans la chaire empestée; il a contre lui toute sa robe. Tout ce qui pense bien le tient dûment battu, et applaudit au maire (Courier, Pamphlets pol., Gazette du village, 1823, p.184).
Façon/manière de penser. Manière de voir, de juger. [Les] plus vieilles façons de penser et de sentir dont chacun de nous hérite au jour de sa naissance (L. Febvre, Face au vent, [1946] ds Combats, 1953, p.39).Les chefs-d'oeuvre du passé nous montrent que chaque génération eut sa manière de penser, ses conceptions, son esthétique (Le Corbusier, Charte Ath., 1957, p.87).Opinion. De l'un à l'autre les mots passaient, et chacun amplifiait, déformait, disait sa façon de penser et ses remarques (Peisson, Parti Liverpool, 1932, p.74).Fam. Dire (à qqn) sa façon de penser. Donner franchement son opinion; être sans nuance, sans détour dans son expression. J'avais envie de te voir aussi, mais pas seulement pour le plaisir, dit-il avec un demi-sourire. Plutôt pour te dire ma façon de penser: c'est dégueulasse d'avoir passé cet article sur Dubreuilh, le mois dernier (Beauvoir, Mandarins, 1954, p.285).
D. − Synon. de réfléchir.M. des Lourdines se laissait emporter, sans penser, mort de fatigue (Châteaubriant, Lourdines, 1911, p.113).Relaxez-vous. Ne pensez plus (Aymé, Mouche, 1957, p.37):
5. Ils ne veulent absolument pas que la vie soit une chose triste: alors, tu comprends, ils pensent le moins possible; ils jouent. Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p.1320.
Locutions
Penser tout haut. V. haut1II C 2 a.
[Le suj. désigne une chose, un événement, une attitude] Donner à penser. Faire réfléchir. Toutes ces remarques vous excitent l'esprit et vous donnent à penser (L. Febvre, La Nationalité, [1926] ds Combats, 1953, p.191).Donner lieu à des suppositions, des soupçons, des inquiétudes. Onze heures sonnaient dans le clair de lune; Même d'Artiailh ouvrait la porte, sans tousser ni frapper, et désespérait de surprendre les jeunes gens dans une attitude qui donnât à penser (Mauriac, Baiser Lépreux, 1922, p.167).
II. − Empl. trans. dir.
A. − Penser qqn/qqc.
1. Synon. de concevoir.
a) [P. oppos. à percevoir, sentir] Surtout dans le domaine de la réflexion, de la connaissance sc. et philos.Saisir par la pensée; former, construire l'idée d'un être ou d'une chose. Naturellement, je ne pouvais pas clairement penser ma mort, mais je la voyais partout, sur les choses, dans la façon dont les choses avaient reculé et se tenaient à distance, discrètement, comme des gens qui parlent bas au chevet d'un mourant (Sartre, Mur, 1939, p.28).La distance, comme toutes les autres relations spatiales, n'existe que pour un sujet qui en fasse la synthèse et qui la pense (Merleau-Ponty, Phénoménol. perception, 1945, p.295).V. intellectuel C 1 ex. de Joubert:
6. Le mouvement n'est perçu que par un jugement qui lie plusieurs images, dessinant de l'une à l'autre une trajectoire continue. Mais si vous pensez une position seulement, vous pensez l'immobile, comme le fameux Zénon d'Élée se plaisait à dire autrefois; la flèche, à chaque instant, disait-il, est où elle est, donc elle ne se meut point. Alain, Beaux-arts, 1920, p.279.
Empl. pronom. réfl. Faites maintenant surgir la réflexion: cette conviction [vécue] s'évanouira; l'homme va se percevoir et se penser comme un point dans l'immensité de l'univers (Bergson, Deux sources, 1932, p.186).
Part. passé en empl. subst. masc. sing. à valeur de neutre. Ce qui est ou peut être pensé. Éviter avec soin la confusion [dans ma pensée] (...) entre les fictions et les vrais actes psychiques, entre le vu, le pensé, le raisonné, le senti (Valéry, Lettres à qq.-uns, 1945, p.106).
En partic. Rapporter par l'esprit (un fait, un événement) à une conception, à une attitude déjà connue. Qu'ils s'en doutent ou non, ils [les Africains, les Asiatiques qui veulent réhabiliter leur culture] réinterprètent les traits culturels anciens à travers une mentalité qui est devenue occidentale; ils pensent l'Afrique ou l'Asie en «Européens» (Traité sociol., 1968, p.329).
P. ext.
Créer par la pensée. Nous pensons des formes, elles deviennent vivantes sur le papier ou sur la toile sans avoir aucun rapport avec les formes de la vie (Cocteau, Crit. indir., 1932, p.120).
Prendre conscience (de). Dans le cours qu'il [Victor Upshaw] donne trois fois par semaine dans un théâtre parisien, il jette ses nouveaux élèves dans le rythme comme on met un enfant à l'eau pour lui apprendre à nager. Il dit: «Si vous savez marcher, vous saurez danser.» Il s'attache surtout à leur faire comprendre la musique, à penser le rythme (L'Express, 30 janv.-5 févr. 1967, p.69, col. 2).
Empl. pronom. réfl. [Avec attribut de l'obj.] Faire sienne une qualité. Certes, ils [les Juifs] rêvent de s'intégrer à la nation mais en tant que juifs, qui donc oserait le leur reprocher? On les a contraints de se penser juifs, on les a amenés à prendre conscience de leur solidarité avec les autres juifs (Sartre, Réflex. quest. juive, 1946, p.188).
Former l'image d'un être ou d'une chose. Ne me regardez pas et pensez-moi simplement d'après le son de ma voix, mon rayonnement, ma syntaxe, mon inimitable façon de prendre haleine et de renifler (Arnoux, Écoute, 1923, p.108).
b) [Corrél. de faire, exécuter]
α) Penser un sujet, un projet, une activité, une oeuvre. Y réfléchir profondément, s'en donner une représentation rationnelle. Les hommes politiques n'ont pas su penser cette guerre. Elle a débordé tous les cerveaux, celui de Briand, celui de Lloyd George (Barrès, Cahiers, t.11, 1918, p.365):
7. Son métier, jusqu'à présent, il l'a fait d'instinct, il l'a construit à l'aide de successives mais incomplètes vérifications. Maintenant il le pense... Vialar, Fusil, 1960, p.148.
Au passif. À qui ferez-vous croire que le hasard préside à vos entreprises nocturnes? Elles sont trop parfaites pour qu'elles ne soient pas solidement pensées (Giono, Angelo, 1958, p.196).
β) En partic., cour.
[S'agissant d'un ouvrage de l'esprit, d'une oeuvre d'art] Fréq. part. passé en empl. adj. Qui est bien construit, harmonieux, solide. C'est un livre [Les Caractères de La Bruyère] fait d'après nature, un des plus pensés qui existent et des plus fortement écrits (Sainte-Beuve, Nouv. lundis, t.1, 1861, p.122).Tout, dans cette remarquable composition [les Sabines de David], est pensé, étudié, cherché et poussé à la limite de perfection dont l'artiste était capable (Gautier, Guide Louvre, 1872, p.8):
8. Le Banquet des Phaeaciens [de Max Bruch], avec le chant des Rhapsodes accompagné par les harpes, les plaintes d'Ulysse soupirant après sa patrie, est plein de charme; les choeurs y sonnent magnifiquement et l'impression qui s'en dégage est celle que doit donner toute musique bien pensée et bien écrite. Saint-Saëns, Portr. et souv., 1909, p.195.
[S'agissant d'équipements, d'urbanisme] Concevoir selon un plan précis; organiser dans le détail. Avoriaz est à 30 minutes seulement de Genève: les responsables de son établissement l'ont «pensée» comme une station internationale, en la rattachant au complexe Morzine-Les Gets-Châtel (Elle, 17 févr. 1966, p.76, col. 3).Transports, santé, délinquance, égouts, pollution, tout ce qui implique un minimum de prévision renvoie à la même conclusion: Sáo Paulo a poussé mais n'a pas été pensée (Libération, 14 mars 1985, p.26, col. 1).
2. [Le compl. d'obj. est le plus souvent un pron. neutre] Avoir pour jugement, pour opinion, pour conviction, pour avis.
a) [Sans compl. d'obj. indir. déterminé] Comment avez-vous pu seulement aborder l'idée que nous vous permettrions de vivre autre part qu'au milieu de nous? Que penserait le monde? (Sandeau, Mllede La Seiglière, 1848, p.140).On pense ce qu'on pense et on laisse dire (Valéry, Corresp.[avec Gide], 1899, p.357):
9. La politique, c'est un art, c'est d'être le plus malin. S'ils [les députés] le sont, on les garde. Moi je ne juge pas leurs raisons. C'est des gens qui vous disent ceci quand ils pensent cela, alors à quoi bon les entendre. Barrès, Cahiers, t.5, 1907, p.246.
[Avec attribut de l'obj.] Synon. de estimer, considérer (que).Élodie (...) songea tout de suite à rattraper son ami (...) elle pensa meilleur de lui donner un rendez-vous sentimental et romanesque (A. France, Dieux ont soif, 1912, p.48).Jamais je ne m'engage dans une entreprise si je la pense vouée à l'échec (Beauvoir, Mandarins, 1954, p.210).
Empl. pronom. réfl. Tu te penses plus raisonnable que tout le monde (Claudel, Échange, 1954, ii, p.757).Ceux qui, de bonne foi, se croient capables de corriger parce qu'ils «aiment lire» et se pensent «soigneux et attentifs» (Gouriou, Mémento typogr., 1961, p.xii).
Loc. et expr.
[En incise] À ce que je pense. Selon mon opinion, à mon avis. M. Dubois me témoignait une bienveillance d'autant plus précieuse qu'elle venait d'un vieillard qui n'aimait pas les jeunes gens. Je la gagnai, à ce que je pense, en l'écoutant avec attention (A. France, Vie fleur, 1922, p.339).
Dire ce qu'on pense. Donner son opinion. Dans cette enquête solennelle où l'Académie m'invite, j'ai plus que le droit de dire la vérité, j'ai le droit de dire ce que je pense (Proudhon, Syst. contrad. écon., t.1, 1846, p.32).Fam. Dire quelque chose avec franchise, sans détour. Je suis fâché, c'est mon opinion; je suis un ancien, un franc marin, et je dis ce que je pense (Sue, Atar-Gull, 1831, p.20).Moi, je dis toujours ce que je pense: eh bien, je suis déçu par le commencement de ma croisade (Salacrou, Terre ronde, 1938, ii, 1, p.174).[Par recoupement de infra II A 4] Dire ce qu'on a dans l'esprit, dans la tête. Un homme qui dit tout ce qu'il pense et comme il le pense est aussi inconcevable dans une ville qu'un homme allant nu (A. France, Mannequin, 1897, p.223).
Dire tout haut ce que les autres pensent tout bas. Nous n'avons d'autre mérite que de dire tout haut ce que la foule pense tout bas (Déclaration des anarchistes, 1883ds Doc. hist. contemp., p.46).
[À la forme nég.] Il n'en pense pas un (traître) mot (de ce qu'il dit). Ce n'est pas sa conviction, son opinion; il n'est pas sincère. Je te connais. Tu as mauvaise tête, mais, en cas de mobilisation, nous marcherons tous deux, et ce que tu chantais là, tu n'en penses pas un mot! (R. Bazin, Blé, 1907, p.23).Georges! Vous ne pensez pas ce que vous dites. Vous ne le pensez pas (Cocteau, Parents, 1938, ii, 9, p.252).
(Ne rien dire mais) n'en penser pas moins. Avoir, bien qu'on ne l'exprime pas, une opinion bien établie et souvent défavorable sur un sujet. Car enfin si je ne parle pas aussi facilement que lui, je n'en pense pas moins, et mes idées sont plus justes que les siennes (Crèvecoeur, Voyage, t.2, 1801, p.6).
b) [Avec compl. d'obj. indir. déterminé]
α) [S'agissant d'une pers. ou d'une chose; avec compl. prép.de] Souvent je ne sais que penser de ce que j'éprouve (Sénac de Meilhan, Émigré, 1797, p.1717).Qu'est-ce que les autres allaient penser de lui? (Genevoix, Raboliot, 1925, p.156).
Loc. Penser du bien (du mal) de qqn ou de qqc. Avoir de lui ou de cela (en avoir) une bonne (une mauvaise) opinion. Je désire, me dit-il, vous introduire au collège et faire entendre au proviseur le bien que je pense de vous (Fromentin, Dominique, 1863, p.63).
β) [S'agissant de choses, notamment abstr.; avec compl. prép.sur] C'était le droit exclusif des théologiens de toutes les sectes de nous prescrire ce que nous devions penser sur ce point; et nul ne pouvait ni n'osait pénétrer dans leur empire (Destutt de Tr., Idéol. 2, 1803, p.7).C'étaient des choses dont on ne devait pas causer tout haut, personne n'avait besoin de savoir ce qu'ils pensaient là-dessus (Zola, Terre, 1887, p.81).
P. euphém., fam. [S'agissant d'une pers.] Je ne peux pas lui dire tout ce qu'on pense sur lui (Rob.).
3.
a) Synon. de croire, supposer, (s')imaginer.J'avais eu seul l'idée de cette excursion. J'avais eu toutes les difficultés que tu penses pour en faire agréer en haut lieu le principe (Benoit, Atlant., 1919, p.54).Contrairement à ce que l'on pourrait penser, l'héraldique, science des symboles héréditaires, est une science moderne (L'Hist. et ses méth., 1961, p.740).V. être12esection I B 3 a ex. de Simenon:
10. Il y a moins loin que l'on ne pense de l'impassibilité stoïque à l'abnégation de l'insensé sous le froc, à la démence du faquir qui mérite la béatitude du vingtième ciel, en fixant la lumière bleue... Senancour, Rêveries, 1799, p.132.
[Dans la lang. parlée, p.ell. de ne le] Il faudra vous réconcilier avec MlleCéleste, dit-il avec un sourire complice. Je vous y aiderai. Les vieilles gens sont plus faciles à séduire qu'on pense (Bernanos, Crime, 1935, p.759).
[Avec attribut de l'obj.] Synon. de penser que (infra II B 1 a β).Nous ne nous sommes point autrement inquiétées de son absence, le pensant à quelques pas de la charrette (Gautier, Fracasse, 1863, p.144).Je crois bien que cette dame, me pensant endormi déjà, s'était comportée comme si elle eût été seule (Larbaud, Journal, 1934, p.315).
Empl. pronom. réfl. [Avec attribut du suj.] Avoir l'impression de. Il se pensa devenu fou (Maupass., Bel-Ami, 1885, p.107):
11. Aujourd'hui, quand je m'assieds devant ces panneaux que je considère chaque fois avec tendresse et mélancolie, je me pense revenu à ces jours anciens où je ne connaissais personne à la brasserie. Fargue, Piéton Paris, 1939, p.160.
b) [En incise]
[Sert à annoncer des propos rapportés] Les nuages, pense-t-on, tendent à se dissiper, quand les rayons de la lune les frappent (Flammarion, Astron. pop., 1880, p.219).
[Sert à renforcer ou à légitimer une affirmation] M. de Sacy a jadis refusé de se marier, à cause de trois enfants naturels qu'il avait et qu'il a gardés, je pense (Goncourt, Journal, 1860, p.730).J'acceptai avec joie, vous le pensez bien, la séduisante proposition (Coppée, Bonne souffr., 1898, p.82).Elle a tout sacrifié à ce joli gamin qui se moque d'elle, comme tu penses (A. France, Pt bonh., 1898, vii, p.525).Il n'y a pas de véritable éducation, pensons-nous, si l'on ne s'efforce à la fois de cultiver l'être humain et de le préparer à la vie (Hist. instit. et doctr. pédag., 1923, p.363).
c) Fam. [À la forme exclam.; dans un propos rapporté au style dir., sert à renforcer ou constitue une affirm.] Tu penses! Synon. de tu parles, en effet, évidemment, bien sûr!Ta femme à toi ça l'a retournée d'te voir partir? −Tu penses... (Benjamin, Gaspard, 1915, p.14).Ah, celui-là!... −Vous le connaissez? −Je pense bien. La petite brute! (Vercel, Cap.Conan, 1934, p.130).
[Avec invers. du suj., exprime ou constitue une dénégation] Penses-tu! pensez-vous! Synon. de mais non, pas du tout, certainement pas, sûrement pas.Souffert! Pensez voir! Il a tombé d'un coup comme ça... V'lan! (Benjamin, op.cit., p.156).On aurait dit une petite bête qui grattait. Même qu'au premier coup d'oeil, avec l'air chaud qui tremblait, le camarade dit: «Mais non. C'est une bête.» «Penses-tu, je lui dis. C'est trop fin pour une bête. C'est une fille» (Anouilh, Antig., 1946, p.172).
d) Fam. [À la forme interr.; dans un propos rapporté au style dir., sert à exprimer le scepticisme devant une affirm.] Pensez-vous? Synon. plus usité Tu crois? Vous croyez? (v. croire I B 3):
12. ... Ah! oui, de jolis parents j'ai là! Ils ne me reverront jamais. −Jamais? s'écria-t-il, ne dis pas de bêtises, Mouchette (...). On ne laisse pas les filles courir à travers champs, comme un perdreau de la Saint-Jean. Le premier garde venu te rapportera dans sa gibecière. −Pensez-vous? dit-elle. J'ai de l'argent. Qu'est-ce qui m'empêche de prendre demain le train de Paris, par exemple? Ma tante Eglé habite Montrouge −une belle maison, avec une épicerie. Je travaillerai. Je serai très heureuse... Bernanos, Soleil Satan, 1926, p.77.
4. [Le compl. d'obj. est le plus souvent un pron. neutre] Synon. de avoir dans l'idée, dans l'esprit, dans la tête.Il peut en faire une martyre ou une femme heureuse, se dit-elle à elle-même en pensant ce que pensent toutes les mères lors du mariage de leurs filles (Balzac, Cous. Bette, 1846, p.228).«Rassurez-vous, Madame: je n'aimais pas mon père.» Aussitôt, il se mordit les lèvres. D'avoir pensé cela le bouleversait plus encore que de l'avoir dit (Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p.1314).
[Dans un propos rapporté au style dir.; avec ell. du suj.] Empl. exclam., fam. Pensez! Pensez-donc! J'ai ma chambre au Quartier Latin (...) Au Quartier Latin! pense un peu! (A. Daudet, Pt Chose, 1868, p.121).Quand elle entendait les gens la plaindre, elle excusait vite Coupeau. Pensez donc! Il avait tant souffert (Zola, Assommoir, 1877, p.490):
13. Tant qu'il souffle [le vent], ces diables de sapins font un bruit! Pensez: le bois pousse comme il veut, c'est plein de branches mortes, une vraie forêt vierge. Bernanos, Crime, 1935, p.747.
P. euphém., fam. [Pour désigner qqc. que l'on ne veut pas nommer] Il a marché dans ce que je pense (Rob.).Le cochon qui a fait une chose pareille, vois-tu, je lui arracherais les yeux et aussi ce que je pense (Simenon, Vac. Maigret1948, p.99).Lorsque la morale s'émousse, il est temps de revenir à la saine politique des coups de pied où je pense (L'Est Républicain, 15 juin 1985, p.10, col. 6).
[En incise, avec invers. du suj.] Ah! Mon Dieu, que vais-je devenir! pensait-elle en enfonçant sa tête brune dans l'oreiller (Theuriet, Mariage Gérard, 1875, p.198).Il est dur, pensait-il, d'être un juge (Saint-Exup., Vol nuit, 1931, p.90).
[Sert à introduire un discours dir.] Synon. se dire.J'ai rougi d'embarras; et puis j'ai pensé: «Ah! Si vous étiez mon Amélie!» Mais soudain je me suis reproché ma pensée comme un crime, et c'en était bien un (Krüdener, Valérie, 1803, p.26):
14. Il rit en montrant les dents, et je pense en moi-même: «Cause toujours: l'hiver prochain, je serai à Paris, et tu ne m'y rencontreras guère!» Colette, Cl. école, 1900, p.312.
[Suivi d'un subst. sans art.; corrél. de dire; p.ell. de la prép. à] Lorsqu'on pense à la condition des sexes dans la société, pour les femmes on pense plutôt malheur, pour les hommes on pense plutôt embêtements (Montherl., J. filles, 1936, p.1007).On a trop tendance devant un goitre banal à penser maladie grave, hyperthyroïdie de Basedow actuelle ou à venir (Quillet Méd.1965, p.474).
B. − [Le compl. est une prop.]
1. [Prop. complét. ou à valeur de complét.]
a) Penser que.[Suivi de l'ind. si la princ. est positive, de l'ind. ou du subj. si la princ. est nég., interr. ou si penser figure dans une hypothétique]
α) Synon. de être d'avis (que), juger, estimer, considérer (que).Nous pensons qu'il faut leur chercher [à nos enfants] les plus grands exemples de vertu dans tous les pays (Bern. de St-P., Harm. nat., 1814, p.318).A. Comte ne pense pas que leur méthode [de V. Cousin et de ses disciples] puisse être féconde (Hist. de la sc., 1957, p.1647).
[P. méton. du déterminé] Comme sa rédaction [d'un article] présentait une certaine ambiguïté, le Conseil d'État a pensé qu'il y avait lieu de définir le point de départ et la durée des publications (Code pêche fluv., 1875, p.70).
β) Synon. de croire, supposer (que) ou de avoir le sentiment, l'impression (que).Si vous pensez que cela soit utile, je le prendrai [un ouvrage] à la Bibliothèque Royale (Gobineau, Corresp.[avec Tocqueville], 1843, p.66).J'ai toujours pensé que tu me tuerais (Mérimée, Carmen, 1847, p.69).Je ne pense pas que ce petit ait jamais été puni (Gide, Journal, 1943, p.175):
15. Soldat avant tout, il m'accompagnait parce que c'était l'ordre, et je pense qu'il eût tiré sur moi sans hésiter si j'avais fait mine de m'échapper... Ambrière, Gdes vac., 1946, p.320.
Tournure impers., rare. Il est d'ailleurs à penser que, dans les délais nécessaires à une telle évolution, l'URSS, fortune faite et pressée par une Chine devenue dangereuse, rejoindrait sans discordances gênantes la famille occidentale (Beaufre, Dissuasion et strat., 1964, p.180).
[Dans un propos rapporté au style dir.]
Ne pensez-vous pas, ne penses-tu pas (que) ou fam. vous ne pensez pas, tu ne penses pas (que). [Précaution oratoire empl. pour atténuer une question] Georgette avait hâte d'inaugurer avec Edmond une tout à fait nouvelle vie. À cette époque-là, il a eu plusieurs fois l'occasion de lui dire: «Maintenant que ça marche bien, tu ne penses pas que tu devrais aller à la mairie pour faire supprimer l'allocation des gosses?» (Romains, Hommes bonne vol., 1938, p.252).
Fam. [Sert à renforcer une affirm., la conviction d'une certitude] Vous pensez bien que les gens qui payent huit francs pour une consultation n'aiment pas trop qu'on leur indique un remède de quatre sous (Romains, Knock, 1923, ii, 1, p.7).Vous pensez bien qu'il ne m'a pas épousée pour ça (Sartre, Mains sales, 1948, 5etabl., 1, p.177).
Empl. exclam. [Pour exprimer une dénégation] −Alors, ils y sont restés là-haut, les deux sans-guides? Bon pour toi, la marmotte! Tu iras les descendre à minuit, ça te fera les bras... −Penses-tu que j'irai! (Peyré, Matterhorn, 1939, p.206).
γ) Former dans son esprit l'idée ou l'image d'une réalité absente. Synon. penser à (infra IV A 2), prendre conscience*, avoir l'idée*, se rendre compte*, se dire* (que).Que notre famille est réduite, et je tremble en pensant que le cercle peut encore se rétrécir! (E. de Guérin, Journal, 1839, p.296).Edmond parlait ainsi (...) surtout pour conjurer l'image de Carlotta. Il venait de penser qu'il ne la reverrait jamais plus (Aragon, Beaux quart., 1936, p.281):
16. Devant son fourneau, elle pense que voilà son père et sa mère très vieux, et qu'ils vont bientôt mourir, que son fils sera soldat l'année prochaine, et elle se demande s'il ne sera pas trop malheureux. Renard, Journal, 1901, p.647.
Souvent en empl. exclam., fam. [Dans un propos rapporté au style dir.] Quand je pense que; pensez (donc) que. Et quand je pense que mon père l'a décoré et fait comte et que le lendemain ce vilain n'a pas eu honte de porter la main sur lui (Jarry, Ubu, 1895, ii, 5, p.51).Panisse: Oou! Non, non! Je veux dire que comparé à une voilure, c'est si petit un billet de mille francs, monsieur Brun! Plié en quatre, c'est rien du tout! Pensez que pour ce petit bout de papier, je vous fais tout ça! Réellement, c'est un cadeau entre amis (Pagnol, Fanny, 1932, ii, 2, p.114).
b) Penser combien, comme, si
α) Synon. de s'imaginer, se représenter, se faire une idée.Un autre jour, qu'on la persécutait pour sortir, Sara, qui craignait que je ne voulusse pas l'accompagner, passa un billet sous ma porte: (...) L'on veut absolument que ta femme sorte, cher bon ami! Je te laisse à penser comme elle va s'amuser! (Restif de La Bret., M. Nicolas, 1796, p.86):
17. On pense si cela leur fit de la peine d'être forcés d'obéir à cet animal; mais comme ils auraient risqué leur tête en lui résistant, ils descendirent tout de suite. Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t.2, 1870, p.231.
β) Souvent en empl. exclam., fam. [Dans un propos rapporté au style dir.]
Imaginer. Ne le retenez pas trop longtemps, je vous en supplie, Élisabeth! Vous pensez si maman et moi nous sommes impatientes! (Mauriac, Mal Aimés, 1945, i, 2, p.165):
18. Mon fils, ai-je dit avec une inflexion tendre et grave, il ne faut pas t'abandonner ainsi à ces rêves qui préparent à l'amour et ôtent la force de le combattre. Pense combien il se passera de temps avant que tu puisses te permettre d'aimer, de choisir une compagne... Krüdener, Valérie, 1803, p.260.
[Exprime une dénégation] Voyons, mon petit pote, fais pas l'idiot. Je te dis qu'on nous a prévenus: il va y avoir du baroud un de ces jours. Alors tu penses comme on va te laisser entrer ici sans regarder tes poches (Sartre, Mains sales, 1948, 3etabl., 2, p.87).
2. [L'inf. compl. équivaut à une prop. dont le suj. est le même que celui de la prop.princ.]
a) Avoir pour conviction, estimer. Qui de nous ne pense Valoir ceux que le rang, les talents, la naissance, Élevent au-dessus de nous? (Florian, Fables, 1792, p.45).Il pense avoir des droits sur toi (Pagnol, Fanny, 1932, ii, 8, p.153).
b) Avoir le sentiment, l'impression (de). Synon. croire.L'homme se remit à parler, avec cette volubilité des solitaires qui pensent avoir enfin rencontré une oreille bienveillante (Duhamel, Confess. min., 1920, p.135):
19. La légèreté entraîne ces imaginations trop promptes qui toujours vont au delà des bornes logiques, concluent avant d'avoir raisonné, volent d'une conclusion à l'autre, nient ou affirment sans distinction, et pensent être subtiles parce qu'elles sont superficielles. Ozanam, Philos. Dante, 1838, p.105.
En partic. Synon. de s'attendre à, espérer.Je retournai guetter encore, attendre en vain, pensant toujours voir la porte s'ouvrir et surgir enfin la haute silhouette d'Augustin (Alain-Fournier, Meaulnes, 1913, p.297).Il eut un choc. Ah, il n'avait pas pensé le revoir! (Montherl., Bestiaires, 1926, p.564).
c) Vieilli. [À un temps passé, sert à exprimer qu'un fait a été très près de se produire] Synon. faillir, manquer (de).Je ressemble à un homme, qui, mesurant des yeux l'abyme où il a pensé tomber, est plus effrayé qu'au moment du danger (Sénac de Meilhan, Émigré, 1797, p.1654):
20. À l'époque, une famille distinguée se devait de compter au moins un enfant délicat. J'étais le bon sujet puisque j'avais pensé mourir à ma naissance. Sartre, Mots, 1964, p.71.
Vx. [L'agent est une chose] Vous êtes deux qui m'engagez à faire encore des pétitions. À votre aise vous en parlez, et vous n'irez pas en prison pour les avoir lues. Mais moi, voyez ce qu'a pensé me coûter la dernière (Courier, Pamphlets pol., Réponses aux anon., 2, 1822, p.154).Le matin, à peine éveillée, elle [Catherine II] (...) étudiait au saut du lit; elle y prit même une pleurésie qui pensa l'emporter (Sainte-Beuve, Nouv. lundis, t.2, 1862, p.182).
d) Synon. de avoir l'intention/en vue de, avoir dans l'idée (de), compter, vouloir (faire qqc.).Si mes défaillances ne sont pas trop fortes et trop nombreuses, je pense avoir fini au jour de l'An (Flaub., Corresp., 1861, p.441).Il avait pensé se faire aimer et c'était lui qui était tombé amoureux (Larbaud, F. Marquez, 1911, p.118):
21. Un garde-barrière bordelais, dont les gamins pillaient les treilles, voulut en dégoûter ses voleurs, et couvrit les grappes, les aspergea d'une solution de sulfate de cuivre, pensant ainsi les rendre indigestes. Pesquidoux, Livre raison, 1925, p.79.
Par amphibologie [Pour atténuer une affirm.] Synon. de vouloir, croire.Elle se retira l'air vexé, en disant qu'elle avait pensé faire plaisir à Madame (Zola, Nana, 1880, p.1352).
III. − Empl. pronom., pop. ou région. [Sert le plus souvent à introduire un propos rapporté au style dir.] Synon. de penser (supra II A 4), se dire, s'imaginer.Il en a pour son compte, me suis-je pensé, voilà qui est bon ([L'Héritier],Suppl. Mém. Vidocq, t.1,1830,p.313).Il fallait se tenir à quatre pour ne pas taper dessus [sur les Prussiens] (...) Heureusement que l'enfant marchait près de moi, et chaque fois que la main me démangeait trop, je me pensais en le regardant: «Chaud là, Bélisaire!... Prenons garde qu'il n'arrive pas malheur au moutard» (A. Daudet, Contes lundi, 1873, p.84).Quand tu es venu me chercher à Peyruis et que tu m'as dit qu'elle avait un petit, je me suis pensé: elle te racontera tout elle-même parce qu'elle est franche (Giono, Baumugnes, 1929, p.178).
IV. − Empl. trans. indir.
A. − Penser à
1. Appliquer son esprit à un objet abstrait ou concret, présent ou non. Synon. réfléchir, songer (à), se concentrer (sur).Il se consumait à tenter de composer le temps et le moment: tourment de tous les artistes qui pensent profondément à leur art (Valéry, Variété III, 1936, p.15).J'ai beaucoup pensé à tes récriminations. Ma conviction est que tu as rêvé (Salacrou, Terre ronde, 1938, ii, 1, p.176):
22. Pourquoi me laisser dominer par tant de petites choses misérables, pour lesquelles j'éprouve au fond le mépris le plus absolu, quand j'y pense sérieusement? Maine de Biran, Journal, 1816, p.128.
Loc. et expr.
Penser à ce qu'on dit. Faire attention à ce qu'on dit, peser ses propos. MmeBremontier, agréable jeune femme, nous a très bien récité sa petite conférence, avec des hésitations, des fautes, et un air de ne jamais penser à ce qu'elle disait qui mérite toute notre affectueuse indulgence (Renard, Journal, 1904, p.880).
Penser à ce qu'on fait. Le faire en s'appliquant, avec toute son attention. C'était un grand garçon grandissant encore, tout pâle et dégingandé, avec de longs bras et de grandes jambes et qui quelquefois avait l'air de ne pas penser à ce qu'il faisait (Vigny, Serv. et grand. milit., 1835, p.89).
Ne penser à rien. Avoir l'esprit complètement libre. Je rentre tranquillement, sans penser à rien, ne songeant qu'à me garer des chocs et des mouvements brusques (Miomandre, Écrit eau, 1908, p.226).Ne (plus) penser à rien. Ne plus pouvoir se concentrer sur quoi que ce soit. Il semblait complètement repris par le travail de la pêche, par le train monotone des choses réelles et présentes, comme ne pensant plus à rien (Loti, Pêch. Isl., 1886, p.180).Fam. Ne (jamais) penser à rien. N'avoir aucune idée, aucun projet. Vous m'agacez un peu, votre père et vous. «Vous ne pensez jamais à rien... Vous n'êtes pas bons à grand-chose... Vous ne savez pas...» Vous vous plaisez ainsi? (Sagan, Bonjour tristesse, 1954, p.158).
(Faire qqc.) sans y penser. Le faire sans en être conscient, sans s'en rendre compte. Synon. machinalement.D'instinct, sans y penser, il se baisa le pouce, pour conjurer le mauvais sort (Montherl., Bestiaires, 1926, p.533).Il avait dit ça sans y penser, il n'avait pas pu faire autrement, il ne savait pas qu'il allait le dire (Aragon, Beaux quart., 1936, p.303).
2.
a) Se représenter mentalement un être ou une chose, par l'imagination, par la mémoire, le souvenir. Synon. s'imaginer, se rappeler, se souvenir, évoquer.Ici, je vivais en pensant à vous; ici, je regardais cette persienne, j'attendais des heures entières le moment fortuné où je verrais cette main l'ouvrir (Stendhal, Rouge et Noir, 1830, p.427).Qu'est-ce exactement que penser à un être? C'est concentrer son attention sur un certain système d'images cristallisant soit autour d'une image privilégiée, soit autour d'un nom (G. Marcel, Journal, 1919, p.170).Si je pense à ma jeunesse, je revis les instants émus qui la tenaient parfois en suspens (J. Bousquet, Trad. du sil., 1936, p.173).V. agacer ex. 18:
23. Ainsi dans la forêt où mon esprit s'exile Un vieux Souvenir sonne à plein souffle du cor! Je pense aux matelots oubliés dans une île, Aux captifs, aux vaincus!... à bien d'autres encor! Baudel., Fl. du Mal, 1860, p.152.
b) En partic.
[Le compl. d'obj. indir. désigne une pers.]
Avoir sans cesse présente à l'esprit l'image de la personne dont on est épris. Je comprends ce que tu veux dire: il y a, que tu penses toujours à lui et que par délicatesse, tu tiens à m'avertir et à me le répéter (Pagnol, Fanny, 1932, ii, 6, p.131).
[Notamment dans la correspondance] Avoir une pensée pour quelqu'un, se souvenir de lui. Écrivez-moi, et pensez à votre vieux fidèle qui est bien triste, et qui vous chérit (Flaub., Corresp., 1872, p.30).[Formule épistolaire pour conclure une lettre] Du courage, mon ami. Je pense bien à toi. Jacques (Rivière, Corresp.[avec Alain-Fournier], 1907, p.292).
[Le compl. d'obj. indir. désigne une pers. ou une chose] Faire dans son esprit, la liaison, le rapprochement entre des êtres, des choses, des événements. J'ai cherché quel roman de l'autre siècle cela me rappelait. J'ai pensé à Chateaubriand, à cause du style (Alain-Fournier, Corresp.[avec Rivière], 1907, p.177).
Fréq. tour factitif. Faire penser à. Synon. rappeler, évoquer.Le jour s'était levé tout à fait. Le chant d'un coq me fit penser à la trahison de saint Pierre (Billy, Introïbo, 1939, p.133).La description du disparu ne vous fait pas penser à quelqu'un? (Guèvremont, Survenant, 1945, p.280):
24. Qu'on imagine une très grande femme, pâle et d'une invraisemblable maigreur, avec des traits étonnamment heurtés, un nez immense, des yeux profonds et lumineux et un menton de galoche. Elle faisait penser à la fois à Don Quichotte, à Henri IV et à Pierrot. Gyp, Souv. pte fille, 1928, p.82.
3.
a) [Le compl. d'obj. indir. désigne une pers.] Se préoccuper, s'inquiéter d'elle, lui témoigner de l'intérêt. Il ne pense jamais aux autres, pas même à ses enfants (Mauriac, Noeud vip., 1932, p.147).Tu ne pourrais pas t'arrêter, juste pour respirer un peu? Pense à José, qu'est-ce qu'il deviendrait sans toi (Triolet, Prem. accroc, 1945, p.71):
25. ... il est toujours à m'appeler: «Lucie, donne-moi un mouchoir. Lucie donne-moi de la tisane, donne-moi ci, donne-moi ça.» Il pense qu'à lui comme tous les malades... Dabit, Hôtel Nord, 1929, p.125.
b) [Le compl. d'obj. indir. désigne une chose] Synon. de faire attention (à), se soucier, se préoccuper (de).Lesable n'écoutait pas, n'entendait pas, ne pensant plus qu'à sa santé, à son existence menacée (Maupass., Contes et nouv., t.1, Hérit., 1884, p.513).Et le pavillon alors? T'as pensé aux traites? (Céline, Mort à crédit, 1936, p.544):
26. La hotte sur le dos pendant toute la froide saison il [le vigneron] remontera les terres entraînées jusqu'au pied des pentes par les pluies, et portera le fumier à ses vignes, car il faut déjà penser aux vendanges de l'année prochaine! Menon, Lecotté, Vill. Fr., 2, 1954, p.84.
Loc. et expr.
Penser à l'avenir, à demain, au lendemain. Être prévoyant. [La petite bourgeoise qui] raisonne sur tout, a peur de tout, calcule tout et pense toujours à l'avenir (Balzac, C. Birotteau, 1837, p.42).
Avoir (bien) autre chose à penser (souvent fam.). Avoir à penser à bien d'autres choses. Qui donc, dans ces temps de malheurs publics, se préoccupe de savoir s'il est profitable aux arts que l'Institut soit ou ne soit pas le maître de l'enseignement et de l'existence des artistes? On a bien autre chose à faire et à penser (Viollet-Le-Duc, Archit., 1872, p.400).Avoir trop de choses à penser. Deux couverts étaient mis dans la salle à manger. Mademoiselle avait envoyé M. Chasle déjeuner chez lui. Quant à elle, Dieu bon! Elle avait «trop de choses à penser» pour pouvoir se mettre à table (Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p.1274).
Ne penser qu'à ça (fam.). Ne penser qu'à l'amour. Le Bois, le soir. Des fiacres de gens qui ne pensent qu'à ça (Renard, Journal, 1902, p.769).
c) [Avec compl. inf.] Synon. de avoir pour (unique) souci (de), s'occuper, prévoir (de).Tu es un gros égoïste, un homme qui ne pense qu'à boire et à manger (Erckm.-Chatr., Ami Fritz, 1864, p.6):
27. De l'autre côté de ces murs, il y a des types qui pensent nuit et jour à me descendre; et comme, moi, je ne pense pas tout le temps à me garder, ils finiront sûrement par m'avoir. Sartre, Mains sales, 1948, 4etabl., 3, p.139.
[Le suj. désigne une doctrine écon.] Le protectionnisme cherche à accroître le nombre des emplois, tandis que le libéralisme pense surtout à élever le niveau d'existence (Hist. sc., 1957, p.1604).
4. Avoir, mettre, se mettre dans l'esprit.
a)
α) Avoir présent à l'esprit (une idée, une image, un sentiment, un projet). Teissier, tout en ramassant ses papiers: Ignorance, incapacité, emportement, voilà les femmes! À quoi pense celle-là, je me le demande! (Becque, Corbeaux, 1882, ii, 3, p.111).Il rangea ses papiers et décampa, marcha au hasard. Oui, il n'avait pas pensé à cela, qu'elle attendait quelqu'un. C'était pourtant simple, mais il n'y avait pas pensé (Montherl., Célibataires, 1934, p.850):
28. Le philosophe, le physicien, le mécanicien, l'astronome, le biologiste et l'homme de la rue, en parlant du temps, ne pensent sans doute pas à la même chose. Decaux, Mesure temps, 1959, p.5.
Loc. et expr.
(Sans) penser à mal. (Sans) avoir de mauvaises intentions. Cette fille farouche et pure qui, sans penser à mal, offrait de l'argent à un homme (Guèvremont, Survenant, 1945, p.169).
Penser à autre chose. Ne pas suivre une conversation; être distrait. Synon. être ailleurs.Oui, dit la jeune fille, l'oeil fixe, pensant à autre chose (Duranty, Malh. H. Gérard, 1860, p.316).
C'est comme l'oeuf de Colomb, il fallait y penser. V. oeuf I C 4.
[Dans un propos rapporté au style dir.]
Empl. exclam., fam. [Exprime une vive dénégation face à un projet, une idée que l'on juge absurde, irréalisable] Tu n'y penses pas! Vous n'y pensez pas! Synon. vous êtes fou! vous n'êtes pas sérieux!Dêmo! Mais tu n'y penses pas, mon ami, c'et une fille des rues. On l'a pour une datte (Louys, Aphrodite, 1896, p.129).Maman, vous n'y pensez pas!... On ne peut pas la confier à un gamin comme Archambault! (Gyp, Souv. pte fille, 1928, p.241).
N'y pensez plus. Oubliez cela. Elle m'aimait, celle-là! J'ai eu tort de ne pas saisir ce bonheur... Bah! N'y pensons plus! (Flaub., Éduc. sent., t.2, 1869, p.274).
À quoi penses-tu? À quoi pensez-vous? [S'adresse gén. à une pers. qui a l'air pensive, soucieuse, préoccupée]. À quoi penses-tu, Gilbert? Le cafard? −Non, souvenirs... (Dorgelès, Croix de bois, 1919, p.113).
β) En partic.
[S'agissant gén. de l'organ. pratique de qqc.] Synon. prévoir.
Penser à tout. Ne rien laisser au hasard. Ne lui donne jamais de mou [à un vautour], parce que cet aliment, faisant éponge sur l'estomac, le ferait éclater sans le nourrir. Achète-lui du foie, de la rate et du déchet de côtelettes... Tu vois que je pense à tout (Miomandre, Écrit sur eau, 1908, p.242).
Penser à qqn (pour un poste). Considérer qu'une personne correspond au profil d'un emploi; lui réserver cet emploi. J'avais pensé à Olivier pour la direction d'une revue (Gide, Faux-monn., 1925, p.1194).
Penser à une carrière. Envisager une carrière, un métier déterminé(e). [Ta mère] n'est pas riche, elle ne t'offrira pas le luxe de deux ou trois années d'études supplémentaires (...). Tu n'as jamais pensé à l'administration? (Nizan, Conspir., 1938, p.236).
γ) [Avec compl. inf.] Ces êtres qu'on connaît si bien, ces êtres familiers et lointains, insaisissables, qui ont subitement un grain de peau, une plantation de cheveux, des ongles, une forme d'oreille, tous ces détails qu'on ne pense pas à imaginer (Triolet, Prem. accroc, 1945, p.61).Je compris que jamais elle ne penserait à me questionner, à me délivrer parce que l'idée ne l'effleurerait pas et qu'elle estimait que cela ne se faisait pas (Sagan, Bonjour tristesse, 1954, p.88).
b) Garder en mémoire. Synon. se rappeler.Le matin, par exemple, elle rappelle à son mari qu'il doit rapporter à midi un litre de pétrole et un litre d'huile. Isabelle est priée de penser au sucre, au café (Romains, Hommes bonne vol., 1932, p.61).
[Dans un propos rapporté au style dir.]
[En incise; sert à présenter une remarque, une réflexion sans rapport apparent avec le sujet de la conversation; sert à rappeler qqc. à qqn] Pendant que j'y pense... Ah/mais/tiens j'y pense... Dis-moi pendant que j'y pense, me dit Robert, mon oncle Charlus a quelque chose à te dire. Je lui ai promis que je t'enverrais chez lui demain soir (Proust, Guermantes 2, 1921, p.412).Il est parti depuis une heure et ne tardera pas à rentrer. Attendez-le... Mais, j'y pense... et votre examen? (Gide, Faux-monn., 1925, p.1213).
Tour factitif. Faire penser qqn à qqc. ou à faire qqc.Ne te tourmente pas. Il sera toujours temps de réparer ça. Fais-m'y penser cet hiver (Romains, op.cit., p.287).−Vous n'avez pas faim? −Si. Maintenant que vous m'y faites penser, j'ai grand faim, dis-je (Beauvoir, Mandarins, 1954, p.306).
[Avec compl. inf.] Penser à demander à Riesener mon étude d'arbres sur papier (Delacroix, Journal, 1854, p.207).
B. − Penser de + inf.Synon. de avoir l'idée (v. ce mot I A 3 b), envisager (de).Lorsque je vis que mon mari faisait son préparatif pour s'en aller, il me fut impossible de penser seulement de vivre sans lui (Nerval, Filles feu, Angélique, 1854, p.554).Son esprit comme son oreille sont devenus sensibles à des impressions que l'auteur n'avait jamais pensé de produire (Valéry, Variété[I], 1924, p.96).Vers neuf heures et demie, par gentillesse, je pense de lui téléphoner pour lui dire un petit bonjour (Bourdet, Sexe faible, 1931, iii, p.417).
REM. 1.
Pensailler, verbe intrans.,hapax, péj. Réfléchir sans efficacité. V. mangeailler ex. de Balzac, rem. s.v. mangeaille.
2.
Pensoir, subst. masc.,fam., le plus souvent p.iron. Lieu, pièce où l'on se retire pour penser, pour réfléchir. Les autres [parmi les Français moyens] (...) affectent une épouvante horrifiée devant les spectres maçonniques, dont ils projettent la silhouette sur les murs de leur pensoir (L'OEuvre, 18 févr. 1941).Il ne reçut point de pension. Il s'évertua une dernière fois, à sa manière, sans bouger de sa retraite et de son pensoir (Guéhenno, Jean-Jacques, 1948, p.121).
Prononc. et Orth.: [pɑ ̃se], (il) pense [pɑ ̃:s]. Homon. panser, (la) panse. Att. ds Ac. dep.1694. Étymol. et Hist.1. a) Fin xes. «réfléchir, concentrer son esprit sur quelque chose» (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 55); b) fin xes. «estimer, imaginer» (ibid., 339); c) ca 1220 penser qqc. «avoir dans l'esprit (quelque chose)» (Barlaam et Josaphat, éd. C. Appel, 5623); d) 1534 penser come enfant (J. Lefèvre d'Etaples, trad. Bible, I Cor. 13, 11); 2. fin xies. soi penser qqc. «songer à» (Roland, éd. J. Bédier, 355); 3. a) déb. xiies. pensez de (+ verbe) «périphrase équivalent à l'impératif de l'infinitif substantivé» (Benedeit, St Brendan, éd. E. G. R. Waters, 398); b) ca 1160 penser d'aucun «évoquer mentalement quelqu'un, se le représenter par la mémoire ou l'imagination» (Eneas, éd. J.-J. Salverda de Grave, 1223); ca 1165 penser à aucun «attacher sa pensée à quelqu'un qu'on aime» (Troie, 17621 ds T.-L.); c) 1160-74 penser de (+ inf.) «se mettre à, tâcher de» (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, III, 10814); ca 1165 penser de (+ inf.) «id.» (Troie, 10078 ds T.-L.); d) ca 1200 penser à «songer à, se souvenir de, réfléchir à» (Poème moral, 161a, ibid.); ca 1274 penser à (qqc.) «avoir dans l'esprit» (Adenet Le Roi, Berte, éd. A. Henry, 2723); 1306 penser à «ne pas oublier» (Joinville, éd. N. L. Corbett, § 419); e) 1306 penser à faire qqc. «avoir l'intention de» (ibid., § 612); f) 1636 penser à «pourvoir à» (Monet); 1762 penser à tout pour qqn (Rousseau, Émile, II ds OEuvres, éd. B. Gagnebin et M. Raymond, t.4, p.360); 4. a) 1155 penser que «être d'avis que» (Wace, Brut, éd. I. Arnold, 263); b) ca 1160 penser «être absorbé par un souci, par des pensées accablantes» (Éneas, éd. citée, 2221); c) ca 1160 penser «concevoir un projet» (ibid., 1692); d) ca 1165 penser (+ inf.) «croire» (Troie, 29997 ds T.-L.); e) ca 1170 mal penser d'aucun «avoir mauvaise opinion de, concevoir un soupçon» (Beroul, Tristan, éd. E. Muret4, 110); 1863 penser du bien de qqn (Fromentin, loc. cit.); f) ca 1200 penser (+ inf.) «avoir l'intention de» (Hist. Joseph, 299 ds T.-L.); g) 1377 n'en penser pas mains (Gace de La Buigne, Roman des deduis, éd. Å. Blomqvist, 144); h) ca 1393 penser à mal «avoir une mauvaise intention» (Ménagier, éd. G. E. Brereton et J. M. Ferrier, I, VI, p.78); xves. penser mal «songer à faire du mal» (Isopet III de Paris, éd. J. Bastin, t.2, p.401); i) 1798 penser tout haut (Ac., s.v. haut); j) 1823 bien penser «avoir en politique des opinions conformes aux principes convenus» (Courier, loc. cit.); k) 1935 pensez-vous? «expression ironique et familière pour dire qu'on ne croit pas que les paroles de l'interlocuteur soient à prendre au sérieux» (Ac.). Forme sav. issue du lat. pensare «peser, apprécier, évaluer» et, prob., à basse époque, «penser», fréquent. de pendere «peser, réfléchir». V. aussi panser et peser. Pour l'évolution de la concurrence entre les verbes exprimant l'idée de penser, v. en partic. A. Greive, Rêver, songer, penser im Französischen Synchronie, Diachronie und Geistesgeschichte ds Rom. Forsch. t.85, pp.486-500. Fréq. abs. littér. Penser, v. penser2. Pensé: 4464. Fréq. rel. littér. Penser, v. penser2. Pensé: xixes.: a) 5342, b) 4501; xxes.: a) 5555, b) 8674.
DÉR.
Pensement, subst. masc.,vx. Action de penser de quelque chose; résultat de cette action. Mais jusqu'à ces temps derniers, ce pensement avait été son plaisir et sa consolation (Sand, Fr. le Champi, 1848, p.232).Le pauvre homme suivit les archers en gros pensement et souci, car sa femme était sur l'heure d'accoucher (Tharaud, Chron. frères enn., 1929, p.22). [pɑ ̃smɑ ̃]. 1reattest. 1188 (Florimont, 8397, 8450, etc. ds T.-L.); de penser1, suff. -ment1*.
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