| PEINE, subst. fém. I. A. − 1. Ce que l'on fait subir à l'auteur d'un délit, d'une faute ou d'un crime pour le punir, le châtier. Synon. châtiment, punition.Il est dans l'ordre qu'une peine inévitable suive une faute volontaire (Joubert, Pensées, t.1, 1824, p.359).Eh bien, monsieur, vous copierez trois fois (...) le paragraphe 38 de la grammaire latine; et vous offrirez cette peine au seigneur, en le remerciant de vous éprouver ainsi ! (Adam, Enf. Aust., 1902, p.180): 1. Si, comme nous l'avons dit, il y a toujours eu dans un groupe humain d'une certaine ampleur, des hommes ayant une conduite anti-sociale, il est aisé de constater que ce ne sont pas les actes de même nature qui ont toujours été regardés comme criminels, qui ont provoqué cette réaction passionnelle qu'est la peine.
Traité sociol., 1968, p.214. ♦ Peine du talion. Châtiment infligé selon la loi du talion. La peine si générale du talion n'est-elle pas une satisfaction accordée à la passion de la vengeance? (Durkheim, Divis. trav., 1893, p.53).V. infracteur ex. de Karr. ♦ Âme en peine. V. âme I A 2. − THÉOL. CHRÉT. Châtiment infligé par Dieu à ceux qui ont commis une faute. Les peines de l'enfer, du purgatoire; les peines éternelles. [Les démons] y souffrent [dans l'enfer] (...) la peine du feu (...) parce que le feu de l'enfer, rendu par Dieu capable de brûler un esprit, a reçu aussi la puissance d'agir à distance par un contact virtuel (Théol. cath.t.4, 11920, p.400). ♦ Peine du dam*, du sens*. 2. En partic. a) Sanction édictée et appliquée par un tribunal à l'encontre de celui qui a contrevenu aux lois de la société. La seule organisation qui se rencontre partout où il y a peine proprement dite se réduit donc à l'établissement d'un tribunal (Durkheim, op.cit., p.63). b) DR. PÉNAL. Sanction pénale applicable à une personne ayant commis une infraction. L'on vous défendra, sous des peines sévères, de vous concerter ensemble pour obtenir une augmentation de (...) salaire (Lamennais, Paroles croyant, 1834, p.174).Nul ne peut être détenu sans qu'un jugement ait prononcé une peine à raison de la culpabilité reconnue (Belorgey, Gouvern. et admin. Fr., 1967, p.48).V. appliquer ex. 17: 2. À l'expiration de leur peine, les individus condamnés à moins de deux ans d'emprisonnement, sont mis à la disposition du ministre de la guerre pour tout le temps du service militaire qu'ils doivent à l'État...
J.O., Loi rel. recrut. arm., 1928, p.3823. − [Suivi d'un déterm. pour former le nom d'un type de peine en dr. fr.] ♦ [Le déterm. stipule la juridiction qui applique la peine] Peine correctionnelle. Peine de gravité moyenne (notamment l'emprisonnement durant deux mois à cinq ans, une forte amende) qui imprime à l'infraction qu'elle sanctionne le caractère de délit correctionnel (d'apr. Cap. 1936 et Barr. 1974). Peine criminelle*. Peine de (simple) police. Peine légère (notamment un emprisonnement pendant moins de deux mois, une amende) qui imprime à l'infraction qu'elle sanctionne le caractère de contravention de simple police (d'apr. Cap. 1936 et Barr. 1974): 3. ... il faut avoir présente à l'esprit la classification en trois catégories des diverses infractions telle qu'elle résulte du Code pénal. Celui-ci (Artier) distingue les contraventions punies de peines de police (par exemple, le tapage nocturne), les délits punis de peines correctionnelles (par exemple, le vol simple) et les crimes punis de peines afflictives ou infamantes (par exemple, le meurtre).
Vedel, Dr. constit., 1949, p.343. ♦ [Le déterm. stipule le statut de la peine dans le verdict du juge] Peine accessoire*. Peine complémentaire. ,,Peine que les juges ont le droit ou même le devoir de prononcer à côté d'une autre peine`` (Cap. 1936). V. accessoire ex. 24.Peine principale. Peine formant l'essentiel de la sanction. V. accessoire ex. 24. ♦ [Le déterm. stipule le contenu de la peine] [Le déterm. est un adj.] Peine afflictive* et infamante; peine (seulement) infamante*. Peine capitale (v. ce mot A; peine pécuniaire). Peine corporelle. Peine qui porte atteinte à l'intégrité corporelle du condamné ou qui l'atteint dans son intégrité ou sa liberté corporelle (d'apr. Cap. 1936). [Le déterm. est un groupe nom.] Peine d'emprisonnement, de mort, de prison, de travaux forcés. Les demandes en relèvement de leur peine que peuvent introduire les instituteurs, aussi bien privés que publics, condamnés à une peine d'interdiction (Encyclop. éduc., 1960, p.123).V. agent ex. 52. SYNT. Requérir une peine contre qqn; sanctionner par une peine; appliquer, édicter, établir, exécuter, infliger une peine; adoucir, aggraver, commuer, mitiger, remettre une peine; faire grâce d'une peine; commutation, exécution, prescription d'une peine; remise de peine; encourir une peine; être passible d'une peine; subir, purger une peine; une peine expire; durée d'une peine; peine légère, lourde, rigoureuse, juste; juge d'application des peines. B. − P. ext., littér. Conséquence fâcheuse qui semble sanctionner une action ou une situation condamnable d'un point de vue moral. Je (...) trouvais dans leur visage, ou souriant ou sombre, le loyer de ma sagesse ou la peine de mes fautes (A. France, Pt Pierre, 1918, p.92). ♦ Porter la peine de qqc. Nous pouvons porter aujourd'hui la peine physique d'un excès commis il y a plus d'un siècle (J. de Maistre, Soirées St-Pétersb., t.1, 1821, p.53).Madame de Meximieu portait, à quarante-huit ans, la peine de son éducation première, qui avait été ce qu'on appelle toute mondaine, c'est-à-dire cruellement vide (R. Bazin, Blé, 1907, p.160). C. − Loc. prép. 1. À peine de + subst., verbe à l'inf.(dr., vieilli). Si l'on ne veut pas être passible de (telle peine). Ce registre contiendra une notice sommaire de chaque affaire, et de la condamnation, à peine de cinquante francs d'amende pour chaque omission (Code instr. crim., 1808, p.789).L'électeur doit, à peine de nullité de son vote, voter pour une liste complète et sans panachage (Vedel, Dr. constit., 1949, p.383). − P. ext. Si l'on ne veut pas courir le risque de. Ils ne peuvent plus l'être [sincères et honnêtes], à peine de recommencer l'impuissance du gouvernement provisoire (Sand, Corresp., t.3, 1852, p.314).Le Centre [Méditerranéen] ne peut vivre que de l'opinion et de l'intérêt qu'il excitera, à peine de languir et de se réduire à une vie tout artificielle et administrative sans avenir (Valéry, Regards sur monde act., 1931, p.307). 2. Sous peine de + subst., verbe à l'inf.(dr.). Si on ne veut pas être passible de (telle peine). Tout juge de paix (...) est tenu d'office (...), sous peine d'être poursuivi comme complice de détention arbitraire, de s'y transporter aussitôt (Code instr. crim., 1808, p.792).L'enseignement primaire devint obligatoire, sous peine, pour les parents et leurs complices, de sanctions pénales (Encyclop. éduc., 1960, p.96). − P. ext. Si l'on ne veut pas courir le risque de. Le médecin lui enjoint, sous peine de mort, de rentrer à Paris (Lemaitre, Contemp., 1885, p.330).Il est temps de songer à remettre de l'essence, sous peine de tomber en panne «sèche» 20 ou 30 km plus loin (Chapelain, Techn. automob., 1956, p.338). ♦ Sous peine de vie (vx). Sous peine de mort. [Ils] écartent les soldats, leur défendent sous peine de vie d'approcher du roi (Chateaubr., Ét. ou Disc. hist., t.4, 1831, p.157). Rem. Sous peine que + prop.au subj. (rare). Le vent du changement souffle en rafales sur la France libérée. Mais la règle doit s'y imposer sous peine que rien ne vaille rien (De Gaulle, Mém. guerre, 1959, p.91). II. A. − État affectif, durable, fait de tristesse, de douleur morale ou d'un profond sentiment d'insatisfaction (généralement à la suite ou à cause d'un événement déterminé). Anton. bonheur, joie, plaisir, satisfaction.De courtes interjections témoignaient de son bonheur actuel qui avait fait cesser cette peine atroce (Stendhal, Rouge et Noir, 1830, p.427).La joie venait toujours après la peine Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure (Apoll., Alcools, 1913, p.45): 4. ... c'étaient les yeux d'un homme que l'idée fixe obsède et que l'aiguillon d'une peine intolérable touche sans cesse à la fibre la plus sensible de son âme. Cette peine datait du jour où il avait reçu la terrible lettre par laquelle sa soeur lui révélait son projet de suicide.
Bourget, Disciple, 1889, p.225. − Au plur. ♦ [Plur. d'amplification] Littér., vieilli. J'entrai dans ses peines; je partageai sa douleur; j'essuyois de nouveau ses larmes (Crèvecoeur, Voyage, t.2, 1801, p.370).V. ex. infra passim. ♦ Moments de peine (qui peuvent être liés à plusieurs événements). J'ai eu cette année de vives peines accompagnées de grandes lumières (Dupanloup, Journal, 1868, p.297).Jamais encore, au cours de cette journée capitale, il ne s'était senti plus loin de l'enfance, des joies et des peines d'hier, de toute joie, de toute peine (Bernanos, M. Ouine, 1943, p.1365). − Dans le vocab. de la philos., de la psychol. Le plaisir et la peine sont les principaux objets du désir et de l'aversion, et ce n'est point la raison, c'est le sentiment immédiat qui les discerne (Cousin, Philos. écoss., 1857, p.205).La peine naît donc d'une action partielle qui n'exerce que certaines des énergies disponibles et les exerce parfois avec excès, en même temps que d'un sacrifice des tendances refoulées (Blondel, Action, 1893, p.161). Rem. Peine n'est pas empl. dans le discours de la psychol. contemp.; on y utilise le syntagme douleur morale. SYNT. Éprouver, ressentir de la peine, une peine profonde; être accablé, chargé, rempli de peine(s); qqc. accroît la peine de qqn, cause de la peine à qqn; compatir à la peine de qqn; confier ses peines à qqn; partager, soulager la peine de qqn; distraire qqn de sa peine; le poids de la peine; peine cruelle, lourde, violente. 1. En partic. a) [Dans un cont. décrivant les manifestations ou les différents moments de cet état] Elle lut sur ses traits une peine apitoyée, la torture du remords (Vogüé, Morts, 1899, p.410).Il me semble, à moi, que vous n'êtes pas un triste: vous n'êtes qu'un homme qui souffre. La peine vient et elle s'efface (R. Bazin, Blé, 1907, p.144). b) [Constr. avec la prép. de + inf. désignant ce qui cause la peine]Rare. Entre les larmes de l'adieu, qu'on verse sur un foyer de famille, et la peine légère de voir se rapetisser dans l'éloignement les girouettes d'un toit sous lequel on a passé quelques beaux étés, la comparaison serait absurde (Coppée, Bonne souffr., 1898, p.62).Ce n'est rien, va: c'est la peine de ne pas être reconnu (J. Bousquet, Trad. du sil., 1936, p.118). c) [Constr. avec un groupe déterm. désignant le siège de la peine]Vieilli. Peine d'âme, de l'âme; peines d'esprit. Éviter pareillement les douleurs du corps et les peines de l'esprit (Laclos, Éduc. femmes, 1803, p.445).Les peines morales peuvent aussi laisser des impressions ineffaçables (Senancour, Obermann, t.2, 1840, p.212). ♦ Peine de coeur. Synon. chagrin* d'amour.«Oh! J'ai eu une grande peine de coeur cet hiver» (...) «Louis, −c'est son mari −m'a trompée (...)» (Goncourt, Journal, 1865, p.178).Tout en me racontant ses peines de coeur, Nancy s'amusa à me déguiser d'une grande robe mexicaine (Beauvoir, Mandarins, 1954, p.307). d) [Formant un groupe prép.] ♦ Avec peine (vieilli). Dans ce mouvement de solliciteurs, je vis avec peine que les électeurs n'étaient pas nombreux (Reybaud, J. Paturot, 1842, p.323).V. frimaire ex. de Napoléon. ♦ Dans la peine. Marie fut vaillante, confiante, presque gaie dans sa peine (Vogüé, Morts, 1899, p.277).Messieurs, vous me voyez dans une grande peine (Audiberti, Mal court, 1947, iii, p.193).V. justice A 1 ex. de Weill. ♦ De peine. [Combiné avec un verbe ou un adj. décrivant un état ou un comportement] Je tremble de honte et de peine. Il est temps que nous nous retirions (Audiberti, Mal court, 1947, ii, p.161). ♦ En peine. Nous irons donc à la louée de Bazolles, bien que j'aie le coeur tout en peine de me séparer de toi (R. Bazin, Blé, 1907, p.44).Mettre en peine qqn (rare). Un peintre, habitant d'une petite ville, mis en peine par la niaiserie provinciale, et obligé d'organiser comme une opération clandestine l'utilisation d'un modèle (J. Bousquet, Trad. du sil.,1936,p.230).Être, errer (ou un verbe équivalent) comme une âme en peine. V. âme I A 2. 2. Loc. verb. a) [Combiné avec avoir] Avoir de la peine, une peine (+ un groupe déterm.), (expr. quantifiante) + peine; avoir des peines (vieilli). Il passa la matinée à s'imaginer que Ninon aurait de la peine à le voir partir (Boylesve, Leçon d'amour, 1902, p.156).J'eus de la peine de ne point apercevoir la tunique de soie rouge de la petite Tanit-Zerga (Benoit, Atlant., 1919, p.197).J'ai eu de la peine en entendant une femme que j'aimais me déclarer qu'elle s'ennuyait (J. Bousquet, Trad. du sil.,1936,p.100).Je souffre parce que Paul a de la peine, je suis en colère parce qu'il est en colère (Merleau-Ponty, Phénoménol. perception, 1945, p.409).V. chagriner A ex. de Restif de la Bretonne: 5. C'est bien la pire peine
De ne savoir pourquoi,
Sans amour et sans haine,
Mon coeur a tant de peine.
Verlaine, Romances sans par., 1874, p.15. ♦ Avoir de la peine pour qqn. Un jour je me suis trouvé à voir jouer Faust et j'ai eu de la peine pour Marguerite (Aymé, Nain, 1934, p.275). b) [Combiné avec faire] Faire peine, de la peine, une peine (+ un groupe déterm.), (expr. quantifiante) + peine à qqn. − Causer de la peine, une peine (à quelqu'un). Il y a dans tout ce que tu m'as dit des choses qui me font peine, et d'autres qui me font plaisir (Musset, Lorenzaccio, 1834, iii, 3, p.195).Monsieur Codomat, vous me faites de la peine en ayant de moi une si mauvaise opinion... et en pensant que je ne suis pas digne de me marier (Tr. Bernard, M. Codomat, 1907, ii, 9, p.177): 6. Ça lui avait d'abord fait une grosse peine; elle voulait même aller se jeter à l'eau; mais, à présent, elle s'était raisonnée, tout se trouvait pour le mieux.
Zola, Assommoir, 1877, p.407. − Inspirer un sentiment de pitié triste, de compassion. Je ne cesse de cracher le sang. Oh! Je vous ferais peine si vous me voyiez (Dumas fils, Dame Cam., 1848, p.280).Elle ne retrouvait pas sa respiration... Elle me faisait une peine infinie (G. Leroux, Parfum, 1908, p.30). ♦ Faire (de la) peine à voir, à entendre, etc. Il entra tout pâle, (...) d'un air tellement effrayé que cela faisait de la peine à voir (Erckm.-Chatr., Ami Fritz, 1864, p.213).Le vautour de Monsieur de Meillan faisait peine à voir. Mélancolique et affectueux, il se traînait avec lenteur (Miomandre, Écrit sur eau, 1908, p.39). c) [Combiné avec être] Qqc. est une peine (+ un groupe déterm.) pour qqn. Le départ pour Combourg qui fut une grande peine pour ma mère fut une grande joie pour sa petite famille (Chateaubr., Mém., t.1, 1848, p.549).Le médecin (...) ne put en conscience autoriser l'abbé Berthet à continuer son enseignement. Ce lui fut, à nouveau, une peine énorme. «Un coup mortel», écrit son frère (L. Febvre, Dom B. Berthet, [1950] ds Combats, 1953, p.414). B. − [Dans les loc. infra] Souci, inquiétude. 1. En peine. Synon. en souci.MmeSimons me dit à l'oreille: «Vous paraissez bien en peine! Y a-t-il là de quoi faire une grimace pareille?» (About, Roi mont., 1857, p.191). − [Combiné avec être, mettre] Être, mettre en peine (de, pour qqc., qqn). Je ne suis pas en peine de sa conduite avec vous; il vous respecte trop pour vous rien dire qui vous embarrasse (Sénac de Meilhan, Émigré, 1797, p.1657).Non, je ne suis pas en peine de ce qu'ils deviendront. (...) ils suivront la même voie que leurs pères (Lacretelle, Silbermann, 1922, p.166). ♦ Empl. pronom. Ne vous mettez pas en peine pour cela. Dites-moi que vous acceptez. C'est tout ce que je vous demande (Billy, Introïbo, 1939, p.124).Ne vous mettez pas en peine de moi, j'irai m'étendre sur le divan de la bibliothèque (Bernanos, M. Ouine, 1943, p.1371): 7. ... dans les arbres, dans les fleurs, frémissaient les mélodies, de sorte que, tout pareil à ceux-là qui suivaient les pas de Jésus, il ne se mettait point en peine.
Châteaubriant, Lourdines, 1911, p.68. ♦ En partic. Être en peine de qqc. Ressentir cruellement le manque de quelque chose. C'est par milliers qu'on les compte, ceux qui, parmi nous, sont en peine de leur vêtement, de leur nourriture et de leur gîte (L. Blanc, Organ. trav., 1845, p.v).Des millions d'êtres, çà et là, sont en peine de leur nécessaire (Valéry, Variété IV, 1938, p.185). 2. Se faire de la peine pour qqc., qqn (rare). Voyons, Monsieur le curé, faut pas vous faire de peine pour si peu de chose; on ne va pas à la messe, mais on n'est pas tout de même du mauvais monde (R. Bazin, Blé, 1907, p.187). III. A. − Vieilli ou fam. [Au sing. et précédé de l'art. déf.] 1. Travail physique très pénible. Nous qui suons le jour et couchons sur la dure, Qui n'avons ici-bas que la peine et le mal (Barbier, Ïambes, 1840, p.154).Ce sera toujours le mineur qui aura la peine, sans l'espoir d'un gigot de temps à autre, en récompense (Zola, Germinal, 1885, p.1277). ♦ Dur* (ou un adj. équivalent) à la peine. Ils sont avares et durs à la peine comme les Auvergnats (Mille, Barnavaux, 1908, p.178).Résistants à la peine, capables de souffrir longtemps. Ce sont de simples hommes (Barbusse, Feu, 1916, p.53). ♦ Mourir, tuer qqn à la peine. Synon. mourir, tuer à la tâche.(Faire) travailler durement et sans relâche jusqu'à la mort. Ce gredin de gouvernement qui tuait ses employés à la peine, sans leur assurer seulement de quoi mourir (Zola, Ventre Paris, 1873, p.704).V. gros1II C 2 ex. de Zola. − De peine, loc. adj. Il n'avait d'autre ressource que le métier de hasard ou le travail de peine (Vallès, Réfract., 1865, p.64).L'argent qui leur pleut dessus [les artistes] avec le succès, ça garde dans leurs mains la vilenie et la crasse de ces argents de peine qu'on gagne avec de la sueur (Goncourt, Man. Salomon, 1867, p.254). ♦ Subst. (désignant une pers.) + de peine(vieilli). Personne qui effectue des travaux pénibles et subalternes. Garçon de peine. Nous demandions qu'on fît nos lits; nous étions fatigués. Il fut impossible de trouver une femme de peine pour les faire (Sand, Prom. autour vill., 1860, p.63).David (...) avait été homme de peine en fabrique (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p.158). 2. P. méton. a) Douleur provoquée par un déplacement, un travail physique pénible. Le père alors le prit en ses bras, et, accélérant encore son allure, se mit à souffler de peine en montant le trottoir incliné (Maupass., Contes et nouv., t.2, M. Parent, 1886, p.587).La fatigue de leurs dos toujours pliés devenait telle vers le soir qu'ils ne se redressaient qu'avec des grimaces de peine (Hémon, M. Chapdelaine, 1916, p.97). − P. métaph. V. convoi ex. 1. b) [Dans un syntagme locatif] Vieilli. Situation pénible par manque de ressources. Synon. besoin, gêne, misère.Aider des amis dans la peine; se tirer, sortir qqn de la peine. Ces pauvres gens ont pourtant vendu (...) leurs quinze actions (...) pour compléter la somme. De braves gens dans la peine, cela serre le coeur (Balzac, C. Birotteau, 1837, p.132).Ce jeune chevalier ayant su que la marquise était dans la peine eût donné sa croix de Malte pour lui venir en aide (Boylesve, Leçon d'amour, 1902, p.29). B. − P. ext. 1. Ce qui a été ou doit être dépensé en fait de fatigue, d'effort, d'attention pour effectuer un travail, une activité quelconque. a) Être récompensé de sa peine, de ses peines; ménager, perdre son temps, son argent et sa peine; ne pas plaindre sa peine. Faustine commence à faire de l'argent (...), je suis payé de mes peines qui n'ont pas été médiocres (Flaub., Corresp., 1864, p.130).Le travail est préparé de telle sorte que chacun puisse l'exécuter convenablement avec le minimum de peine (Brunerie, Industr. alim., 1949, p.189).V. coûter B 1 ex. de Balzac et de Gide et information ex. 2: 8. −Ces messieurs de Paris, ça danse pas comme par ici. −Ça, c'est vrai! On dirait que ça a peur de se casser, si peu que ça remue. À la bonne heure, les gars d'ici, ils se donnent du plaisir sans regarder à leur peine!
Colette, Cl. école, 1900, p.307. ♦ Ne pas être au bout de ses peines. Avoir encore beaucoup de travail, d'effort à faire pour surmonter une difficulté. V. bout ex. 28: 9. Enfin, après bien des délais et des explosions d'impatience, à onze heures nous partîmes. Nous n'étions pas au bout de nos peines. Pour arriver au Carrousel, il fallut prendre la file le long de la rue de Rivoli: les voitures entraient lentement, une à une; le ciel versait des cataractes sur le pavé.
Reybaud, J. Paturot, 1842, p.225. ♦ En être pour sa peine. Synon. en être pour ses frais*. ♦ Pour la peine, sa (...) peine. [Formule empl., souvent de façon iron., pour remercier qqn d'un travail, d'un service ou d'une action obligeante] La herse fut donc levée, le concierge reçut un louis pour sa peine, et l'on passa (Dumas père, Monte-Cristo, t.1, 1846, p.543).Quand il m'a eu quittée, Lord voulait le rappeler pour l'inviter à dîner avec nous. Je l'ai embrassé pour la peine (Murger, Scènes vie boh., 1851, p.233): 10. ... l'apothicaire certifia qu'il le guérirait lui-même, avec une pommade antiphlogistique de sa composition, et il donna son adresse: −M. Homais, près des Halles, suffisamment connu. −Eh bien, pour la peine, dit Hivert, tu vas nous montrer la comédie.
Flaub., MmeBovary, t.2, 1857, p.153. − Dans le domaine de la crit. esthét.Sentir la peine. Laisser paraître le travail, la recherche. Rien n'y sentait la peine [dans la Caravane de Boucher]; la touche était hardie et spirituelle (Nolhac, Boucher, 1907, p.192). − En partic. ♦ [Constr. avec un compl. prép. de spécifiant l'activité] Vieilli. L'opération qui détruit un enfant dans le sein de sa mère, afin de la dispenser des peines de l'allaitement (J. de Maistre, Soirées St-Pétersb., t.1, 1821, p.143). ♦ Empl. attributif. (C'est) peine(s) perdue(s), inutile(s). Il en aurait appelé en cassation que c'eût été peines perdues (Murger, Scènes vie boh., 1851, p.272).Il se tourna dans sa couchette, résolu à ne plus penser à cela. Peine inutile. Il alluma l'électricité, prit un livre et essaya de lire (Peisson, Parti Liverpool, 1932, p.106). − Proverbes ♦ Toute peine mérite salaire. V. mériter I A. ♦ À chaque jour (suffit) sa peine. V. jour II B 2 b α. b) Loc. verb. − [Combiné avec donner] Donner à qqn de la peine, une peine (+ un syntagme déterm.), (expr. quantifiante) + peine, les, des peines (suivi d'un syntagme déterm.) à, pour faire qqc. Souvent une simple lettre me donne de la peine et je m'en fais une affaire (Maine de Biran, Journal, 1816, p.243).Ses deux enfants, Alice et Firmin, bien mignons et donnant bien de la peine à élever (A. France, Vie fleur, 1922, p.301).Un régulateur donnera peu de peine s'il est régulièrement entretenu (Quéret, Industr. gaz, 1923, p.131). ♦ Empl. pronom. réfl. On ne peut faire autrement que de se donner une peine immense pour manger un morceau de pain (R. Bazin, Blé, 1907, p.107).Ainsi donc, les mille petites peines que Léon s'était données, pour maintenir cet équilibre, avaient été inutiles! (Montherl., Célibataires, 1934, p.894). − [Combiné avec mettre] Se mettre en peine de faire qqc. Synon. se soucier de.[Les Messieurs de Port-Royal] se sont bornés à nous dire en quatre mots que tous les philosophes enseignent qu'il y a trois opérations de notre esprit, concevoir, juger, et raisonner, sans se mettre du tout en peine d'examiner, ni de développer cette doctrine (Destutt de Tr., Idéol. 2, 1803, p.7).Je me mets en peine de rechercher à quoi nous reconnaissons qu'un objet donné est ou non fait par un homme (Schaeffer, Rech. mus. concr., 1952, p.157). − [Combiné avec prendre] Prendre peine, prendre de la peine, prendre une peine (Un syntagme déterm.) + peine, (expr. quantifiante) + peine, les, des peines (+ un syntagme déterm.) à, pour faire qqc. Ils aiment beaucoup l'argent, mais ils méritent d'en gagner, car ils prennent assez de peine (Chênedollé, Journal, 1812, p.70).Notre compagne de voyage (...) te remercie des peines que tu as prises (Hugo, Corresp., 1865, p.500).Ces faits sont «tout pleins de géographie» même dans les pays civilisés −et c'est à le démontrer que nous avons pris peine (Brunhes, Géogr. hum., 1942, p.266). 2. La peine de [suivi d'un verbe à l'inf., d'une prop. au subj., d'un subst. exprimant une idée verbale (rare)].Ce que représente en fait de fatigue, d'effort, d'attention l'accomplissement d'un travail, d'une activité (désigné par le compl. prép. de ou par la prop. complét. ou par l'inf. dans la combinaison avec valoir ou être). Vous allez aux Tuileries? Faites-moi le plaisir de donner cette dépêche à Sa Majesté; vous m'éviterez la peine du voyage (Chateaubr., Mém., t.3, 1848, p.300).Des milliers de malheureux qui sont au désespoir de ce petit froid, qui ne vous coûte tout au plus que la peine de souffler votre feu (Delacroix, Journal, 1854, p.177).Je ne me crus plus astreint à la peine de le comprendre (Proust, Guermantes 2, 1921, p.328). − Loc. verb. ♦ [Combiné avec avoir, se faire (rare), prendre, se donner] Après avoir fermé la porte au verrou, elle dit: −Faites-vous la peine de vous asseoir, Madame (Sue, Juif errant, 1844-45, p.51).On n'avait que la peine de réquisitionner les chevaux et les voitures du pays, et de les faire escorter par de petits détachements (Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t.2, 1870, p.49).On n'a plus le temps, on ne prend plus la peine d'étudier (Barrès, Cahiers, t.5, 1906, p.73).Quel remarquable journaliste eût été Gide, s'il avait voulu s'en donner la peine (L. Daudet, Brév. journ., 1936, p.236).Loc. [P. allus. à la tirade de Figaro dans Le Mariage de Figaro de Beaumarchais (acte 5, scène 3)] Avoir (prendre, se donner) la peine de naître. J'ai gagné cette fortune, Messieurs, non pas en me donnant la peine de naître, comme mes jolis adversaires, mais à force de visites, payées trente sous (Stendhal, L. Leuwen, t.3, 1836, p.241). Rem. Les constr. prendre la peine, se donner la peine sont fréq. empl. dans les formules de politesse pour inviter qqn à faire qqc. Donnez-vous la peine d'entrer, de vous asseoir. Je serais heureux si vous vouliez bien prendre la peine de me faire adresser un télégramme à Arbois (Pasteur, Corresp., 1883, p.376). ♦ [Combiné avec valoir] Il fallait attendre, au contraire, tâter ce gaillard-là. La chose valait la peine d'un voyage (Flaub., MmeBovary, t.2, 1857, p.122).Les exemples de lapsus cités (...) laissent une impression nouvelle qui vaut la peine qu'on s'y arrête (Freud, Introd. psychanal., trad. par S. Jankélévitch, 1959 [1922], p.45).Dans le temps, il avait eu un tas de copains, au temps où la vie valait encore la peine d'être vécue (Triolet, Prem. accroc, 1945, p.261).[Sans compl. prép.] Synon. valoir le coup*, la chandelle* (fam.), le déplacement*.Ça (ne) vaut pas la peine (fam.). Ma seule utilité est de nous empêcher de passer trop vite en négligeant des détails qui «vaudraient la peine» (Rivière, Corresp.[avec Alain-Fournier], 1907, p.250). ♦ [Combiné avec être] Être la peine. [Le suj. est obligatoirement en fin de phrase; l'énoncé est gén. interr., nég. ou orienté négativement] Est-ce bien la peine, pour un si faible résultat, d'introduire la métaphysique dans la symphonie? (P. Lalo, Mus., 1899, p.359).Je ne crois pas que ce soit la peine d'en parler (Malraux, Cond. hum., 1933, p.237).C'était bien la peine qu'il eût pris tant de soin de ces pelouses! (Montherl., Célibataires, 1934, p.876). ♦ [P. ell. de valoir ou être] Il regarda son fils pour la première fois de sa vie avec respect: «Bon, bon, ça va. Pas la peine de se chamailler» (Aragon, Beaux quart., 1936, p.226).V. décider ex. 10. IV. − [Dans les loc. infra] Difficulté d'ordre matériel, psychologique, moral rencontrée dans l'accomplissement de quelque chose, dans le déroulement d'un processus. A. − Loc. verb. 1. [Combiné avec avoir] Avoir peine, de la peine, une peine (+ un syntagme déterm.), (expr. quantifiante) + peine, les, des peines (suivi d'un syntagme déterm.) à faire qqc.Avoir grand'peine, n'avoir aucune peine, toutes les peines (du monde) à faire qqc. − [Le suj. désigne une pers.] ♦ [L'inf. désigne une action accomplie par la pers. désignée par le suj.] Synon. avoir du mal* (à faire qqc.).Les naturalistes ont une peine extrême à former une classification stable d'espèces (Renouvier, Essais crit. gén., 3eessai, 1864, p.152).Il eut surtout de la peine à monter l'escalier de pierre (Zola, Débâcle, 1892, p.616).V. compte II C 2 a ex. de Marat: 11. ...«Ô mon ami, s'écria-t-il [Littré], ne faites jamais de dictionnaire.» On a peine, en effet, à se figurer une telle somme de travail. Lui-même a eu la coquetterie de compter que si le dictionnaire, sans le supplément, était composé sur une seule colonne, cette colonne aurait 36 kilomètres 525 mètres 28 centimètres, à peu près la distance de Paris à Meaux.
Pasteurds Travaux, 1882, p.425. Rem. Avoir peut être remplacé par éprouver, ressentir. Ils commencent par ressentir plus de peine à respirer, ils toussent, leur voix devient enrouée (Geoffroy, Méd. prat., 1800, p.130). La peine qu'on éprouve à le définir [le sentiment du beau] tient-elle surtout à ce que l'on considère les beautés de la nature comme antérieures à celles de l'art (Bergson, Essai donn. imm., 1889, p.24). ♦ [L'inf. désigne un processus intéressant la pers. désignée par le suj.] On aura bien de la peine à gagner le mois de mai prochain (...) sans que nous arrivions à quelque phase révolutionnaire (Tocqueville, Corresp.[avec Gobineau], 1851, p.177).Germaine pense qu'elle aura de la peine, plus tard, à éviter les varices (Romains, Hommes bonne vol., 1932, p.119). − [Le suj. désigne un inanimé] Le feu avait beaucoup de peine à échauffer et à faire bouillir l'énorme quantité d'eau de la chaudière (P. Rousseau, Hist. techn. et invent., 1967, p.260).V. gargarisme ex. 1. 2. [Combiné avec il y a] −Vous savez ce qu'elle va y faire? −Il n'y a aucune peine à deviner... On voit que vous n'êtes pas une femme, Commissaire (Simenon, Vac. Maigret, 1948, p.155). B. − [Dans un syntagme locatif sans art.] Synon. embarras.Se tirer de peine. Laurent feignit d'être un commissionnaire en peine de se rappeler le nom d'une personne à laquelle il devait remettre un paquet (Balzac, Fille yeux d'or, 1835, p.354).−Ne parlons pas de moi, lui dis-je en lui faisant comprendre que mes propres affaires n'étaient point en jeu, et que récriminer n'était pas se donner raison. −Soit; c'est à celui qui se trouve en peine de s'en tirer (Fromentin, Dominique, 1863, p.228). − Être en peine de faire qqc.; être fort en peine de faire qqc. Si vous trouvez qu'c'est trop cher, j'suis pas en peine d'trouver d'autres clients pour c'te chambre (Barbusse, Feu, 1916, p.78).Nombre de petites ouvrières nipponnes seraient bien en peine de se payer tous ces peignes de luxe (Rousset, Trav. pts matér., 1928, p.73). C. − Loc. adv. − À grand'peine. Avec beaucoup de difficulté. On lui arracha à grand'peine la promesse d'un suprême effort (Vogüé, Morts, 1899, p.405). ♦ [Var. graph.] Le bruit (...) perçant à grand-peine cet horrible tumulte (Dumas père, Monte-Cristo, t.1, 1846, p.528).Le pauvre Duc se leva péniblement (...), descendit à grand peine, le marchepied (Bourges, Crépusc. dieux, 1884, p.328). − Avec peine. Synon. difficilement, péniblement.Les flammes résineuses grésillaient avec peine parmi cet air épais (Gautier, Rom. momie, 1858, p.164).L'auditeur non averti distinguera avec peine l'originalité de ce dernier mouvement (Samuel, Art mus. contemp., 1962, p.182). ♦ Avec grand'peine (rare). Les fumées ne sortaient plus qu'avec grand'peine des cheminées (Ramuz, Gde peur mont., 1926, p.259). − Sans peine. Synon. aisément, facilement.Il (...) se rendit à Vincennes. Il trouva sans peine le cabaret indiqué (Ponson du Terr., Rocambole, t.3, 1859, p.433).Un vaccin polyvalent contre la grippe (...), vaccin dont on imagine sans peine l'immense importance (R. Schwartz, Nouv. remèdes et mal. act., 1965, p.134).V. fosse ex. 2. ♦ Non sans peine. Avec beaucoup de difficulté. Nous escaladâmes non sans peine la cheminée de pierres croulantes qu'était le lit du petit ruisseau (Gracq, Syrtes, 1951, p.161). REM. 1. Peine-à-jouir, subst.,arg. [Corresp. à supra IV] Personne qui, dans le coït, ne parvient au plaisir que lentement et difficilement; p.ext., fam., personne lymphatique, triste (d'apr. Cellard-Rey 1980). Le Pen a remisé le peine-à-jouir sur son second rayon. Alors que tout le monde ressasse le malheur de l'époque, lui parle du bonheur d'être Français (Libération, 18 juin 1984, p.4, col. 5). 2. Pénologie, subst. fém.[Corresp. à supra I] ,,Étude des mesures pénales et des effets qui en résultent, tout particulièrement en ce qui concerne la protection de la société et la réintégration sociale des délinquants`` (Thinès-Lemp. 1975). Prononc. et Orth.: [pεn]. Ds Martinet-Walter 1973, 7 sujets disent [pε:n]. Homon. pêne et éventuellement penne. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist.1. 2emoitié xes. plur. poenas «souffrances (surtout physiques) infligées à quelqu'un» (St Léger, éd. J. Linskill, 151); ca 980 penas «id.» (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 62); 2. a) ca 1050 peine «mal que l'on se donne, souffrance voulue pour un but, un idéal» (Alexis, éd. Chr. Storey, 611); b) ca 1165 se mettre en peine de «se donner du mal pour» (Troie, 23951 ds T.-L.); c) 1176-81 être en peine de (Chrétien de Troyes, Chevalier lion, éd. M.Roques, 2878); d) 1176-81 perdre sa peine «se donner du mal inutilement» (Id., ibid., 892); ca 1260 painne perdue, v. perdre étymol. I 2 a; e)1409 «travail, tâche» (Trésor des Chartes de Rethel, 629, 25 ds Runk., p.49); 1690 homme de peine (Fur.); f) 1461-69 prendre la paine (de) (Pathelin, éd. R. T. Holbrook, 310); g) 1461-69 pour ma paine (ibid., 1214); h) ca 1485 mourir à la peine (Vieil Testament, XXXVI, 33263, éd. J. de Rothschild, V, 271); i) 1540 se donner peine (de) (Nicolas Herberay des Essars, Amadis, éd. H. Vaganay, 30 ds IGLF); j)1587 valoir la peine (N. du Fail, Contes d'Eutrapel, OEuvres facétieuses, éd. J.Assézat, t.2, p.128); k) 1656 ce n'est pas la peine (Pascal, Provinciales, IV, OEuvres, éd. L. Lafuma, Seuil, 1972, p.385); 3. a) déb. xiies. peines «souffrances infligées en enfer en châtiment du péché» (St Brendan, 66 ds T.-L.); b) ca 1165 «punition, châtiment infligé par la justice rendue par les hommes» mortel peine (Troie, 28358, ibid.); xiiies. painne capital (Cout. d'Artois, 79, Tardif d'apr. A. Delboulle ds R. Hist.litt. Fr. t.6, p.292); c) 1301 seur la peine de «en encourant la peine (ici, une amende) de» (Trésor des Chartes de Rethel, I, 481, 9 ds Runk., p.87); 1303 sur peine de «id.» (Mém. de la Sté de l'hist. de Paris et de l'Ile-de-France, 1882, 109 ds IGLF); ca 1340 a paine de «id.» (Tombel de Chartrose, éd. E. Walberg, IV, 369); 1541 sous peine de (Calvin, Institution chrét., éd. J.-D. Benoît, IV, X, par. 2, p.187); 4. a) ca 1100 «souffrance morale, profonde affliction» (Roland, éd. J. Bédier, 2519); ca 1180 (être) en paine (Thomas, Tristan, éd. J. Bédier, XXXI, Le Mariage, 69); b) 1601 faire peine à voir (Montchrestien, David, Tragédies, éd. Petit de Julleville, p.219 ds IGLF); 5. a) déb. xiies. «difficulté, souffrances ou obstacles s'opposant à la réalisation de quelque chose» sanz peine (St Brendan, 440 ds T.-L.); b) ca 1100 a peine «avec difficulté, dans la souffrance» (Roland, éd. J. Bédier, 1787); 1160-77 a painne «difficilement» (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, II, 445, t.1, p.30), a grant peine (Id., ibid., III, 8206, t.2, p.190); xives. a peine «tout juste, pas encore tout à fait» (Chevalier papegau, 7, 14 ds T.-L.); 1559 a peine rien «presque rien» (J. Grevin, La Trésorière, Théâtre complet, éd. L. Pinvert, p.62 ds IGLF); c) av. 1538 avoir peine de «avoir du mal de» (P. Gringore, OEuvres compl., éd. A. de Montaiglon et Ch. d'Héricault, I, 306, ibid.); 1553 avoir peine à «id.» (Bible de l'imprimerie Jean Gerard, Marc 6, 48, p.15); 1587 avoir de la peine à «id.» (N. du Fail, op.cit., t.2, p.72); 1656 avoir peine à croire «ne pas vouloir croire» (Pascal, op.cit., V, ibid., p.387). Du lat. poena «réparation, expiation, châtiment» (gr. π
ο
ι
ν
η
́ «id.») d'où, en lat. de l'époque impériale «souffrance, affliction». Fréq. abs. littér.: 15904. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 26212, b) 20751; xxes.: a) 22193, b) 20803. Bbg. Gemmingen Arbeit 1973, pp.104-107. _ Kleiber (G.). Le Mot ire en anc. fr. (xie-xiiies.). Essai d'analyse sém. Paris, 1968, pp.235-237. |