| ![]() ![]() ![]() ![]() PASSÉ, -ÉE, part. passé et adj. I. − Part. passé de passer*. II. − Adjectif A. − [Dans le temps] 1. [Corresp. à passer12esection II A 1] a) [En parlant du temps ou d'une fraction du temps] Qui s'est écoulé antérieurement à l'époque dans laquelle se trouve le locuteur ou à celle qui fait l'objet du propos. Anton. futur.Les siècles passés; les temps passés. [L'histoire] procède en dressant des répertoires particuliers des faits d'une époque passée, et en leur appliquant des questionnaires généraux fondés sur l'étude du présent (Langlois, Seignobos, Introd. ét. hist., 1898, p.276).Je mettais (...) une certaine complaisance à me poser des questions insolubles, à me rappeler les jours passés, à craindre ceux qui suivraient (Sagan, Bonjour tristesse, 1954, p.91): 1. ... où en serait-on? Que deviendrait le monde, si chaque âge respectait, révérait, consacrait, à titre d'ancienneté, tout oeuvre des âges passés, n'osait toucher à rien, défaire ni mouvoir quoi que ce soit?
Courier, Pamphlets pol., Au réd. «Censeur», 1819, p.19. Rem. Le subst. qualifié est fréq. au pluriel. − [P. méton.] Qui a existé, qui a été (dans une période, à une époque aujourd'hui révolue, d'autrefois). La mémoire n'est autre chose qu'un fait passé de notre vie perçu par nous comme présent (P. Leroux, Humanité, t.1, 1840, p.276).Des histoires (...) couraient sur son existence passée (Genevoix, Raboliot, 1925, p.89).À la recherche d'un homme nouveau, les instructeurs étudiaient le monde passé pour essayer de préparer l'avenir (Cacérès, Hist. éduc. pop., 1964, p.133).V. déduire ex. 3 et futur I B ex. de Chateaubriand: 2. La Déclaration des Droits de l'Homme avait été (...) une affirmation de la vie, un appel à la vie. C'étaient les droits de l'homme vivant que proclamait la Révolution. Elle ne reconnaissait pas à l'humanité passée le droit de lier l'humanité présente.
Jaurès, Ét. soc., 1901, p.139. SYNT. Générations, peuples, sociétés passé(e)s; civilisation passée; grandeur, splendeur passée; élégances, espérances, gloires, prospérités passées; chefs d'oeuvre passés; vie passée; activité, attitude, conduite passée; actes, actions, aventures, serments passé(e)s; affection, amitié, amour, bonheur, émotion, intimité, luxe, plaisir passé(e); chagrin, douleur, mal, préoccupation, souffrance passé(e); bontés, services, succès passé(e)s; amertumes, angoisses, conflits, déboires, échecs, errements, erreurs, faiblesses, faillites, fautes, humiliation, illusions, péchés, peines, tâtonnements passé(e)s; phénomènes, réalisations, sensations passé(e)s; éclat, évolution, réalité passé(e); aspects, effets passés; mode passée; idiomes passés. ♦ Loc. (exprimant l'irréversibilité du passé). Ce qui est passé est passé. J'ai du chagrin à vous revoir ainsi. −C'est ma faute, Rodolphe, je ne me plains pas; ce qui est passé est passé, n'y songez pas plus que moi (Murger, Scènes vie boh., 1851, p.292). b) [En parlant d'une fraction du temps] Qui vient juste de s'écouler, qui précède immédiatement le moment actuel. Synon. dernier (v. ce mot II B 3).Dimanche passé; l'hiver passé; la semaine, la saison passée. Notre famille, originaire d'Allemagne, vint s'établir à Genève dans le siècle passé (Toepffer, Nouv. genev., 1839, p.189).À mesure qu'il avançait, le Survenant s'étonna devant le paysage, différent de celui qu'il avait aperçu, l'automne passé (Guèvremont, Survenant, 1945, p.190): 3. Il (...) s'attarda comme il l'avait souvent fait l'année précédente, à considérer le même peuplier au travers de plusieurs fenêtres (...): ces divers aspects du même arbre avaient été l'an passé l'origine de maintes réflexions (...) sur la notion d'échelle dans la perception du monde...
Vailland, Drôle de jeu, 1945, p.131. 2. [En parlant d'un instant précis ou d'une fraction du temps; corresp. à passer11resection I D 1 b] Qui est dépassé de façon sensible. Il y avait deux jours passés qu'elle n'avait pris aucun aliment (Borel, Champavert, 1833, p.30).Il était dix heures passées quand il sonna chez son ami (Maupass., Bel-Ami, 1885, p.66).Elle était d'une fraîcheur étonnante, vraiment appétissante encore, en dépit de ses cinquante ans passés (Simenon, Vac. Maigret, 1948, p.72).V. anglais ex. 6. 3. GRAMMAIRE: 4. Le passé englobe tous les temps qui réfèrent effectivement à une époque révolue par rapport au moment de l'énoncé du locuteur pris comme origine. En français on distingue, d'après leur forme et leur signification, un passé simple ou défini (J'attendis), un passé composé ou indéfini (J'ai attendu), un passé antérieur (J'eus attendu), deux passés du conditionnel (J'aurais attendu, J'eusse attendu), un subjonctif passé (Que j'aie attendu), un participe passé (Attendu), un infinitif passé (Avoir attendu), voire un impératif passé (Aie fini d'ici une heure).
Mounin1974. B. − [Comme une conséquence ou comme la marque du temps écoulé; corresp. à passer12esection II A 2] 1. [En parlant d'une fleur, d'un fruit] Qui a dépassé le point optimum de maturité. Cet honnête homme ne regardait pas comme au-dessous de lui d'acheter lui-même les melons, alléguant qu'une femme est incapable de connaître un cantaloup parvenu au moment fugitif de sa maturité savoureuse d'avec un autre encore vert ou déjà passé (A. France, Vie fleur, 1922, p.486). ♦ Fleur passée. Fleur fanée demeurée sur pied (d'apr. Bén.-Vaesk. Jard. 1981). − P. anal. ♦ [En parlant d'un aliment] Qui a perdu sa fraîcheur, ses qualités gustatives; qui n'est plus tout à fait consommable. Viande passée. Quand un vin devient trop vieux, il perd sa sève, il meurt, il est passé (Ali-Bab., Gastr. prat., 1907, p.131). ♦ Bois passé. Synon. de bois échauffé (v. ce mot II A 2) (d'apr. Lar. encyclop.).Le bois trop passé ne vaut pas mieux que celui qui a été coupé trop récemment (Maigne, Maugin, Nouv. manuel luthier, 1929 [1869], p.18). 2. [En parlant d'une couleur, d'un ton] Qui a pâli, qui a perdu sa teinte, son intensité initiale. Synon. décoloré, fané.C'est un manuscrit d'environ cent pages, au papier jauni, à l'encre déteinte, dont les feuilles sont réunies avec des faveurs d'un rose passé (Nerval, Filles feu, Angélique, 1854, p.524). ♦ Sans connotation péj. et p.oppos. à vif, éclatant. Pâle, atténué. De grands bouquets, des guirlandes minces (...) suivent le bas de la jupe, des branches (...) grimpent sur le corsage, tout cela en soies violettes nuancées, passées (Colette, Cl. école, 1900, p.253).Les belles mottes [de beurre] blondes sont (...) découpées dans la masse onctueuse, toutes ici de cette couleur or passé que j'ai signalée, sans qu'il soit jamais besoin de les colorer (Pesquidoux, Livre raison, 1928, p.221): 5. ... l'homme pénètre «dans ce mystérieux jardin des couleurs lapidaires, plus séduisant peut-être, avec leurs tons passés et leurs nuances éteintes, que les parterres de fleurs éblouissantes»...
L. Febvre, C. Jullian, [1931] ds Combats, 1953, p.354. Empl. subst. masc. sing. à valeur de neutre. C'est, dans le coloriage [des estampes japonaises anciennes], un assoupissement du ton, un passé de la nuance, une harmonie délicieusement discrète (E. de Goncourt, Mais. artiste, t.1, 1881, p.235).− [P. méton.] Qui a perdu sa couleur. Drap, indienne passé(e); habit, pull over, robe de chambre passé(e). La gorge s'encadrait dans le pur corsage aux tulles jaunis, aux rubans passés, qui n'avait serré que bien peu les charmes évanouis de la tante (Nerval, Filles feu, Sylvie, 1854, p.606).La table se couvrit (...) de jolies laines rajeunissant de leurs tons éclatants les fleurs passées du vieux tapis (A. Daudet, Nabab, 1877, p.167).V. encerclé ex. de Barbusse, rem. b s.v. encercler: 6. L'action de la lumière a beaucoup affaibli la vivacité des teintes: on peut s'en convaincre en comparant les peintures de la nef exposées au jour, avec celles de la crypte, qui sont demeurées dans une obscurité continuelle: les premières sont passées, tandis que les autres ont conservé toute leur fraîcheur.
Mérimée, Ét. arts Moy. Âge, 1870, p.155. 3. [En parlant d'une pers. sur le plan physique] Qui a perdu sa fraîcheur, l'éclat de la jeunesse ou de la maturité. Synon. fané, flétri.Quand Joseph expliqua la position de Philippe à sa mère (...) il lui sentit trembler le bras sur le sien, la joie illumina ce visage passé (Balzac, Rabouill., 1842, p.343).Une forte dame, très bien vêtue de noir, promenait avec assurance le teint passé de ses quarante ans, devant les sourires cruels de ses jeunes rivales (Hamp, Champagne, 1909, p.219): 7. Je suis allé hier chez MmeMerlin où nous avons eu une collection impossible à trouver ailleurs; des femmes passées et engraissées, Mmede Toreno était parmi les minces. Elle marche maintenant comme la tour de Babel.
Mérimée, Lettres ctessede Montijo, t.1, 1843, p.64. 4. [En parlant d'un vêtement et, p.anal., d'une manifestation de l'activité hum.] Passé de mode (v. mode1II B 1 a) et p.ell., rare, vx passé. Démodé. [Les vieilles femmes] ont des mantelets en dentelles noires, et des chapeaux de formes passées en harmonie avec leur démarche lente et solennelle (Balzac, U. Mirouët, 1841, p.53).La polytonalité (...) n'est ni «passée de mode» comme certains voudraient le faire accroire, ni particulièrement «moderne» (Arts et litt., 1935, p.34-13). C. − [Impliquant une qualité acquise] 1. [Corresp. à passer11resection IV B 3 a ; en parlant du cuir, d'une étoffe] Vieilli. Qui a subi le traitement approprié (d'apr. Littré). Ces trois nations (...) peuvent armer cent vingt hommes. Ils sont bien faits, très-braves, agiles et passionnés pour la chasse. Ils peuvent fournir tous les ans deux mille peaux de chevreuil bien passées (Baudry des Loz., Voy. Louisiane, 1802, p.251). 2. Passé maître, maître passé , adj. et subst. masc. [Corresp. à passer11resection II B 4 b; dans le système corporatif] (Artisan) qui a reçu les lettres de maîtrise (v. maître1II B 1 a, maîtrise B 2 a). Bien que blasé j'ai trouvé à m'extasier devant l'église de Surgères (...) je ne connais rien de plus beau que sa façade. Le sculpteur qui l'a faite était un passé maître (Mérimée, Lettres L. Vitet, 1840, p.23). − [Avec compl. prép.] Qui est particulièrement habile, compétent (dans un domaine, une activité). César, passé maître en toute tromperie, a écrit sur les Gaulois ce qu'il convenait de faire croire aux Romains (Stendhal, Mém. touriste, t.2, 1838, p.21). ♦ Au fém. Au reste (...) comme [les indifférentes] ne brillent pas par une grande puissance d'imagination, c'est surtout dans l'expression des riens qu'elles sont maîtresses passées (Delacroix, Journal, 1853, p.9). − Passé singe (arg.). ,,Fin matois, rusé, qui ne se laisse pas prendre`` (France 1907 [v. passe-singe s.v. passe- B 2 b ]). Je vous connais, vous êtes marlou [malin], mais je suis passé singe [très malin] (Vidocq, Vrais myst. Paris, t.7, 1844, p.14). Prononc.: [pase]. Fréq. abs. littér.: 13461. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 18956, b) 19576; xxes.: a) 19118, b) 19084. |