| PALPITATION, subst. fém. A. − 1. [À propos d'un animé, d'une partie du corps] Mouvement plus ou moins régulier manifestant la vie ou mouvement convulsif manifestant la persistance d'un reste de vie. Palpitation de la vie. Que de palpitations humaines dont il ne reste d'autre trace qu'une forme imprimée dans un morceau de pierre! (Taine,Voy. Ital.,t.2, 1866, p.79).Un papillon cueillant sa vie sur les oeillets, allant de l'un à l'autre avec une rapide palpitation des ailes (Maupass.,Bel-ami,1885, p.186): 1. ... Antoine observa les contractions du bébé, s'appliquant à noter la fréquence de certains mouvements; mais il n'y avait pas de renseignements à tirer de cette gesticulation désordonnée, pas plus que des palpitations d'un poulet qu'on saigne.
Martin du G.,Thib.,Consult., 1928, p.1119. 2. [Avec une valeur de personnification; à propos d'une oeuvre d'art] Impression de mouvement vivant donnée par une expressivité particulièrement forte. L'immobilité des statues exposées, la palpitation insensible dont s'entourent leur blancheur calcaire et leurs mouvements d'apothéose (A. Daudet,Nabab,1877, p.3). 3. P. anal. [À propos d'une chose concr.] Mouvements rappelant ceux de la vie, de la lutte pour la vie, par leur rythme régulier ou leur précipitation. Ces palpitations de la mer dans son lit, ce mouvement sans fin d'un élément qui vit (Lamart.,Chute,1838, p.914).Le linge qui avait eu une grande palpitation, le battement d'ailes d'un oiseau captif s'efforçant de voler encore (Zola,Rêve,1888, p.77).Les palpitations d'un crépuscule rouge qui se débattait à l'horizon (Giono,Bonheur fou,1957, p.333). − Synon. de agitation, oscillation.Ce jour fleuri d'étoiles, cette palpitation de lueurs battantes, le fourmillement de lumières (Goncourt,MmeGervaisais,1869, p.89). 4. Au fig. Élan de vie intérieure, de force morale, sursaut d'énergie. Cette toute petite région autour de Montaigu (...) elle va devenir le centre de la dernière lutte, de la palpitation suprême (La Varende,Man' d'Arc,1939, p.111).V. aile ex. 105. B. − 1. a) [À propos du coeur] Modification du rythme cardiaque ressentie comme pénible (notamment par sa rapidité, son irrégularité) et provoquée par une cause pathologique ou une émotion. Palpitations violentes. Sa douce et vivante voix, où frémissait la palpitation étouffée d'un coeur trop ému (Bourget,Disciple,1889, p.186).Il souffre de son malaise chronique, les palpitations cardiaques (...). Chaque nouvelle accélération du pouls, réelle ou imaginaire, fait passer de sa nuque aux talons une onde d'angoisse (Bernanos,Mauv. rêve,1948, p.945): 2. Le mot palpitation du coeur, dans le langage médical usuel, peut être défini un battement du coeur sensible et incommode pour le malade, plus fréquent que dans l'état naturel, et quelquefois inégal sous les rapports de fréquence et de développement.
Laennec,Auscul.,t.2, 1819, p.227. − Expr. Avoir/donner des palpitations. Je sentais le cervelet qui me battait dans le crâne, comme on se sent sauter le coeur quand on a des palpitations (Flaub.,Corresp.,1853, p.169). b) [À propos (d'une autre partie) du corps] Mouvement rapidement rythmé ou désordonné, dû à une émotion. La palpitation précipitée de sa gorge, qui soulevait ses dentelles, le léger tremblement de l'éventail dans sa main (...) eussent trahi l'intérêt qu'elle portait au Léandre (Gautier,Fracasse,1863, p.233).Un corps que les dernières palpitations du plaisir font frissonner dans sa longueur (Toulet,Mariage Don Quichotte,1902, p.132).Un halètement de vendeurs d'actions, une palpitation de propriétaires de métaux précieux, derrière lesquels l'on sent l'attention passionnée de l'univers (Morand,New-York,1930, p.59). 2. P. anal. [À propos d'une chose concr.] Mouvements rappelant ceux de l'émotion. Pourquoi ces palpitations Des flots dans plus de joie et dans plus de rayons? Pourquoi partout l'ivresse et la hâte d'éclore (Hugo,Légende,t.1, 1859, p.41). 3. Au fig. Vif mouvement affectif, passion. Les battements d'âme, les élancements, les palpitations de sacrifice (Valéry,Corresp.[avec Gide], 1892, p.155).Je craignais les attendrissements de Caroline, les palpitations et les explosions de sa sensibilité (Arnoux,Crimes innoc.,1952, p.123): 3. ... sa vie [du siècle] semble une fièvre (...) si dans cette fièvre il entre bien des émotions passagères, de mauvais caprices, d'engouements à la minute, il y a aussi là-dedans de bien nobles palpitations, une sérieuse flamme, des torrents de vie et de génie...
Sainte-Beuve,Prem. lundis,t.2, 1833, p.154. − P. méton. Ce qui exprime de vifs mouvements affectifs. V. essoufflé ex. 3. Prononc. et Orth.: [palpitasjɔ
̃]. Att.ds Ac. dep.1694. Étymol. et Hist.1. 1538 «tremblement convulsif des paupières» (Jean Canappe, trad. du Guidon en françois, fo277 cité ds Sigurs, p.520: le renversement des palpebres est separation et division d'icelles, tellement que l'on ne peult couvrir l'oeil et est semblable es yeulx de lievre et en celle est enclose gesse qui est selon Avicenne difficulté de palpitation); 2. 1541 palpitation du coeur (Id., Tabl. anat., fo45 ds Gdf. Compl.); 3. 1758 «vive émotion» (Rousseau, Lettre d'Alembert, p.140); 4. 1835 «frémissement» (Lamart., Voy. Orient, t.1, p.87: elles font rendre à ces grandes voiles une palpitation sonore, un battement irrégulier). Empr. au lat. palpitatio, dér. de palpitare (v. palpiter). Fréq. abs. littér.: 329. Fréq. rel. littér.: xixe: a) 423, b) 531; xxes.: a) 544, b) 425. |