| PÉTRIFICATION, subst. fém. A. − 1. Transformation en pierre. Sthéno, soeur de Méduse (...) notait en outre le nombre des victimes de la pétrification (Cocteau,Appogiatures, 1953, p.77). − En partic. Minéralisation de substances organiques. Synon. fossilisation.La meilleure source, pour l'étude détaillée des végétaux fossiles, ce serait les végétaux à structure conservée, qui ont été l'objet de véritables pétrifications (Plantefol,Bot. et biol. végét., t.2, 1931, p.594). ♦ P. méton., vieilli. Organisme, objet pétrifié. Synon. fossile.M. de Lamanon rapporta d'un endroit élevé de plus de deux cents toises au-dessus du niveau de la mer, des pétrifications très-bien conservées et de la plus grande dimension, de la coquille connue (...) sous le nom de (...) coquille de Saint-Jacques (Voy. La Pérouse, t.2, 1797, p.189).La vitrine étalait des curiosités ramassées sur la montagne, cristaux, silex, pétrifications, deux oursins, une salamandre (A. Daudet,Tartarin Alpes, 1885, p.133). 2. Fait, pour des eaux calcaires, de recouvrir d'une couche pierreuse les objets, les corps qui y sont plongés. P. méton. Corps, objet recouvert d'un dépôt calcaire. Ce garçon (...) emmagasinait dans sa chambre un tas de curiosités achetées à bon marché: des pierres à paysages (...) des pétrifications de la Fontaine Saint-Allyre à Clermont (Balzac,Employés, 1837, p.89).Ces sources d'eaux thermales qui vous prennent un animal vivant, et vous rendent une pétrification (Feuillet,Scènes et com., 1854, p.13). B. − P. anal. ou au fig. 1. État d'immobilité totale; stupéfaction. Il y avait vingt minutes que je m'appliquais à atteindre le plus haut degré de pétrification possible dans cette attitude (Vigny,Serv. et grand. milit., 1835, p.98).Comme il n'avait pas prévu ni imaginé que son fils pouvait s'enfuir avec MmeRenaud, il entra, quand il le sut, dans une surprise, dans un ébahissement, dans une pétrification indescriptibles (Flaub.,1reÉduc. sent., 1845, p.185).Un gamin mal assis tombe du banc, tout d'une pièce, avec bruit. Sursaut de Marie Fadette en arrière, et une pétrification épouvantée, les yeux désorbités, la bouche béante, vers le camarade un instant étendu (Frapié,Maternelle, 1904, p.229). 2. Dessèchement, endurcissement. Dans son impassibilité (...) étaient empreintes les deux pétrifications, la pétrification du coeur propre au bourreau et la pétrification de l'esprit propre au mandarin (Hugo,Homme qui rit, t.1, 1869, p.76).Ses quelques rares paroles banales manifestaient une sorte de dureté furieuse, une pétrification de sa sensibilité et de sa conscience (Malègue,Augustin, t.2, 1933, p.392).V. aréfaction ex. 3. Fait de figer dans un état donné, d'empêcher toute évolution; p.méton., état qui en résulte. Si la religion chrétienne s'éteignait, on arriverait par la liberté à la pétrification sociale où la Chine est arrivée par l'esclavage (Chateaubr.,Mém., t.4, 1848, p.784).Tête originale (...), pleine de feu, de mouvement, de manière de sentir à soi, et qui a échappé à la pétrification commerciale, tout en gagnant sa fortune dans le commerce (Barb. d'Aurev., Memor. 3, 1856, p.38).Cette pétrification de l'en-soi par le regard de l'autre est le sens profond du mythe de Méduse (Sartre,Être et Néant, 1943, p.502).V. aussi supra ex. de Hugo: . Pour moi, je redoute la pétrification de l'âge (...). La vieillesse d'un écrivain, c'est sa propre statue à laquelle il ne peut plus rien ajouter et sur laquelle les nouvelles vagues de moineaux se posent, et ils l'insultent de leurs fientes.
Mauriac,Nouv. Bloc-Notes, 1961, p.353. Prononc. et Orth.: [petʀifikasjɔ
̃]. Ac. 1694, 1718: petrification; dep. 1740: pé-. Étymol. et Hist. 1. 1515 «durcissement» (J. Falcon, Notables declaratifz sur le Guidon, Lyon ds Sigurs, p.410: petrification aux apostemes n'est autre chose qu'endurcissement de la matiere à la semblance d'une pierre); 2. 1580 «fossilisation» (B. Palissy, Discours admirable ds OEuvres, éd. A. France, p.334); 1638 «fossile» (J. Boyceau, Traité du jardinage, 80 ds Rommel, p.73); 3. 1771 «formation d'une couche pierreuse par incrustation de carbonate de calcium sur des corps séjournant dans l'eau calcaire» (Trév.); 1837 «corps entouré d'une couche pierreuse» (Balzac, loc. cit.). Dér. sav. de pétrifier*; suff. -(a)tion*. Fréq. abs. littér.: 38. Bbg. Gohin 1903, p.366. |