| OUATER, verbe trans. A. − Doubler, garnir d'ouate. Ouater un manteau, une robe. Ouater un couvre-pied (Ac.). P. méton. de l'obj. Vêtir de vêtements garnis d'ouate. Nous partons par le chemin que j'ai pris pour venir, mais j'ai cette fois un cheval doux, on m'a caleçonné, ouaté (Vallès,J. Vingtras,Enf., 1879, p.151). B. − P. anal., littér. Garnir d'une matière semblable à l'ouate par son aspect, sa consistance. Le duvet neigeux et doux qui se gonflait à la gorge de l'oiseau, qui lui ouatait le ventre et les cuisses (Genevoix,Raboliot,1925, p.123): . L'hermine vierge de souillure,
Qui, pour abriter leurs frissons,
Ouate de sa blanche fourrure
Les épaules et les blasons...
Gautier, Émaux,1852, p.23. C. − Au fig., littér. 1. [Le compl. désigne une impression des sens] Atténuer, assourdir, estomper, rendre moins net. Il n'est pas jusqu'à la fumée des cigarettes (...) qui ne contribue à réchauffer la fin de cette fête mal commencée, en ouatant d'une atmosphère bleuâtre et transparente la clarté crue de l'électricité (Bourget,Physiol. amour mod.,1890, p.241).Empl. pronom. Les bruits du dehors se ouatent de silence (Rodenbach,Règne sil.,1891, p.111). ♦ Ouater de + subst.Il semblait surtout qu'on voulût l'empêcher d'entendre, à force de les ouater de douceur (...) les derniers grincements de son corps que quittait la vie (Proust,Plais. et jours,1896, p.32). − En partic. [Le suj. désigne un phénomène atmosphérique] Estomper, voiler. L'épais brouillard qui ouate les docks et les navires du port (Cendrars,Du monde entier,Vancouver, 1924, p.138). ♦ Empl. pronom. Quand (...) la nature, dépouillée de ses couleurs semble se revêtir de satin ou de moire, qu'elle se ouate de brume avec ça et là, dans les arbres, des teintes violâtres, et sur l'eau dormante, des luisances d'acier (Lorrain,Contes chandelle,1897, p.174). 2. [Le compl. désigne une pers. ou son cadre de vie] Entourer de douceur, de prévenances. Rose Esther était de ces personnes qui ne souffrent pas le bruit, le bris de vitres, et qui ont l'art d'ouater la vie autour d'elles, afin que tous y glissent discrètement (Vogüé, Morts,1899, p.160). Prononc. et Orth.: [wate], (il) ouate [wat]. Att. ds Ac. dep.1762; 1798 et 1835, prononc. [wete]. V. ouate et, pour la liaison, ouaté. Étymol. et Hist. 1. 1680 «doubler d'ouate» ici, au part. passé (Mmede Sévigné, lettre du 19 juin ds Corresp., éd. R. Duchêne, t.1, p.977: j'ai une robe de chambre ouatée, j'allume du feu tous les soirs); p.ext. 1839 ciel ouaté (Michelet, Journal, p.293); 2. 1765 «adoucir, estomper» ici, au part. passé, à propos des contours ou des couleurs d'un sujet sur une toile (Diderot, Salons, p.292 ds Brunot t.6, p.789); 1884 empl. adj. «assourdi» en parlant d'un bruit (A. Daudet, Sapho, p.152: roulement sourd et ouaté [des voitures]); 3. 1836 «entourer de douceur» ici, au part. passé en empl. adj. (Balzac, Vieille fille, p.367 s.v. ouaté); 1846 empl. adj. «protégé, douillet» (Dumas père, Monte-Cristo, t.2, p.94: le calme ouaté de son ménage). Dér. de ouate*; dés. -er. |