| OEUVRER, verbe A. − Emploi trans. [Dans quelques emplois techn.] Travailler, façonner. Synon. ouvrer.Des outils circulaires (...) enlèvent sur le bois à oeuvrer une quantité de copeaux très minces (Champly,Nouv. encyclop. prat.,t.12, 1927, p.210).V. faîtage ex. − Au fig., littér. Je ne vois pas bien le livre que je pourrais oeuvrer sur elle (Huysmans,Cathédr.,1898, p.138).Ce monde n'est pas seulement spectacle mais problème et tâche, matière à oeuvrer; il est le monde pour le projet et l'action (Ricoeur,Philos. volonté,1949, p.198). B. − Emploi intrans. 1. Vx ou région. [En parlant d'un ouvrier] Travailler. On sait que les Allemands vont remettre la fabrique en route. On ne veut pas oeuvrer pour les Allemands (Van der Meersch,Invas. 14,1935, p.129). 2. Littér. Agir au service d'une cause, travailler à une oeuvre considérée comme ayant de la dignité, de l'importance, de la noblesse. OEuvrer à, dans, pour qqc. Il est le bon ouvrier qui oeuvre pour la beauté, pour la vérité et la justice (Zola,Corresp.,1901, p.883).C'est le poète −et le poète seul, si l'on accorde aussi ce titre à ceux qui oeuvrent avec force dans l'idée ou dans l'action −qui trouve les analogies, hiérarchise les valeurs et découvre les passages conduisant à l'unité (Faure,Espr. formes,1927, p.265).À la Libération, un certain nombre de responsables des Compagnons vont continuer à oeuvrer dans l'éducation populaire (Cacérès,Hist. éduc. pop.,1964, p.128): . Personne autant que nous ne peut désirer cet ordre supérieur où, dans une nation en paix avec elle-même et avec son destin, chacun aura sa part de travail et de loisirs, où l'ouvrier pourra oeuvrer sans amertume et sans envie, où l'artiste pourra créer sans être tourmenté par le malheur de l'homme, où chaque être enfin pourra réfléchir, dans le silence du coeur, à sa propre condition.
Camus,Actuelles I,1944, p.55. Prononc.: [oevʀe], (il) oeuvre [oe:vʀ]. Étymol. et Hist. 1176 intrans. oevrer «agir, travailler» (Chrétien de Troyes, Cligès, éd. A. Micha, 5482: il ... oevre, et point et taille); 1260 euvrer (Etienne Boileau, Métiers, éd. Lespinasse et Bonnardot, titre xcii, i, p.203); 1530 oevrer (Palsgr., p.784). Altération, sous l'infl. de oeuvre* de l'a. fr. ovrer, v. ouvrer. Fréq. abs. littér.: 49. |