| OBSTINATION, subst. fém. A. − 1. Attachement tenace d'une personne à ses idées, à ses résolutions, à ses entreprises en dépit des difficultés qu'elle rencontre. Synon. entêtement.Cette obstination imperturbable avec laquelle l'Anglais ou l'Allemand marchent à leur but, sans tomber ni se détourner, n'est pas à l'usage des Français (J. de Maistre, Corresp.,t.1, 1804, p.126).J'ai mis tant d'obstination... d'entêtement même!... à trouver un jeune collaborateur, ardent, enthousiaste! (Bernanos,Imposture,1927, p.414): 1. Il y a eu des années où Durkheim a édifié son oeuvre et répandu son enseignement, avec une grande obstination, avec une grande rigueur autoritaire, en donnant à cette oeuvre les allures vénérables de la science...
Nizan,Chiens garde,1932, p.191. [Avec compar. caractérisante] Cet homme qui s'arrange pour vivre dans mon ombre, pour mettre ses pas dans l'empreinte des miens, avec une obstination de chien (Colette,Vagab.,1910, p.79).− En partic. Insistance. L'épicière m'observe avec attention et je remarque que son regard s'attache à ma taille, à mon ventre, avec une obstination gênante (Mirbeau,Journal femme ch.,1900, p.63). 2. Péj. Attachement excessif, irraisonné à une résolution, à une entreprise. Obstination aveugle, désespérée, exaspérante, farouche, féroce, imbécile, intraitable, puérile, stupide; obstination d'ivrogne. Il aurait pu parler ainsi pendant des heures, il se serait toujours buté à la même obstination fermée, inébranlable (A. Daudet, Nabab,1877, p.134).Claude répondait sèchement, avec l'obstination de l'idée fixe, qui dédaigne même à donner des raisons (Zola,OEuvre,1886, p.282). − [Avec compl. prép. contre] Quelque chose d'irritant, c'est son obstination sourde, hostile, contre tout ce qui est raisonnement (Goncourt,Journal,1870, p.556). B. − P. méton. Comportement, manière d'agir qui dénote ou met en oeuvre cette qualité. Fléchir dans son obstination; vaincre l'obstination de qqn. Opposant à nos offres une obstination souriante, il ne but pas (Benoit,Atlant.,1919, p.65).L'habitude de subordonner de bien loin ce qui est vrai à ce qui est convenable, et la science à la politesse, est donc la plus ancienne en nous tous; beaucoup d'aveuglements, d'obstinations et de stériles controverses s'expliquent par là (Alain,Propos,1921, p.246): 2. Il y a entre les fureurs de 1793 et l'obstination patiente des partis opposés en 1827 la différence qu'il y a entre des boxeurs qui risquent de se tuer et des joueurs d'échecs attentifs, mais patients qui se disputent la victoire et soutiennent des paris importants.
Delécluze,Journal,1827, p.400. − [Avec compl. prép.] ♦ Obstination à + inf.Il n'y avait plus de place dans le coeur de tous que pour un très vieil et très morne espoir, celui-là même qui empêche les hommes de se laisser aller à la mort et qui n'est qu'une simple obstination à vivre (Camus,Peste,1947, p.1430). ♦ Obstination dans + subst.Tu manques la plus belle occasion de fortune qui puisse se présenter de ta vie entière à un ouvrier de Granville, et cela par ton obstination dans d'extravagantes amours (Nodier,Fée Miettes,1831, p.95). Prononc. et Orth.: [ɔpstinasjɔ
̃]; pour [ɔsti-] v. obstiné. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Fin du xiies. (Sermons S. Bernard, 6, 9 ds T.-L.). Empr. au lat. class. obstinatio «constance, persévérance, fermeté», dér. de obstinare (v. obstiner). Fréq. abs. littér.: 720. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 662, b) 841; xxes.: a) 1540, b) 1118. |