| MORTIFICATION, subst. fém. A. − 1. MÉD., PATHOL. Processus d'altération, de décomposition d'un tissu par la mort des cellules; état qui en résulte. Synon. nécrose.Sous le nom de processus gangreneux ou putride (...), nous entendons un ensemble de troubles dont l'évolution amène à la fois l'inflammation, la mortification et la putréfaction des tissus (A. Veillon dsNouv. Traité Méd.fasc. 1 1926, p.361). ♦ Mortification pulpaire. ,,État de la pulpe d'une dent, pathologique, spontané ou provoqué, amenant la perte de la vitalité pulpaire`` (Méd. Biol. t.2 1971). 2. ART CULIN. ,,Action de garder certaines viandes pour qu'elles deviennent tendres et gagnent du fumet`` (Ac. 1878, 1935). B. − 1. Dans le vocab. relig. et moral a) Acte volontaire par lequel on s'inflige une souffrance corporelle ou morale dans un souci de pénitence ou d'élévation spirituelle. Mortification extérieure, intérieure; faire qqc. par mortification, par esprit de mortification. [Saint François de Sales] avait cherché bien moins la mortification de la chair que celle de la volonté (Sainte-Beuve,Port-Royal,t.1, 1840, p.244).Les mortifications sont de l'esprit plus que du corps, à la Visitation, et celles du corps sont prévues (Jouve,Paulina,1925, p.179).V. aussi austérité ex. 4. − P. métaph.: 1. Je n'avais, à admirer le maître de Bayreuth, aucun des scrupules de ceux à qui, comme à Nietzsche, le devoir dicte de fuir, dans l'art comme dans la vie, la beauté qui les tente, qui (...), par ascétisme spirituel, de mortification en mortification parviennent, en suivant le plus sanglant des chemins de croix, à s'élever jusqu'à la pure connaissance et à l'adoration parfaite du Postillon de Longjumeau.
Proust,Prisonn.,1922, p.159. − En partic. Pratique d'ascétisme, privation ou souffrance infligée à la chair. Synon. macération.L'abstinence et la mortification sont des vertus de barbares et d'hommes matériels, qui, sujets à de grossiers appétits, ne conçoivent rien de plus héroïque que d'y résister (Renan,Avenir sc.,1890, p.403): 2. Les hommes de la Renaissance pensaient n'exhumer que des statues grecques ou romaines. Ce qu'ils exhumaient, en réalité, c'était le corps humain que le Moyen Âge avait voulu enfouir à force de prières et de mortifications. La Renaissance a déterré le vieil homme.
Green,Journal,1941, p.172. b) P. anal. Événement malheureux considéré comme une épreuve donnée par Dieu. Clotilde, qui n'avait jamais vu un Allemand, considérait l'invasion du territoire comme l'une de ces mortifications dont l'histoire est remplie et qui entrent dans les desseins de la Providence (Chardonne,Femmes,1961, p.42). 2. Blessure d'amour-propre, humiliation, vexation. Kalinowski (...) déjà irrité de longue main contre Chmielnicki, saisit avec joie l'occasion de lui infliger soit un châtiment, soit du moins une mortification (Mérimée,Cosaques d'autrefois,1865, p.227).Je jugeai alors qu'il fallait renoncer à lire mon discours, dont personne ne réclamait la suite: ce qui me causait une mortification cruelle (A. France,Vie fleur,1922, p.424). Prononc. et Orth.: [mɔ
ʀtifikasjɔ
̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 1200 terme de spiritualité «action de mourir à soi-même, dans la perspective de la mort corporelle, en relation avec la mort et la résurrection du Christ» (Moralium in Job ds Dialogue Grégoire, éd. W. Foerster, p.322); xives. «ascèse quotidienne» (Précept. pieux, ms. Charleville, 100 ds Gdf. Compl.: vivre ... en mortification et atrempance); 2. 1627 «contrariété, chagrin que l'on fait éprouver à une personne» (Lettres de Peiresc aux frères Dupuy, 8 déc., éd. Ph. Tamizey de Larroque, t.1, p.428). B. 1. 1552 «état d'un tissu, d'un organe qui se décompose» (Paré, Traicté des causes, signes ... de gangrene et mortification ds
Œuvres, éd. J.-F. Malgaigne, X, 11, t.2, p.210, note 2); 2. 1845 art culin. (Besch.). Empr. au lat. mortificatio, dans la lang. chrét. «mise à mort, mort; mort spirituelle [du vieil homme, du péché]»; «répression, mortification [voluntatum, carnis]»; à l'époque médiév., terme de méd. en 1250 ds Latham. Fréq. abs. littér.: 220. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 284, b) 357; xxes.: a) 402, b) 259. |