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MARCHANDISE, subst. fém.
A. − Gén. au plur.
1. Tout produit (denrées, matières premières, objets manufacturés) susceptible d'être acheté ou vendu, en gros ou au détail. Rétablissez le troc et l'échange, donnant-donnant, café contre marchandises, des armes, des machines, des bateaux, des avions, du drap, de la verrerie, des souliers (Cendrars,Bourlinguer,1948, p. 366):
1. ... ils portent [les ânes] sur les flancs de vastes poches de chanvre, (...) bourrées de marchandises: raisins, légumes, poteries, sacs de farine, moutards, charbon de bois, ou de grandes jarres d'eau alignées par trois. T'Serstevens,Itinér. esp.,1933, p. 22.
SYNT. Marchandises avariées, étrangères, exportées, précieuses, prohibées, solides; belles, bonnes marchandises; marchandises de contrebande, d'exportation, d'occasion, de pacotille; acheter, débarquer, décharger, échanger, étaler, livrer, transporter, vendre des marchandises; chargement, circulation, stock, tarif, transport de(s) marchandises.
En appos. [Lang. techn. des transp., de la manutention] Le transport marchandises (Pineau, S.N.C.F. et transp., 1950, p. 82).Le trafic marchandises (Lesourd, Gérard,Hist. écon.,1966, p. 571).
[Opposé à voyageurs] Gare de marchandises. Entre les trains réglementaires, on lançait souvent des trains de marchandises imprévus, surtout aux époques des grands arrivages (Zola,Bête hum.,1890, p. 219).
Marchandises sèches
[P. oppos. à liquide] Tout produit vendu en magasin en dehors des liquides (vins, huiles, etc.). Le transport par voie maritime, tant à l'importation qu'à l'exportation des marchandises sèches (...) a évolué depuis la guerre (M. Benoist, Pettier,Transp. mar.,1961, p. 66).
Région. (France et Canada). [P. oppos. à toute l'alimentation] Articles de bazar, mercerie, nouveautés. Plusieurs sont sous l'impression que «marchandises sèches» est la traduction de l'anglais «dry goods» (...). On veut lui substituer «nouveautés» (...). À mon avis «mercerie» vaudrait mieux (Dionne1969).
MAR. Denrées et objets composant la cargaison d'un navire et faisant l'objet de certaines réglementations. Marchandises dangereuses, flottantes, pondéreuses:
2. ... il y a lieu de considérer principalement les marchandises de base, celles qui sont transportées par voie maritime en quantités toujours importantes, dont le poids est élevé par rapport au volume, et qu'on appelle pour cela des «pondéreux». Il s'agit essentiellement du charbon, des minerais, des céréales. M. Benoist, Pettier,Transp. mar.,1961p. 43.
2. DROIT
a) CIVIL. Tout objet mobilier soumis à un commerce, à l'exception des denrées alimentaires. Le gouvernement du roi Charles conquit vraiment la Normandie (...) en faisant avec elle le commerce des marchandises et l'échange des denrées (A. France,J. d'Arc,t. 2, 1908, p. 441).
b) COMM. Objets mobiliers faisant partie d'un fonds de commerce et donnant lieu à un inventaire annuel. La masse des créanciers (...) s'empara des instruments de travail qui nous restaient, magasin, marchandises, mobilier, valeurs de toute nature (Reybaud,J. Paturot,1842, p. 450).
3. Au sing., avec une valeur de collectif. Ensemble des produits proposés à l'achat ou à la vente. Une marchande d'œillets, qui, au lieu de vendre ses bouquets, les jetait dans la Seine (...). Cette manière de débiter sa marchandise m'étonne (Dumas père, Chev. Maison-Rouge,1847, ii, 9, p. 73):
3. Aujourd'hui, le négociant n'a plus qu'un but, exploiter l'ouvrier, fabriquer de la camelote, tromper sur la qualité de la marchandise, frauder sur le poids des denrées qu'il vend. Huysmans,Là-bas,t. 1, 1891, p. 190.
Fétichisme de la marchandise (v. fétichisme B 2).
Locutions
a) Crier sa marchandise. [S'applique surtout aux marchands forains] Vanter ses produits d'une voix forte. Un vieux nègre qui tirait une charrette pleine de melons d'eau et criait sa marchandise d'une voix mélancolique (Green,Moïra,1950, p.7).
b) Étaler sa marchandise. Exposer ses produits pour les vendre. Au fig. Greuze n'étale pas toujours sans honte sa marchandise sentimentale (Faure,Espr. formes,1927, p. 132).
c) Faire valoir, (savoir vendre, vanter) sa marchandise. Vanter les qualités de la marchandise pour mieux la vendre. Au fig. Mettre ses propres mérites en avant, tourner une situation à son avantage. [Il] ne commençait plus une histoire sans sourire de la drôlerie de celle-ci, de peur qu'un air sérieux ne fît pas suffisamment valoir sa marchandise (Proust,Sodome,1922, p.872).
B. − P. anal. Personne ou objet considéré comme un produit de commerce que l'on peut acheter, vendre ou échanger.
1. Péj. [Appliqué à une pers. ou à un collectif] − Vous avez des passagers? − Pas de passagers. Jamais de passagers. Marchandise encombrante et raisonnante (Verne,Tour monde,1873, p. 191).
En partic. Prostituée, faisant commerce de son corps. Les hommes qui achètent l'amour examinent la marchandise avant de la prendre (Dumas fils, Dame Camélias,1848, p.279):
4. Ce sont les éternelles, inconscientes et sereines prostituées qui livrent leur corps sans dégoût, parce qu'il est marchandise d'amour, qu'elles le vendent ou qu'elles le donnent, au vieillard qui hante les trottoirs avec de l'or dans sa poche... Maupass.,Contes et nouv.,t. 1, Soir, 1889, p. 1143.
2. [Appliqué à un inanimé abstr.] Faut-il que je vous dise Que c'est de la vertu faire une marchandise Qu'étaler au grand jour le bien qu'on dut cacher (Laya,Ami loix,1793, ii, 1, p.25).
C. − P. méton., vieilli. Faire marchandise de. Faire commerce, trafic de. Je ne dois rien à qui que ce soit, je n'ai jamais fait marchandise de rien (Hugo, Corresp.,1845, p. 625).
Faire métier et marchandise (de). V. métier I C 4.
Prononc. et Orth.: [maʀ ʃ ɑ ̃di:z]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 1160-74 marcheandise «ce qui est meuble et objet de commerce» (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, III, 11140); b) ca 1165 marceandise «négoce, commerce, trafic» ([Chrétien de Troyes], G. d'Angleterre, éd. M. Wilmotte, 2005); 1538 train de marchandise (Est., s.v. negotiari); c) 1835 le pavillon couvre la marchandise «les navires belligérants doivent respecter les navires marchands qui portent le pavillon d'une puissance neutre» (Ac.); 1893 «telle chose, telle action a pour garantie le nom de celui qui l'a produite, de l'endroit d'où elle vient» (souvent ironique ou en mauvaise part) (DG); 2. 1538 faire estat et marchandise à «faire quelque chose, avoir l'habitude de» (Est., s.v. quaestus); 1563 faire mestier et marchandise (de dévotion) «en faire trafic (terme de mépris)» (Calvin, Serm. sur la prem. à Timothee, 48 [LIII, 570]); 1566 Faire mestier et marchandise de qqc. «s'occuper habituellement de faire son ordinaire de» (H. Estienne, Conformité, II, 2, p. 165 ds Hug.); 3. 1594 estaler sa marchandise (Satyre Ménippée, éd. Ch. Read, p. 136); 1640 faire valoir sa marchandise «en faire remarquer les qualités» (Oudin Curiositez); 1873 vanter sa marchandise (Lar. 19e). Dér. de marchand*; suff. -ise* (cf. a. fr. marcheandie «ce qui est meuble et objet de commerce», ca 1160, Eneas, éd. J. J. Salverda de Grave, 454). Fréq. abs. littér.: 1 300. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 3164, b) 1 254; xxes.: a) 1 653, b) 1 161. Bbg. Breslin (M. S.). The Old Fr. abstract suffix -ise. Rom. Philol. 1969, t. 22, p. 419. _ Flutre (L. F.). De Qq. termes de la langue commerciale... des 17eet 18es. R.Ling. rom. 1961, t.25, p.282.