| MANIQUE, MANICLE, subst. fém. I. − [La manique est une protection ou une entrave] A. − HISTOIRE 1. Brassard métallique dont les gladiateurs se protégaient le bras droit et les archers le bras gauche. Sa main droite (...) portait la manicle de cuir comme le ceste des lutteurs (Giono, Eau vive, 1943, p. 204). 2. Au xves. forme de manche recouvrant la main jusqu'à la première phalange des doigts (d'apr. Leloir 1961). B. − Moderne 1. Gant de ménage, généralement recouvert d'amiante, utilisé pour se protéger de la chaleur excessive des plats, casseroles, etc. Une barre latérale pourvue de crochets pour y suspendre maniques, etc. (Femmes d'aujourd'hui, 1981, no10, p. 83). 2. TECHNOLOGIE a) Gant de cuir très résistant dont certains artisans et ouvriers se protègent les mains pendant leur travail (d'apr. Mots rares 1965): 1. ... il [le cordonnier] prend sur son établi un objet de cuir qu'on appelle la manicle [it. ds le texte] et il en arme ses mains. C'est exactement le ceste des gladiateurs romains. Quelquefois d'ailleurs le ceste s'appelait aussi manicle [it. ds le texte]. C'est une mitaine de cuir; elle protège la paume de la main. C'est de là qu'il va pousser l'alène. C'est sur la manicle qu'il enroulera le ligneul à chaque brassée pour serrer durement le point. Le voilà donc qui revêt son armure.
Giono, Triomphe vie, 1941, p. 76. b) ,,Demi-gant du savetier`` (Esn. 1966). − P. méton. ♦ Métier de savetier. C'est un château galant, trianon germanique, qu'un bottier de Cassel, laissant là sa manique, construisit en l'honneur des grâces (Glatigny, Fer rouge, 1870, p. 34). ♦ Spécialisation dans un métier, habileté à le pratiquer. Parler manicle; avoir de la manicle. Il lui a vendu pour une bonne somme un ustensile de ménage, en vermeil, assez joliment tortillé pour un homme qui n'est pas de la manique (Balzac,Goriot,1835, p. 52). − Expr. Tirer la manique. ,,Faire le métier de cordonnier`` (Hautel t. 2 1808). Sentir la manicle. ,,Sentir le cuir ou toute autre odeur d'atelier`` (Delvau 1866, p. 239). c) ,,Anneau de pied du forçat, rivé, auquel est fixée la chaîne`` (Esn. 1966). Synon. manille2.River la manicle: 2. Obligé d'envoyer dans une jambe plus de force que dans l'autre pour tirer cette manicle [it. ds le texte], tel est le nom donné dans le bagne à ce ferrement, le condamné contracte invinciblement l'habitude de cet effort.
Balzac, Splend. et mis., 1847, p. 539. − Expr. Frères de la manicle. ,,Voleurs, forçats accouplés`` (Esn. 1966). 3. Au fig. Manège, manigance, habileté à faire quelque chose. J'ai bien l'horreur du bigotisme et des maniques pieuses, mais je ne me sens pas attiré, tout en les admirant, vers les phénomènes de la mystique (Huysmans,En route, t. 1, 1895, p. 172). − Expr. Il entend la manicle. ,,Il est adroit, rusé`` (Hautel t. 2 1808). II. − [La manique est un prolongement de la main] Poignée de quelques instruments. A. − ,,Manche que le tondeur de drap tient à la main pour faire mouvoir les forces dont il se sert`` (Mots rares 1965). B. − Poignée de la brosse dont se servent les cochers (d'apr. DG). C. − Manche utilisé par le fabricant de porcelaine pour soulever les couvercles des fourneaux (d'apr. Lar. Lang. fr.). Prononc. et Orth.: [manik], [-nikḽ]. Ac. 1694: manicles; 1762 et 1798: -que; 1835 et 1878 ,,manicle voyez manique``; 1935: -que. Les 2 formes dans les dict. du xixeet xxes. Étymol. et Hist. 1. Ca 1165 «partie de l'armure qui couvrait l'avant-bras et la main» manicle (Benoît de Sainte-Maure, Troie, 14154 ds T.-L.); 2. 1384 «menottes» menicles (Arch. JJ 125, pièce 120 ds Gdf.); 3. 1615 «corporation» être de la menicle (Gabriel Le Bien-Venu, Foucade aux Estats, 19-20 ds Quem. DDL t. 19.); 1750 «métier de cordonnier» manique (J.-J. Vadé, Le Paquet de mouchoirs, p. 39); 4. technol. 1680 «manchon de protection de certains ouvriers» (Rich.); 1723 «manche que le tondeur de drap tient à la main» manicle (Savary). Empr. au lat. manicula «petite main; mancheron de la charrue», dimin. de manus «main». Bbg. Sain. Arg. 1972 [1907], pp. 175-176. |