| MÉTIER, subst. masc. I. A. − Activité manuelle ou mécanique nécessitant l'acquisition d'un savoir-faire, d'une pratique. Métiers du bois; du bâtiment; Conservatoire, École des Arts et Métiers. L' ennoblissement, n'étoit pour une famille que le passage de la condition privée à l'état public, puisque la famille renonçoit à exercer des professions domestiques, arts ou métiers, pour se dévouer exclusivement à la profession publique de juger et de combattre (Bonald, Législ. primit., t. 1, 1802, p. 325).Comme nous remontions la grande rue, elle fourmillait de monde; les gens de boutiques et de métiers descendaient leurs escaliers en dehors (Erckm.-Chatr.Hist. paysan, t. 1, 1870, p. 305). − HIST., fréq. au plur. Organisation réglementant une activité précise sous l'Ancien Régime, en particulier le savoir-faire, l'apprentissage, la hiérarchie, les droits et devoirs concernant les personnes exerçant cette activité. Synon. corps de métier.Registre des métiers; bannières des métiers; grands et petits métiers. Il n'y avait qu'à prendre exemple sur le fief; et c'est ainsi qu'en effet s'organisèrent peu à peu les métiers, comme des fiefs industriels et commerciaux (Faral, Vie temps st Louis, 1942, p. 68). B. − P. ext. Occupation, profession utile à la société, donnant des moyens d'existence à celui qui l'exerce. Synon. activité, fonction, gagne-pain, (fam.) boulot.Tout ce que Mme Jeannin réussit à trouver, après mille efforts, fut une place de professeur de piano dans un couvent, métier ingrat et ridiculement payé (Rolland, J.-Chr., Antoinette, 1908, p. 869).Il est vrai que l'on choisit moins un métier qu'un genre de vie en rapport avec une histoire psychique personnelle (Mounier, Traité caract., 1946, p. 93): 1. Lui, était d'une intelligence très vive, très déliée, honnête même, ayant l'amour de son métier, grisé de sa toute-puissance, qui le faisait, dans son cabinet de juge, maître absolu de la liberté des autres.
Zola, Bête hum., 1890, p. 73. SYNT. Métier dangereux, ennuyeux, fatigant, honnête, indépendant, lucratif, qualifié, pénible; beau, bon, dur métier; (fam. ou pop.) foutu métier; le pire, le dernier des métiers; métier de chien, de cochon; métier manuel, intellectuel; les joies, les nécessités, les risques du métier; les jalousies, les roueries du métier; l'ABC, les ficelles, les secrets, les tours du métier; les métiers d'art, de la guerre, de la mer, de la terre; argot, jargon de métier; apprendre, exercer un métier; aimer, connaître, faire, savoir son métier; faire tous les métiers; chercher, prendre, trouver un métier; avoir un métier dans les mains; gâcher, gâter, lâcher, quitter le métier; être du métier; être rompu au métier; entrer dans le métier; parler métier. P. anal. Rôle dévolu, activité propre à un animal, un inanimé. Et puis, c'était une lune voilée, brouillée, flasque, veule. Elle faisait quand même son métier de lune, elle tournait (Vogüé, Morts, 1899, p. 420).Ne lui faites pas de mal! C'est un bon chien et qui sait son métier! C'est lui qui nous aide à vivre par son travail (Claudel, Tobie et Sara, 1940, i, 4, p. 1235).− Locutions ♦ Subst. (désignant une activité) + de son métier.Synon. de son état.Brunetto Latini, notaire de son métier, était érudit et subtil; de moeurs contre-nature, si l'on en croit Dante, qui d'ailleurs l'accable de respect (Paulhan, Fleurs Tarbes, 1941, p. 215).Moi, je suis menuisier de mon métier. Oui, menuisier, monsieur, reprit-il comme le petit homme levait sur lui un regard plus attentif (Roy, Bonheur occas., 1945, p. 185). ♦ Subst. + de/par métier.[P. oppos. à activité de loisir ou amateur, avec valeur d'adj.] Activité régulière dont on vit. Anton. amateur.Le docteur Lanze est non seulement un médecin par métier, il l'est encore et surtout, par passion (Gobineau, Pléiades, 1874, p. 65).Nous, soldats de métier, nous sommes soldats, quand il s'agit de nous imputer tant de fautes de guerre ou d'avant-guerre; nous sommes «nation armée», quand on veut trouver que ça n'a pas encore trop mal marché (Barrès, Cahiers, t. 11, 1917, p. 221): 2. Semblable au paysan qui fait sa tournée dans son domaine et qui prévoit, à mille signes, la marche du printemps, la menace du gel, l'annonce de la pluie, le pilote de métier, lui aussi, déchiffre des signes de neige, des signes de brume, des signes de nuit bienheureuse.
Saint-Exup., Terre hommes, 1939, p. 154. Armée de métier. Armée régulière composée de militaires de profession. L'armée du Directoire, devenue une armée de métier, reprit, par cet afflux qui entraînait un nouvel amalgame, un peu du caractère populaire de celle de l'An II (Lefebvre, Révol. fr., 1963, p. 533).− Expressions ♦ (À) chacun son métier. Chacun doit faire ce qu'il a à faire. Moi, je ne m'occupe que de vous, de votre bien-être; c'est mon devoir. Que chacun fasse le sien... Chacun son métier, comme on dit (Scribe, Bertrand, 1833, ii, 2, p. 150). ♦ Il n'y a pas de sot métier. Tout métier a son utilité. Y a pas de sots métiers et y a du bon monde dans tous les états... Mais vous êtes une personne rangée. Vous serez riche sur vos vieux jours (A. France, Crainquebille, 1905, p. 3). C. − P. anal. 1. Occupation, activité permanente s'apparentant à un métier par son utilité sociale, le savoir-faire ou le mode d'existence qu'elle implique. L'influence de la religion se fit nettement sentir dans le sentiment élevé qu'il eut de son devoir, dans la manière admirable dont il allait exercer son métier de roi (...) et de roi chrétien (Grousset, Croisades, 1939, p. 112).Le métier de prêtre lui apparaissait comme le plus beau qui fût et il ne doutait pas de se rapprocher maintenant de la lumière qu'en secret il avait toujours cherchée, du bien qu'il avait désiré toujours (Queffélec, Recteur, 1944, p. 138). 2. Rôle social, intellectuel, politique joué dans la société. Le métier d'homme, de femme, de jeune fille. L'avidité consiste à ravir le bien d'autrui par violence ou par souplesse, comme dans les deux nobles métiers de conquérant et de courtisan (Destutt de Tr., Comment. Espr. des lois, 1807, p. 358).Il faut que je me mette à mon métier de père de famille, que je marie mon Hortense et que j'enterre le libertin (Balzac, Cous. Bette, 1846, p. 73). ♦ Loc. adv. À ce métier. À ce genre d'existence, d'occupation. À ce métier-là, avec les visites à recevoir et à rendre, je n'aurais pas vu mon enfant de la journée et je n'aurais pas aperçu les Pyrénées (Sand, Hist. vie, t. 4, 1855, p. 22). 3. Activité malhonnête, dégradante, exercée habituellement et réprouvée par la société. Métier de voleur, de proxénète. L'avocat général a déclaré aux jurés que de notoriété générale le témoin exerçait le métier de souteneur (Camus, Étranger, 1942, p. 1191).Le boiteux dessina quelque chose sur un bout de papier. «Voilà ce qu'il faut faire et se laisser faire dans le métier de courtisane» (Beauvoir, Mém. j. fille, 1958, p. 269). ♦ En partic. Le plus vieux métier du monde. La prostitution. Le «plus vieux métier du monde» existe aussi en Union soviétique, même s'il est officiellement dénoncé comme une «survivance du passé» et une tare «caractéristique du monde capitaliste» (Le Matin, 17 sept. 1981, p. 23, col. 4). ♦ Loc. Faire métier de + subst. Tirer un profit malhonnête, immoral de quelque chose. Tous ces hommes qui font métier de funérailles (Picard, Avent. E. de Senneville, 1813, i, p.170).Elle avait une âme, elle souffrait de son état et de faire métier de son corps (Arnoux, Juif Errant, 1931, p.129).Au fig. Faire métier et marchandise de. Tirer profit de l'exploitation malhonnête d'un sentiment, d'un idéal. Maudit soit, m'écriai-je, le premier qui s'est avisé de faire de l'horreur métier et marchandise! Maudit soit la nouvelle école poétique avec ses bourreaux et ses fantômes! (Janin, Âne mort, 1829, p. 87).Évitons de faire métier et marchandise des mystérieuses allégresses et des ineffables émotions de notre vie religieuse (Amiel, Journal, 1866, p. 128). 4. Manière d'être habituelle ou temporaire. Il se rend de là chez mon mari, et lui dit qu'il croit devoir l'avertir que je fais le métier de confidente, de complaisante, et que j'ai favorisé les amours de sa femme (Sénac de Meilhan, Émigré, 1797, p.1772).Les hommes, maintenant, penchent vers Geneviève leurs plastrons blancs et font leur métier de séducteurs, comme si l'on gagnait la femme avec des idées (Saint-Exup., Courr. Sud, 1928, p. 23): 3. Ce monsieur Ganguernet, est de Pamiers, où, jusqu'à présent, il a toujours vécu. Il sait tous les tours de son métier de farceur. Il est fort habile à attacher un morceau de viande à la chaîne des sonnettes de porte-cochère, afin que tous les chiens errants de la ville viennent sauter après ce morceau de viande, et éveillent les domestiques dix fois dans la nuit.
Soulié, Mém. diable, t. 2, 1837, p. 34. ♦ Loc. Faire métier de + inf. S'appliquer à, s'adonner à. Telle fut l'origine des magiciens, des prêtres intermédiaires entre l'homme et la divinité, des augures et des oracles interpretes de ses secrets, et en général de tous ceux qui, au nom des Dieux, ont fait métier de tromper les hommes, pour vivre à leurs dépens (Dupuis, Orig. cultes, 1796, p. 426).À lui, qui, débauché jusques à la folie Et dans les cabarets vivant au jour le jour, Aussi facilement qu'il méprisait la vie Faisait gloire et métier de mépriser l'amour! (Musset, Rolla, 1833, p. 25). D. − P. méton. Habileté, savoir-faire dans la production ou l'exécution manuelle ou intellectuelle acquise par l'expérience, la pratique que confère un métier ou une activité permanente. Ce qui prouve encore la puissance de M. Corot, ne fût-ce que dans le métier, c'est qu'il sait être coloriste avec une gamme de tons peu variée − et qu'il est toujours harmoniste même avec des tons assez crus et assez vifs (Baudel., Salon, 1845, p. 61).Elle ne vaut rien, rien du tout, continua Christophe. Elle n'a ni voix, ni goût, ni métier, pas l'ombre de talent (Rolland, J.-Chr., Foire, 1908, p. 779). − Péj. [P. oppos. à talent, génie dans le domaine artistique] Maupassant a du métier. Il réussit très bien la nouvelle Normande, et encore y a-t-il dans Monnier des choses plus drôles que son Cochon de Morin. Mais ce n'est pas un grand écrivain; ce n'est pas ce que nous appelons, nous, un artiste (Renard, Journal, 1892, p. 112). II. A. − TECHNOL. Métier ou métier à tisser. Machine servant à confectionner un tissu. Métier horizontal, vertical; métier manuel, mécanique; métier à crochets, à navette, à tirettes; tendre un métier. Ces insulaires sont de tous les peuples non civilisés que nous ayons visités (...) les seuls chez qui nous ayons vu des métiers de tisserand: ces métiers sont complets, mais assez petits pour être portatifs (Voy. La Pérouse, t. 4, 1797, p. 77).Le métier français comprend un premier système de fils qui, provenant de bobines placées sur un râtelier, se présentent à l'avant du métier sous forme d'une nappe verticale (Thiébaut, Fabric. tissus, 1961, p. 98): 4. On possède actuellement en France les plus belles manufactures de soieries et de draps qu'il y ait au monde: peut-être les doit-on aux sages encouragemens de Colbert. Il avança 2000 francs aux manufacturiers par chaque métier battant...
Say, Écon. pol., 1832, p. 189. − En partic. ♦ Métier à filer. Il manie le tire-ligne et dessine des épures (...): celle d'un engin à creuser les tranchées, d'une machine à scier et à polir le marbre, d'un métier à filer le chanvre (P. Rousseau, Hist. des techn. et des inventions, 1967, p. 242). ♦ Dans le domaine de la bonnet.Métier circulaire, métier à tricoter. Métier permettant la confection des bas et chaussettes et des ouvrages en maille. Mais si notre comparaison schématique entre le métier circulaire et les métiers rectilignes peut se concevoir assez aisément, il n'en demeure pas moins que des problèmes techniques importants se sont posés aux réalisateurs de tels métiers circulaires (Thiébaut, Fabric. tissus, 1961, p. 163). B. − Support rigide (cadre ou châssis) permettant de maintenir un ouvrage de couture. Métier à dentelle; dentelle au métier. Elle travaillait à un petit métier de tapisserie fort élevé (Stendhal, Rouge et Noir, 1830, p. 82).Madame de Beaupréau était dans un coin du salon, occupée à broder au métier (Ponson du Terr., Rocambole, t. 1, 1859, p. 117). C. − Au fig. Mettre/avoir sur le métier. Entreprendre ou réaliser quelque chose, en particulier une oeuvre artistique. Il n'est jamais gêné par l'entrechoc et la mêlée des inspirations différentes: − «J'ai sur le métier, dans le même temps, des choses différentes, mais je suis sûr de ne confondre aucune avec les autres...» (Rolland, Beethoven, t. 1, 1937, p. 287). − [P. allus. aux vers de Boileau dans L'Art poétique] Vingt, cent fois remettre sur le métier. Recommencer plusieurs fois une chose pour atteindre la perfection. De tous ces préceptes, je doute si le plus dédaigné n'est pas celui qui nous enjoint de vingt fois sur le métier remettre notre ouvrage (Gide, Journal, 1946, p. 291): 5. Cent fois sur le métier remettez votre ouvrage et vous êtes à peu près sûr de l'achever comme on achève une bête qui va mourir. Toute spontanéité, tout élan, tout ce qui fait qu'un roman ou qu'une pièce vivent et respirent, voilà ce qu'on assassine en retravaillant certains textes.
Green, Journal, 1954, p. 238. ♦ Vieilli. [En parlant d'une pers., de ses sentiments, ses idées] Elle est tombée entre les mains des Révérends Pères Jésuites qui l'ont remise sur le métier, et l'ont travaillée à neuf, de façon qu'elle est plus catholique que le Pape (J. de Maistre, Corresp., 1804, p. 227).Nous avons des commandes pour plus de deux ans, sans compter les réputations qui sont sur le métier (Jouy, Hermite, t. 5, 1814, p. 150). III. A. − ART CULIN. Pâtisserie semblable aux oublies. Nous ne parlerons pas ici des métiers (...) qui sont autant de membres de la grande famille des gaufres (J. Mainzer, Français peints par eux-mêmes, t. 4, Le Pâtissier, 1841, p. 213). B. − BRASS. Liquide que l'on retire des cuves où l'on a fait bouillir le malt et le houblon. Le moût ou métier obtenu d'après l'un ou l'autre procédé (Wurtz, Dict. chim., t. 1, 1ervol., 1869, p. 117). REM. 1. Métière, subst. fém.,technol. Bassin d'épuration succédant au jas (v. jas3) dans les salines. Les eaux de la mer sont reçues dans des étriers (...), et, de là, par des vannes elles sont distribuées dans des écours secondaires. La même vanne alimente plusieurs marais (...) les eaux se rendent par un conduit en bois (...) dans le premier réservoir d'évaporation appelé métière (Enquête sur les sels, t. 1, Paris, Impr. Impériale, 1868, p.231). 2. Mestier, subst. masc.,orfèvr. Sorte de chandelier destiné à recevoir un flambeau; p. méton. le flambeau lui-même. Ces flambeaux carrés à quatre canons ne sont autre chose que le mestier, dont parlent, au XVesiècle Olivier La Marche, puis plus tard Nicot et Savary (Gayt. 21928). Prononc. et Orth.: [metje]. Ac. 1694, 1718: mestier, dep. 1740: mé-. Étymol. et Hist. I. 1. 881 lo Deo menestier «le service divin (spirituel, liturgique, pastoral)» (Eulalie, 10, ds Henry Chrestomathie, p. 3); 2emoitié xes. mistier (St Léger, éd. J. Linskill, 81: Et sancz Lethgiers fist son mistier, Missae cantat, fist lo mul ben; 103: Et sancz Lethgiers fist so mistier, Ewrui prist a castïer); 2. «fonction, service» a) ca 1050 (St Alexis, éd. Chr. Storey, 376); 1130-40 (Wace, Ste Marguerite, éd. E. A. Francis, 403: Au deable se retorna, Hardiement li demanda, Son nom et ses mestiers); ca 1165 (Guillaume d'Angleterre, éd. M. Wilmotte, 1824: ... uns forestiers Cui la baillïe et li mestiers Estoit de le forest garder); 1erquart xiiies. en parlant de la fonction de roi (Renclus de Molliens, Carité, 32, 7 ds T.-L.); b) ca 1170 femme de mestier «prostituée» (Marie de France, Lais, éd. J.Rychner, Guigemar, 515) [cf. ca 1170 dameisele menestrale «id.», Rois, éd. E. R. Curtius, III, III, 16, p. 117]; 3. exercice d'une profession, d'un art a) demandant un certain savoir-faire
α) 1160-74 en parlant du métier des armes (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, II, 3226); ca 1280 (Adenet le Roi, Cleomadès, éd. A. Henry, 16018: Car d'armes est teus li mestiers Que il i couvient aperté);
β) ca 1170 (Marie de France, Lais, Milun, 181: Jeo sui uns huem de tel mestier, D'oisels prendre me sai aidier); 1174-87 (Chrétien de Troyes, Perceval, éd. F. Lecoy, 5698: ... ovriers, Qui feisoient divers mestiers, Si com li mestier sont divers: cil fet hiaumes et cil haubers, Et cil lances et cil blazons) b)procurant une rémunération ca 1200 (Aiol, 971 ds T.-L.: Il vous aprendera quir a taillier; vous viverés mout bien de cest mestier); 4.ca 1165 «manière de procéder, d'agir, d'en user» (Benoît de Ste-Maure, Troie, 24094 ibid.); 5. a) ca 1180 genz de mestiers «ceux dont le métier exige des connaissances, les lettrés» (Proverbe au vilain, 229, 1 ds T.-L.); ca 1260 (Philippe de Novare, Quatre âges, éd. M. de Fréville, 213 : cil de mestier sont mout grant genz; car cil qui ont les soverains mestiers, ce sont prestres et clers); b) début xves. gens de mestier «artisans» (Livre des faicts du Maréchal de Boucicaut, ds Michaud et Poujoulat, Mém. relatifs à l'Hist. de Fr., II, 10, t. 2, p. 266b); fin xve-début xvies. gens de mestier «ouvriers» (Ballade des Haulx-Bonnets ds Anc. poésies fr., éd. A. de Montaiglon, t. 4, p. 332); 6. ca 1316 les mestiers «les gens de métier, les corporations» (Geffroy, Chron. métr. 5078 ds T.-L.). II. Ca 1200 «instrument servant à tisser les textiles» (Jean Renart, Escoufle, 4965, ibid.: uns mestier por gimples faire). Du lat. ministerium «fonction de serviteur [minister], service, fonction», spéc. «service divin» à l'époque class., puis, dans la langue chrét. «service de Dieu, ministère du service de Dieu; ministère de prêtre; sacerdoce; administration des sacrements»; du sens «service de la table» est issu, à basse époque et p. méton. ceux de «ustensile, objet de la table, vaisselle, vase» (anno 136 ds TLL s.v.) et de «mobilier» (viiie-ixes. ds Nierm.); du sens de «service» sont issus au Moy. Âge ceux de 1. «usage, besoin» (861-882, Hincmar de Reims ds Nov. gloss., s.v.), d'où le sens, usuel en a.fr., de «utilité, besoin» ca 1100 avoir mester [a aucun] «(d'une chose) être utile, servir à» (Roland, éd. J.Bédier 1742; début xiies. avoir mester d'aucune rien «d'une personne) avoir besoin de» (Benedeit, St Brendan, éd. E. G. R. Waters, 1484), 2.«métier, profession» (864, Capit. reg. Franc. ds Nov. gloss., s.v.), d'où est dér. celui de «corps de métier» (ca 961, Folcuin, ibid.). Mestier repose sur un lat. vulg. *misterium qui, plutôt qu'à une contraction de ministerium, est dû à un croisement avec le lat. mysterium dont les sens, dans la langue chrét., sont très voisins: «rites, célébration; les saints mystères, la messe» (cf. F. Blatt ds Arch. Lat. Med. Aev. t. 4, 192, p. 80-81 qui explique comment le ministerium et le mysterium se sont confondus dans la personne du prêtre, serviteur [minister] de Dieu, qui renouvelle le mystère [mysterium] du Christ): cf. mysterium au sens de ministerium ds Itala I Cor., XII, 5: divisiones mysteriorum «la diversité des ministères» [Vulgate: div. ministrationum] et veCommodien, Instr., II, 27, 1: mysterium Christi, zacones, exercite casti [= ministerium exercece] ds TLL, s.v mysterium, 1758, 12 sqq.; cf. également le lat. médiév. mysterium au sens de «table, étal» (anno 1116 ds Nov. gloss., s.v. mysterium (à rapprocher de ca 1200 mestier «table» ds T.-L.) et l'a.fr. mistere «métier» (doc. 1334 ds Gdf.). Fréq. abs. littér.: 4850. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 5053, b) 6223; xxes.: a) 8085, b)8117. Bbg. Gemmingen Arbeit 1973, p. 89. _ Thomas (A.). Nouv. Essais 1904, p. 133; pp.139-141, 144. |