| LEST, subst. masc. A. − MAR. Corps pesant chargé dans la partie basse de la cale, ou fixé au plus bas de la quille d'un bâtiment pour en assurer la stabilité. Gilliatt descendit dans la panse les deux caisses contenant les roues démontées (...). Ces deux caisses firent lest (Hugo, Travaill. mer,1866, p. 306).Sa coque [du garde-côtes américain Ratahdin], s'élève très peu au-dessus de la flottaison normale et peut, grâce à un lest d'eau, s'immerger au moment du combat (Croneau, Constr. nav. guerre, t. 1, 1892, p. 190): 1. Il [le lest] est en général composé d'un saumon de métal fixé au plus bas de la quille ou au bout d'un aileron. De la position du lest et de la proportion existant entre son poids et la flottabilité du bateau dépendant bien des performances et, bien souvent, la sécurité propre à tel ou tel yacht.
Barber. 1969. ♦ Lest fixe. ,,Masse métallique faisant partie intégrante du bateau`` (Soe-Dup. 1906). ♦ Lest mobile, volant. Gueuse, saumon placé en réserve dans les parties centrales d'un bâtiment. (Dict. xixeet xxes.). ♦ Sur (son) lest. Sans fret, sans chargement. Il [un brick] navigue sur son lest, et montre presque deux pieds de cuivre hors de l'eau (Sue, Altar-Gull,1831, p. 1).Pétroliers et porte-vins font nécessairement une traversée sur deux sur lest, c'est-à-dire à vide (Le Masson, Mar.,1951, p. 72).V. baptiser ex. 10. SYNT. Lest de cailloux, de galets, de pierres, de sable; lest en fonte, en plomb; lest métallique; garnir un bateau/un navire de lest; débarquer, embarquer du lest. − P. métaph. et au fig. Ce qui assure la stabilité, l'équilibre, ce qui sert à pondérer. Nous nous remettons à travailler. Nous nous sentons sortir de l'immense tristesse, qui nous a pris à notre retour (...). Il nous semble reprendre notre équilibre. Le travail est vraiment le lest de la vie (Goncourt, Journal,1864, p. 75): 2. Puisque voici Ferdinand VII qui s'embarque aussi à bord de la Liberté, c'est pour elle un lest suffisant. Quoi que fassent maintenant les vagues de l'absolutisme, elles n'abîmeront pas ce glorieux navire...
Mussetds Revue des Deux Mondes,1833, p. 203. B. − P. anal. 1. Masse fixée à un corps (pour en assurer l'équilibre, pour en augmenter le poids). On leur donne une position oblique ou horizontale [aux frayères] (...) et un lest en pierre sert à couler celles qui sont clayonnées (Code pêche fluv.,1875, p. 136).Dans la partie basse [du flotteur de la torpille Whitehead] (...) se trouve un lest composé d'une masse de plomb (Ledieu, Cadiat, Nouv. matér. nav.,1890, p. 661). 2. Corps pesant (généralement du sable contenu dans des sacs) fixé aux parois extérieures de la nacelle d'un aérostat, dont les aéronautes se débarrassent au moment opportun afin de contrôler l'ascension ou la descente du ballon. Sac de lest. À la fin d'une ascension [en ballon], (...) il faut garder une grande quantité de lest pour régler la descente (Marchis, Nav. aér.,1904, p. 349). 3. Nous descendons, très vite, (...) M. Mallet crie sans cesse : « Jetez du lest, jetez du lest! » et le lest qu'on précipite dans le vide, sable et pierres mêlées, nous revient dans la figure, comme s'il remontait (...) tant est rapide notre chute.
Maupass., Contes et nouv., t. 2, Voy. Horla, 1887, p. 1325. ♦ Loc. fig. Jeter, lâcher du lest. Faire des concessions, des sacrifices; prendre une attitude modérée afin de rétablir une situation compromise, de pallier un échec, d'éviter une catastrophe. Nos instructions (...) l'invitaient à jeter du lest et à ouvrir des négociations à Beyrouth et à Damas (De Gaulle, Mém. guerre,1956, p. 196).Si l'on veut résister au mécanisme, l'on est obligé en même temps de lâcher du lest et de trouver de meilleures réponses (David, Cybern.,1965, p. 19). C. − Produit alimentaire dont la valeur nutritionnelle est faible et qui permet d'assurer une bonne digestion des nutriments (d'apr. Clém. Alim. 1978). Prononc. et Orth. : [lεst]. Homon. leste. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1208 last « certaine quantité (d'un solide) » (Hist. de Liège, II, 389 ds Gdf.); 1282 lees (Reg. aux bans, Arch. S.-Omer, AB XVIII, 16, no578, ibid.); 1351 lest (Ordonnances des rois de France, t. 2, p. 440, cf. Gdf.); 2. 1473 Sud-Ouest last « poids dont on charge un navire pour en abaisser le centre de gravité et en assurer ainsi la stabilité » (doc. ap. K. Baldinger ds Mél. Flasdieck (H.M.), p. 34); 1611 lest (Cotgr.); 3. 1837 « corps pesant que les aéronautes emportent pour régler le mouvement ascensionnel de leur ballon » (Vigny, Journal poète, p. 1052). Empr., dans le nord du domaine d'oïl, au m. néerl.last « poids, charge » et à sa var. frisonne lest. L'a. gasc. et le fr. région. du Sud-Ouest ont emprunté le mot à l'angl. last, lest « id. » (cf. K. Baldinger, loc. cit., pp. 33-36). Cf. également les attest. de lastum, lestum, lesta en lat. médiév. (xiies.), dans le domaine angl., ds Latham et Nov. gloss. Fréq. abs. littér. : 78. Bbg. Behrens D. 1923, p. 71. - La Landelle (G. de). Le Lang. des marins. Paris, 1859, p. 272. |