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LÈSE(-),(LÈSE , LÈSE-) adj. fém. inv. antéposé et élém. de compos.
I. − Adj. fém. inv. antéposé. Lèse-majesté
A. − DR. ANC. (Crime de) lèse-majesté. Atteinte grave à la personne du souverain ou de la descendance royale, qui était punie de mort et entraînait la confiscation des biens du coupable. Criminel de lèse-majesté (Ac.). Le crime de lèse-majesté, si fertile jadis en applications, tend de plus en plus à disparaître (Durkheim, Division trav.,1893, p. 138):
Le duc fut ajourné au Parlement, n'y comparut point et fut condamné par défaut, comme coupable de lèse-majesté; il fut banni et ses seigneuries déclarées en forfaiture. Barante, Hist. ducs Bourg., t. 3, 1821-24, p. 296.
En partic.
(Crime de) lèse-majesté divine. Atteinte à la divinité par apostasie, hérésie, sortilège, simonie, sacrilège ou blasphème (d'apr. Marion Instit. 1923). Cette irrévérencieuse puissance, portant sur toute chose un œil ferme et scrutateur, est, par son essence même, coupable de lèse-majesté divine et humaine (Renan, Avenir sc.,1890, p. 45).
Crime de lèse-majesté humaine. Crime contre la personne physique du souverain ou contre l'État. Crime de lèse-majesté (humaine) au premier chef, au second chef (Ac.). P. anal. Seigneur capitaine, un crime de lèze-majesté humaine a été commis ce matin vis à vis la maison que vous habitez (Hugo, L. Borgia,1833, II, 1repart., 3, p. 87).
B. − P. anal. Atteinte portée à quelque chose ou à quelqu'un de respectable. En toute œuvre vénérée il y a lèse-majesté. Mais oui, par cela seul que ce n'est pas un tyran qui l'a faite (Alain, Propos,1930, p. 945).
P. méton., subst. masc. Mais Mozart parle trop à mon gré, et trop clairement. Je le taxerai, si l'on me permet ce lèse-majesté, de bavardage et de légèreté, de simplisme (Schaeffer, Rech. mus. concr.,1952, p. 165).
II. − Élém. de compos. entrant dans des constr. formées sur le modèle de lèse-majesté; indique que la réalité désignée par le 2eterme a subi une atteinte grave (de la part de qqn ou de qqc.).
A. − Littéraire :
lèse-humanité (crime de) .Atteinte à la nature humaine. Il doit y avoir une limite, au delà de laquelle la bêtise devient crime de lèse-humanité chez le détenteur d'autorité publique (Clemenceau, Vers réparation,1899, p. 546).
lèse-nation (crime de) .Atteinte aux intérêts de la nation. S'il fallait donner des exemples individuels, parmi les principaux criminels de lèse-nation, je citerais Bailly, Mottier, Brunville, Varien, Montlausier (Marat, Pamphlets, Dénonc. Malouet, 1790, p. 216).Démarche inconstitutionnelle et dangereuse qui seroit déjà punie comme un crime de lèze-nation (Robesp., Discours, Guerre, t. 8, 1791, p. 53).
lèse-patrie (crime de) .Atteinte aux intérêts de la patrie. Qu'ils osent donc arrêter la grande œuvre à la veille du succès final, et l'on verra comment la France jugera ce crime de lèse-patrie! (Vogüé, Morts,1899, p. 288).Expliquez-vous donc. Vous nous parlez, Hennedyck, de crime de lèse-patrie! C'est un gros mot (Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 132).
lèse-religion (crime de) .Atteinte aux dogmes et aux croyances professés par une religion. Que le roi très-chrétien ne se trompe point, et qu'il ne croie pas que sa conscience soit pure et déchargée du crime de lèse-religion, pour quelques sentiments de piété qui passent pour lui être ordinaires (Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 1, 1840, p. 307).Encore les révolutions politiques paraissaient-elles moins terribles que ce crime de lèse-religion, dont le salut de la cité pouvait dépendre (Louÿs, Aphrodite,1896, p. 195).
B. − [Constr. rares et plais.] :
lèse-âme. La censure, quelle qu'elle soit, me paraît une monstruosité, une chose pire que l'homicide; l'attentat contre la pensée est un crime de lèse-âme (Flaub., Corresp.,1852, p. 59).
lèse-amour. Une femme a-t-elle jamais pardonné de semblables crimes de lèse-amour? (Balzac, Lys,1836, p. 273).
lèse-beauté. Aussi l'Espagnol se tint-il, l'espace d'une seconde, le raisonnement suivant : « Voilà une femme fort belle et qui me plaît fort. Ne pas l'aimer serait un crime de lèse-beauté (...). » (Ponson du Terr., Rocambole, t. 4, 1859, p. 205).
lèse bric-à-brac.La revente, dans les salles de la rue des Jeûneurs, aux coups de marteau des commissaires-priseurs, lui semblait un crime de lèse bric-à-brac (Balzac, Cous. Pons,1847, p. 10).
lèse-capitalisme. Leur rapport est allé directement à la trappe (...). On s'y attendait d'ailleurs depuis les remous provoqués il y a un an, presque jour pour jour, par la remise de leur rapport intérimaire, déjà entaché du péché de lèse-capitalisme (Le Nouvel Observateur,23 août 1976, p. 20, col. 1).
lèse-captivité. Il y a mieux : aux termes des nouvelles lois légitimistes, la danse, qui n'était qu'un délit avant l'arrestation de madame la duchesse de Berry, est maintenant un crime de lèse-captivité (Mussetds R. des Deux Mondes,1833, p. 326).
lèse-égoïsme. Vous voulez donc qu'on vous montre au doigt, quand vous entrerez dans un salon! − Je vous dénoncerai comme coupable de lèse-égoïsme, à la société moderne (Villiers de L'I.-A., Corresp.,1859, p. 35).
lèse-éloquence. Son vrai crime, aux yeux des honnêtes gens, est de lèse-éloquence. Moins beau parleur, on lui permettrait de quitter la place (Bremond, Hist. sent. relig., t. 4, 1920, p. 314).
lèse-fraternité. Repentants ou non, tous les coupables de lèse-fraternité, Montbars, Yul, les Marseille (...) sont avertis par ma bouche (Cladel, Ompdrailles,1879, p. 157).
lèse-génie. Je suis allé payer pour toi le bédouin qui a commis un crime de lèse-génie en te coffrant (Balzac, Cous. Bette,1846, p. 126).
lèse-idéologie. À partir de combien de cadavres, de rescapés, de morts-vivants, de condamnés à la camisole psychiatrique pour crime de lèse-idéologie un bilan cesse d'être « globalement positif » (L'Express,12 janv. 1980, p. 53, col. 2).
lèse-louloute. Eh bien, monsieur, vous vouliez prêter à cette vieille horreur les deux cent mille francs de mon hôtel? En voilà un crime de lèse-louloute! (Balzac, Cous. Bette,1846p. 297).
lèse-manuscrit. Et si cette prévention en faveur de ma traduction peut me faire absoudre du crime de lèse-manuscrit, je me moque fort qu'après cela on la trouve bonne ou mauvaise (Courier, Lettre à M. Renouard,1810, p. 270).
lèse-masque. Il n'y a pas besoin de commettre un crime de lèse-masque, reprit Bixiou, la Torpille et Lucien vont revenir jusqu'à nous en remontant le foyer (Balzac, Splend. et mis.,1844, p. 23).
lèse-moi. Pour rien au monde je n'aurais voulu commettre devant lui le moindre délit de lèse-moi. Et voilà que je le trouve, soudain, la proie d'un affreux scrupule (Larbaud, Barnabooth,1913, p. 269).
lèse-nucléaire. La C-F-D-T a tenu à rappeler, à partir de ces faits, que le délit de lèse-nucléaire existe bel et bien en France (Le Nouvel Observateur,18 avril 1981, p. 42, col. 4).
lèse-nature. Je fais en ce moment grand effort de vision pour suivre votre enquête, et d'humilité pour me convaincre de mon crime de lèse-nature, puisque, je le comprends parfaitement, les phénomènes du clair-obscur comme ceux de la perspective, font partie de la nature visible, au même titre que les prés, les arbres, les nuages (Lhote, Peint. d'abord,1942, p. 15).
lèse-tabac. Sacré argent! Dire que je n'en ai pas! s'écria-t-il en jetant par terre sa pipe. Une pipe culottée est une pipe précieuse pour un fumeur; mais ce fut par un geste si naturel, par un mouvement si généreux, que tous les fumeurs et même la Régie lui eussent pardonné ce crime de lèse-tabac (Balzac, Chabert,1832, p. 72).
En partic. [Le 2eterme est un nom propre] :
lèse-Elzévir.J'avais cette fois le sentiment très-net de ma ruine définitive. Déjà coupable de mensonge et de lèse-Elzévir, aller encore enfoncer une porte, lire des livres défendus, puis m'échapper de ma prison (Toepffer, Nouv. genev.,1839, p. 112).
lèse-« Gross Deutschland ».Pour un peu Godasse eût prononcé le mot de sabotage, et il pensait certainement, dans sa stupidité fanatisée, qu'à s'essuyer trop généreusement les fesses, un prisonnier commettait le crime de lèse-Gross Deutschland (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 109).
Rare. [Le 2eterme est un adj.] :
lèse-syndical, -ale, -aux. Une déclaration gouvernementale (...) prévoit notamment un allégement fiscal pour le patronat et, crime lèse-syndical, la cogestion s'y trouve une fois de plus déformée (Le Point,10 janv. 1977, p. 41, col. 1).
Rem. La valeur d'adj. fém. n'est plus sentie : le 2eterme est parfois masc. (v. supra lèse-amour, lèse-égoïsme, etc.). En outre lèse(-) tend à être assimilé à une forme du verbe léser (v. en partic. supra lèse-moi).
Prononc. et Orth. : [lε:z]. Att. ds Ac. dep. 1694; 1694-1740 lese avec la rem. ,,quelques-uns l'écrivent avec un z``; 1762-1935 lèse. Étymol. et Hist. 1344 meffait de leze majesté (Actes norm. de la Chambre des Comptes, éd. L. Delisle, 1871, p. 317); 1354 criesme de lese majesté (Accord ds E. Deseille, Le Pays boulonnais, 1879, p. 281); 1580 criminels de lèze majesté humaine et divine (Montaigne, Essais, II, XIII, éd. A. Thibaudet et M. Rat, p. 563) p. anal. fam. 1673 un crime de lèse-faculté [d'Argan contre M. Purgon] (Molière, Malade imaginaire, III, 6); 1726 crime de lèze République (R.R.P.P. Catrou et Rouille, Hist rom., t. 5, p. 196). Calqué sur le lat. jur. [crimen] laesae majestatis (TLL t. 8, 156, 70 sqq.). Bbg. Bierbach 1982, pp. 274-279. − Dub. Pol. 1962, p. 331 (comp.). − Gohin 1903, p. 257 (comp.). − Quem. DDL t. 11 (comp.).