| JUGÉ, -ÉE, part. passé, adj. et subst. I. − Part. passé de juger*. II. − Emploi adj. − C'est un homme jugé (fam., péj.). ,,Homme dont on connaît le peu de mérite, le peu d'honnêteté`` (Ac. 1878-1935). − Bien jugé, mal appelé. [Formule figurant dans l'arrêt confirmant le jugement de la juridiction inférieure dont est fait appel] ♦ Mal jugé, bien appelé. [Formule employée lorsque l'arrêt infirme le jugement frappé d'appel] Emploi subst. Mon cher Dutacq, Ce pauvre garçon n'est pas coupable, et il y a mal jugé, nous triompherons (Balzac, Corresp.,1839, p. 703).Emploi subst. masc. sing. à valeur de neutre. Il a fallu distinguer l'erreur juridique, soumise à la censure du tribunal suprême, d'avec le mal jugé, soit en droit, soit en fait, qui échappe à cette censure (Cournot, Fond. connaiss.,1851, p. 439). − (La) chose jugée. Ce qui est décidé par sentence judiciaire. M. Dufour commet la grave impertinence de s'inscrire en faux contre la chose jugée, qui m'est acquise tant qu'il n'y aura pas appel (Balzac, Corresp.,1836, p. 106).Que nous objecte-t-on? La chose jugée...? (Clemenceau, Iniquité,1899, p. 209).On a préféré la loi et la chose jugée à M. Lescouvé. Ils ont préféré Dreyfus à tout (Barrès, Cahiers, t. 7, 1908, p. 107). ♦ L'autorité de la chose jugée. Qualité que possède la sentence à partir du moment où elle est rendue par le fait qu'elle met fin au litige de façon irrévocable. La Chambre, de son autorité, impose à une circonscription un représentant qu'un arrêt ayant la force de chose jugée déclare criminel (Barrès, Cahiers, t. 11, 1918, p. 390): 1. L'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même; que la demande soit fondée sur la même cause; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.
Code civil,1804, art. 1351, p. 245. III. − Emploi subst. masc. en loc. adv. Au jugé. Par approximation, sans avoir la possibilité de voir, d'entendre : 2. Aussi, le premier coup de canon de l'ennemi n'avait-il surpris personne, et les batteries françaises (...) s'étaient-elles mises aussitôt à répondre, pour faire acte de présence, car elles tiraient simplement au jugé; dans le brouillard.
Zola, Débâcle,1892, p. 207. − P. anal. Et depuis longtemps il avait pris l'habitude de ne plus travailler que de chic, de peindre au jugé avec l'acquis des souvenirs d'école (Goncourt, Man. Salomon,1867, p. 95). − Au juger (var. orth.). J'aperçois quelque chose qui file dans les roseaux; (...) je tire au juger; Agobar me rapporte une grosse poule d'eau (Dumas père, Chasse et amour,1825, 10, p. 47).Une charrette limonière, chargée de grosses pierres de taille et pesant au juger de cinquante à soixante quintaux (Cladel, Ompdrailles,1879, p. 155): 3. Avenue de France, dans l'espoir d'un peu de tabac, des queues de cent quatorze obstinés devant un kiosque, de cent trois devant un autre. Je me suis amusé à les compter. (Au juger, j'aurais cru exagérer en supputant au-dessus de quatre-vingts.)
Gide, Journal,1943, p. 183. Prononc. et Orth. : [ʒyʒe]. Att. ds Ac. 1694-1878. Fréq. abs. littér. : 2 134. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 3 493, b) 2 421; xxes. : a) 2 933, b) 3 033. |