| INTENDANCE, subst. fém. A. − HIST. MOD. 1. Administration, gestion, direction de choses, d'affaires importantes. Quoiqu'il eût l'intendance de mes bâtimens (Senancour, Obermann, t. 2, 1840, p. 115).Leudaste (...) ambitionna la suprême intendance des haras de sa patrone et le titre de comte de l'écurie (Thierry, Récits mérov., t. 2, 1840, p. 198): 1. Dans ses vieux jours, Bertrand avait conservé l'intendance des écuries, pour ne pas perdre l'habitude d'être une autorité dans la maison.
Balzac, Enf. maudit,1831-31, p. 390. − Au fig. La raison, dis-je, prendra un jour en main l'intendance de cette grande œuvre (...), et après avoir organisé l'humanité, organisera Dieu (Renan, Avenir sc.,1890, p. 37). − En partic., domaine privé. Ce petit monstre avait au Caire l'intendance de ma cave (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 915).À trois heures et demie, l'hiver, le feu était allumé par la servante discrète qui avait l'intendance du petit appartement; à trois heures et demie, l'été, des glaces étaient montées par la même servante (Dumas père, Monte-Cristo, t. 2, 1846, p. 621). 2. Fonction publique d'administration et, plus particulièrement, fonction exercée par l'intendant de province. S'il [Turgot] avait obtenu, dans l'intendance du Limousin, des résultats qui l'avaient rendu célèbre, c'est parce qu'il était resté treize ans à son poste (Bainville, Hist. Fr., t. 2, 1924, p. 9).L'ancien président de la Cour des aides de Clermont a été chargé de l'intendance de Rouen. C'est Étienne Pascal, qui a un bien curieux garçon, Blaise (Brasillach, Corneille,1938, p. 196). 3. P. méton. a) Temps durant lequel s'effectuait une intendance; durée d'une intendance. Ces travaux (...), commencés (...) sous l'intendance de M. de La Bauve, furent continués sous celle de M. d'Étigny (Dusaulx, Voy. Barège, t. 1, 1796, p. 121). b)
α) Circonscription territoriale sur laquelle s'exerçaient les pouvoirs, les fonctions de l'intendant. Synon. généralité (v. ce mot D).Cette élection était de l'intendance d'un tel (Ac.1835, 1878) : 2. Il monta chez Madame d'Hocquincourt, que ses amis de Nancy appelaient familièrement Madame d'Hocquin. (...) M. de Serpierre expliquait longuement, et malheureusement avec preuves, comment les choses allaient au mieux, avant la Révolution, à l'intendance de Metz, sous M. de Calonne, depuis ministre si célèbre.
Stendhal, L. Leuwen, t. 2, 1835, p. 127.
β) Maison où logeait l'intendant, où se trouvaient ses services. Nous trouvâmes à Brest, à notre arrivée, un poste astronomique établi dans le jardin de l'intendance (Voy. La Pérouse,t. 2, 1797, p. 11).Le billet qu'elle [la bouteille] renfermait y est déposé dans les archives de l'intendance (Bern. de St-P., Harm. nat.,1814, p. 84): 3. Savez-vous que quand j'allais à Metz je n'avais point d'autre auberge (...) que l'hôtel de l'intendance de M. de Calonne? Là, table somptueuse, des femmes charmantes, les premiers officiers de la garnison, des tables de jeu, un ton parfait.
Stendhal, L. Leuwen, t. 2, 1835p. 128. B. − Usuel. Fonction publique d'administration dans le domaine de la comptabilité, des biens et du contentieux. 1. Service(s) d'intendance. a) Intendance (militaire). Service chargé de la comptabilité et de l'administration de l'armée et, en particulier du ravitaillement, de l'habillement, de la solde; ensemble des intendants militaires. Officier d'intendance. Ils se battaient devant la porte des magasins militaires, où l'intendance leur distribuait de la farine d'avoine (Adam, Enf. Aust.,1902, p. 90).Afin de bien cataloguer ses fournisseurs et par suite ses prix d'achat, l'intendance militaire avait été amenée à établir une classification (Bérard, Gobilliard, Cuirs et peaux,1947, p. 68): 4. − Et pour les chevaux? demanda La Guillaumette. − Ne vous inquiétez pas de ça; c'est affaire entre l'intendance et la compagnie. Faites simplement attention à ne pas perdre leurs bulletins de passage...
Courteline, Train 8 h 47,1888, 1repart., 5, p. 52. b) Service chargé de l'administration matérielle, de la gestion financière des établissements d'enseignement. V. économat ex.; p. méton. locaux occupés par ce service. 2. Bâtiments abritant les bureaux, les services de l'intendance militaire. Se rendre à l'intendance (Rob., Lar. Lang. fr.). 3. Tout ce qui est du ressort de l'intendance militaire : 5. ... Manuel (...) avait reçu la promesse d'un ravitaillement pour trois jours. Pendant ce temps, il organiserait l'intendance. Mais les camions n'arriveraient qu'à l'aube.
Malraux, Espoir,1937, p. 661. − Expr. fig. L'intendance suivra (toujours). ,,Formule prêtée au général De Gaulle qui aurait affirmé, vers 1958 : « l'intendance suivra toujours », en voulant dire que les problèmes économiques et financiers de l'État finissent toujours par être résolus tant bien que mal`` (Gilb. 1971). Il est des hommes politiques qui affectent d'ignorer l'économie et la relèguent au second plan en disant que « l'intendance suivra » (Gazette de Lausanne,11 avr. 1961,ds Gilb. 1971). Prononc. et Orth. : [ε
̃tɑ
̃dɑ
̃:s]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. [1537 (s. réf. ds Bl.-W.1-5)] 1. 1543 « pouvoir, autorité; fait de diriger » (Édit ds Isambert, Recueil gén. des anc. lois fr., t. 12, p. 807 : authorité et intendance que à contreroolleur appartient); 2. a) ca 1570 « charge d'un intendant sous l'Ancien Régime » (M. de L'Hospital, Traité de la réformation de la justice ds
Œuvres inédites, éd. P. J. S. Dufey, t. 2, p. 171 : la charge de l'intendance dont vous m'avez honoré); b) 1690 « division territoriale soumise à l'autorité d'un intendant de province » (Fur.); 3. a) 1845-46 intendance militaire (Besch.); b) 1902 « bureaux de cette administration » (Nouv. Lar. ill.); c) 1960 éduc. (v. économat ex.); d) 1961 fig. l'intendance suivra (Gazette de Lausanne, supra); 4. 1671 « fonction d'intendant chez un particulier » (Pomey). Dér. de intendant*; suff. -ance*. Fréq. abs. littér. : 135. |