| IMPROVISATION, subst. fém. A. − Dans le domaine artistique 1. MUS. [Correspond à improviser A 1 a] .
a) Art, action de composer et d'exécuter simultanément. Car l'improvisation à l'orgue, qui est de métier, a été la source de beaucoup de compositions qui ont gardé toujours la marque originelle (Alain, Beaux-arts,1920, p. 119) : 1. Il jouait les yeux clos et comme ignorant du public. Il ne semblait point tant présenter un morceau que le chercher, le découvrir, ou le composer à mesure, et non point dans une improvisation, mais dans une ardente vision intérieure, une progressive révélation dont lui-même éprouvât et ravissement et surprise.
Gide, Si le grain,1924, p. 465. − P. anal. Je terminai le ballet par une improvisation d'entrechats et de pirouettes qui fit rire ma grand-mère aux éclats (Sand, Hist. vie, t. 2, 1855, p. 267). b) P. méton.
Œuvre musicale produite par improvisation. Improvisation libre. Maintenant elle tient l'orgue de la chapelle chaque dimanche et prélude au chant des cantiques par de courtes improvisations (Gide, Symph. pastor.,1919, p. 920). − P. anal. Des improvisations entières de rossignols, des chants de merle, de canari (Giraudoux, Suzanne,1921, p. 95). 2. LITT. [Correspond à improviser A 1 b] .
a) Art, action de composer et d'exprimer simultanément. Juvénal, Dante, Milton avaient le dard de l'improvisation et de la satire (Vigny, Journal poète,1857, p. 1336). − P. ext. Capacité de composer et de déclamer en même temps (un discours). La recherche constante du mot nous rend impropres à l'improvisation (Renard, Journal,1909, p. 1259).Une grande capacité d'improvisation en public, de séduction oratoire, de présence d'esprit, de rapidité de conception et de compréhension, de précision dans la parole (Mounier, Traité caract.,1946, p. 249). b) P. méton.
Œuvre, discours produit par improvisation. Une brillante improvisation. L'admirable causeur qu'était Gautier s'était livré à une stupéfiante improvisation sur le nombril de la Vénus de Milo (Goncourt, Journal,1896, p. 981).Le petit vieux, brandissant les feuillets qu'il avait devant lui, se lança dans une volubile improvisation sur un projet d'imprimerie coopérative pour les journaux du « parti » (Martin du G., Thib., Sorell., 1928, p. 1213). B. − P. ext. 1. [Correspond à improviser A 2 a] Action de créer, de réaliser subitement (quelque chose). Des sujets de tableaux auxquels la rapide improvisation de son crayon donnait à l'instant la forme et la vie (Lamart., Confid.,1849, p. 318).On ne négligea, du reste, aucune précaution pour ôter à cette entrevue toute apparence officielle et pour lui donner le caractère d'une improvisation soudaine du hasard (Feuillet, Mariage monde,1875, p. 33).L'improvisation de la main succédait aux improvisations de l'esprit (Fromentin, Maîtres d'autrefois,1876, p. 128). − P. méton. Ce qui est créé de manière subite, instantanée, sans préparation (directe). Ces fresques sont des improvisations d'un barbouilleur spirituel (Michelet, Journal, 426).M. Monnet a longtemps bafouillé, lâchant de courtes improvisations, bâclant des bouts de paysages (Huysmans, Art mod.,1883, p. 292).Une enfilade interminable de salles désespérantes, où (...) on ne voit que pochades et improvisations (Lhote, Peint. d'abord,1942, p. 113). 2. [Correspond à improviser A 2 b] a) Le fait de préparer ou de réaliser (quelque chose) en grande hâte et au pied levé. On a l'air de croire la partie gagnée lorsqu'on peut se reposer sur une belle formule, comme : « La France a le génie de l'improvisation » (Gide, Journal,1915, p. 514).Nous ne rencontrerons partout que la désorganisation, un mélange d'unités, ou, tout au moins, de l'improvisation dans l'emploi des moyens (Foch, Mém., t. 2, 1929, p. 215) : 2. Rien n'a été fait pour soumettre l'essor industriel à des règles logiques; au contraire, tout a été laissé à l'improvisation qui, si elle favorise parfois l'individu, accable toujours la collectivité.
Le Corbusier, Charte Ath.,1957, p. 55. b) Ce qui est préparé hâtivement, au dernier moment. Maman nous a prévenus tout de suite que le déjeuner ne serait qu'une improvisation (Duhamel, Maîtres,1937, p. 14).La France libre avait, d'urgence, besoin de tout. Après les improvisations de l'été et de l'automne, avant les entreprises nouvelles que j'étais décidé à engager au printemps, force nous était d'obtenir des Anglais l'indispensable (De Gaulle, Mém.,1954, p. 123). Prononc. et Orth. : [ε
̃pʀ
ɔvizasjɔ
̃]. Att. ds Ac. dep. 1835. Étymol. et Hist. 1. 1807 « œuvre improvisée » (Staël, Corinne, t. 2, p. 73); 2. id. « art d'improviser » (Id., ibid., t. 3, p. 126). Dér. de improviser*; suff. -(a)tion*. Fréq. abs. littér. : 314. Fréq. rel. littér. : xixes : a) 338, b) 412; xxes. : a) 190, b) 710. |