| IMPERTINENT, -ENTE, adj. A. − Vieilli ou littér. 1. [Le subst. désigne un fait, une action] Qui n'est pas adapté, approprié à l'objet dont il est question; qui va à l'encontre de la raison. Synon. inadéquat, inopportun; anton. judicieux, pertinent.Des phrases entières altérées par l'ignorance, et plus souvent par les impertinentes corrections du copiste (Courier, Lettre à M. Renouard,1810, p. 268).Quand un fait impertinent dérange une théorie, rien n'est plus simple que de le nier (Rolland, J.-Chr., Foire, 1908, p. 687) : 1. ... ce doute vous paraît impertinent, cependant je suis bien assuré qu'il vous est impossible de le lever, et que, quelque inébranlable que soit votre opinion à cet égard, vous ne sauriez en démontrer la vérité.
Destutt de Tr., Idéol. 1,1801, p. 115. − DR., vx. Qui ne se rapporte pas à la cause. Fait, article impertinent. (Ds Ac., Littré, Lar. 19e-Lar. Lang. fr.). 2. [Le subst. désigne une pers.] Qui parle ou agit de manière inconsidérée, mal à propos. Synon. déraisonnable, insensé.Un impertinent conseiller désirait qu'il [l'auteur] mît au bas des feuillets la traduction de toutes les phrases latines (Hugo, Han d'Isl.,1823, p. 12).Ce Galilée est-il assez impertinent Avec son soleil fixe et sa terre tournant! (Hugo, Toute la lyre, t. 1, 1885, p. 107). − Emploi subst. Vous êtes une folle et une impertinente, qui ne savez ce que vous dites. Refuser l'Académie est une vanité comme une autre : cela fait partie de ce faux honneur auquel vous vous entendez si bien (Montherl., Port-Royal,1954, p. 1036). B. − Usuel 1. [Le subst. désigne un trait du comportement hum. (action, parole notamment)] Qui est déplacé, blessant; qui dénote l'irrespect. Synon. choquant, inconvenant; anton. bienséant, convenable.Ouvrage impertinent; manières, réponses impertinentes. Le ton leste, impertinent, inouï de cette lettre, qu'elle lut et relut à plusieurs reprises, n'était-il pas là pour attester l'aigreur, la haine sourde d'une rivale? (Ponson du Terr., Rocambole, t. 2, 1859, p. 238).Antoinette arriva à la table de sa mère, s'assit sur une banquette, soutint d'un air impertinent et suprêmement satisfait les regards de tout le monde (Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 84) : 2. Rien n'est plus impertinent ni plus bête que de parler à un grand artiste, érudit et penseur comme Delacroix, des obligations qu'il peut avoir au dieu du hasard. Cela fait tout simplement hausser les épaules de pitié. Il n'y a pas de hasard dans l'art, non plus qu'en mécanique.
Baudel., Salon,1846, p. 117. ♦ Nez impertinent. Nez qui confère une expression quelque peu effrontée. Son nez (...) est pincé des narines et plein de finesse, mais impertinent (Balzac, Béatrix,1839-45, p. 98). 2. [Le subst. désigne une pers.] Qui se comporte d'une manière irrévérencieuse, inconvenante; qui fait preuve d'une audace, d'une familiarité choquantes. Synon. effronté, impudent, insolent; anton. déférent, respectueux.Élève, enfant impertinent. Monsieur de Sénonches, auriez-vous reconnu Monsieur de Rubempré? dit la comtesse en forçant l'impertinent chasseur à saluer Lucien (Balzac, Illus. perdues,1843, p. 690).Mais ce qu'avait voulu le docte et impertinent Schlegel dans sa brochure, c'était surtout de se divertir avec ironie et de nous irriter (Sainte-Beuve, Nouv. lundis, t. 6, 1863, p. 46) : 3. − Croyez-vous que cet impertinent jeune homme, dit-il en me désignant à Mmede Surgis, vient de me demander, sans le moindre souci qu'on doit avoir de cacher ces sortes de besoins, si j'allais chez Mmede Saint-Euverte, c'est-à-dire, je pense, si j'avais la colique.
Proust, Sodome,1922, p. 700. − Emploi subst. Je ne suis point aussi enchantée que vous de ce petit paysan, vos prévenances en feront un impertinent que vous serez obligé de renvoyer avant un mois (Stendhal, Rouge et Noir,1830, p. 31). Prononc. et orth. : [ε
̃pε
ʀtinɑ
̃], fém. [-ɑ
̃:t]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1327 terme de procédure « qui ne se rapporte pas à la cause » (Isambert, Recueil gén. des anc. lois fr., t. 3, p. 345, 29); 1370-72 « qui est sans rapport avec, étranger à » (Oresme, Ciel et Monde, éd. A.D. Menut et A.J. Denomy, 93b, 4-5 ds Mediev. Studies t. 5, p. 307); 2. a) 2emoitié xves. « (d'une chose) malséant, inconvenant » (Ol. de La Marche, Est. des off. du d. de Bourg., p. 300 ds Gdf. Compl.); 1707 « (id.) volontairement inconvenant, irrespectueux » (Lesage, Crispin riv. de son maître, sc. 23 ds Littré : manières impertinentes); b) 1564 » (id.) extravagant, déraisonnable, absurde » (Rabelais, V, Prol. ds Hug.); 3. a) 1559 « (d'une pers.) qui agit mal à propos, de manière déplacée, absurde » (Amyot, Lycurgue, 13, ibid.); 1660 « (id.) qui choque la bienséance, montre de l'insolence » (Molière, Sganarelle, 1). Empr. au b. lat.impertinens « qui est sans rapport avec ». Fréq. abs. littér. : 340. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 717, b) 516; xxes. : a) 438, b) 293. DÉR. Impertinemment, adv.De manière impertinente; avec insolence, irrespect. Mon cher vicomte, interrompit le baronnet, vous avez des expressions triviales dont je vous engage à vous défaire. − Je ne m'en sers pas dans le monde, répondit impertinemment Rocambole (Ponson du Terr., Rocambole, t. 2, 1859, p. 330).Il s'habilla avec une recherche extravagante (...), fixa impertinemment les femmes, répondit aux hommes par-dessus l'épaule et tout de suite crut constater les effets heureux de cette attitude (Maurois, Disraëli,1927, p. 29).− [ε
̃pε
ʀtinamɑ
̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. − 1resattest. a) 1414 prob. « mal à propos » (L. de Premierfait, Trad. de Boccace, B.N. 129ac ds Gdf. Compl.), b) 1559 « mal, maladroitement » (Amyot, Dion, 18 ds Hug.), c) 1690 « avec violence » (Fur.); de impertinent, suff. -ment2*. − Fréq. abs. littér. : 20. |