| * Dans l'article "HACHER,, verbe trans." HACHER, verbe trans. A. − Domaine concret 1. Couper en petits morceaux avec un instrument tranchant. Hacher des épinards, du persil, du tabac, de la paille; hacher qqc. au couteau, avec un couteau; hacher en morceaux. Pendant tout le temps, assez long, qui fut nécessaire pour sécher les feuilles minces [du tabac], les hacher, les soumettre à une certaine torréfaction sur des pierres chaudes (Verne, Île myst.,1874, p. 304).Après avoir été désossée, coupée en morceaux, la viande est préparée selon le produit fabriqué à obtenir (hachée ou broyée, mélangée ou non à de la graisse...) (Industr. conserves,1950, p. 26) : 1. De leurs couteaux, les cosaques écrasèrent le suif sur les tartines, hachèrent l'oignon, salèrent et mangèrent le tout...
Adam, Enf. Aust.,1902, p. 139. − Absol. Hacher fin, gros; planche, table à hacher. Les éléphants entrèrent dans cette masse d'hommes; (...) ils coupaient, taillaient, hachaient avec les faux de leurs trompes (Flaub., Salammbô, t. 2, 1863, p. 133). − En partic. Couper, découper de façon grossière et maladroite. Il ne découpe pas cette viande, il la hache (Ac.1835-1935). ♦ [Le suj. désigne un instrument tranchant] Ce couteau émoussé ne tranche plus la viande, il la hache (Rob.). L'aubier haché par les sillons des dents, déchiqueté, entamé jusqu'au cœur (Genevoix, Raboliot,1925, p. 321). − Loc. fig. a) Hacher (de) la paille. Parler une langue avec un accent tonique prononcé, en particulier, parler allemand ou parler français avec l'accent allemand. Le sous-officier allemand se précipita au-devant d'elle pour lui interdire le passage, les bras en croix, rouge, offensé, furieux, hachant terriblement sa paille germanique (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 201). b) Hacher menu comme chair à pâté. Mettre en pièces, en morceaux. La trappe de la cave se fût ouverte sous les pieds de l'exempt assez audacieux pour pénétrer dans ce repaire. Il n'en serait sorti que haché menu comme chair à pâté (Gautier, Fracasse,1863, p. 318). c) Se faire, se laisser hacher. Se défendre, combattre jusqu'à la dernière extrémité. Le Maréchal croit-il que s'ils se laissaient hacher à son commandement, c'était pour lui faire plaisir? (Alain, Propos,1934, p. 1235). ♦ Se faire hacher pour qqn, pour qqc., plutôt que de faire qqc. Être prêt à toute action, à tout sacrifice par dévouement à une personne, à une cause, ou pour éviter de faire quelque chose. Cornoiller, surpris d'une telle magnificence, parlait de sa maîtresse les larmes aux yeux : il se serait fait hacher pour elle (Balzac, E. Grandet,1834, p. 226).Je me ferais maintenant hacher pour des idées qui ne se réaliseront sans doute pas de mon vivant (Sand, Corresp., t. 1, 1835, p. 316) : 2. Mais nous avons mieux que la Chambre, nous avons nous-mêmes, nous, qui nous ferions hacher par petits morceaux plutôt que de lâcher d'une semelle, nous, qui avant d'être mis en pâtée, crierons si fort que toute la terre nous entendra.
Clemenceau, Vers réparation,1899, p. 487. 2. P. ext. Frapper quelqu'un de façon répétée à coups de hache ou de toute autre arme tranchante. Puis, tirant son sabre suspendu à son côté, il hache les pachas et les vizirs (Mérimée, Guzla,1827, p. 317). ♦ Emploi pronom. réciproque. Ils [des cavaliers] se hachent, se transpercent, se tailladent, se martèlent (...) employant tout un arsenal d'armes antiques, barbares et féroces (Gautier, Guide Louvre,1872, p. 111). − P. hyperb. Blesser, meurtrir en faisant de petites entailles, de petites coupures. Le menton haché d'avoir été livré sans lumière au rasoir (Giraudoux, Siegfried et Lim.,1922, p. 109). 3. P. anal. Mettre en pièces, détruire, ravager par une action violente. De la grêle était tombée dans la nuit au milieu d'un orage épouvantable, hachant les branches, dépouillant les arbres (A. Daudet, Évangéliste,1883, p. 112).Les obus commencèrent à hacher les boqueteaux et la forêt clairsemée (Malraux, Espoir,1937, p. 801) : 3. Les bataillons hachés
Par la mitraille,
Les ventres arrachés
Par la ferraille.
Péguy, Quatrains,1914, p. 495. 4. Emplois techn. a) BÂTIMENT − Hacher une pièce de bois. La dégrossir avec une hache ou un ciseau. (Dict. xixeet xxes.). − Hacher un mur, une pierre. Pratiquer à la hachette des entailles peu profondes à leur surface pour faciliter l'application d'un enduit ou d'un crépi. (Dict. xixeet xxes.). b) ARTS GRAPH. et GRAV. Couvrir de hachures. Hacher un dessin, une estampe. Ta carte est-elle faite? − Non, ma vieille, j'ai pas eu le temps de la « repasser » (...) mes montagnes pas hachées et ma côte de l'Adriatique pas finie (Colette, Cl. Paris,1901, p. 184). − P. ext. Couvrir de traits (un écrit, des mots), barrer, raturer. Chaque mot haché de traits de plume marqués si violemment qu'ils ont troué le papier en maints endroits (Bernanos, Journal curé camp.,1936, p. 1184). − P. métaph. Les désirs turbulents et forts, l'âme hachée Des striures d'argent et de pourpre des sons (Noailles, Ombre jours,1902, p. 173). B. − Au fig. Rompre à plusieurs reprises la continuité ou l'unité de quelque chose; diviser en fragments ou en éléments courts et nombreux. Synon. couper, entrecouper, interrompre.Hacher une phrase, un discours; hacher son style; hacher le temps; (discours) haché d'arrêts, d'interruptions. Le pays se fit semblable à ces terrains de démolitions que l'on voit aux faubourgs des villes, terrains vagues, chargés de gravats blancs, hachés de fossés et d'excavations (Psichari, Voy. centur.,1914, p. 133).Les journées n'étaient point pleines et pressées, mais lentes et libres : les horaires ne hachaient point les pensées et ne faisaient point des individus des esclaves du temps moyen et les uns des autres (Valéry, Variété II,1929, p. 63) : 4. La ponctuation belge a la maladie des virgules; on a beau faire, ces vermicules se glissent partout, et coupent les phrases et hachent les vers à faire horreur. Toute largeur et toute ampleur disparaît sous cette vermine.
Hugo, Corresp.,1859, p. 304. ♦ Emploi pronom réfl. La voix du malheureux se hachait, se mouillait, s'étranglait dans les hoquets (Gide, Prométhée,1899, p. 332). − P. méton. Voici (...) mon discours et le récit de cette discussion où la Chambre, d'abord, aux deux tiers hostile, me hachait d'interruptions (Barrès, Pitié églises,1914, p. 57). − En partic. et p. ell. Dire brutalement en interrompant quelqu'un ou en s'interrompant à plusieurs reprises. L'Allemagne et le militarisme, hacha précipitamment la rage d'un autre (Barbusse, Feu,1916, p. 364).Le chasseur serre les poings (...) hache d'une voix rauque, plusieurs fois la même insulte : « Les vaches! Les vaches! Les vaches! » (Genevoix, Seuil guitounes,1918, p. 186). REM. Hacheuse, subst. fém.,rare. Machine à hacher. Plusieurs appareils, fixés sur le bloc, une pompe à injecter, une machine à pousser, une hacheuse mécanique (Zola, Ventre Paris,1873, p. 682). Prononc. et Orth. : [aʃe] init. asp., (il) hache [aʃ], je hache [ʒ
əaʃ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1225 [ms.] « réduire, couper en menus morceaux avec un instrument tranchant » (Aliscans [ms. Arsenal 6562], éd. F. Guessard et A. de Montaiglon, 3632); b) 1690 « découper maladroitement » (Fur.); 2. 1376 grav. (Invent. de la Sainte-Chapelle ds Havard); 3. 1611 « entailler avec une hache, un ciseau » (Cotgr.). Issu, par fausse régression, de dehachier « découper » (1176-81, Chr. de Troyes, Chevalier Lion, éd. M. Roques, 827), lui-même dér. de hache*; préf. dé-*; dés. -er. Fréq. abs. littér. : 176. Bbg. Archit. 1972, p. 46. |