| GRIFFE1, subst. fém. I. A. − Gén. au plur. 1. Ongle pointu et recourbé de certains animaux. Les griffes d'un lion, d'un vautour; griffes acérées. Le genre des chats grimpe en enfonçant ses griffes aiguës, tranchantes et crochues dans les corps (Cuvier, Anat. comp., t. 1, 1805, p. 494).Ces marques récentes Annonçaient la démarche et les griffes puissantes De deux grands loups-cerviers et de deux louveteaux (Vigny, Destinées,1863, p. 128).Je n'entendis que l'aboiement d'un chien, les griffes d'un chat qui lacéraient l'écorce d'un arbre (Colette, Mais. Cl.,1922, p. 129) : 1. ... le hérisson a des épines, la pieuvre n'a pas d'épines; l'espadon a un glaive, la pieuvre n'a pas de glaive; la torpille a une foudre, la pieuvre n'a pas d'effluve; le crapaud a un virus, la pieuvre n'a pas de virus; la vipère a un venin, la pieuvre n'a pas de venin; le lion a des griffes, la pieuvre n'a pas de griffes; le gypaète a un bec, la pieuvre n'a pas de bec; le crocodile a une gueule, la pieuvre n'a pas de dents.
Hugo, Travaill. mer,1866, p. 371. − ZOOL. Phanère consistant en un étui corné se développant autour de la phalange terminale du doigt des reptiles, oiseaux et mammifères. La locomotion arboricole est aidée par divers dispositifs facilitant l'adhésion au support : griffes, pelotes « adhésives » (...) doigts capables d'opposition, dispositifs antidérapants (...) queue préhensile (Zool.,t. 4, 1974, p. 829 [Encyclop. de la Pléiade]). ♦ P. anal. Étui chitinisé constituant l'article terminal des appendices des arthropodes. [Chez le Tenebrio] le tibia larvaire est à l'origine du tibia et du tarse de l'adulte à l'exception des griffes (J. Embryol. exp. Morphol.,t. 35, 2, 1976, p. 319). − P. anal. a) Ongle d'êtres imaginaires en forme de griffe. Les griffes de Satan. Un monstre terrible armé de griffes rouges et de dents énormes, écailleux, se battant les flancs avec une queue tortueuse (Du Camp, Mém. suic.,1853, p. 107).Jusqu'à ce que (...) le créateur, avec les deux premières griffes du pied, saisît un autre plongeur par le cou, comme dans une tenaille, et le soulevât en l'air, en dehors de la vase rougeâtre, sauce exquise! (Lautréam., Chants Maldoror,1869, p. 183). b) Péj. Ongle humain particulièrement long, fort ou acéré. Prostituées divines aux griffes peintes en bijoux (Jouhandeau, M. Godeau,1926, p. 228).Il était couché sur une femme égarée qui disait des paroles obscènes et dont les griffes faisaient mal (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 26). − Loc. adj. ou adv. En griffe(s)
α) En forme de griffe(s), ayant une forme pointue et recourbée. Un exemplaire des Diaboliques imprimé avec ces caractères de civilité dont les croches biscornues, dont les paraphes en queues retroussées et en griffes, affectent une forme satanique (Huysmans, À rebours,1884, p. 214).Un rameau chargé de cristallisations comme une branche de corail noir de ses pendentifs en griffe (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 312).
β) (Main, doigt) en griffe. Dont on se sert comme de griffe(s). Il mordait, griffait, déchirait le visage de son adversaire. Il cherchait, de ses doigts en griffes, les yeux de l'autre (Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 263). − MÉD. Griffe cubitale. ,,Hyperextension de la première phalange et flexion des deux dernières phalanges de l'annulaire et du petit doigt, que l'on observe dans la paralysie du nerf cubital`` (Méd. Biol. t. 2 1971; cf. Quillet Méd. 1965, p. 369). 2. En partic. [En parlant de félins et plus partic. de chats] ♦ Griffe rétractile. Griffe que l'animal peut rentrer. Les griffes rétractiles du tigre, les crochets venimeux de la vipère (Ménard, Rêv. païen,1876, p. 213). ♦ Ouvrir, sortir, fermer, rentrer ses griffes. Le chat se roulait sur mes genoux, sur le dos, les pattes en l'air, ouvrant et fermant ses griffes, montrant sous ses lèvres ses crocs pointus (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Chats, 1886, p. 1059).C'est un moment si pur que les « bêtes sauvages » elles-mêmes rentrent leurs griffes et rampent en ronronnant (Duhamel, Terre promise,1934, p. 179). ♦ Se faire les griffes. Aiguiser ses griffes. Le chat il a quitté sa rombière pour venir se faire les griffes (Céline, Mort à Crédit,1936, p. 28). B. − P. méton., au sing. 1. Patte munie de griffes. Mon petit Linot [un oiseau] était sous la griffe de la chatte, comme j'entrai dans ma chambre. Je l'ai sauvé en donnant un grand coup de poing à la chatte, qui a lâché prise (E. de Guérin, Journal,1835, p. 49) : 2. La noble bête se cabra, volta sur elle-même, devint sourde à la voix, indocile à l'éperon. En même temps l'ours, qui n'était que blessé, se relevait et fondait sur le cheval qu'il frappait au poitrail d'un coup de sa terrible griffe, et le cheval tombait à la renverse, engageant sous lui son cavalier.
Ponson du Terr., Rocambole, t. 5, 1859, p. 463. − P. anal. a) Main munie d'ongles très longs ou acérés. Lafcadio sentit s'abattre sur sa nuque une griffe affreuse, baissa la tête et donna une seconde poussée plus impatiente que la première; les ongles lui raclèrent le col (Gide, Caves Vatican,1914, p. 830). b) Main puissante. Deux ou trois fois, l'un de ces mécréants, qui paraissait le plus animé, mit sa griffe de diable sur le bras de Brulette, comme pour l'emmener (Sand, Maîtres sonneurs,1853, p. 127). ♦ En partic., arg. et pop.
α) Main. Ils (...) se serrèrent la griffe, se tapèrent sur l'épaule (Le Breton, Razzia,1954, p. 56).
β) À griffe(s). À pied. Synon. à pinces.Il fait beau (...) on descend à griffes sur les boulevards (Simonin, Pt Simonin ill.,1957, p. 212). ♦ Coup de griffe(s). Coup donné avec la patte ou la main pour griffer. Donner un, des coup(s) de griffe(s). Un moment l'idée lui vint [à MmeAstier] de tomber dessus, de le cribler [Léonard] de coups de poings, de coups de griffes (A. Daudet, Immortel,1888, p. 120).Vous êtes comme une chatte à qui on fait gentiment une petite caresse, et qui répond avec un coup de griffe (Montherl., Celles qu'on prend,1950, I, 1, p. 774). 2. Rare. Synon. de griffure, éraflure.Je mire, avec un sourire inerte, mon visage las rayé d'une griffe rose près de la lèvre (Colette, Cl. ménage,1902, p. 276). C. − Au fig. et/ou p. métaph. 1. [En tant que symbole de l'agressivité] Malauve avait des griffes féminines. Il savait louer un adversaire pour le faire blâmer davantage (L. Daudet, Astre noir,1893, p. 112).Le jansénisme dont il me parle est un jansénisme qui me paraît assez mitigé, un jansénisme sans ses griffes, sans ses terreurs (Green, Journal,1951, p. 90). ♦ Coup de griffe. Critique, attaque verbale cinglante ou sournoise. Elle insultait les gens de la maison qui ne la servaient pas assez vite, invectivait les cavaliers qui ne lui faisaient pas de place, donnait des coups de griffe à ceux qui voulaient s'émanciper avec elle (Sand, Beaux MM. Bois-Doré, t. 2, 1857, p. 271) : 3. Cela nous rappelle l'admiration d'un littérateur républicain qui félicitait sincèrement le grand Rubens d'avoir, dans un de ses tableaux officiels de la galerie Médicis, débraillé l'une des bottes et le bas de Henri IV, trait de satire indépendante, coup de griffe libéral contre la débauche royale. Rubens sans-culotte! Ô critique! Ô critique!...
Baudel., Salon,1845, p. 10. − Loc. verb. [Renvoyant à l'image d'un félin, d'un chat] Supra A 2. ♦ Voir, sentir la griffe (chez qqn) (vieilli). Voir, sentir quelque chose de menaçant. Dîné chez Mmede St(aël). On voit toujours la griffe. Elle sera furieuse. Qu'y faire! Il faut sortir de cette vie-ci qui ne peut mener à rien (Constant, Journaux,1814, p. 424).L'horreur était dans cette femme et se combinait avec la grâce. Rien de plus tragique. On sentait la griffe, on sentait le velours. C'était l'attaque féline, mêlée de retraite (Hugo, Homme qui rit, t. 3, 1869, p. 99). ♦ Montrer la griffe (vieilli), sortir les/ses griffes. Se montrer menaçant, agressif. Cet autre, en montrant la griffe, a dit à quel prix il consentirait à faire patte de velours (Jouy, Hermite, t. 3, 1813, p. 234).Autrefois tu jugeais tout cela comme des choses sans conséquence et voilà que, maintenant, tu montres toutes tes griffes (Duhamel, Terre promise,1934, p. 218). ♦ Rentrer ses griffes. Se montrer conciliant. « ... Nous aurions vu immédiatement Berlin changer de ton », interrompit Studler. « L'Allemagne aurait battu en retraite, forcé l'Autriche à rentrer ses griffes, et tout se serait terminé, à l'amiable, par des marchandages de chancelleries! » (Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p. 517).V. amateur ex. 66. ♦ Se faire les griffes. Synon. s'aguerrir.Peut-être suis-je seulement en train de jeter ma gourme, de me faire les griffes (Vialar, Tournez,1956, p. 81). − Loc. adv. ♦ Toutes griffes dehors. En se montrant agressif. J'appréhendais cet instant, partagée entre l'envie de l'accueillir [Maurice] toutes griffes dehors et celle de m'effondrer sur son veston (H. Bazin, Qui j'ose aimer,1956, p. 143). 2. La griffe (rare), les griffes de qqn, qqc.Emprise, pouvoir cruel ou impitoyable exercé par (quelqu'un, quelque chose). La griffe, les griffes du destin, du malheur, du temps, des passions. − Loc. verb. ♦ Tomber, être [ou un verbe d'état] sous, dans la griffe, les griffes de (qqn, qqc.); entre les griffes de (qqn, qqc.). Tomber, être au pouvoir, à la merci de (quelqu'un, quelque chose). La jeune femme poussa un soupir. Elle était pieds et poings liés dans les griffes de son terrible protecteur (Ponson du Terr., Rocambole, t. 3, 1859, p. 169).Madame, votre article est assurément ce que j'aurais pu ambitionner de plus flatteur, puisque vous avouez ne l'avoir écrit que sous la griffe et la dent du plus impérieux besoin de justice (Bloy, Journal,1897, p. 253).Ce domaine tombé entre les griffes des marchands de biens, c'eût été une diminution de la beauté provençale (Barrès, Mystère,1923, p. 120) : 4. Il n'est pas vrai que l'homme soit, comme le veut l'idéaliste, en dehors du monde et de la nature (...). Il est tout entier dans les griffes de la nature, qui peut l'écraser d'une seconde à l'autre...
Sartre, Sit. III,1949, p. 220. ♦ Prendre, saisir, tenir (qqn, qqc.) dans ses griffes, sa griffe, sous sa griffe, entre ses griffes. Prendre (...) en son pouvoir, à sa merci. L'ennui me reprend dans sa griffe et me dévore par les souvenirs (Barb. d'Aurev., Memor. 2,1838, p. 355).[La Sévère] n'en tenait pas moins sous sa griffe la succession de Cadet Blanchet (Sand, F. le Champi,1848, p. 182) : 5. Certes il n'y avait jamais eu rendez-vous moins blâmable, plus excusable, que celui auquel cette pauvre femme courait : elle y allait pour son mari, pour son enfant, dans l'espoir d'arracher l'un à l'horrible femme qui le tenait dans ses griffes, de conserver à l'autre une fortune menacée par l'avidité furieuse d'une courtisane...
Ponson du Terr., Rocambole, t. 2, 1859, p. 254. ♦ Mettre sa griffe sur (qqn, qqc.). Placer sous son pouvoir, à sa merci. Le fisc n'a pas de cœur, il ne s'inquiète pas des sentiments, il met sa griffe sur nous en tout temps (Balzac, Rech. absolu,1834, p. 247).Les mots, outre leur sens, ont une portée. Une nouvelle qu'on nous dit, même fausse, met sa griffe sur nous et, tandis que notre raison la dément, elle atteint nos affections dans leur substance même (J. Bousquet, Trad. du silence,1935-36, p. 25). ♦ Arracher [ou un verbe synon.] (qqn, qqc.) aux griffes de (qqn). Soustraire au pouvoir, à l'emprise de (quelqu'un, quelque chose). Le soir même du jour où Jean Valjean avait tiré Cosette des griffes des Thénardier, il rentrait dans Paris (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 514).En vain se bourrait-il de lectures romanesques, cherchant, comme l'immortel Don Quichotte, à s'arracher par la vigueur de son rêve aux griffes de l'impitoyable réalité (A. Daudet, Tartarin de T.,1872, p. 14). 3. P. méton. Vive douleur provoquée comme par une griffe. Il disait d'une voix qu'on entendait à peine : « Je n'en puis plus : je sens une griffe de fer dans le côté » (Chateaubr., Mém., t. 2, 1848, p. 78).Derrière la porte d'Annie, on entendait des rires : son rire et celui de Tosca. Le sang monta aux joues de Régine et des griffes se plantèrent dans sa gorge (Beauvoir, Tous hommes mort.,1946, p. 57). D. − P. ext. 1. a) Signature apposée au moyen d'un cachet. L'emploi d'une griffe remplaçant les signatures est donc formellement interdit [sur un chèque et sur des effets de commerce] (Banque1963). − ,,Mention (en général initiales ou signatures abrégées) qui atteste qu'une personne a pris connaissance d'un document`` (Admin. 1972). Je vais envoyer un domestique prier le concierge de venir parapher de sa griffe le contrat de location (Courteline, Client sér., Piano, 1893, pp. 220-221). b) Dessin, marque distinctive d'un fabricant. On place aussi derrière le faux titre (...) la griffe de l'éditeur (E. Leclerc, Nouv. manuel typogr.,1932, p. 275). ♦ Au fig. Les pièces de Dumas ont toutes dès la première scène la même intonation cassante et paradoxale, voix de tête et crête dressée; mais c'est sa marque de fabrique cela, son poinçon, la griffe au coin du tableau (A. Daudet, Crit. dram.,1897, p. 212). − En partic., p. méton.
α) Petit morceau d'étoffe cousu à l'intérieur d'un vêtement et portant le nom du fournisseur ou du fabricant. Tissus Bouclette, oui! mais exigez la griffe dans votre veste ou votre manteau (Figaro,4 sept. 1952, p. 7, col. 4-5-6).
β) Entreprise produisant ou diffusant des produits de marque, généralement de vêtements ou des articles de luxe. Nous sommes l'une des premières griffes françaises de Haute Couture et d'accessoires; nos articles sont diffusés dans le monde entier (Le Nouvel Observateur,1979, no751, p. 78). c) P. méton., vieilli. Instrument qui sert à imprimer une signature, un paraphe, une marque. [L'employé] prit une griffe, imprima le visa en encre bleue sur le passeport, écrivit rapidement les mots : Mantoue, Venise et Ferrare (Stendhal, Chartreuse,1839, p. 184).M. Victor Hugo (...) coupa les feuilles en petits carrés sur lesquels il imprima avec une griffe le mot espagnol qui veut dire fer (MmeV. Hugo, Hugo,1863, p. 121). 2. Au fig. a) Rare. Influence de (quelqu'un) dans une situation, un événement. S'il [l'Empereur de Russie] n'a pas été jusqu'ici plus favorable aux Grecs, c'est qu'il a cru apercevoir dans leur insurrection la griffe des Jacobins de Paris (Chateaubr., Corresp., t. 4, 1789-1824, pp. 306-307).La plupart [des gens] acceptaient même de voir dans l'aventure le doigt de Dieu comme aussi la griffe de Satan (Aymé, Vouivre,1943, p. 194). b) En partic., dans le domaine de la critique artistiqueMarque de la personnalité, du style de (quelqu'un) dans une œuvre. Point d'idée qui, plus clairement que celle-là, ne porte la griffe voltairienne (M. Bloch, Apol. pour hist.,1944, p. 91). − P. méton. Personnalité, style caractéristique d'un créateur. S'il y a dans le bagage de Liszt des œuvres inutiles du moins n'en est-il pas une seule, fût-ce la plus insignifiante, qui ne porte la marque de sa griffe et l'empreinte de sa personnalité (Saint-Saëns, Portr. et souv.,1909, p. 40).Il faut du reste reconnaître que Victor Hugo, quand il voulait citer l'antique, le faisait avec la toute-puissante liberté, la griffe dominatrice du génie (Proust, Chron.,1922, p. 223). ♦ La griffe du lion. Marque d'une personnalité géniale, d'un style vigoureux. Voilà les clartés qui illuminent le groupe principal détaché en vigueur sur les demi-teintes; mais il manque à tout cela une chose : la griffe du lion (Du Camp, Hollande,1859, p. 47) : 6. Les Mémoires d'Outre-Tombe de Chateaubriand, tant de pages même si justement critiquées, mais marquées encore de la griffe du lion, n'ont fait que confirmer l'idée de son talent et de sa force dans l'esprit des jeunes groupes, toujours prêts à se révolter...
Sainte-Beuve, Nouv. lundis, t. 2, 1862, p. 293. Rem. Cette expr. est adaptée d'un proverbe lat. : Ex ungue leonem « À l'ongle, on connaît le lion ». II. A. − Dans le domaine de la botanique 1. Racine, caïeux ou rhizome de certaines plantes. Griffe d'anémone, d'asperge, de renoncule. Beppo (...) achevait de croquer un croûton et quelques griffes de fenouil (Gide, Caves Vatican,1914, p. 699). 2. Vieilli. Appendice crochu de certaines plantes grimpantes ou rampantes. Synon. crampon.Les griffes du lierre. Les lichens ont en général pour racines des griffes imperceptibles qui s'accrochent aux rochers les plus durs et les plus polis (Bern. de St-P., Harm. nat.,1814, p. 237). B. − ARCHIT., ÉBÉNISTERIE 1. [Dans l'archit. romane] Petit élément décoratif, généralement feuillagé, occupant l'espace délimité par la base circulaire d'une colonne et les angles d'une plinthe carrée. Vers le milieu du xiiiesiècle, les plinthes des bases étant presque toujours taillées sur plan octogonal, la griffe disparaît (Viollet1875). 2. Élément décoratif, généralement en forme de griffe, aux extrémités d'une pièce de mobilier. Les planchers égaux mirent les griffes de bronze terminant les sièges et les tables (Adam, Enf. Aust.,1902, p. 104).Les nombreuses commodes fabriquées sous Louis XVI peuvent se ramener à deux types principaux : la commode à trois tiroirs reposant sur des pieds courts en griffe de lion, en toupie, en gaine... (Viaux, Meuble Fr.,1962, p. 116). C. − TECHNOLOGIE 1. Instrument muni de dents recourbées. a) Instrument en forme de fourche recourbée servant à racler. Griffe de jardinier. Lorsqu'elles se sont produites en grande quantité [les croûtes de mâchefers] le mécanicien doit les extraire du foyer à l'aide de la griffe ou de la pelle à mâchefers (Herdner, Constr. et conduite locomot.,1887, p. 19). b) Instrument en forme de tenailles servant à saisir. Les supplices de la question étoient : le chevalet (...) les lames de fer rouge, les crocs à traîner, les griffes à déchirer (Chateaubr., Ét. ou Disc. hist., t. 3, 1831, p. 50).V. bec ex. 9. c) Instrument muni de crampons et adaptable aux pieds pour grimper aux arbres ou aux poteaux en bois. Je t'ai appris à monter aux arbres [dit Sylvain] (...). Comme Parisien, tu étais obligé d'attacher à tes souliers des griffes en fer, tandis que moi je montais avec mes pieds nus! (Nerval, Bohême gal.,1853, pp. 83-84). d) Instrument en forme de lame courbe servant à faire des incisions ou des marques. La griffe Richter (...) sert à fendre l'écorce des porte-greffes au moyen des dentures de façon à faciliter l'émission des racines (Brunet, Matér. vitic.,1909, p. 49). 2. Dispositif denté d'une machine ou d'un instrument. a) Dispositif denté servant à racler. La griffe sous-soleuse fixée sur l'étançon arrière [de la charrue], derrière le versoir, ameublit le fond de la raie qui vient d'être faite (Passelègue, Mach. agric.,1930, p. 60). b) Dispositif servant à saisir pour maintenir ou entraîner. Griffe de serrage (Métro 1975); griffe d'entraînement (Lanecki 1973). Il existe [dans le cinéma] plusieurs dispositifs d'entraînement du film, qui sont les griffes, la came et la croix de Malte (Graffigny, Cin.,1923, p. 84).Les barres et branches, placées dans un guide spécial et poussées par deux cylindres d'entraînement à griffes viennent, au travers du plateau, buter contre une « enclume » qui permet de régler la longueur de coupe (Dupont, Bois carburant,1941, p. 12). − BIJOUT. Petit crochet servant à maintenir une pierre. Le cabochon, solidement serti, résistait, glissait sous le fer, inébranlable dans sa griffe (A. Daudet, Rois en exil,1879, p. 218). REM. 1. Griffée, subst. fém.,hapax. Synon. de griffade.Elles luttent à se faire des pinces, des griffées, des morsures au sang (Péladan, Vice supr.,1884, p. 177). 2. Griffement, subst. masc.,grifferie, subst. fém.Action de griffer. Quelqu'un raconte le griffement de la figure de MmeBoissy d'Anglas, la maîtresse à la fois de Bourgeois et de Maurice Lefèvre, par la femme de ce dernier, avec des ongles − ce serait historique − qu'elle laissait pousser depuis deux mois (Goncourt, Journal,1896, p. 948).Leurs bouderies de chienne, leurs grifferies de chatte [des femmes] (Valéry, Lettres à qq.-uns,1945, p. 22). 3. Griffette, subst. fém.Petite griffe. S'il lui prenait envie [à un oiseau] de décoller ses mignonnes griffettes du cadre de ma glace (Fabre, Norine,1889, p. 117). Prononc. et Orth. : [gʀif]. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. a) 1175-80 masc. « ongle pointu et crochu de certains animaux; patte armée de griffes » (Renart, éd. M. Roques, 5226 : ferir des gris); b) xive-xvies. criffe fém. (Le Liv. des Esches, ms. de Chartres 419, fo73 rods Gdf. Compl.); 1469 [ms.] griffe (Jean Wauquelin, Girart de Roussillon, éd. L. de Montille, p. 233); 2. 1623 « symbole d'agressivité, de rapacité » (Sorel, Francion, éd. E. Roy, t. 2, p. 133). B. 1. 1545 « nom de divers outils, instruments, pièces en forme de griffe » (Van Aelst, Reigles générales de l'architecture, livre III, chap. X, fo65 vo); 2. a) 1798 « instrument avec lequel on met l'empreinte imitant une signature » (Ac.); b) 1835 « empreinte imitant cette signature » (ibid.); c) 1951 « ruban cousu à l'intérieur d'un vêtement et portant le nom du couturier ou du tailleur » (Figaro, 26 déc., p. 6, col. 6); 3. 1852 « marque de la personnalité de quelqu'un dans ses œuvres » (Flaub., Corresp., p. 398). Soit déverbal de griffer*; soit empr. à un frq. *grif que l'on suppose d'apr. l'a. h. all. grif « action de saisir, de prendre »; m. h. all. grif; all. Griff « id. ». Fréq. abs. littér. : 906. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 981, b) 2 119; xxes. : a) 1 434, b) 1 016. Bbg. Le Breton Grandmaison. Vêt. et environnement. Vie Lang. 1971, p. 445. - Mat. Louis-Philippe. 1951, p. 279. |