| GRENADE1, subst. fém. Fruit du grenadier, de la forme et de la grosseur d'une pomme, à enveloppe coriace, dont l'intérieur est divisé en loges par des cloisons membraneuses renfermant des grains rouges entourés d'une pulpe transparente, comestible, de saveur aigrelette et rafraîchissante. Grenade sure, mûre; fleur, couleur, saveur, jus, sirop de grenade; rouge des grenades; sucer des grenades. Grenade douce, aigre (Ac.). C'est l'heure où le soleil blanchit les vastes cieux Et fend l'écorce d'or des grenades vermeilles (Leconte de Lisle, Poèmes trag.,1886, p. 42).La cosse qui éclate magnifiquement de la grenade entr'ouverte qui répand son jus de toutes parts (Du Bos, Journal,1923, p. 236) :1. Dures grenades entr'ouvertes
Cédant à l'excès de vos grains,
Je crois voir des fronts souverains
Éclatés de leurs découvertes!
Si les soleils par vous subis,
Ô grenades entre-bâillées,
Vous ont fait d'orgueil travaillées
Craquer les cloisons de rubis...
Valéry, Alb. vers anc.,1900, p. 146. ♦ P. métaph. et poét. Joues de grenade; bouche de grenade. Ta bouche de grenade où luit le feu vermeil Que dans le sang du More alluma le soleil? (Gautier, Prem. poés.,1830-45, p.278). − Par symbolisation ♦ [Dans la mythologie gréco-romaine : les pépins de la grenade symbolisent les « douceurs maléfiques », les fautes qui vouent aux enfers (cf. Symboles 1969)] :
2. D'où les deux états : d'abord l'état de lutte; le monde est tentation; il ne faut pas céder aux choses. Puis l'état supérieur, où n'atteignit pas Proserpine qui se souvint toujours d'avoir pris les grains de grenade...
Gide, Journal,1893, p. 43. ♦ [Dans la mystique chrétienne : ,,Saint Jean-de-la-Croix fait des pépins de la grenade le symbole des perfections divines dans leurs effets innombrables`` (Symboles 1969)] :
3. Le grain de grenade. On ne s'engage pas à aimer Dieu, on consent à l'engagement qui a été opéré en soi-même sans soi-même. Faire seulement, en fait d'actes de vertu, ceux dont on ne peut pas s'empêcher, ceux qu'on ne peut pas ne pas faire, mais augmenter sans cesse par l'attention bien dirigée la quantité de ceux qu'on ne peut pas ne pas faire.
S. Weil, Pesanteur,1943, p. 52. Prononc. et Orth. : [gʀ
ənad]. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Ca 1165 pume grenate (Chr. de Troyes, G. d'Angleterre, éd. M. Wilmotte, 1356); ca 1314 grenate (H. de Mondeville, Chirurgie, 1838 ds T.-L.). Prob. empr. aux dial. de l'Italie du Nord : piém. pum graná, lomb. pom granat, istr. pom graná, où pomo remplaça melo « pomme » dans l'expr. melo granato « grenade », du lat. malum granatum « id. » (d'où sont issues, souvent avec des altérations p. étymol. pop., les formes des autres lang. rom.), propr. « pomme à grains » (v. FEW t. 4, p. 239b). Bbg. Hope 1971, p. 41. - Quem. DDL t. 1. |