| GAZETTE, subst. fém. A. − 1. Vx. Publication périodique, souvent hebdomadaire, relatant des faits de la vie politique, littéraire, artistique ou autre. Lire la/sa/les gazette(s); gazette locale, étrangère; remplir les gazettes. Son nom triomphe dans les journaux de sport, même dans les échos des gazettes mondaines et littéraires (Mirbeau, Journal femme ch.,1900, p. 336) : 1. Il n'y a rien à faire contre un journal américain, serait-on Dieu; il n'y a qu'à attendre, qu'à attendre midi... (...). Il y a cent ans, nous dit Ludwig, quand les gazettes ne paraissaient qu'une ou deux fois par semaine, Goethe écrivait qu'il prévoyait des jours terribles où elles paraîtraient trois fois par jour... nous y sommes.
Morand, New-York,1930, p. 196. − [Employé dans un titre de périodique] Un ouvrage qui doit bientôt paroître et dont la Gazette littéraire a publié un fragment plein d'intérêt (Lamennaisds L'Avenir,1830-31, p. 361).L'ancienne Gazette de France, qui s'imprimait au bureau de l'adresse, dans les entresols du Louvre (Hugo, Rhin,1842, p. 139). 2. Région. ou p. plaisant. Journal en général, quotidien ou non. Ses indiscrétions déformées, publiées en échos de gazette médisante (Rolland, J.-Chr., Amies, 1910, p. 1096). − Péj. Bruits, racontars de gazette. Nouvelles peu et mal fondées ou dénuées d'intérêt. Il se peut, au surplus, que toutes ces nouvelles ne soient que des bruits de gazette (Chateaubr., Mém., t. 4, 1848, p. 502) : 2. − Monsieur Lacase, dit-il assez affablement, j'ai rapporté de Pont-l'Évêque quelques journaux; pour moi je ne suis pas grand amateur des racontars de gazettes, mais j'ai pensé qu'ici vous étiez un peu privé de nouvelles et que ces feuilles pourraient vous intéresser.
Gide, Isabelle,1911, p. 634. − Vx. Lire la gazette. [Le sujet est un animal] Être abandonné à sa faim pendant que son maître est au café, au cabaret, et, au fig., avoir faim et regarder un autre manger devant soi. Ah! chez M. le maire, les bêtes n'avaient pas l'habitude de crever de famine, de lire la gazette, comme on dit chez nous (Fabre, Barnabé,1875, p. 178). B. − Récit détaillé, oral ou écrit, de petites nouvelles. 1. Vx ou littér. Chronique minutieuse. Si les nouvelles de cette espèce vous peuvent intéresser, je vous en ferai une gazette (Courier, Lettres Fr. et It.,1810, p. 832).C'est vrai! je n'avais pas terminé ma gazette : ... et samedi, vingt-six, une heure avant dîné, Monsieur de Bergerac est mort assassiné (Rostand, Cyrano,1898, V, 6, p. 220) : 3. On lui doit [à Eugène Sue] (...) la publication de lettres manuscrites d'une sœur Demerez de l'Incarnation, véritable gazette où sont notés au fur et à mesure par une plume catholique les principaux contre-coups et les terreurs de cette guerre des Cévennes.
Sainte-Beuve, Portr. contemp., t. 3, 1840, p. 106. 2. Commérages, cancans, potins sur la voie publique. La gazette du quartier. Vieilles filles occupées à faire la gazette du bourg, leur chaufferette sous les pieds (Pourrat, Gaspard,1930, p. 32) : 4. À six heures, le soir, c'était là que se tenait la gazette du pays; les moindres événements y trouvaient un écho, on s'y livrait à des commentaires sans fin sur ceux-ci qui avaient mangé de la viande, sur la fille à ceux-là, grosse depuis la Chandeleur; et, pendant les deux années, les mêmes commérages avaient évolué avec les saisons...
Zola, Terre,1887, p. 147. C. − Au fig., fam. ou p. plaisant. Personne bavarde, bien informée de tous les petits faits de la vie d'une personne, d'un quartier, d'une ville, etc., et qui s'empresse de les répandre. Être la gazette du quartier. − M. Fillars : Eh bien, mesdames, qu'est-ce qu'on dit de neuf? − Sophie : C'est à vous qu'il faut le demander, car vous êtes une vraie gazette (Leclercq, Prov. dram., Mar. manqué, 1835, 2, p. 58). Marie-Antoinette et MmeElisabeth, l'ayant mis à l'épreuve, avaient placé toute leur confiance en lui et le surnommaient Fidèle... Il était leur gazette (L. Daudet, Lys sangl.,1938, p. 233) : 5. Ce cher vidame était l'entrepôt de toutes les confidences, la gazette du Faubourg; discret néanmoins, et comme toutes les gazettes, ne disant que ce que l'on peut publier.
Balzac, Cabinet ant.,1839, p. 61. Prononc. et Orth. : [gazεt]. Mais [ɑ] à titre de 1ervar. ds Barbeau-Rodhe 1930 et Warn. 1968. D'apr. Mart. Comment prononce 1913, p. 36 et Fouché Prononc. 1959, p. 85 [ɑ] ne fait que se survivre dans ce mot ainsi que dans gazetier. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1609 La Gazette [titre d'un poème satirique]; 1611 « écrit périodique destiné à l'information » (Cotgr.); 1612 (M. Régnier, Sat. XIII, 34 ds
Œuvres, éd. G. Raibaud, p. 173 : Et la Gazette mesme a déjà dit à Rome, La voyant aymer Dieu et la chair maistriser Qu'on n'attend que sa mort pour la canoniser [Macette]). Empr. à l'ital.gazzetta « feuille volante d'information » (dep. av. 1580, V. Borghini ds Batt.), du vénitien Gazeta de le novite, nom d'un journal créé à Venise et qui coûtait une gazeta « pièce de monnaie valant environ trois liards » frappée à Venise en 1539 (d'où fr. gazette « pièce de monnaie italienne » chez D'Aubigné, Hist. univ., XV, 17 ds Hug.); le vénit. gazeta est d'orig. controversée : − soit dér. du lat. class. gāza « trésor, richesses » (aussi lat. médiév., v. Latham; cf. gaze « trésor » au xvies. ds Gdf. et Hug.), empr. au gr. γ
α
́
ζ
α « trésor du roi de Perse » (DEI; Devoto; Batt.), − soit, moins vraisemblablement, dér. du vénit. gaza « pie », de même orig. que geai* (REW3no3640; FEW t. 4, p. 22; Bl.-W.5; EWFS2). Fréq. abs. littér. : 821. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 524, b) 2 453; xxes. : a) 692, b) 459. Bbg. Arickx (I.). Les Orthoépistes sur la sellette. Trav. Ling. Gand. 1972, no3, p. 131. - Couperus (M.). La Terminol. appl. aux périod. et aux journalistes. In : Ét. des périod. anc. Paris, 1972, pp. 59-62. - Hope 1971, p. 198. - Kohlm. 1901, p. 46. - Ritter (E.). Les Quatre dict. fr. B. de l'Inst. nat. genevois. 1905, t. 36, p. 429. - Wind 1928, p. 142, 148, 200. |