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* Dans l'article "FÊTE,, subst. fém."
FÊTE, subst. fém.
Ensemble de réjouissances collectives destinées à commémorer périodiquement un événement :
1. La fête s'élabore autour d'un thème mythique particulier et organise, sinon un désordre, du moins des dérogations à l'ordre, pour obtenir ou réactualiser dans la conscience collective l'assentiment à l'ordre préconisé. C'est donc essentiellement un jeu symbolique qui resitue la praxis par rapport au mythe qui lui donne sens. La fête vaut ce que valent effectivement pour le groupe la symbolique utilisée et le mythe évoqué. De ceci découlent de notables différences entre la fête en milieu archaïque et traditionnel, et la fête dans les sociétés modernes. Thinès-Lemp.1975.
SYNT. Fête commémorative, périodique, annuelle; fête organisée, mémorable, ordinaire; grande, petite fête; préparatifs, vêtements, habits, parure de fête; veille, jour, lendemain de fête; organisation, éclat d'une fête; instituer, organiser, célébrer une fête; assister, participer, s'associer à une fête; être prêt pour une fête.
A.− Dans le domaine relig.[P. réf. à un cycle liturg.] Célébration en l'honneur d'une divinité, d'un être, d'une chose... vénérés par une religion, ou en commémoration d'un événement marquant de son histoire. Fête religieuse.
1. ANTIQ. Fêtes religieuses grecques, romaines, égyptiennes, de l'Antiquité. La fête d'Isis, d'Osiris, de Jupiter, de Junon, de Vénus, etc. Les païens célébraient la plupart de leurs fêtes par des sacrifices et des jeux (Ac.).Ce tableau nous rappelle la fête équinoxiale du printems, célébrée en Égypte sous Aries ou sous l'agneau, en mémoire de ce que le feu du ciel avait embrâsé le monde (Dupuis, Orig. cultes,1796, p. 347).Il [Dicéopolis] revenait de la fête des Panathénées, où avaient été récités, comme de coutume, de longs morceaux de l'Iliade (Thibaudet, Réfl. litt.,1936, p. 224):
2. Le jour de fête n'est pas en principe, du moins chez les Romains, un jour de joie. La fête des mânes est considérée comme un jour triste. Le jour de fête comportait généralement des sacrifices, des processions, des jeux, des repas sacrés (...). Il semble au contraire que chez les Juifs les fêtes eurent d'ordinaire un caractère de joie religieuse. Archéol. chrét.1922.
2. RELIG. JUIVE. Commémoration d'un événement touchant à l'histoire du peuple juif. Fête des juifs; fêtes israélites; fête du Passage (de la mer Rouge). La tente de feuillage que David Sichel dressait chez lui, comme tous les fils d'Israël, au jour de la fête des Tabernacles (Erckm.-Chatr., Ami Fritz,1864, p. 4):
3. Les trois grandes fêtes mosaïques (...). Le quinzième jour du mois de nisan, on célébrait la Pâque, en mémoire de la sortie d'Égypte (...). On offrait au Seigneur les prémices de la moisson de l'orge, et la solennité durait sept jours (...). Sept semaines après la Pâque (...) venait la Pentecôte, appelée aussi la fête de la moisson (...). On offrait au Seigneur les prémices de la moisson du froment (...). La fête ne durait qu'un jour (...). La fête des Tabernacles, célébrée le quinzième jour du septième mois, se prolongeait durant sept jours. C'était comme la fête de la récolte (...) dans laquelle on célébrait joyeusement la rentrée de tous les fruits de l'aire et du pressoir. Bible1912.
3. RELIG. CHRÉT. Commémoration relative à la vie du Christ, de la Vierge ou des saints. Fêtes reconnues par l'Église; les dimanches et les fêtes; les quatre grandes fêtes de l'année (Noël, Pâques, Pentecôte, Assomption); le retour des grandes fêtes; fête de la Vierge, de l'Immaculée Conception; fête des Rameaux, de (la) Pentecôte, de l'Assomption. On fait ce jour-là (24 août 1653) la fête de saint Barthélemy, apôtre (Bremond, Hist. sent. relig., t. 4, 1920, p. 191).Si l'on y croyait, à cette belle fête de Noël, au lieu de s'échapper dans les nuages théologiques, alors se développerait le culte de l'enfant (Alain, Propos,1935, p. 1298).Déjà la fête de la Nativité de la Vierge, qui tombe le 8 septembre, est une de celles qui se célèbrent au milieu du plus grand concours de fidèles (Faral, Vie temps st Louis,1942, p. 223):
4. Avec Jésus les formes anciennes du culte sont périmées, car les croyants ne sont plus asservis au cycle naturel et les événements jadis célébrés n'étaient que figure de la réalité qu'est l'Alliance dans la Pâque du Christ. Aussi la célébration du mystère pascal est-il la fête chrétienne par excellence, dont chaque dimanche rayonne la présence. Léon1975.
Fête-Dieu, fête du Saint(-)Sacrement. Solennité instituée en l'honneur du sacrement de l'Eucharistie et fixée au jeudi qui suit l'octave de la Pentecôte :
5. ... Urbain IV (1261), ce fils de cordonnier (...) eut la gloire de trouver un nouvel aliment à la piété catholique en instituant la fête du Saint-Sacrement (1264)... Montalembert, Ste Élisabeth,1836, p. xx.
Fête des saints, de tous les saints. Célébration de tous les saints fixée au 1ernovembre. Synon. Toussaint.
Rem. La fête des saints est couramment confondue avec la fête des morts qui est célébrée le lendemain (infra).
En partic. Fête des morts. Jour consacré par l'Église à la commémoration des morts (2 novembre). Synon. Jour des morts :
6. ... il n'est pas étonnant que la Toussaint et la fête des morts, qui ne sont qu'une seule fête en deux pensées, se trouvent placées en ce moment de l'automne où il est clair que tout se défait, et que rien ne s'annonce encore. Alain, Propos,1926, p. 691.
Fête d'obligation ou de précepte. Commémoration imposée par l'Église. P. oppos. Fête de dévotion.
Fête chômée. Fête d'obligation marquée civilement par un repos légal d'un jour. Synon. vieillis fête fêtée, fériée.C'était fête chômée; à cette date, l'Église commémore solennellement le jour où la Vierge Marie (...) fut enlevée au ciel en corps et en âme (France, J. d'Arc,t. 2, 1908, p. 24).
Fête carillonnée. Grande fête annoncée dès la veille par des carillons. Ces carrosses (...) transportent la cour à l'église les jours de fête carillonnée (About, Grèce,1854, p. 363).
Fête fixe. Commémoration annuelle dont la date est fixée invariablement.
P. oppos. Fête mobile. Commémoration annuelle dont la date varie en fonction de celle de Pâques, elle-même mobile. Supputation des temps pour le calendrier des fêtes mobiles (Saint-John Perse, Exil,1942, p. 227):
7. ... il avait parlé du jour et de la nuit, de la semaine et des mois, des signes du zodiaque, des épactes, du cycle lunaire et des fêtes mobiles. France, J. d'Arc,t. 1, 1908, p. 205.
Fête double, semi-double, simple. ,,Au rite romain, anciens degrés de solennité des fêtes, aujourd'hui abolis`` (Foi t. 1 1968). Le Gloria des fêtes simples (...) est un bel exemple du chant de cette espèce (d'Indy, Compos. mus.,t. 1, 1897-1900, p. 66).
[Réjouissances dont l'origine réside dans la commémoration d'un saint reconnu comme protecteur ou patron, et organisées le jour de sa fête]
Fête de congrégation :
8. Une messe clôturait les exercices. Tous se trouvèrent réunis à une communion solennelle. Volontiers on se serait cru rejeté d'une année en arrière, à cette fête de congrégation durant laquelle Léonard, nommé préfet, avait songé pour la première fois au miracle de la vocation. Estaunié, Empreinte,1896, p. 155.
Fête (d'une corporation, d'une compagnie, d'un corps de métier). Fête des Écoliers (le jour de la saint Charlemagne). Fête des Cordonniers (le jour de la saint Crépin). Fête des Boulangers (le jour de la saint Honoré) :
9. À la Saint-Pierre, fête des Papetiers, pour la transformation de ses fabriques, Grange donna un banquet en plein air dans le pré, sous Minard. Il y avait son Angliche, les compagnons papetiers, des gouverneurs aux apprentis, et jusqu'aux chiffonnières. Il y avait M. le curé et plusieurs gros bourgeois. Pourrat, Gaspard,1930, p. 98.
Fête patronale (d'une ville, d'un village); fête de village; fête (d'un lieu); fête votive (dans le Midi); fête locale. « Voulez-vous que je vous mène à la fête de Saint-Cloud? » Edgar fut d'avis qu'on y allât, à cause des chevaux de bois (France, Servien,1882, p. 40).Le 15 août, deux jours après son arrivée, était la fête patronale de la ville. On l'avait invité au banquet de la municipalité (Guéhenno, Jean-Jacques,1952, p. 255):
10. Il faut avoir vu nos fêtes votives de Provence, ces paysans debout sur les tables, hurlant (...) tout un village ivre à rouler pour quelques bouteilles de limonade. A. Daudet, N. Roumestan,1881, p. 281.
Fête paroissiale. Synon. de fête patronale.P. ext. Toute fête réunissant les fidèles d'une paroisse. Il me remet le programme de je ne sais plus quelle petite fête paroissiale (Green, Journal,1929, p. 22).
Fête (d'une personne). Réjouissances commémorant le saint dont la personne a reçu le nom à son baptême, organisées le jour de la fête de ce saint et mises à profit pour formuler des souhaits et offrir des présents. Souhaiter à qqn sa fête, une bonne/joyeuse/heureuse fête; offrir à qqn un cadeau pour sa fête; c'est ma fête aujourd'hui; bouquet, gâteau de fête. Ils venaient se pourvoir d'un bouquet pour la fête de leur grand-papa. On leur remit à chacun un petit bouquet de pensées et d'immortelles (Jouy, Hermite,t. 2, 1812, p. 225).Justement, un anniversaire de fête se présenta, ils emplirent la chambre de gros bouquets (Zola, Joie de vivre,1884, p. 1062):
11. Ce soir, peut-être, aurons-nous la pluie avec le feu d'artifice pour la fête du roi [Louis-Philippe]. En passant par les Tuileries, j'ai vu les préparatifs probablement tout ce que je verrai de la Saint-Philippe. Je n'aime pas ces foules, et puis je ne suis pas en gaies dispositions. E. de Guérin, Lettres,1841, p. 430.
Loc. pop. ou arg., par antiphrase. Souhaiter sa fête à qqn. Malmener quelqu'un, lui donner une sévère correction. Ça va être ta fête. Il savait que les autres [ses trois tourmenteurs] n'allaient pas lui faire de fleur, que ça allait être sa fête. Tant pis pour lui (Le Breton, Rififi,1953, p. 91).
B.− Dans le domaine profane
1. [Au plan national]
a) [Avec un caractère institutionnel et public, pour commémorer un événement ou un personnage hist.] Comité, salle des fêtes; rumeurs, décors, décorations de fête; programme d'une fête; fête publique, populaire.
Fête nationale, du 14 juillet, de l'Armistice (de 1918), de la Libération, de la Victoire, de l'Indépendance; Fête de Jeanne d'Arc (8 mai). Revenu au Caire, Bonaparte célèbre la fête anniversaire de la fondation de la République (Chateaubr.,Mém., t. 2,1848,p. 344).14 juillet. − Fête de la République. Je me suis promené par les rues. Les pétards et les drapeaux m'amusaient comme un enfant (Maupass., Contes et nouv.,t. 2, Horla, 1866, p. 1106):
12. Ce 14 juillet qui est à peine une fête légale en pays craonnais (où la fête nationale est plutôt celle de Jeanne d'Arc), s'achevait par un crépuscule radieux. H. Bazin, Vipère,1948, p. 104.
Fête légale. ,,Jour de l'année correspondant à des cérémonies religieuses ou consacré, soit de façon permanente, soit à titre exceptionnel, à des réjouissances civiles et que la loi a déclaré « jour férié »`` (Cap. 1936). V. supra ex. 12.
b) [Pour célébrer des fonctions, des activités considérées comme fondamentales]
Fête du Travail (le 1ermai) :
13. 1793. « Le Duodi, deuxième des sansculottides, sera consacré à l'industrie et à l'activité laborieuse. Cette fête s'appellera la fête du travail ». Fabre d'Églantine, Œuvres politiques,1878, ds Quem. DDL t. 11.
[Avec un caractère à la fois national et privé] Fête des Mères. Célébration instituée en l'honneur de la fonction maternelle et des mères qui l'incarnent, fixée au dernier dimanche du mois de mai (mois de la Vierge Marie), donnant lieu en privé à des réjouissances familiales et donnant à la nation l'occasion d'honorer (par l'attribution de distinctions) des mères particulièrement méritantes. [Dans le même esprit] Fête des Pères (célébrée en juin).
c) Au plur.
[Dans certaines expr., relig. à l'orig., mais considérées d'un point de vue profane et prises dans un sens gén.] Les fêtes de Noël, de Pâques, de la Pentecôte... La succession des jours légalement chômés à l'occasion de ces fêtes. Je t'attends aux fêtes de la Toussaint. Tu es spécialement convié par ma nièce à embellir de ta présence notre modeste asile (Flaub., Corresp.,1859, p. 249).J'irai donc, écrivit-il, passer les fêtes de Pâques à l'Ermitage (Guéhenno, Jean-Jacques,1950, p. 132):
14. ... Marie serait triste, ayant été seule pendant les fêtes de Noël, d'être encore abandonnée pendant mes vacances du Jour de l'An... Mallarmé, Corresp.,1866, p. 195.
Les fêtes de fin d'année. L'ensemble des jours chômés à l'occasion de la fête de Noël et de celle du Nouvel An. P. ell. Les fêtes; époque des fêtes; passer les fêtes en famille, être invité pour les fêtes. Comme tous les paysans elle était prise, au retour des fêtes, d'un accès de piété ponctuelle et machinale (Moselly, Terres lorr.,1907, p. 78):
15. ... ça n'avait pas de bon sens de vouloir faire ce voyage-là en plein hiver, au temps des fêtes, avec le froid qu'il faisait, peut-être bien quatre pieds de neige dans le bois, et seul. Hémon, M. Chapdelaine,1916, p. 140.
Ensemble des manifestations organisées à l'occasion de certaines grandes fêtes. Aller aux fêtes; assister aux fêtes du 14 juillet. J'entendis ainsi passer sous mes fenêtres toutes les fêtes nocturnes du carnaval (Fromentin, Dominique,1863, p. 159).Il regarde les célèbres fêtes avec distraction, sympathie et ennui (Montherl., Bestiaires,1926, p. 472).
2. [Au plan d'une collectivité géogr., prof., soc.]
a) [Pour célébrer quelque chose qui réjouit par l'une ou l'autre de ses qualités] Fête des roses, des jonquilles. À la fête des vendanges, quand on flambe les vieilles queues avec une mèche de soufre, vous me verrez danser encore pour vous sur la tonne roulante, une torche dans chaque main! (Claudel, Protée,1927, I, 1, p. 357):
16. Il est bien fâcheux que l'on ne se soit pas arrêté dès l'origine à une fête en l'honneur de la liberté; fête avec laquelle les Suisses de Châteauvieux n'auraient rien eu de commun. Alors cette fête n'aurait point dû être et n'aurait point été une fête privée, mais publique. L'allégresse générale, l'assentiment de tous les citoyens, le concours de toutes les autorités, les talents de David et des autres artistes, alors bien employés, lui auraient donné tout ce qu'elle devait avoir de grand et d'auguste... Chénier, Iambes,1794, p. 262.
b) [Pour célébrer quelque chose qui réunit, rassemble] Je n'attendais plus rien de la vie sinon qu'elle ressuscitât pour moi, sur le tard, la fête annuelle de l'Institut des langues vivantes (Sartre, Mots,1964, p. 134).
Fête des conscrits. Manifestations joyeuses rassemblant chaque année, dans les villages où la coutume se maintient encore, les soldats nouvellement recrutés pour le service militaire :
17. ... j'ai dû aller au dîner, à la fête des conscrits. Bien que, comme toujours, cette vie à moi m'ait empêché de me mêler à eux comme je l'aurais voulu, j'ai eu les larmes aux yeux de trop comprendre, de trop aimer toute cette grossièreté. Danses sauvages, rubans écarlates, gaudrioles insupportables, sensibleries. Alain-Fournier, Corresp.[avec Rivière], 1906, p. 388.
3. P. ext. Toutes réjouissances non commémoratives, de caractère plus ou moins occasionnel, faisant l'objet de préparatifs plus ou moins importants de la part d'une collectivité, d'une personnalité, d'une personne privée. Il y avait fête au faubourg, et le peuple endimanché montait bruyamment par les rues (Zola, Contes Ninon,1864, p. 55).Qu'arrivera-t-il, dans le cas Où pour votre fête champêtre Le soleil ne paraîtrait pas? (Ponchon, Muse cabaret,1920, p. 264).Les fêtes mondaines, étaient pour l'Américaine une sorte d'école Berlitz (Proust, Temps retr.,1922, p. 960):
18. − C'étaient Monsieur et Madame Fouché de Careil − me dit ma mère qui paraissait ravie − et ils nous ont invités à une fête qu'ils donnent au château de Careil... Gyp, Souv. pte fille,1928, p. 222.
SYNT. Repas, banquet de fête; chants, cris de fête; lumières de fête; fête d'inauguration, de mariage, de collège; fête enfantine, sportive, aérienne, nautique, littéraire, musicale; fête travestie, rustique, vénitienne; fête privée, familiale; fête improvisée, réussie, bruyante, charmante, délicieuse, brillante, somptueuse; donner/offrir une fête (en l'honneur de qqn/à qqn); improviser une fête.
Fête foraine. Rassemblement de stands et de manèges forains (souvent à l'occasion d'une fête locale, en particulier d'une fête de ville ou de village). Cohue, bruit, odeurs de fête foraine. Un terrain vague (...) au milieu duquel une fête foraine s'étendait comme un gala multicolore (Morand, Rococo,1933, p. 182).
P. ell. Je t'aime ainsi, douce France, Avec tes magasins rances, Tes fêtes à loteries (Jammes, De tout temps,1935, p. 132):
19. C'est à la fête que je l'ai trouvée et à la fête que je l'ai perdue. C'était une grande fête. Une fête avec le tir à la carabine et les gaufres et les billards japonais et les bouteilles de champagne et les baraques et les manèges. Cocteau, Théâtre poche1949, p. 135.
Au fig. Amour absolu, carrefour sans fontaine; Mais à tous les bouts, d'étourdissantes fêtes foraines (Laforgue, Poés.,1887, p. 97).
Fête de charité, de bienfaisance. Manifestation organisée par une œuvre de bienfaisance et présentant la particularité d'offrir aux participants l'occasion de faire acte de bienfaisance en se divertissant, en devenant acquéreur de quelque chose en contrepartie. Le nom de tous les donateurs de la fête de charité (Giraudoux, Suzanne,1921, p. 163):
20. − Pour les enfants de déportés, vous ne pouvez pas refuser (...) − Ils ne peuvent pas cracher deux mille francs sans emmerder personne, vos philanthropes? − Ils cracheront une fois, mais pas dix. La charité c'est très joli, mais il faut que ça rapporte. C'est le principe des fêtes de bienfaisance. Beauvoir, Mandarins,1954, p. 250.
Fête de famille. Réjouissances organisées à l'occasion d'un événement heureux concernant une famille ou l'un de ses membres. Cet événement m'ayant surpris au milieu d'une fête de famille, le jour même de mes fiançailles, j'ai tout quitté, fiancée et amis (Dumas père, Monte-Cristo,t. 1, 1846, p. 117):
21. ... j'en viens aux fêtes de famille, que je mets au nombre de ces vieilles habitudes dont je vois avec regret s'affaiblir chaque jour la vénérable autorité. Jouy, Hermite,t. 5, 1814, p. 27.
B.-A. Fête(s) galante(s). Représentation picturale de jeunes hommes et de jeunes femmes livrés au divertissement en costumes de théâtre. Cf. les fêtes de cour de la Régence et Les Indes galantes de Rameau.Les fêtes galantes de Watteau. Les Fêtes galantes parurent l'année qui suivit (...). Qu'est-ce donc que ces fêtes galantes? Elles se donnent dans la Cythère de Watteau (France, Vie littér.,1891, p. 312):
22. Où est le critérium qui nous permettrait de distinguer entre le mystère d'intimité de Vermeer et celui de Pieter de Hoogh, entre la fête galante chez Watteau et la fête galante chez ses imitateurs, Lancret ou Pater? Jankél., Je-ne-sais-quoi,1957, p. 82.
[P. allus. littér.] Les Fêtes galantes. Poèmes de Verlaine :
23. ... d'aucuns de ses livres, La Bonne chanson, Les Fêtes [it. dans le texte] galantes, Romances sans paroles, enfin son dernier volume, Sagesse, renfermaient des poèmes où l'écrivain original [Verlaine] se révélait, tranchant sur la multitude de ses confrères. Huysmans, À rebours,1884, p. 245.
4. Locutions
Être à la fête. Être présent à la fête. Non, elle ne dort pas; c'est aujourd'hui la fête de l'arc, la seule de l'année où l'on danse toute la nuit. Elle est à la fête (Nerval, Filles feu,Sylvie, 1854, p. 598).
Être de (la) fête. Être invité à une fête; y participer. On se régalait d'abord avec les privilégiés qui avaient été de la fête (les personnes qui étaient restées là), des mots qu'Oriane avait dits (Proust, Guermantes 2,1921, p. 465):
24. ... les Beauchêne et les Séguin (...) vinrent tous (...) passer à Chantebled l'après-midi d'un dimanche. Ils avaient même décidé Morange à être de la fête, avec Reine... Zola, Fécondité,1899, p. 337.
(Être) la reine, le héros de la fête. (Être) la personne en l'honneur de laquelle la fête est donnée; (être) la personne la plus remarquée, la plus recherchée, parmi les participants de la fête, pour une qualité ou une autre. Ses talents de société éclipsaient les miens; il devenait le héros de la fête (Reybaud, J. Paturot,1842, p. 332):
25. Cette mémorable soirée fut pendant huit jours l'objet de la chronique du quartier; et Phémie Teinturière, qui avait été reine de la fête, avait l'habitude de dire en en parlant à ses amies : − C'était fièrement beau; il y avait de la bougie, ma chère. Murger, Scènes vie boh.,1851, p. 76.
(Être) en fête. (Être) en train de se livrer à des réjouissances. Il s'habillait avec une élégance tapageuse de provincial en fête (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Bombard, 1884, p. 969).L'enfant écoutait mugir, jusqu'aux lointains de Paris, la foule en fête et grouillant sous les folioles de mai (Adam, Enf. Aust.,1902, p. 149).
C.− Au fig.
1. Tout événement qui réjouit particulièrement en tranchant sur la routine. Chaque dimanche surtout devenait une fête, lorsque le père n'allait pas à son bureau (Zola, Fécondité,1899, p. 235).Il a donc fallu installer tout ce monde [Désiré, sa femme et les enfants]. Ça a été une belle fête (Giono, Regain,1930, p. 225):
26. ... les visites du comte de Lerne étaient en général considérées par les dames comme de petites fêtes très flatteuses pour celles qui en étaient favorisées. Feuillet, Paris.,1881, p. 102.
Faire la fête. Rompre la routine en faisant quelque chose qui réjouit. Trente sous, mon chéri! mais nous allons faire la fête! (Zola, Fécondité,1899p. 2).On a bien marché aujourd'hui, et puis ce vent nous a battus; on va ouvrir une boîte de sardines. Tant pis, on fait la fête. Et puis on va boire un bon coup (Giono, Regain,1930p. 85):
27. Quand nos parents sortaient le soir, nous faisions la fête; nous confectionnions une omelette soufflée que nous mangions à la cuisine, nous bouleversions l'appartement en poussant de grands cris. Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 101.
[Pour signifier que se prolonge l'événement qui réjouit] Et la fête continue! (Titre d'un poème de Prévert. Cf. Paroles, 1946, p. 229).
2. Tout ce qui est source de plaisir pour les yeux, le cœur, l'esprit... Fête des couleurs; tableau qui est une fête pour l'œil. Montesquieu, dont le style est une fête pour l'esprit (Stendhal, Mém. touriste,t. 1, 1838, p. 416).O nuit! ô rafraîchissantes ténèbres! vous êtes pour moi le signal d'une fête intérieure (Baudel.Poèmes prose,1867, p. 107).Il s'agit [dans les Noces de Cana] de donner aux yeux la fête la plus splendide que puisse réaliser la palette (Gautier, Guide,1872, p. 41):
28. C'est un lieu commun, au contraire, que de constater l'émerveillement de l'entrée en Hollande par le nord-est ou le sud, la vapeur d'eau qui s'illumine, les choses et les êtres prenant soudain, baignés par elle, un éclat inattendu, à la fois profond et translucide, la fête des géraniums à toutes les fenêtres... Faure, Espr. formes,1927, p. 80.
3. [Pour désigner qqc. qui paraît à l'image de la fête]
[P. réf. à la fête en tant que célébration, exaltation] La fête suprême de cet art [des verriers de Chartres] n'était ni dans le chœur, ni dans les bras de l'église, ni dans la nef; elle était à l'entrée même de la basilique (Huysmans, Cathédr.,1898, p. 390):
29. Le soleil incessant, ces heures au goût de sommeil et de vacances, n'invitaient plus comme auparavant aux fêtes de l'eau et de la chair. Elles sonnaient creux au contraire dans la ville close et silencieuse. Elles avaient perdu l'éclat cuivré des saisons heureuses. Camus, Peste,1947, p. 1309.
[P. réf. à la fête en tant qu'explosion, déchaînement] C'est [la fiction du rêve] l'imprévu dans toute sa puissance, c'est l'impossible accepté d'avance, c'est la fête sans frein de l'imagination (Sand, Impress. et souv.,1873, p. 171).Dans un monde sonore, résonant et rebondissant, cette fête intense du corps [la danse] devant nos âmes offre lumière et joie (Valéry, Eupalinos,1923, p. 43):
30. Et la mouche bourdonne à pleines ailes, dans une fête de soleil qui la soûle (...) toujours plus haut, affolée de soleil et du bruit de ses ailes. Genevoix, Marcheloup,1934, p. 194.
4. Péj. [P. réf. aux notions de plaisir d'une part, de désordre et d'excès d'autre part, attachées à l'idée de fête] Vie de plaisirs, vie de débauche. Parti de la simple fête du mari coureur (...) il [Beauchêne] en était venu (...) à vivre chez les filles qui le ramassaient sur le trottoir (Zola, Fécondité,1899, p. 663):
31. Il y a d'abord en haut le véritable viveur, celui qui possède réellement les cent cinquante mille francs par an que suppose la grande fête... Bourget, Pastels,1889, p. 5.
Faire la fête. Se livrer à une vie de plaisir, de désordre, de débauche. Synon. faire la noce :
32. Fils d'un notaire d'Angoulême (...) envoyé par cette ville à Paris comme député (...) il [Dutheil] y faisait la fête (...) mais son aimable garçonnière de la rue de Surène, ses succès de joli homme dans le tourbillon de femmes où il vivait, lui coûtaient gros... Zola, Paris,t. 1, 1897, p. 29.
33. − ... Croyez-vous qu'une jolie petite gueuse de vingt ans, qui fait la fête, depuis cinq ou six ans déjà (...) sait encore distinguer un homme de trente ans d'avec un homme de soixante? Maupass., Fort comme la mort,1889, p. 111.
5. Locutions
Être à/de la fête.
Être à la fête. Être dans un état, se livrer à une occupation qui réjouit, procure une grande satisfaction. Ne pas être à la fête. Être dans une situation désagréable, défavorable :
34. Ce que je lui reproche [à Giraudoux], c'est un désir trop conscient de rester dans une certaine tradition (...). Mais la fraîcheur, la nouveauté du style rachètent ce petit défaut. Il donne presque tout le temps l'impression qu'il s'amuse, que rien ne lui coûte, qu'il est à la fête. Green, Journal,1933, p. 127.
35. Pour nous, tout prend un air de fête, parce que c'est une fête de voyager. Mais je suis sûr qu'eux [les Indiens] ne sont pas à la fête. Beauvoir, Mandarins,1954, p. 429.
P. méton. Cette activité [de Napoléon] sans pareille n'avait tout son emploi et toute sa jouissance, n'était véritablement à la fête que quand elle rentrait en campagne (Sainte-Beuve, Caus. lundi,t. 1, 1851, p. 141).
N'avoir jamais été à pareille fête. Ne s'être jamais trouvé dans une situation aussi agréable, aussi réjouissante. Il ne s'était jamais trouvé à pareille fête; car chacun le comblait d'égards (Rolland, J.-Chr.,Adolesc., 1905, p. 323):
36. [Mathieu :] − Enfin, vous, je vois que tout va bien et que vous êtes contente. [Norine :] − Oh! pour sûr, très contente Jamais je n'ai été à pareille fête, nourrie et soignée, dorlotée du matin au soir à ne rien faire. Zola, Fécondité,1899, p. 177.
P. personnification. La prose française fait là aussi [chez Rabelais] sa gymnastique, et le style s'y montre prodigieux pour l'abondance, la liberté, la souplesse, la propriété à la fois et la verve. Jamais la langue, jusque-là, ne s'était trouvée à pareille fête (Sainte-Beuve, Caus. lundi,t. 3, 1851, p. 11).
Ne pas être de la fête. Ne pas participer à quelque événement heureux, en être exclu. Partout des visages empreints de hâte et de projets (...). Elle [Sabine], elle n'était pas de la fête du voyage! (Noailles, Nouv. espér.,1903, p. 277).[Le suj. désigne le soleil] . Le lendemain, le soleil n'était pas de la fête. Dehors un ciel sale, des nuages à ras le plateau et la pluie proche (Estaunié, MmeClapain,1932, p. 131).
(Être) en fête
(Être) plein d'animation, de joie, de bonheur. [Marc] achevait de déjeuner avec ces dames, égayé par le babil de sa petite Louise, très en fête ce jour-là (Zola, Vérité,1902, p. 82).
[Le suj. désigne une chose] (Offrir un spectacle) riant, plein de gaieté. Avril est de l'aurore un frère ressemblant; (...) Les ajoncs sont en fête, et dorent les ravins (Hugo, Art d'être gd-père,1877, p. 183).Les phares, les vitrines en fête, l'énorme bruit des rues m'étourdissaient (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 532).
(Avoir) le cœur en fête. (Être) joyeux, heureux. Je me rendis au café, le cœur en fête. Pour la première fois, j'avais la certitude charmante d'y être attendu (Estaunié, Infirme,1923, p. 25).Erica, le cœur en fête, repartit au bras de Martin Kéerzée (L. de Vilmorin, Retour Erica,1946, p. 107).
(Avoir un) air de fête. [Le suj. désigne une pers.] (Présenter un) aspect réjoui. Fénelon n'était pas dans le secret de ces mauvaises nuits [de Villars], et il en restait sur l'air d'audace et de fête du personnage, sur ses allures de bal et de plaisir aux plus graves moments (Sainte-Beuve, Caus. lundi,t. 13, 1858, p. 108).[Le suj. désigne une chose] (Présenter un) aspect riant. Les chefs-d'œuvre éternels de l'art revêtirent eux-mêmes un air de fête pour saluer sa venue (Mallarmé, Dern. mode,1874, p. 786).Les catalognes et les ronds de tapis nattés attendaient leur tour de donner un air de fête à la maison (Guèvremont, Survenant,1945, p. 100).
Faire + fête
Faire (la) fête à qqn. L'accueillir avec empressement, être très aimable avec lui. Faire fête à ses amis :
37. Les vieilles demoiselles du bourg me faisaient fête. Mademoiselle Élise me donnait des pains d'épice en forme de cœur. Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 14.
P. anal. [Le suj. désigne un chien] Faire fête à (son maître). Le chien fit fête à l'enfant (Maupass., Une Vie,1883, p. 203).P. ext. et p. iron. Vous qui vous plaigniez tant d'être un étranger dans votre propre pays, ces bestioles [des mouches] vous font la fête, elles ont l'air de vous reconnaître (Sartre, Mouches,1943, I, 1, p. 14).
Faire (une) fête de qqc. à qqn. Elle, inquiète et pourtant très douce. Elle me fit une fête de ce jour de solitude (Michelet, Journal,1850, p. 141).
Faire fête à qqc. Lui réserver un accueil favorable. Faire fête à une belle œuvre. La Normandie, avec ses deux capitales, fit fête au nouveau style [le classicisme du XVIesiècle] (Hourticq, Hist. Art, Fr.,1914, p. 141).
[Le compl. désigne un repas] Synon. lui faire honneur.Une salle basse où était servi le souper auquel ils firent fête en gens affamés et altérés (Gautier, Fracasse,1863, p. 281).
Se faire (une) fête de qqc. Se réjouir de quelque chose, en attendre beaucoup de plaisir. Se faire une fête de voir qqn; se faire fête d'avoir qqn pour convive; se faire fête d'une promenade; se faire une fête d'offrir qqc.; se faire une si jolie fête, en imagination, de qqc. :
38. Nous irons certainement passer un mois à Quiberon, et je m'en fais une fête puisque vous viendrez; j'ai bâti là-dessus des projets que je vous soumettrai plus tard. Loti, Journal,1878-81, p. 163.
Proverbe. Ce n'est pas tous les jours fête. Il n'arrive pas quelque chose d'heureux tous les jours, les choses ne sont pas tous les jours faciles. (Dict. xixeet xxes.).
Prononc. et Orth. : [fεt]. Enq. : /fet, (D)/. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Ca 1050 « célébration faite à jour marqué » (Alexis, éd. Chr. Storey, 257 : Cascune feste se fait acomunier). Du lat. festa « id. », neutre plur. subst. devenu fém. de l'adj. festus « de fête ». Fréq. abs. littér. : 7 504. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 11 596, b) 11 502; xxes. : a) 10 941, b) 9 274.
DÉR.
Fêtard, arde, subst.Personne menant une vie de débauche. Synon. noceur.Un jeune gommeux, fils poitrinaire et fêtard d'un grand industriel (Proust, J. filles en fleurs,1918, p. 677). [fεta:ʀ], [fe-], fém. [-aʀd]. 1reattest. 1884 « celui qui mène une vie de plaisirs » (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Yvette, p. 528); de fête*; suff. -ard*. Il est douteux que l'a. fr. fetart « nonchalant, négligent » (ca 1223, G. de Coincy, Miracles Vierge, éd. F. Koenig, I Mir 27, t. II, p. 258, 100) − 1700, Pomey, faitard d'apr. FEW t. 3, p. 482b, soit à identifier avec fêtard. Son rattachement à feste, fête* (FEW t. 3, p. 484b, note 8) fait difficulté, le mot (cf. les dér. fetardie, fetardise) ne présentant jusqu'au xixes. que des formes sans s ni accent circonflexe fetart, fetard, faitard et seulement le sens de « nonchalant ». Un rattachement à faire* et à tard* (cf. FEW t. 3, p. 349b : prov. fai-tard) fait difficulté du point de vue morphol. (le mot est exclusivement adj.) et chronologique. Fréq. abs. littér. : 18.
BBG. − Beekman (H.). Der Begriff fête du village und seine Bezeichnungen im Galloromanischen. Berlin, 1961, passim.Giraud (J.), Pamart (P.), Riverain (J.). Mots dans le vent. Vie Lang. 1971, p. 693. − Jaberg (K.) Grossräumige und kleinräumige Sprachatlanten. Vox. rom. 1954/55, t. 14, p. 12. − Quem. DDL t. 11. − Riverain (J.). Ces mots souvent obscurs. Foi Lang. 1976, no1, pp. 72-73. − Straka (G.). En relisant Menaud, maître-draveur... Mél. Imbs (P.) 1973, p. 293.