| DUVET, subst. masc. A.− [Chez l'oiseau] 1. Ensemble des premières plumes des oisillons. Duvet de poussin. Chaque nid voit des métamorphoses charmantes : un œuf brillant, ensuite un petit couvert de duvet. Ce tendre nourrisson prend des plumes (Chateaubr., Génie,t. 1, 1803, p. 175). Rem. On rencontre chez E. de Goncourt duvetis, subst. masc. Fait de se présenter sous forme de duvet. Voici l'échevèlement du plumage pleureur du coq, le duvetis de la plume naissante d'un poussin monté sur le dos de sa mère (Mais. artiste, 1881, p. 8). 2. Ensemble de petites plumes molles et frisées qui recouvrent des parties du corps de certains oiseaux adultes. Duvet d'oiseau; le duvet d'une aile. Elles descendaient toujours le perron, légères, envolées comme un duvet (Zola, Page amour,1878, p. 1078).Une petite plume de duvet, échappée aux coussins, voletait dans l'air orageux (Duhamel, Suzanne,1941, p. 296). SYNT. Duvet cotonneux, luisant, mou, neigeux, pelucheux, satiné, soyeux; duvet blanc, grisâtre, jaunâtre; duvet de canard, de colibri, de cygne, d'oie, de poule; couvert, recouvert d'un duvet; garni, plein, rembourré, tapissé de duvet; doux, fin, léger comme un duvet; oreiller de duvet; la chaleur, la douceur, la tiédeur du duvet. − P. méton., vieilli. Lit de duvet, matelas de duvet. Coucher sur le duvet, se glisser dans le duvet, rentrer dans le duvet. Nous dormirions sur des duvets plus mous que des nuées (Flaub., Tentation,1856, p. 587). − Région. (Suisse). Gros édredon garni de duvet. Elle disposait autour d'elle l'amour de sa mère comme jadis le duvet tiède et sans poids couvrant son lit d'enfant (Malègue, Augustin,t. 2, 1933, p. 154). − Mod. Sac de couchage bourré de duvet ou d'une matière similaire. Elle s'étendit sur la couchette [d'un refuge de montagne], se glissa dans son duvet, s'y enfouit (R. Frison-Roche, Retour à la montagne,Paris, Le Livre de poche, 1971 [1957], p. 227). ♦ Veste en duvet ou duvet. Veste de sportif garni de duvet ou d'une matière similaire. Ils s'emmitouflèrent dans leurs duvets, ouvrirent la porte (R. Frison-Roche, Retour à la montagne,Paris, Le Livre de poche, 1971 [1957]p. 302). B.− P. anal. 1. Ensemble de poils fins et doux, cachés sous les longs poils qui forment le pelage des mammifères. Duvet d'hermine. Après mon déjeuner de foie rose et de lait, une joie puérile et sans cause me restitue quotidiennement l'âme d'un chaton encore vêtu de duvet fou (Colette, Dialog. bêtes,1905, p. 139). − Spéc. Duvet (de cachemire). Poils très fins de la poitrine des chèvres du Cachemire, utilisés dans la fabrication des cachemires des Indes (d'apr. Bouillet 1859, Privat-Foc. 1870). 2. Poils très fins de la peau humaine. a) Première barbe des jeunes gens. Un duvet naissant, précoce; duvet d'éphèbe; un soupçon de duvet sur les joues. Cependant il devenait un grand garçon et un fin duvet lui dorait la lèvre (France, Balth.,1889, p. 251). Rem. La docum. atteste un subst. masc. duvetier. Poilu dont la barbe n'est encore qu'un simple duvet. Blaire pourrait être le père de Biquet, qui est un duvetier de la classe 13 (Barbusse, Feu, 1916, p. 21). b) Ensemble de poils très fins qui recouvrent certaines parties du corps (la joue et la lèvre en parlant de la femme, la nuque, la poitrine, etc.). Un duvet fourni; duvet blond, doré, noir, roussâtre. Nana était toute velue, un duvet de rousse faisait de son corps un velours (Zola, Nana,1880, p. 1271).À la naissance de vos seins, dans le duvet entre vos seins, un de vos cils est tombé (Montherl., Reine morte,1942, II, 2etabl., 5, p. 200). 3. Ensemble de petits poils soyeux qui recouvrent les tiges, les feuilles ou les fruits de certains végétaux. Le duvet de l'armoise, du chardon, du chanvre, des peupliers; le duvet d'une feuille; duvet de fruit. La pêche au frais duvet, à la robe vermeille (Michaud, Printemps proscrit,1803, p. 82). C.− P. ext. 1. Ce qui a l'apparence du duvet. Le reste du terrain est couvert d'un léger duvet de gazon, semé de fleurs du rouge le plus éclatant (Lamart., Voy. Orient,t. 1, 1835, p. 187).La neige tombait plus épaisse, leurs vêtements confondus se liséraient d'un fin duvet blanc (Zola, Terre,1887, p. 317).Un reflet infiniment doux de quelque clarté inconnue émanait de cette présence et se répandait sur sa peinture comme un duvet de lumière (Bloy, Femme pauvre,1897, p. 217): 1. ... dans le carreau de la fenêtre, au-dessus d'un petit bois noir, je vis des nuages échancrés dont le doux duvet était d'un rose fixé, mort, qui ne changera plus, ...
Proust, À l'ombre des jeunes filles en fleurs,1918, p. 654. 2. Au fig. a) [Symbolisant l'innocence] Le duvet de l'enfance. Tous deux nous éprouvons l'amour pour la première fois; nous nous apportons l'un à l'autre un duvet que nul contact n'a pollué (Renan, Drames philos.,Prêtre Némi, 1885, II, 4, p. 556). b) [Symbolisant une protection] Le duvet des habitudes. Une génération douillette, sensitive, efféminée se forme ainsi dans le duvet et dans l'abondance (Amiel, Journal,1866, p. 208): 2. ... il y avait six semaines qu'ils [V. Hugo et ses frères] étaient à Madrid, menant une vie d'oiseaux, sautillant et chantant depuis le matin jusqu'au moment où ils allaient se blottir dans le duvet de leur jolie chambre de soie jaune.
MmeHugo, Victor Hugo raconté par un témoin de sa vie,1863, p. 115. c) [Symbolisant la douceur] Le galant, tournait autour d'elle, tout velours, tout duvet (Duranty, Malh. H. Gérard,1860, p. 297).Il la prit [le Milord Sarcinette] dans un enlacement doux comme un duvet et la baisa sur les yeux (Carco, Innoc.,1916, p. 245). Prononc. et Orth. : [dyvε]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. a) Av. 1278 ornith. (Marques de Rome, 33d 3 ds T.-L.); b) 1803 « premières plumes des jeunes oiseaux » (Chateaubr., loc. cit.); 2. 1680 « poil doux et fin qui pousse avant la barbe sur le visage des adolescents » (Rich.); 3. 1700 bot. (Mémoires de l'Ac. des sc., p. 30 ds Trév. 1752); 4. 1760 « poil fin et court de certains quadrupèdes » (Buffon, Hist. naturelle, Quadrupèdes, t. 5, p. 424); 5. [1768 en Suisse romande « édredon » (Feuille d'avis de Neuchâtel, 30 juin ds Pierreh.)]; 1957 « sac de couchage » (R. Frison-Roche, loc. cit.). Réfection inexpliquée de dumet (1473 dumect cité ds Archives historiques du Poitou, t. 42, p. 16 ds IGLF), lui-même dér. de dum, dun (1remoitié xiiies. [ms.], Partonopeus de Blois, éd. J. Gildea, t. 1, p. 462 − début xives., G. Tilander, Glanures lexicographiques, 1932, p. 73), cf. lat. médiév. duma (ca 1250, Frédéric II, Tractatus de arte venandi ds Z. rom. Philol., t. 46, 1926, p. 286). Les formes en -m-sont prob. une altération de dun d'apr. plume, dun étant empr. à l'a. nord. dunn « duvet » (De Vries Anord.), cf. norv. suéd. dan. dun, angl. down, all. Daune. Fréq. abs. littér. : 488. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 682, b) 770; xxes. : a) 770, b) 616. Bbg. Gir. t. 2 Nouv. Rem. 1834, p. 33. − Hasselrot 20es. 1972, p. 10. − Piron (M.). Les Belgicismes lex. In : [Mél. Imbs (P.)]. Trav. Ling. Litt. Strasbourg. 1973, t. 11, no1, p. 299. − Sain. Sources t. 1. 1972 [1925], p. 400; t. 2 1972 [1925], p. 294; t. 3 1972 [1930], p. 535. |