| ![]() ![]() ![]() ![]() DORÉ, ÉE, part. passé, adj. et subst. I.− Part. passé de dorer*. II.− Emploi adj. A.− TECHNOL. et usuel. Qui est recouvert d'or, d'ornements dorés. 1. [En parlant d'un obj., d'un matériau] Recouvert d'une mince couche d'or ou d'une substance ayant l'apparence de l'or. Bois, bronze, marbre doré; cadre, vase doré; statue dorée. Un long mur avec de grands panneaux de bois noir suspendus, tenus par des clous dorés (Verlaine,
Œuvres compl.,t. 5, Confessions, 1895, p. 42): 1. Les fauteuils et les divans ont les pieds dorés. Autour de la salle il y a des consoles dorées; et les lambris (...) ma foi, il y a aussi des lambris dorés. La chose est complète, comme tu vois.
Nerval, Voyage en Orient,t. 1, 1851, p. 75. − Spéc., RELIURE. [En parlant d'un livre] Doré sur tranche. Dont la (les) tranche(s) est (sont) recouverte(s) d'une couche d'or. P. plaisant. Fourchevif [apercevant la livrée de Tronquoy]. − Comment, te voilà encore doré sur tranches à neuf heures du matin? (...) va mettre ta petite veste (Labiche, Fourchevif,1859, 3, p. 383).Il faillit tomber sur un état-major entièrement doré sur tranche (Giono, Bonheur fou,1957, p. 446). − Emploi subst. à valeur de neutre. Une seule chambre avait échappé aux fauteuils acajou, au doré des pendules sous globe (Malègue, Augustin,t. 1, 1933, p. 126). 2. Recouvert, enrichi d'ornements dorés. Un habit doré; un salon doré. Dans les pays religieux, la cathédrale est l'endroit le plus orné, le plus riche, le plus doré, le plus fleuri (Gautier, Tra los montes,1843, p. 155).P. métaph. Les façades dorées des siècles dits chrétiens (Mauriac, Bloc-notes,1958, p. 270). − [En parlant de pers.] Vêtu d'habits dorés, chamarrés. Les généraux dorés galopent triomphants, Regardés par les morts tombés à la renverse (Hugo, Châtim.,1853, p. 20): 2. ... j'ai aperçu (...) des nuées de rabatteurs en béret saxon courant et criant dans les fourrés, pendant que des chasseurs dorés et empanachés s'embusquaient à chaque tournant d'allée.
A. Daudet, Robert Helmont,1874, p. 195. B.− P. anal. Qui a la couleur, l'apparence, l'éclat ou les reflets de l'or. 1. TECHNOLOGIE a) PEINT. Teintes dorées. Teintes obtenues par mélange de jaune, de rouge et d'orangé, ou par des alliages métalliques. Jaune doré; beige doré; un blond doré. Coulé pour la chair, très fin : le ton de laque jaune et jaune de zinc avec laque rouge dorée (Delacroix, Journal,1853, p. 7).Le pentasulfure d'antimoine, dit aussi soufre doré (...) sert à la fois de vulcanisant (...) et de colorant (Graffigny, Industr. caoutch.,1928, p. 55). b) CUIS. [En parlant d'une préparation culinaire] Qui a une couleur d'or, un aspect brillant, dû à la cuisson et/ou à un enrobage d'œuf battu. Une belle boulangerie (...) étalait sous le nez des passants des gâteaux et de grands pains dorés (Zola, Travail,t. 1, 1901, p. 18).C'était une cuisse de poulet, rôtie à point, dorée, que je humais déjà (Gide, Journal,1943, p. 208). − Spéc., région. Pain doré. Pain trempé dans du lait, des œufs battus et frit au beurre. Synon. pain perdu : 3. ... il y aurait toujours des repas à la galette de sarrazin que maman faisait si bien et que l'on arrosait de mélasse presque noire; il y avait aussi des repas au « pain doré »; aux crèpes pas chères; ...
C. Jasmin, La Petite patrie,Montréal, éd. La Presse, 1972, p. 109. 2. Qui a l'éclat ou la couleur de l'or; qui a des reflets irisés. a) [En parlant d'une chose] Un blé doré; un vin doré; une lumière dorée. Si dur que soit ce marbre du Pentélique, et quelle qu'en soit la patine séculaire, jaune, chaude, blonde, paille, dorée (...) ce marbre reçoit d'autres atteintes (Péguy, Clio,1914, p. 26).Quelques sonneries de clairon dans le ciel encore doré témoignaient seulement que les militaires se donnaient l'air de faire leur métier (Camus, Peste,1947, p. 1285). ♦ Emploi subst. à valeur de neutre. La tiédeur, le doré du jour, la paix, tout ce qui en avait sa gloire subsistaient en traces légères malgré les ombres (Giono, Hussard,1951, p. 332). − BOT. Chêne* doré; épicéa* doré; if* doré; pourpier* doré. b) [Dans un syntagme nominal caractérisant un être animé] Une chevelure, un pelage, un plumage doré(e). MlleBeaupré suspend un instant sa vitesse et Rose peut admirer cette alezane dorée (Morand, Rococo,1933, p. 51): 4. ... deux jeunes femmes dans un coin mal éclairé riaient doucement avec un marin dont la chevelure tombait en cascade dorée sur un visage où l'alcool mettait un sourire d'enfant.
Green, Chaque homme dans sa nuit,1960, p. 207. − En partic. ♦ [En parlant des yeux, du regard] Qui a des reflets, des lueurs rappelant ceux de l'or. Ses yeux n'étaient pas bleus comme je l'avais cru, mais dorés (Vercors, Silence mer,1942, p. 31). ♦ [En parlant de l'épiderme] Hâlé, bronzé. Il haussa les épaules et effleura de la main, en passant, la joue dorée du petit clergeon, debout contre le mur (Bernanos, Crime,1935, p. 850).Au détour de la route, toute rousse, toute dorée dans sa robe blanche, Nini vient vers moi (Vialar, Pt jour,1947, p. 279). − [En parlant d'un animal] Des mouvements glissants, mous et onduleux, comme en ont les tanches dorées aux profondeurs des eaux limpides (Noailles, Nouv. espér.,1903, p. 240).Des lézards dorés se chauffaient parmi les pierres (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 429). ♦ BACTÉRIOL., ZOOL. Staphylocoque* doré; cétoine* dorée; mouche* dorée. − P. métaph. [En parlant d'un son, d'une voix] C'était un charme alors d'ouïr cette voix harmonieuse [de M. Villemain] et dorée qui semblait celle de la sirène (Sainte-Beuve, Nouv. lundis,t. 12, 1863-69, p. 416).Nous entendions au bout du jardin (...) le double tintement timide, ovale et doré de la clochette pour les étrangers (Proust, Swann,1913, p. 14). C.− Au fig. 1. [P. réf. à l'or en tant que symbole de richesse] a) Souvent péj. [En parlant d'une pers., d'un groupe hum., et p. méton. de ses conditions d'existence] Qui vit dans une aisance matérielle extrême et profite des privilèges sociaux. Cette heureuse enfance, cette adolescence dorée n'avait jamais rencontré d'opposition à ses désirs (Balzac, Cabinet ant.,1839, p. 30).Les courtisans dorés sont les vils astronomes Qui contemplent d'en bas les rois, ces faux soleils (Hugo, Pape,1878, p. 74): 5. Il reste que ces sornettes, puisqu'il vous plaît de les appeler ainsi, sont un des luxes de la bourgeoisie et qu'en les lisant, vous prenez le pouls et la température des élites dorées au sort desquelles le vôtre se trouve lié.
Aymé, Le Confort intellectuel,1949, p. 204. − Jeunesse dorée ♦ HIST. Jeunes gens de la bourgeoisie aisée qui prirent part à la réaction contre la terreur. Jusqu'aux journées de prairial, les royalistes (...) demeurèrent dans les rangs de cette jeunesse dorée, et servirent sous les ordres de la faction thermidorienne (Sainte-Beuve, Prem. lundis, t. 1, 1869, p. 216). ♦ Mod. Jeunes gens généralement désœuvrés appartenant aux couches privilégiées de la société. Là, sur des divans (...) des jeunes hommes étaient assis (...). La jeunesse dorée de Fez, la nouvelle génération, les futurs caïds et les futurs vizirs (Loti, Maroc,1889, p. 185).La jeunesse dorée de l'endroit est en train de jouer au baby-foot (Giono, Gds chemins,1951, p. 155).[Avec la connotation asociale de blouson noir] Blousons dorés. Jeunes oisifs issus de la bourgeoisie aisée. − Loc. Rêve, songe doré. Projet merveilleux. Je me suis habituée à voir Arthur (...); je l'épouserai avec joie car je sais que ce mariage est depuis longtemps le songe doré de mon père (Dumas père, Teresa,1832, II, 6, p. 170). b) [Dans des emplois fondés sur une antithèse; en parlant de conditions jugées basses, mauvaises ou néfastes] Misère dorée. Vous ignorez l'étendue de certaines infortunes dorées (Balzac, Secrets Cadignan,1839, p. 347).Aujourd'hui même, dans ce château, plusieurs frères de Moulay Yousef sont relégués au fond de leurs appartements, dans une captivité dorée (Tharaud, Rabat,1918, p. 236).Le mot bourgeois n'était employé que par la noblesse qui entendait ainsi souligner une distance entre les gens bien nés et la roture dorée (Aymé, Confort,1949, p. 46). c) Proverbe. Bonne renommée vaut mieux que ceinture* dorée. 2. [Avec l'idée de richesse, de plénitude mor.] :
6. Wolfgang Gœthe va s'éteindre (...). Quel soir auguste! Quel regard sur la vie pleine et dorée, quand, à l'extrême de l'âge, il contemple, − que dis-je − il compose encore son propre crépuscule...
Valéry, Variété IV,1938, p. 126. − LITT. La Légende dorée. Histoire des Saints écrite par Jacques de Voragine. Rien de plus beau, de plus robuste et de plus fier que cette figure de guerrier [saint Georges dans la Sainte Famille de Véronèse] qui serait aussi bien à sa place dans un tournoi que dans la Légende dorée (Gautier, Guide Louvre,1872, p. 82). 3. [P. réf. à la séduction de l'or, à l'aspect trompeur des dorures et à leur fonction d'ornement] Sans effort, sans y attacher d'importance, il jonglait avec les rimes dorées en manière de passe-temps (Saint-Saëns, Portr. et souv.,1909, p. 182). − Langue, parole dorée. Manière de s'exprimer, de présenter les choses, habile et ornée, généralement trompeuse. Le commerce le passionnait [Octave], le commerce du luxe de la femme, où il entre une séduction, une possession lente par des paroles dorées et des regards adulateurs (Zola, Pot-Bouille,1882, p. 13).C'est réellement à Guignol que fait penser le vainqueur de l'Ordre Moral, un Gambetta, l'aventurier subtil, à la langue dorée (Bernanos, Gde peur,1931, p. 109). III.− Emploi subst. A.− Subst. masc., région. (Canada). Poisson d'eau douce estimé en cuisine. Plus humble, sans prétention autre que de donner un beau nom à un beau poisson, le canadien-français a appelé doré l'animal bariolé (A.-N. Montpetit, Les Poissons d'eau douce,1897, p. 52 ds Canadian. 1969). B.− Subst. fém. 1. Arg., vx. Femme de mœurs légères. « Le Soir » a pris pour des ouvrières les petites dorées, autrement dit : les cocottes (Fustier, Suppl. dict. de Delvau,1889, p. 530). 2. Vx. Mince tranche de pain recouverte de beurre ou de confiture. Rem. Attesté ds la plupart des dict. généraux. 3. ICHTYOL. Poisson osseux des mers d'Europe. Synon. de saint-pierre.La dorée (...) mesure 0,60 m de long (...), sa chair, quoique délicate, est peu estimée (Nouv. Lar. ill.). Fréq. abs. littér. : 3 048. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 3 687, b) 5 604; xxes. : a) 5 039, b) 3 782. |