| DIRE1, verbe trans. I.− [Le suj. désigne une ou plusieurs pers.; il est censé se trouver face à face avec le destinataire du propos] Énoncer un propos par la parole physiquement articulée avec l'intention de le communiquer et d'appeler éventuellement une réponse ou une réaction. Dire qqc. à qqn. A.− [Processus de la communication : forme des constr. syntaxiques] 1. [Le destinataire est pris en considération, le compl. d'obj. désigne un propos] a) [Le compl. d'obj. est un propos rapporté au style dir., entouré de guillemets et précédé de 2 points] Il (lui) dit alors : « Bon ». − Spéc. [Le verbe dire est placé en incise ou en fin de propos, dans les 2 cas avec inversion du suj.] La séance est ouverte, dit le président; dit-il, dis-je, qu'il dit. ♦ Emploi abs. [En énoncé indépendant (pour clore un discours)] J'ai dit! J'ai fini de parler. b) [Le compl. d'obj. est un n. ou un pron.] Je lui ai dit toute ma pensée, ce que je pense. ♦ Se dire + attribut de l'obj.Se dire satisfait de. ♦ Emploi réciproque. Se dire ses quatre vérités. c) [Le compl. est une prop. sub. complétive ou interr. indir. à l'ind. ou au cond.] Je lui dis que c'est possible, que ce serait possible, comment je crois pouvoir faire. − Cas partic. [La communication se fait par un code, p. ex. écrit, dérivé de la parole articulée, gén. précisé par le cont.] Il me dit dans sa lettre que. P. méton. [La pers. émettrice étant exprimée par un adj. poss. ou suggérée par le cont.] Son télégramme dit que. ♦ [Suj. parlant et destinataire sont la même pers.] Se dire à soi-même, dire en soi-même. Rem. Quasi-synon. entre dire en soi et penser. d) [Le compl. d'obj. est un inf., le suj. de dire et de l'inf. compl. désignant la même pers.] Littér. Il dit préférer. 2. [Le destinataire est pris en considération, le compl. d'obj. désigne une invitation à agir] a) [Le destinataire du propos et le suj. de l'action à faire désignent la même pers.] Dire à qqn de + inf. − [En manière d'insistance, dire que + ind. ou cond. d'un auxil. de mode exprimant l'obligation] Je leur ai dit qu'ils devront veiller, auraient à prendre garde. b) [Le destinataire du propos et le suj. de l'action désignent des pers. différentes] Dire que + verbe au subj. 3. [Le destinataire n'est apparemment pas pris en considération] a) [P. réf. à des propos entendus] On dit que; dit-on. b) [P. réf. à des manières de parler usuelles] Il est, comme on dit, complètement fauché. B.− [Processus de la communication : valeurs sém.] 1. Exprimer par la parole un propos. a) Emploi trans. dir.
α) Faire connaître par la parole, énoncer, exprimer. Dire qqc. à, de qqn, dire que, dire comment, se dire à soi-même. Anton. partiel faire, écrire.Chaque fois que le jeune Ernest sortait de chez son père, il subissait un interrogatoire inquisitorial sur tout ce que le comte avait fait et dit (Balzac, Gobseck,1830, p. 427).J'aime mieux te dire tout, mon ami. Je suis partie hier avec l'intention de ne plus revenir (Champfl., Avent. MlleMariette,1853, p. 43).Dans la morale, comme dans l'art, dire n'est rien, faire est tout (Renan, Vie Jésus,1863, p. 97): 1. J'ai recueilli, consigné, jour par jour, tout ce que j'ai vu de Napoléon, tout ce que je lui ai entendu dire, durant les dix-huit mois que j'ai été auprès de sa personne. Or, dans ces conversations du dernier abandon, et qui se passaient comme étant déjà de l'autre monde, il devra s'être peint lui-même comme dans un miroir...
Las Cases, Le Mémorial de Sainte-Hélène,t. 1, 1823, p. 3. 2. − (...) Qu'est-ce que tu m'écrivais?
− Je t'écrivais... Non, vois-tu, je n'ose même pas te le dire. Tu vas encore t'emporter.
− Penses-tu! Je comprends trop bien ton ennui. Raconte-moi l'affaire tranquillement et on y réfléchira ensemble.
Aymé, La Jument verte,1933, p. 136. SYNT. Dire son nom (cf. Flaub., Tentation, 1849, p. 290). Finir par dire (que). Un jour, après un emportement de son mari dont on a toujours ignoré la cause, cet homme finit par lui dire : « Allez dans votre chambre, madame! » (Barb. d'Aurev., Memor. A... B..., 1864, p. 438). Dire la raison de (cf. Balzac, Illus. perdues, 1843, p. 143). Avoir raison de dire. J'avais raison de dire qu'il n'était pas fait pour naître parmi les pauvres (Proust, Sodome, 1922, p. 847). Dire des absurdités (cf. Flaub., Corresp., 1857, p. 210, 211). Dire des âneries (cf. Gide, Faux-monn., 1925, p. 1087). Dire des riens (cf. Balzac, op. cit., p. 49). Dire des sornettes (cf. Duhamel, Terre promise, 1934, p. 60). − Locutions ♦ [Dans des énoncés de la lang. parlée souvent fam. et du style dir., à caractère gén. exclam., adversatif, interr.] C'est tout dire, c'est beaucoup dire, c'est dire si...; ce n'est pas pour dire, mais...; c'est moi qui vous le dis! Je ne vous le fais pas dire; je ne vous dis que ça. Va me le chercher [Agénor] (...) je ne te dis que ça (Labiche, Prix Martin,1876, III, 8, p. 99).À qui le dites-vous? Je lui en ai dit (cf. Colette, Music-Hall, 1913, p. 112). Ne pas s'en faire et laisser dire (Dorgelès, Croix de bois,1919, p. 171).Avoir beau dire et beau faire (cf. Céline, Mort à crédit,1936, p. 509); Bernanos, Mauv. rêve, 1948, p. 881; cf. aussi beau ex. 112 à 114.Que tu dis, qu'il dit. Le gros mec s'approche. Tu me cherches des crosses, qu'il me dit. Pan, pan, aussi sec, mon poing dans chaque œil, et toc, mon gauche dans le creux de l'estomac, total, voilà le gros par terre, sans dire ouf (Queneau, Pierrot,1942, p. 19).Vous m'en direz des nouvelles. Entrez, automatiques comme tout, dans les Ordres de l'Harmonie Bien-Veillante! Et vous m'en direz des nouvelles (Laforgue, Moral. légend.,1887, p. 168). ♦ [Dans des énoncés à caractère narratif] Sans dire une parole (Hugo, Misér.,t. 2, 1862, p. 264).Ne dire mot (Rolland, J.-Chr.,Buisson ard., 1911, p. 1304).Sans mot dire (Clemenceau, Iniquité,1899, p. 37).Ce n'est pas une chose à dire. Il sait/ne sait pas ce qu'il dit; il ne veut pas qu'il soit dit; il n'est pas dit (que). Ne pas se le faire dire deux fois. Voilà qui est dit; tout n'est pas dit; et tout est dit. Puisque je suis sur le chapitre du grand critique encore quelques anecdotes, et tout est dit (Vallès, Réfract.,1865, p. 131).Proverbes. Qui ne dit mot consent (Romains, Hommes bonne vol.,1932, p. 42).Dis-moi qui tu hantes, je te dirai qui tu es. On dit communément : je te dirai qui tu es, dis-moi qui tu hantes; on peut dire avec tout autant de certitude : dis-moi ce que tu lis, je te dirai qui tu es (Jouy, Hermite, t. 3, 1813, p. 289). − Spéc. Exprimer des sentiments. Dire ses craintes (cf. Michelet, Journal, 1842, p. 383), Dire sa tendresse (cf. Maupass., Contes et nouv., t. 1, Nos lettres, 1888, p. 1106). Encore un mot dont il usait souvent : « Pourrai-je dire mon sentiment? » (Vallès, Réfract.,1865p. 124). ♦ Se dire (que).Ils s'étaient dit qu'une grande fille de quatorze ans n'est plus une enfant, et n'a pas été créée pour vivre seule (Loti, Mariage,1882, p. 26): 3. La musique plate et les charmants pas de Mademoiselle Elssler lui causèrent un enchantement qui l'étonna. Il se disait vaguement qu'il ne jouirait pas longtemps encore de toutes ces belles choses, et à cause de cela elles ne lui donnaient pas d'humeur.
Stendhal, Lucien Leuwen,t. 3, 1835, p. 368. 4. ... le menton est opiniâtre, le front raisonnable et volontaire sous les bandeaux modestes. Je me suis dit en examinant ce visage qu'on eût cru modelé par la douleur d'une longue vie, que la France battue chercherait en elle-même les raisons de continuer sa route...
Green, Journal,1940, p. 13. 5. Malaisé de se sentir bon quand on se laisse tout penser, tout se dire. Mais alors l'on n'est même pas... mauvais. Tout se dire, c'est enfin rejeter tous les attributs, − tendre vers le moi pur.
Valéry, Mauvaises pensées et autres,1942, p. 173.
β) Exposer, raconter, narrer. ♦ Répandre une nouvelle. On dit; les mauvaises langues disent (que); (le) qu'en dira-t-on. Moi, un écrivain, rédacteur au Mercure (...) je suis soumis aux qu'en-dira-t-on du personnel subalterne de la maison (Léautaud, Journal littér.,t. 3, 1910-21, p. 375). ♦ Dire l'avenir, la bonne aventure, les cartes. Lorsqu'on fut revenu au salon, il [Gontran] se fit dire les cartes par Louise, qui savait fort bien annoncer l'avenir (Maupass., Mt-Oriol,1887, p. 207). ♦ Dire le droit (cf. droit3I B 2).
γ) Exprimer un avis, une opinion. Puisque vous me permettez de dire mon avis (Bern. de St-P., Chaum. ind.,1791, p. 102).Après tout, il me semble qu'ici chacun a bien le droit de dire son opinion (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène,t. 1, 1823, p. 175): 6. Je livre ce système, si c'en est un, aux méditations des penseurs. Ils verront facilement quelles doivent être ses heureuses conséquences, et combien il est appuyé par tout ce que nous avons dit précédemment de l'esprit et des principes des différents gouvernements...
Destutt de Tracy, Commentaire sur l'Esprit des lois de Montesquieu,1807, p. 209. 7. Mais quoi que l'on puisse dire sur la richesse doctrinale et sur la poésie de ces pièces liturgiques, leur plus grande gloire est d'avoir inauguré le culte public du cœur de Jésus; priorité mémorable, qu'on a vainement essayé de contester et sur laquelle il n'est pas inutile de dire encore quelques mots.
Bremond, Hist. littér. du sentiment relig. en France, t. 3, 1921, p. 638. ♦ On dirait (d') + subst. Le buste de cet homme [le maître de poste] était un bloc; vous eussiez dit d'un taureau relevé sur ses deux jambes de derrière (Balzac, U. Mirouët,1841, p. 5).On dirait un essaim qui grouille (Moréas, Syrtes,1884, p. 7).C'est vitreux, mou, aveugle, bordé de rouge, on dirait des écailles de poisson (Sartre, Nausée,1938, p. 33). ♦ On dirait que. On dirait volontiers d'eux qu'ils ignorent ce que Taine, parlant de Michelet, appelait « l'imagination du cœur » (Benda, Fr. byz.,1945, p. 143).On aurait dit que Robert avait entendu le murmure de mes pensées (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 335). ♦ Fam. et arg. (C'est) comme qui dirait. Non pas une part de la moitié, non ... ce serait trop; ... mais, comme qui dirait une prime de cinquante pour cent (France, Jocaste,1879, p. 108). ♦ Dire son fait à qqn. Nous quittons le municipal après lui avoir bien dit son fait (Stendhal, H. Brulard,t. 2, 1836, p. 475).Je voulais dire son fait à la critique (Goncourt, Journal,1889, p. 898): 8. J'ai vu aussi qu'il avait le goût de la justice, qu'il avait du courage dans les relations, une espèce de longanimité, de bienveillance pour les crétins, mais tout à coup susceptible de dire son fait.
Barrès,Mes cahiers,t. 2,1899-1901,p. 145. ♦ Se dire, dire qqn ou qqc. + attribut de l'obj.Elle se disait fort malade (Sand, Hist. vie,t. 3, 1855, p. 141).Les personnes dites immorales (Proust, Fugit.,1922, p. 678): 9. Vous tombez, chère Athéna, dans un moment de l'entretien qu'il n'est pas exagéré de dire pathétique.
Duhamel,Chronique des Pasquier,Cécile parmi nous,1938,p. 49. ♦ Dire + inf.Et vous dites aimer votre fille! (Lemercier, Pinto,1800, I, 3, p. 14).Vous calculez, et vous dites aimer (Balzac, Langeais,1834, p. 276): 10. Il expliquait que la mine ne pouvait être la propriété du mineur, comme le métier est celle du tisserand, et il disait préférer la participation aux bénéfices, l'ouvrier intéressé, devenu l'enfant de la maison.
Zola, Germinal,1885, p. 1382.
δ) Énoncer une objection, une critique. Qu'avez-vous à dire à cela, contre cela? Synon. redire : 11. Ô Brisson, que de belles choses vous disiez, sous l'Empire, contre les ministres qui organisaient des tumultes comme celui que vous avez voulu et préparé hier!
Clemenceau, Vers la réparation,1899, p. 263. SYNT. N'avoir rien à dire, il n'y a pas à dire, trouver qqc. à dire.
ε) [À l'impér. ou avec part., suivi gén. d'une précision numérique ou d'un adv.] Convenir, arrêter, fixer. À heure dite (Fromentin, Dominique,1863, p. 204; Mallarmé, Corresp., 1875, p. 67): 12. Ne parlons donc pas ici d'esprits différents du nôtre. Disons simplement qu'ils ignorent ce que nous avons appris.
Bergson, Les Deux sources de la mor. et de la relig.,1932, p. 158. ♦ [Avec litote] Bon, ça va, grasseya le principal. Mais ne dites pas que j'ai fait pression sur vous (Montherl., Célibataires,1934, p. 797). b) Emploi trans. indir. Dire de + inf./dire que.Ordonner, commander : 13. ... je lui dis précipitamment de sortir, que j'avais à parler en particulier à ma bonne.
Sénac de Meilhan, L'Émigré,1797, p. 1775. ♦ Loc. (avec emploi abs.). N'avoir qu'(un mot) à dire et... ♦ Se dire de + inf.Projeter de. Fauriel s'était épris tout d'abord du poëme de la Parthénéide [de Baggesen], et s'était dit de le traduire (Sainte-Beuve, Portr. contemp., t. 4, 1846-69, p. 174). 2. Exprimer, énoncer par écrit. Dire dans une lettre que. J'ai dit le motif secret qui l'éloignoit de la solitude, et cette différence de conduite fit naître l'idée qu'elle pourroit renoncer à la vie religieuse (Cottin, Mathilde,t. 2, 1805, p. 38). − Spéc., littér. [En parlant d'un penseur, d'un écrivain] Exprimer, révéler quelque chose de nouveau, de personnel, célébrer (un événement). Puis, la guerre venue, les temps noirs, il a dit Tarascon, et sa défense héroïque, l'esplanade torpillée (A. Daudet, Tartarin Alpes,1885, p. 28).Je dirai le soleil levé et le printemps (Moréas, Pèlerin pass.,1891, p. 82). 14. Si donc l'on m'interroge; si l'on s'inquiète (...) de ce que j'ai « voulu dire » dans tel poème, je réponds que je n'ai pas voulu dire, mais voulu faire, et que ce fut l'intention de faire qui a voulu ce que j'ai dit...
Valéry, Variété III,1936, p. 63. 15. ... je n'ai pas assez dit cette ombre des dieux qui tient tout le ciel, qui marche avec l'ombre des nuages...
Giono, L'Eau vive,1943, p. 29. − P. méton. [En parlant d'un texte, d'une pensée considérée comme réf.] Comme dit admirablement la métaphore grecque (Hugo, Feuilles automne,1831, p. 714).Comme dit la Bible et comme dit la vraisemblance (Lamart., Voy. Orient,t. 2, 1835, p. 25).L'article 731 du Code civil dit : « Les successions sont déférées aux enfants » (Jaurès, Ét. soc.,1901, p. 188). 3. [Dans le discours écrit et oral] Emploi pronom. a) Sens réfl. + attribut de l'obj. Se dire content de. [MmeAubin à Peltier] Dites, Monsieur, si vous avez jamais eu le droit de vous dire mon amant (Verlaine,
Œuvres complètes,t. 4, Louise Leclerq, 1886, p. 172). b) Sens réciproque. Se dire ses quatre vérités. c) Sens passif. [Le suj. désigne la signification ou l'emploi possibles d'un mot] L'un ou l'autre se dit ou se disent. II.− [Le suj. désigne une pers. qui parle (mais n'attend pas de réponse du destinataire du propos) ou qui écrit; l'accent est mis sur la forme du message] A.− Exprimer par la parole, en articulant à voix plus ou moins forte. 1. [L'accent est mis sur la plus ou moins bonne articulation des sons] Réciter, lire ou chanter à plus ou moins haute voix. Dire un poème, une chanson; l'art de dire. J'avais un voisin aimable, ancien économe de lycée disgracié, qui savait beaucoup et disait bien (Vallès, Réfract.,1865, p. 59): 16. Dur et pitoyable métier : je me suis tourmenté pour la composition, la manière de dire ou de prononcer et tout cela pour l'effet d'un moment, oublié ou perdu le moment d'après par ceux même qui ont écouté avec intérêt, absolument nul pour le plus grand nombre qui n'entend pas et ne se soucie nullement des paroles...!
Maine de Biran, Journal,1820, p. 297. 17. Avec l'élégance actuelle de nos façons polies, qu'est-ce qu'une femme peut connaître d'un jeune homme « correct », après cinquante visites, si ce n'est son degré d'esprit et le plus ou moins de progrès qu'il a pu faire dans l'art de dire élégamment des choses insignifiantes?
Stendhal,Lucien Leuwen, t. 2,1835,p. 67. − Spécialement ♦ Dire un office, une/la messe. Célébrer. L'on disait autrefois, et je crois bien que l'on dit encore une messe à leur intention [des toreros] pendant la course (Gautier, Tra los montes,1843, p. 88). ♦ Dire ses heures, son chapelet, le rosaire, le bénédicité, ses oraisons. Tous deux vont à la messe et disent leur rosaire (Hugo, Légende,t. 1, 1859, p. 334).En l'enveloppant d'un regard d'angoisse, elle [Félicité] implorait le Saint-Esprit, et contracta l'habitude idolâtre de dire ses oraisons agenouillée devant le perroquet (Flaub., Trois contes,Cœur simple, 1877, p. 66).Personne ne dit le bénédicité? demanda Boche (Zola, Assommoir,1877, p. 451): 18. ... et quand les garçons reviendront du bois, en bonne santé s'il plaît au Bon Dieu, trois autres [messes] pour le repos de son âme, pauvre garçon! Et tous les dimanches nous dirons un chapelet pour lui.
Hémon, Maria Chapdelaine,1916, p. 146. Rem. L'accent peut être mis sur le caractère itératif et par là-même dégradé de l'acte de dire. Dire son chapelet peut signifier débiter son chapelet. Nous ne manquons pas de vieilles pies dévotes qui disent leurs patenôtres toute la journée (Musset, Hist. merle bl., 1842, p. 56). − P. anal. [En parlant d'une compos. artistique] Il arrive souvent qu'un morceau pauvre en lui-même, mais exécuté par une jeune fille sous l'empire d'un sentiment profond, fasse plus d'impression qu'une grande ouverture pompeusement dite par un orchestre habile (Balzac, U. Mirouët,1841, p. 151). 2. [L'accent est mis sur une prononc. qui s'écarte de l'usage] [Kléber] lui dit avec son accent demi-allemand : − Tiens! voilà Ali-Bonaparte qui va nous faire une des siennes (Vigny, Serv. et grand. milit.,1835, p. 150).Puis il dit avec un accent marseillais : « Zé oublié ma bourse, té, il a fallu revenir. Autrement, je crois que tu dormais de bon cœur » (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Marroca, 1882, p. 793). ♦ Façon(s) de dire. Bamban était loin d'appartenir à une famille aristocratique. Cela se voyait sans peine à ses manières, à ses façons de dire, et surtout aux belles relations qu'il avait dans le pays (A. Daudet, Pt Chose,1868, p. 73).Tu sais qu'il observait exactement toutes les bienséances. Il avait de vieilles façons de dire qui étaient excellentes (France, Crainquebille,Cravate, 1904, p. 132): 19. Voyons, bon ermite, cher saint Antoine! Homme pur, homme illustre! Homme qu'on ne saurait assez louer! Ne vous effrayez pas; c'est une façon de dire exagérée, prise aux orientaux.
Flaubert, La Tentation de St Antoine,1874, p. 115. B.− [Avec un adv. ou une tournure adv.] Exprimer par le langage écrit ou oral; rendre sa pensée de telle ou telle manière. Il ne croit pas si bien dire. Ne te fâche pas si je dis mal les choses (Audiberti, Femmes Bœuf,1948, p. 120): 20. andromaque. − Avoue que certains jours tu l'aimes [la guerre].
Hector. − Si l'on aime ce qui vous délivre de l'espoir, du bonheur, des êtres les plus chers...
andromaque. − Tu ne crois pas si bien dire... On l'aime.
Giraudoux, La Guerre de Troie n'aura pas lieu,1935, I, 3, p. 22. − Dire d'une manière + adj. Ce sourire et ce mouvement en disaient autant qu'un bien long discours; ils disaient d'une manière concise et frappante à peu près ceci : (...) (Loti, Mariage,1882, p. 176). − Dire en aparté, cachette, confidence. Tu n'as pas encore l'habitude, et tu conduis mal tes affaires : je te le dis en confidence (Nerval, Sec. Faust,1840, 2epart., p. 152). − Dire + adv. (adv. d'au moins 10 occurr. ds la docum.).Dire affectueusement (cf. Mirbeau, Journal femme, 1900, p. 283), dire aigrement (cf. Bernanos, Journal curé camp., 1936, p. 1243), dire aimablement (cf. Beauvoir, Mém. j. fille, 1958, p. 178), dire amèrement (cf. Sartre, Mort ds âme, 1949, p. 11), dire amicalement (cf. Fromentin, Été Sahara, 1857, p. 215), dire (tout) bêtement (cf. Musset, Lettres Dupuis Cotonet, 1836, p. 665), dire (tout) bonnement (cf. Dupuis, Orig. cultes, 1796, p. 335), dire (plus, assez) brièvement (cf. Cournot, Fond. connaiss., 1851, p. 44), dire brusquement (cf. Maupass., Contes et nouv., t. 2, Moiron, 1887, p. 1147), dire brutalement (cf. Murger, Scènes vie jeun., 1851, p. 136), dire calmement (cf. Camus, Peste, 1947, p. 421), dire carrément (cf. Goncourt, Journal, 1852, p. 84), dire clairement (cf. Marmontel, Essai sur rom., 1799, p. 328), dire confidentiellement (cf. Hugo, Corresp., 1822, p. 352), dire couramment (cf. Bergson, Deux sources, 1932, p. 80), dire crûment (cf. Balzac, Cous. Pons, 1847, p. 197), dire distraitement (cf. Goncourt, Journal, 1890, p. 1098), dire doucement (cf. Michelet, Journal, 1820, p. 103), dire (assez) durement (cf. Id., ibid., 1842, p. 377), dire fièrement (cf. Sartre, Nausée, 1938, p. 176), dire formellement (cf. J. de Maistre, Soirées St-Pétersb., t. 2, 1821, p. 186), dire fortement (cf. Bloy, Journal, 1892, p. 53), dire franchement (cf. Borel, Rhaps., 1831, p. 13), dire froidement (cf. Sénac de Meilhan, Émigré, 1797, p. 1698), dire gaiement (cf. Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 2, 1823, p. 429), dire gentiment (cf. Hugo, N. D. Paris, 1832, p. 542), dire gravement (cf. Gide, Faux-monn., 1925, p. 1037), dire hardiment (cf. Staël, Allemagne, t. 4, 1810, p. 37), dire hautement (cf. Maine de Biran, Journal, 1820, p. 274), dire incidemment (cf. Abellio, Pacifiques, 1946, p. 245), dire ironiquement (cf. Flaub., Corresp., 1846, p. 218), dire justement (cf. Goncourt, Journal, 1890, p. 1168), dire laconiquement (cf. Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 385), dire lentement (cf. Flaub., 1reÉduc. sent., 1845, p. 36), dire mollement (cf. Goncourt, Journal, 1893, p. 364), dire naïvement (cf. Van der Meersch, Invas., 14, 1935, p. 330), dire négligemment (cf. Staël, Lettres L. de Narbonne, 1792, p. 36), dire nettement (cf. Zola, Assommoir, 1877, p. 455), dire obligeamment (cf. Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 5, 1859, p. 19), dire ouvertement (cf. Sénac de Meilhan, Émigré, 1797, p. 1604), dire paisiblement (cf. Balzac, Cous. Bette, 1846, p. 300), dire plaisamment (cf. Sénac de Meilhan, Émigré, 1797, p. 1809), dire poliment (cf. Vigny, Serv. et grand. milit., 1835, p. 40), dire posément (cf. Gobineau, Nouv. asiat., 1876, p. 263), dire précisément (cf. Staël, Lettres div., 1794, p. 609), dire rageusement (cf. Sartre, Mort ds âme, 1949, p. 269), dire railleusement (cf. Mauriac, Nœud vip., 1932, p. 186), dire rapidement (cf. Latouche, L'héritier, Lettres amans, 1821, p. 105), dire résolument (cf. Stendhal, Lamiel, 1842, p. 175), dire respectueusement (cf. Goncourt, Journal, 1863, p. 1216), dire sèchement (cf. Id., MmeGervaisais, 1869, p. 152), dire sérieusement (cf. Flaub., Corresp., 1853, p. 256), dire sévèrement (cf. Mirbeau, Journal femme, 1900, p. 93), dire (tout) simplement (cf. Destutt de Tr., Comment. sur Espr. des lois, 1807, p. 366), dire sincèrement (cf. Champfl., Souffr. profess. Delteil, 1855, p. 181), dire sourdement (cf. Péguy, V.-M., comte Hugo, 1910, p. 764), dire spirituellement (cf. Jouy, Hermite, t. 2, 1812, p. 292), dire timidement (cf. Hugo, N.-D. Paris, 1832, p. 549), dire tranquillement (cf. Chénier, Épîtres, 1794, p. 194), dire tristement (cf. Mille, Barnavaux, 1908, p. 163), dire vulgairement (cf. Flaub., Corresp., 1853, p. 401). C.− [Dire, outil de discours] 1. [Dire introduit le style dir. pour citer des paroles, un juron, une interj., etc.] Tu es bête, tu peux bien me dire « tu », dit Alban, à celui qui dans dix minutes n'aurait plus à dire ni « tu » ni « vous » (Montherl., Songe,1922, p. 154): 21. La première fois que le père se formalisa de ce dédaigneux rayonnement qui l'atteignit comme un éclair, il dit cette phrase que je me suis rappelée : − Si vous me regardez encore ainsi, Lambert, vous allez recevoir une férule!
Balzac, Louis Lambert,1832, p. 59. 22. − Justin, tu m'agaces. Lyon-Després a dit au censeur, en te désignant du menton, il a dit exactement :
« Extraordinaire, le petit Juif! Il est extraordinaire! »
Duhamel, Chronique des Pasquier,Le Jardin des bêtes sauvages, 1934, p. 11. ♦ Dire merde. Bon! − je me dis − en nous couchant, tu vas me faire des lamentations sur ton vase, mais je te dirai merde! (Goncourt, Journal,1860, p. 683).Ah! Cambronne n'a pas dit merde aux Anglais. Eh bien, je dis merde à Lucas! (Hugo, Corresp.,1862p. 395). ♦ Dire ouf. L'enfant n'eut pas le temps de dire ouf (Frapié, Maternelle,1904, p. 23).Chevalme s'approcha de son copain et lui assena une énorme baffe. Sans dire ouf, le copain s'effondra (Triolet, Prem. accroc.1945, p. 392). 2. [En incise, dire annonce que les propos sont rapportés ou fait réf. à des propos connus, entendus] Dit-il, dis-je, dit-on, ou fam. qu'il dit. a) [À l'intérieur de la prop.] Hélas! dit-elle, s'il eût été ici dix ans plus tôt, j'aurois épousé mon doux Tobie (Genlis, Chev. Cygne,t. 1, 1795, p. 96): 23. Si elle n'a pas de peine à croire ce qu'on lui commande dans cet ordre des choses divines, c'est (elle le dit expressément) parce que Dieu lui a fait la grâce de lui donner la foi...
Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 4, 1859, p. 95. b) [En fin de prop.] Faites, faites, Monsieur Grandet, charbonnier est maître chez lui, dit sentencieusement le président (Balzac, E. Grandet,1834, p. 40).« Ils ne reconnaissent pour gens de valeur que leurs amis », disait-on (Gide, Journal,1940, p. 47). c) [L'incise est introd. par comme] Monnaie de singe, comme on dit énergiquement (Alain, Propos,1931, p. 998).Le ciel est pavé de bonnes intentions, non l'enfer, comme on le dit assez sottement (Green, Journal,1950, p. 355): 24. ... il est certain que c'en est fait de la noblesse, si, au lieu de chercher à se créer des alliances, elle continue, comme vous l'avez dit excellemment, de s'isoler dans ses terres, et de s'enfermer dans son orgueil.
Sandeau, Mllede La Seiglière,1848, p. 249. 25. ... Paris est devenu, comme on dit en argot de chemin de fer, tête de ligne de toutes les fortunes faites en pro-vince.
Goncourt, Journal,1861, p. 940. 26. Mon père, fils de petites gens, mi-paysans, mi-jardiniers, s'était détourné de la terre pour « s'élever par le savoir », comme il disait volontiers.
Duhamel, Chronique des Pasquier,Vue de la Terre promise, 1934, p. 116. Rem. 1. Dit-on est except. empl. subst. avec un sens proche du qu'en dira-t-on. Pas la faute de ces grands seigneurs, qui, tellement aimés, faisaient bien mentir le dit-on (La Varende, Manants du Roi, 1938, p. 3). 2. La docum. permet d'observer les fréq. suiv. des différentes formes d'incise avec pronom : dit-il représente 45% des formes d'incise aux temps simples, dis-je près de 30%, dit-elle environ 18%; dis-tu, disions-nous, disent-ils, à peine 1,5% chacun, puis avec un nombre plus faible d'occurr. disent-elles et dit-on. 3. [Dire ponctue la fin d'une déclaration] J'ai dit! Puisse notre union durer autant que la terre et le soleil! j'ai dit (Chateaub., Natchez,1826, p. 196); cf. aussi p. 424). 4. [Dire, en syntaxe expressive, permet dans des loc. figées] a) [l'enchaînement du raisonnement] Ceci dit, cela dit (cf. ceci, cela). b) [la notation de figures de pensées, nuançant la portée d'un énoncé, d'une opinion] ♦ [Effet d'hyperb. ou de quantification] Que dis-je? Il ne semble pas exagéré de dire que, dès le séminaire, Renan est tout formé et en possession des données essentielles qu'il développera plus tard (Massis, Jugements,1923, p. 37). ♦ [Effet d'atténuation] J'allais dire, je ne saurais dire, que dire de plus, si j'ose dire. Voici, Messieurs les jurés, le simple récit de ce meurtre. Que dire de plus pour sa défense? (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Assass., 1887, p. 594).Le plus prudent des hommes dira tout au plus là-dessus qu'il faut qu'il en soit ainsi (Alain, Propos,1931, p. 1005).Tous les Descartes de ce monde sont toujours à constater si cela est, ou disons plus modestement, si ces apparitions sont bien telles que l'imagination les décrit (Alain, Propos,1932, p. 1104).Je dirais volontiers qu'un orage menace, si nous n'étions si tôt dans la saison (Bernanos, Dialog. Carm.,1948, p. 1574): 27. ... un ordre de mouvement dramatique, un rythme de pas pressés ou ralentis (j'allais dire de ballet) qui commence, et ne s'arrêtera qu'à la fin sur une mesure originale...
Thibaudet, Réflexions sur la litt.,1936, p. 79. ♦ [Effet de prétérition, d'allus.] Soit dit entre nous, soit dit en passant. Soit dit en passant, c'est une justice à rendre aux Allemands que leurs camps étaient très visibles, très reconnaissables, et généralement situés assez loin des agglomérations pour que tout danger de bombardement en fût écarté (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 343). ♦ [Effet de substitution] Autrement dit (cf. autrement). ♦ [Effet de congruence] Proprement dit. L'image proprement dite d'une suppression de tout n'est donc jamais formée par la pensée (Bergson, Évol. créatr.,1907, p. 279).Même si elle n'acquiert pas chez autrui un pouvoir de gestion proprement dit, elle agit par conseil, recommandation, information (Perroux, Écon. XXes.,1964, p. 209). ♦ [Effet d'insistance] . Je le dis et je le répète. Hier j'ai relu les Consolations pour me consoler de ce que j'entrevois. Elles sont ravissantes, je le dis et je le répète; c'est ce que je préfère dans la poésie française intime (Lamart., Corresp.,1830, p. 36): 28. ... comme je l'ai dit ici et redit, à peine la « volonté » s'en mêle, ce « vouloir-être-sincère-avec-soi » est un principe inévitable de falsification.
Valéry, Variété II,1929, p. 107. c) [Suivi de donc, dire permet toutes formes d'expression de sentiment (emportement, agacement...) manifestées à propos du dire d'un interlocuteur] Dis donc! (cf. donc). 5. Loc. ou expr. formées avec l'inf. dire a) Avec à ♦ C'est-à-dire*. ♦ Il y aurait beaucoup à dire. Il y aurait beaucoup à dire (...) sur cette justice des nations polies, dont les vengeances sont plus cruelles que le crime même (France, Contes Tournebroche,1908, p. 155).Il y aurait beaucoup à dire sur ce point (Bergson, Deux sources,1932, p. 260). ♦ Est-ce à dire? Qu'est-ce à dire? Qu'est-ce à dire, sinon qu'on ne peut concevoir de tendances données par la nature, mais qu'elles surgissent du mouvement même de la liberté (...)? (J. Vuillemin, Être et trav.,1949, p. 18): 29. Est-ce à dire, qu'une fois la victoire remportée et la justice rendue, la France de demain voudra se figer dans une attitude de rancœur à l'égard d'un peuple longtemps dévoyé mais que rien de fondamental ne devrait séparer de nous?
De Gaulle, Mémoires de guerre,1956, p. 536. Rem. Emploi subst. exceptionnel de la loc. Il jeta un − « Qu'est-ce à dire? » qui révélait plus le maître brutal que l'homme amoureux (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Inutile beauté, 1890, p. 1147). ♦ À vrai dire. Ils ne deviennent des caractères typiques que par l'habitude acquise de n'en développer qu'un seul, à laquelle nous cédons à vrai dire généralement (Mounier, Traité caractère,1946, p. 332): 30. ... c'est qu'il s'agit d'un livre dont Jésus-Christ a dit que pas un « iota » ne passerait jamais et qui est à vrai dire le seul livre qui mérite ce nom.
Green, Journal,1947, p. 83. ♦ À dire vrai. Quant à restreindre mes aises, mes plaisirs, j'y suis prêt. À dire vrai, mon corps vieillissant n'en a cure (Gide, Journal,1940, p. 53).L'étonnant chez Jacques Blanche, c'était que son insatiable curiosité vous donnait l'illusion de lui apporter plus encore qu'on n'avait reçu de lui. À dire vrai, sur toute question son esprit retenait peu du solide qu'il attendait de vous (Mauriac, Journal occup.,1940-44, p. 345). b) Avec sans. Cela/il va sans dire. Que la correspondance en souffrît, il va sans dire; et ses amies, peu au courant de cette gêne, s'étonnaient qu'elle restât parfois si longtemps sans répondre à leurs affectueux messages (Gide, Et nunc manet,1951, p. 1140). c) Avec ainsi. Pour ainsi dire (cf. ainsi). d) Avec mieux. Pour mieux dire. Sur l'avis ou, pour mieux dire, par l'ordre du général, le Père Magitot retourna chez monsieur Chauvel (France, Dieux ont soif,1912, p. 184). e) Avec que. [Avec une valeur concessive] (Et) dire que : 31. Dire qu'il était si joyeux, le jour où il avait quitté le service, après la guerre d'Italie, à l'idée de n'être plus un traîneur de sabre, un tueur de monde!
Zola, La Terre,1887, p. 500. III.− [Le suj. ne désigne pas une pers.] Exprimer au moyen d'un code quelconque, d'un signe ou par l'aspect. A.− [L'accent est mis sur la révélation que peut apporter le suj.] 1. [Par personnification d'une partie du corps, d'un obj. fam., etc.] Indiquer. Mon petit doigt me l'a dit. Elle a les plus beaux yeux, comme vous avez vu, et des yeux qui disent tout ce qu'ils veulent (Stendhal, L. Leuwen,t. 1, 1835, p. 76).Angolio, dont les vêtements usés et propres disaient en effet la misère décente, répondit (Zola, Rome,1896, p. 463): 32. ... dans la calèche, des éternuements convulsifs, une sorte de gloussement continu, disaient que la baronne étouffait.
Maupassant, Une Vie,1883, p. 95-96. 33. Le marquis regarda tour à tour sa femme immobile, muette, mais dont le calme visage disait éloquemment la pureté et l'innocence; puis Daï-Natha, qui se tordait dans les convulsions de l'agonie et blasphémait...
Ponson du Terrail, Rocambole,t. 3, 1859, p. 296. − Emploi pronom. à valeur réciproque. Elle [la grosse brune] sourit en apercevant Duroy, comme si leurs yeux se fussent dit déjà des choses intimes et secrètes (Maupass., Bel-Ami,1885, p. 18). 2. [En parlant d'une chose plus ou moins énigmatique] Révéler, exprimer. Dans les Merveilles de nature, il est dit : « Le papier, ce silence qui dit tout. » (Goncourt, Journal,1856, p. 272).L'ombre est un silence; mais ce silence dit tout (Hugo, Travaill. mer,1866, p. 303): 34. Que ce soit ici un dernier adieu, ou que je doive vous revoir encore, Céluta, quelque chose me dit que ma destinée s'accomplit; si ce n'est pas aujourd'hui même, elle n'en sera que plus funeste : René ne peut reculer que vers le malheur.
Chateaubriand, Les Natchez,1826, p. 439. ♦ Loc. En dire long (sur). Elle [la vieille] (...) paya, non sans renfoncer ensuite son porte-monnaie dans sa poche, d'un geste qui en disait long sur les méfiances de la province (A. Daudet, Nabab,1877, p. 150): 35. Le mécanisme des tentations est si curieux que je m'étonne toujours qu'on ne l'étudie pas de plus près. Il en dit long sur notre âme, sur sa fragilité...
Green, Journal,1941, p. 87. − Spéc. [En parlant d'une production de l'homme, à caractère gén. esthétique] Exprimer. Ces trois dessins différents [de Delacroix, Daumier, Ingres] ont ceci de commun (...) qu'ils disent juste ce qu'ils veulent dire (Baudel., Curios. esthét.,1867, p. 19).Tout est dit, exprimé, traduit [dans Tannhäuser] par la parole et la musique, d'une manière si positive qu'il est presque impossible de concevoir une autre manière de le dire (Baudel., Art romant.,1867, p. 500): 36. Elle pensait à de petits pas sur le sable des plages napolitaines, à ces belles expressions naïves qui disent si vivement l'amour, l'étonnement et le plaisir.
Maurois, Ariel ou la Vie de Shelley,1923, p. 260. 3. [En parlant d'un acte qui demande une explication] Vouloir dire. Il regarda la baronne d'un air qui voulait dire : « Ai-je de l'esprit! » (Balzac, Cous. Bette,1846, p. 286).Cela ne veut rien dire (Camus, Étranger,1942, p. 1125): 37. L'un dans l'autre, s'il me reste cinquante, quarante-cinq francs, c'est-à-dire un franc cinquante par jour pour mon petit déjeuner, dix sous, au bar, debout, mes déplacements, et les femmes, tu te rends compte... ça veut dire que dix francs à moi, comme argent de poche, ça ne me fait pas moins d'une semaine, soit dit sans reproche.
Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 362. 38. ... n'osant lui demander ce que cela signifiait, je trouvai plus expédient de demander comment il fallait écrire : ah. Il répondit aussitôt, avec un peu d'impatience : « Peu m'importe : a ou ah. » ... Et je compris alors qu'il s'agissait de l'expression d'une durée. Cela voulait dire : le temps de dire : a (ou ah!).
Gide, Journal,1936, p. 1258. ♦ Loc. Savoir ce que parler veut dire (cf. G. Leroux, Myst., ch. jaune, 1907, p. 104): 39. Alors le vieux éclata tout d'un coup :
− Me prends-tu pour un imbécile et crois-tu que je ne sache pas ce que parler veut dire? Comme si ton manège n'a pas trop duré.
Moselly, Terres lorraines,1907, p. 262. B.− [L'accent est mis sur l'effet produit par l'aspect d'une chose sur l'interlocuteur, avec un compl. indir. de pers.] Présenter un intérêt. Cela ne me dit rien de bon! (Balzac, Annette,t. 3, 1824, p. 78).Quelque chose me disait d'aller (Balzac, Méd. camp.,1833, p. 122). ♦ Loc. Si le cœur vous/lui en dit. En tout cas, vous pouvez lui montrer cette lettre, si le cœur vous en dit (Claudel, Corresp.[avec Rivière], 1899-1926, p. 216); cf. aussi Alain, Propos, 1929, p. 866) : 40. On ne cesse de me redemander en France, et pour peu que le cœur en dise au ministère, je suis aussi disposé à le quitter, qu'il est disposé à la malveillance pour moi.
Chateaubriand, Correspondance gén.,t. 2, 1789-1824, p. 173. 41. Quand pourrait-il avoir le plaisir de vous trouver, si le cœur lui en dit?
− Si le cœur lui en dit (...) reprit madame de Maurescamp... Eh bien! voyons... demain soir... après le dîner...
Feuillet, L'Histoire d'une Parisienne,1881, p. 105. Rem. On rencontre ds la docum. a) Disette, subst. fém., vieilli, région., gén. au plur. Propos badins, commérages. Elle [Boulette] lui avait fait oublier [à Charlot] tout cela et lui avait appris de jolies prières et un tas d'amusettes et de disettes gentilles qu'il arrangeait à sa mode et qui réjouissaient tout le monde (Sand, Maîtres sonneurs, 1853, p. 247). Il lui eut bientôt défilé tout son chapelet de disettes (Id., ibid., p. 280). Attesté ds Lar. 19e-20e. b) Disable, adj., fam., région., gén. en tournure négative. Synon. de dicible. C'est pas tant la beauté, comme je vous disais tantôt, que cette douceur qu'elle vous a dans le regard et qui est pas disable (Guèvremont, Survenant, 1945, p. 237). Et les chimères qu'il lui contait après, c'est pas disable! (Id., ibid., p. 268). Elle [Anne de Galard] disait tout ce qui lui passait par la tête; seulement (...) il ne lui passait rien que de disable (La Varende, Bric-à-brac, 1953, p. 64). Attesté ds Ac. Compl. 1842, Besch. 1845, Lar. 19e-20e, Guérin 1892 et considéré comme vieux ou inusité. Prononc. et Orth. : [di:ʀ], (je) dis [di]. Ds Ac. 1694 1932. Conjug. Rad. [diʀ-] : inf., fut. de l'ind. dirai, dirons, etc., cond. prés. dirais, dirions, etc.; [di-] : 1re, 2e, 3epers. du sing. du prés. de l'ind. dis, dit, 1re, 2e, 3epers. du sing. du passé simple de l'ind. dis, dit, part. passé masc. dit; [diz-] : 1reet 3epers. du plur. du prés. de l'ind. disons, disent, toute la conjug. de l'imp. de l'ind. disais, disions et du subj. prés. que je dise, que nous disions, etc., part. prés. disant; [dit-] : 2epers. du plur. de l'ind. dites, 2epers. du plur. du passé simple de l'ind. dîtes, avec l'accent circonflexe impér. plur. dites, part. passé fém. dite; [dim-] : 1repers. du plur. du passé simple dîmes; [diss-] : subj. imp. que je disse, que nous dissions, etc. Redire se conjugue comme dire mais contredire, médire, prédire font vous contredisez, médisez, prédisez à la 2epers. du plur. du prés. de l'ind. Homon. dix ([di] devant consonne). Étymol. et Hist. A. Ca 980 « exprimer, déclarer au moyen du langage (oral ou écrit) » (Fragment de Valenciennes ds Bartsch Chrestomathie, no4, 53); 1. 2emoitié xes. avec pour compl. d'obj. une phrase au style dir. (Saint Léger, éd. J. Linskill, 43); 2. ca 980 introduisant le style indir. (Passion, éd. d'A. Silvio Avalle, 364); a) ca 1100 « donner l'ordre » (suivi d'une prop. introduite par que) (Roland, éd. J. Bédier, 2746); b) 1673 « id. » (suivi d'une prop. infinitive introduite par de) (Molière, Malade Imaginaire, éd. R. Jouanny, II, 11); 3. ca 980 « confirmer, affirmer, soutenir » (Passion, éd. d'A. Silvio Avalle, 179); 4. a) 2emoitié xes. « exposer, conter » trans. indir. dire de (St Léger, éd. J. Linskill, vers 7 et 9); b) ca 1175 plus gén. « parler » dunt je vus dis (Horn, éd. M. Pope, 268); c) 1580 emploi abs. « parler » ici dans l'expr. laisser dire (Montaigne, Essais, éd. A. Thibaudet, I, chap. 26, p. 205); 5. a) ca 980 à l'impér., pour interpeller quelqu'un à qui l'on demande de dire quelque chose (Passion, éd. d'A. Silvio Avalle, 188); b) 1606 comme simple interpellation (Nicot) cf. aussi en a. fr. diva (di + va = impér.) exclam. (Charroi Nîmes, éd. D. Mac Millan, 425); 6. a) ca 980 « appeler, nommer » (Passion, éd. d'A. Silvio Avalle, 89), 1690 part. passé adj. dit « appelé, surnommé » (Fur.); b) 1219 « indiqué, nommé (plus haut) » susdict (Cart. de Cysoing, p. 100 ds Gdf. Compl.); [ca 1530, Marot d'apr. Lar. Lang. fr.] 1668 l'heure dite (La Fontaine, Fables, éd. H. Régnier, I, 18, Le Renard et la Cigogne); 7. a) ca 1050 trans. « réciter (une prière, un office, etc.) » (Alexis, éd. Chr. Storey, 625); b) ca 1175 « conter, réciter en parlant avec art (un conte, une histoire, un poème, etc.) » (Horn, éd. M. Pope, 1247); c) 1remoitié xiiies. emploi abs. or dient et content et fabloient (Aucassin et Nicolette, éd. M. Roques, titre II etc.); d'où bien dire, ca 1560 les mieux disants (Pasquier, Lettres ds Rickard, La langue fr. au seizième siècle, Cambridge, 1968, p. 240, l. 4); 8. a) ca 1050 « ajouter, discuter le nombre » a dire « manquant » (Alexis, éd. Chr. Storey, 161), 1611 à dire « à discuter, blâmer, critiquer » (Cotgr.), v. aussi L. Foulet ds Mélanges A. Jeanroy, 1928, pp. 163-179; b) 1636 « commenter » d'où « avoir telle ou telle opinion de, penser » (Corneille, Le Cid, éd. A. Régnier, I, 2); c) 1636 « imaginer, croire » (Id., ibid., III, 4); 9. a) 1532 pronom. « se prétendre, se faire passer pour » (Rabelais, Pantagruel, éd. V. L. Saulnier, chap. VIII, p. 44, l. 91); b) 1606 trans. « faire passer pour » on me dit ton frère (Nicot); 10. ca 1650 pronom. se dire « être prononcé, pouvoir être dit, être dit couramment » (Descartes, Rép. II, 4 ds Littré). B. « Exprimer, suggérer » en dehors du langage. Le suj. désigne gén. un inanimé; 1. ca 1223 trans. vouloir dire « signifier » (G. de Coincy, Mir. Vierge, éd. F. Kœnig, t. 4, II Mir. 18, 400); 2. a) ca 1274 « indiquer, suggérer » (Adenet Le Roi, Berte, éd. A. Henry, 3013 : Li cuers li dist pour voir, bien s'en asseüra); b) 1559 « être favorable à » d'où « être attrayant, plaire » (Amyot, Pyrrhus, 57 ds Littré). Du lat. class. dicĕre « dire, exprimer par la parole », notamment « indiquer, nommer, raconter, conter ». |