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DISTINCTION, subst. fém.
A.− [Correspond à distinguer A et à distinct] Action de distinguer, de déterminer, dans un être ou une chose, ce qui les rend différents (d'un autre être ou d'une autre chose).
1. Rare, domaine sensoriel :
1. ... nous comprendrions encore mieux combien est accessoire et accidentel, dans l'acte de la vision, le phénomène de la distinction des couleurs dont l'échelle serait renversée par un simple déplacement des points qui correspondent au « maximum » d'intensité de chacune des teintes élémentaires. Cournot, Essai sur les fondements de nos connaissances,1851, p. 153.
2. Usuel
a) Action de séparer nettement un être ou une chose, d'un autre être ou d'une autre chose; p. méton. résultat de cette opération, fait d'être distingué, classe distinguée. Distinction capitale, essentielle, fondamentale, radicale; établir, fonder une distinction.
[Concerne des réalités abstr.] Distinction du droit et du fait, de l'essence et de l'existence, entre l'intelligence et l'instinct :
2. Un savant ecclésiastique du temps, le docteur Lowde, l'ayant accusé publiquement d'affaiblir par son système la distinction du bien et du mal, Locke au lieu de se fâcher : « le brave homme a raison, dit-il... » Cousin, Hist. de la philos. du XVIIIes.,t. 1, 1829, p. 78.
[Concerne des réalités concr.] Bible imprimée sans distinction de versets :
3. ... cette passion qui, pendant ses séjours à Jutigny, s'était tout d'abord étendue à la fleur, sans distinction ni d'espèces ni de genres, avait fini par s'épurer, par se préciser sur une seule caste. Huysmans, À rebours,1884, p. 116.
[Concerne une pers. (un trait, un caractère ou un attribut de cette pers.) ou un groupe de pers.] Faire distinction de l'ami et de l'ennemi (Ac.1798-1932).Il fit transporter les blessés sans distinction de Français ou d'ennemis (Ac.1878-1932).Sans distinction de personnes.
[Le compl. prép. désigne ce qui fonde ou marque une différence entre les pers.] Sans distinction d'âge ni de sexe, de grade. La distinction des rangs, (...) l'infériorité de la naissance (Duras, Édouard,1825, p. 173).Exaspérer chez les classes le sentiment de leur distinction (Benda, Trah. clercs,1927, p. 122):
4. Il s'agit simplement d'obliger les juges français, civils ou militaires, à appliquer à tous les citoyens, sans distinction de croyances religieuses, les lois en vertu desquelles ils prononcent leurs arrêts. Clemenceau, Vers la réparation,1899, p. 7.
b) En partic., domaine intellectuel.Action de séparer nettement les divers sens qu'un mot ou une proposition peuvent recevoir. Il y a ici une distinction importante à faire; il se tira d'affaire par une distinction subtile (Ac.1835-1932).
B.− [Correspond à distinguer B et à distingué]
1. Vieilli. Singularité ou supériorité qui place (quelqu'un ou quelque chose) à part ou au-dessus des autres. La distinction de la naissance. Synon. éclat, grandeur.
Usuel. Marque d'estime, d'honneur qui distingue le mérite ou le rang d'une personne et la désigne à l'attention respectueuse d'autrui. Distinction honorifique. Synon. faveur, privilège, prérogative.La maréchale était la personne la plus infatuée de l'avantage d'une haute naissance, et des distinctions attachées à son rang (Sénac de Meilhan, Émigré,1797, p. 1581).Il détestait les distinctions nobiliaires (Staël, Considér. Révol.,t. 1, 1817, p. 241).
En partic. Synon. de décoration (militaire, civile, religieuse).Voir collier ex. 9.
2. Emploi gén. abs. Manières élégantes dans le langage, la tenue qui distinguent une personne des autres. Exquise, extrême, rare distinction; cachet de distinction; manquer de distinction. Synon. classe, élégance.Une femme aristocratique et son sourire fin, la distinction de ses manières et son respect d'elle-même m'enchantent (Balzac, Peau chagr.,1831, p. 109).Une certaine distinction d'esprit et de manières (France, Orme,1897, p. 220).Une gentille jeune fille, qui se piquait de distinction aristocratique (Rolland, J.-Chr.,Révolte, 1907, p. 514).
P. anal. [En parlant du style, de l'expression] Cette distinction native du style, ces nuances délicates et fines font plaisir à étudier (Amiel, Journal,1866, p. 74).
Loc. adj. [En parlant d'une pers.] De distinction. Synon. distingué.Les étrangers de distinction ont rempli mes salons magnifiquement décorés (Chateaubr., Mém., t. 1, 1848, p. 446).J'ai fréquenté plusieurs anglais de distinction (About, Roi mont.,1857, p. 108).Célébrer sur le ton de la plus haute distinction une sorte de culte des morts (Fargue, Piéton Paris,1939, p. 252).
Prononc. et Orth. : [distε ̃ksjɔ ̃]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1170 « état de ce qui est distingué, différencié » (Rois, éd. F. R. Curtius, 3elivre, V, 12, p. 121 : destinctiuns); b) 1585 « subtilités de l'esprit » (Noel du Fail, Contes d'Eutrapel, éd. J. Assézat, p. 237 : subtilités, finesses, distinctions aigues); c) 1670 « supériorité qui place au-dessus du commun » (Bossuet, Duch. d'Orl. ds Littré); d) 1687 « marque d'estime, d'honneur » (Mmede La Fayette, La Princesse de Clèves, éd. Cazes, 87); 2. 1831 « manières élégantes dans le langage ou la tenue » (Balzac, loc. cit.). Empr. au lat. class.distinctio « action de distinguer, différence, séparation, honneur ». Fréq. abs. littér. : 2 618. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 4 176, b) 3 977; xxes. : a) 2 798, b) 3 756.