| DÉSHUMANISER, verbe trans. Faire perdre les caractères spécifiques à la nature de l'homme et à sa condition. A.− [Le compl. désigne une pers. seulement considérée dans sa nature matérielle] Faire perdre son caractère humain en dépouillant de toute temporalité et en réduisant à l'état de pur esprit. La vie religieuse, en arrachant l'homme aux activités temporelles, le déshumanise et l'aliène (Philos., Relig., 1957, p. 3211).La mystique sur commande dévitalise et déshumanise l'homme, qui perd le sens d'une critique constructive et (...) la possibilité d'exercer largement ses facultés créatrices (Univers écon. et soc.,1960, p. 3610). B.− [Le compl. désigne une pers. (ou p. ext. son activité) considérée seulement dans sa nature morale, spirituelle] Faire perdre son caractère humain en réduisant à l'état d'animal ou d'objet : ... une très grande partie des actes humains aura été déshumanisée. Ces actes détraqués ne sont que les façons de faire d'une machine qui développe mal des ordres centraux, seuls humains.
David, La Cybernétique et l'humain,1965, p. 111. − Emploi pronom. passif. Le droit (...) n'a nullement renoncé à reconnaître l'existence des personnes irréductibles aux choses (...) la personne juridique ne semble pas se déshumaniser du fait des acquisitions scientifiques (David, La Cybernétique et l'humain,1965p. 21). − En partic. [Le compl. désigne une pers., un groupe de pers., une entité abstr.] Faire perdre son caractère humanitaire en dépouillant de tout sentiment. C'est fatalement déshumaniser la médecine, c'est la ravaler au rang d'une zootechnie que de l'organiser autrement que dans le contact fraternel avec le malade (Biot, Pol. santé,1933, p. 51). Rem. On rencontre ds la docum. a) L'emploi adj. déshumanisant, ante, néol. Qui déshumanise. En tant qu'elle est déshumanisante, son intuition [à Ponge] contribue à refermer au-dessus de nos têtes le monde matériel et à nous perdre comme des choses en son sein (Sartre, Sit. I, 1947, p. 268). b) Le part. passé adj. déshumanisé, ée. Qui a perdu tout caractère ou sentiment humain. Société déshumanisée (Montherl., Notes théâtre, 1954, p. 1076). Les machines à calculer (...) donnent au plus haut point l'idée de l'imperfectibilité des hommes comparée à la perfectibilité des machines. Leur travail est entièrement clarifié et définitivement déshumanisé. Affranchie de toute intervention humaine, la machine atteint alors une sorte de région plus oxygénée, où le travail se poursuit différemment (David, Cybern., 1965, p. 66). Prononc. : [dezymanize]. Étymol. et Hist. 1647 (Vaugelas, Rem. sur la lang. fr., éd. J. Streicher, p. 492). Dér. de humaniser*; préf. dé(s)-*. Fréq. abs. littér. : 12. Bbg. Gohin 1903, p. 254. |