| DÉLICE, subst. masc. sing.;DÉLICES, subst. fém. plur. Plaisir d'une grande intensité et subtilité. Les délices de la chair et de l'âme (Flaub., Éduc. sentim.,t. 2, 1869, p. 280).A.− Domaine physique : 1. Les mornes ivresses de la Vénus vulgaire, les capiteuses ardeurs de la Vénus noire, les raffinées délices de la Vénus savante, les criminelles audaces de la Vénus sanguinaire, ont laissé de leur ressouvenir dans les plus spiritualisés de ses poèmes [de Baudelaire].
Bourget, Essais de psychol. contemp.,1883, p. 5. − P. méton. Un petit palais qui est un délice architectural (Fromentin, Voy. Égypte,1869, p. 88). B.− Domaine moral.Sensation toute neuve de se sentir veillée par cette virile sollicitude (...) elle s'y abandonnait avec délice (Martin du G., Thib.,Été 14, 1936, p. 397): 2. M. de Saint-Lambert a parlé de lui, et le public l'a applaudi avec attendrissement. Son fils était dans un transport inexprimable. Il y a un délice, dans les jouissances qui ne nous sont pas personnelles, que toutes les satisfactions de l'amour-propre ne peuvent égaler.
Staël, Lettres de jeunesse,1786, p. 63. − P. méton. Personne ou chose qui procure un délice moral. On [a] dit de l'empereur Titus, qu'il était les délices du genre humain (Ac.1798-1878).Elle a tout goûté, (...) toutes les délices épicées de notre âpre littérature moderne (Taine, Notes Paris,1867, p. 142). SYNT. Pur délice; délices cruelles, ineffables, pures; délices de l'amour, du sentiment; lieu de délices; faire ses délices de; boire, écouter, plonger, respirer, savourer avec délices. PARAD. Synon. agrément, bonheur, délectation, plaisir, volupté; anton. cruauté, douleur, malheur, supplice. − Expr. Délices de Capoue (p. allus. aux quartiers d'hiver qu'Hannibal prit à Capoue). Il s'amollit pendant quelque temps dans les délices de Capoue (Balzac, Mais. Nucingen,1838, p. 642).Jardin des délices. Paradis terrestre. Avoir choisi (...) dans le jardin de délices d'Éden, le fruit qui donne la conscience du bien et du mal (Valéry, Variété IV,1938, p. 177).Être le(s) délice(s) (de qqn). Vous m'êtes un délice (...) Vous m'êtes un nectar (Verlaine,
Œuvres poétiques complètes,Jadis et naguère, Paris, Gallimard, 1884, p. 215).Faire les délices (de qqn). Boileau, Racine et La Fontaine (...) font les délices des délicats (Joubert, Pensées,t. 2, 1824, p. 150). Rem. 1. On rencontre délice(s) souvent associé à un terme quasi-anton. Je goûtais de suppliciantes délices à palper ce qu'il offrait à ma caresse (Gide, Et nunc manet, 1951, p. 1134). Délice(s) tend à perdre son sens propre pour devenir un simple quantitatif à valeur intensive, superlative. 2. a) Délice au sing. est parfois fém. Il allait à la mort dont il espérait faire sa dernière délice (Chateaubr., Mém., t. 2, 1848, p. 23). b) Délices est gén. fém. au plur. sauf dans qq. formules comme un de mes plus grands délices (cf. Hanse 1949). Prononc. et Orth. : [delis]. Enregistré au plur. ds Ac. 1694-1932; cf. aussi Fér. 1768, Fér. Crit. t. 1 1787, Nod. 1844. Étymol. et Hist. Ca 1120 fém. plur. (Psautier d'Oxford, éd. Fr. Michel, CXXXVIII, 10); ca 1175 sing. (Chr. de Troyes, Cligès, 4576 ds T.-L.). Empr. au lat. class. deliciae, -arum « voluptés, douceurs, jouissance » et « objet d'affection, amour ». Fréq. abs. littér. : 1 892. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 3 832, b) 2 008; xxes. : a) 2 509, b) 2 190. |