| DÉFERRER, verbe trans. Ôter les ferrements appliqués sur quelque chose (pour l'assembler ou la décorer) sur un animal (pour protéger ses sabots) ou sur une personne (pour limiter ses mouvements). Anton. ferrer, mettre aux fers.Déferrer une porte, une roue (Ac.1835-1932).Déferrer un cheval des quatre pieds (Ac.1798-1878).On joue à « déferrer l'âne » (Menon, Lecotté, Vill. Fr.,1, 1954, p. 27):1. J'ai vu le banc de pierre où le condamné était ferré et scellé pendant la messe, déferré seulement pour l'élévation, pour qu'on le mît à genoux.
Michelet, Journal,1844, p. 561. ♦ Emploi pronom. à sens passif. Sa monture se déferrait du pied droit (Musset, Le Temps,1831, p. 84). − P. métaph., fam. Décontenancer quelqu'un. Synon. déconcerter, démonter.Si on l'interrompait, il [Barrès] avait la réponse prompte et ne se laissait pas déferrer (Tharaud, Mes années chez Barrès,1928, p. 141): 2. ... la jeunesse nous intimide parce que nous lui prêtons du secret. C'est la force de son silence. Nous le meublons de notre poche. Elle n'est pas longue à s'en rendre compte et à jouer de cette arme. Son silence devient systématique. Elle s'exerce à déferrer.
Cocteau, La Difficulté d'être,1947, p. 189. Rem. On rencontre ds la docum. chez Cocteau, Foyer artistes, 1947, p. 214 : un équipage déferré par la crainte et la manœuvre des voiles. Il semble que dans cet emploi il y ait une réminiscence du syntagme vieilli déferrer un navire (cf. Littré). Prononc. et Orth. : [defε
ʀe] ou [-feʀe] par harmonisation vocalique; (je) déferre [defε:ʀ]. [ε] ouvert à l'inf. ds Fér. 1768, Fér. Crit. t. 1 1787, Nod. 1844, Fél. 1851, Littré, DG, Barbeau-Rodhe 1930, Warn. 1968 et Lar. Lang. fr.; [e] fermé ds Land. 1834, Gattel 1841, Passy 1914 et Pt Rob. Homon. déférer si l'on admet la prononc. avec [e] fermé. Étymol. et Hist. 1. Ca 1130 « enlever un ou plusieurs fers à une bête de somme » destriers desferrez (Couronnement Louis, éd. E. Langlois, 2257), en partic. 1289 « libérer un prisonnier » (Jacquemard Gielée, Renart le Nouvel, éd. H. Roussel. 1717); 2. ca 1200 [ms. fin xiiies.] lances defferrees ([Richart de Semilli], Tournoiement des Dames, 36 ds Romania t. 28, p. 237); xives. [ms.] « ôter le fer qui garnit » (G. de Coincy, Mir. Vierge, éd. F. König 1 Mir. 10, 1324, var. ms. f. Arsenal 3527); 3. 1580 « perdre contenance » (Montaigne, Essais, éd. A. Thibaudet, I, XXVI, p. 204); 1680 trans. « déconcerter quelqu'un » (Sorel, Polyandre, III, 443 ds Dub.-Lag.). Dér. de ferrer*; préf. dé-*. Fréq. abs. littér. : 4. |