| DÉFENSE1, subst. fém. A.− [Correspond à défendre I A] Action de défendre en combattant. 1. a) Usuel. Action de défendre quelqu'un ou de se défendre contre une attaque, action de résister. Anton. attaque.Tirer son épée pour sa défense personnelle (Las Cases, Mémor., Ste-Hélène,t. 1, 1823, p. 275): 1. ... qui aurait la lâcheté de contempler quelque assassinat dans la rue, sans accourir à la défense de l'égorgé qui est son frère.
Sainte-Beuve, Volupté,t. 2, 1834, p. 210. 2. La défense de Roland et la défense de Léonidas prennent pour l'imagination cette figure : une garde à la frontière.
Thibaudet, Réflexions sur la litt.,1936, p. 212. − En partic. [Dans le cas d'une entreprise galante] :
3. Débats-toi, défends-toi. Qu'il est beau de voir la première défense que la vertu oppose à l'amour.
Giraudoux, Pour Lucrèce,1944, II, 2, p. 110. − Expr. et loc. Légitime défense, défense légitime. Action de repousser par la force un injuste agresseur, en accomplissant un acte interdit par la loi pénale. Il ne m'est pas arrivé une seule fois de tuer un homme, hors le cas de légitime défense (Balzac, Méd. camp.,1833, p. 99).Se mettre en défense, en état de défense. S'organiser contre une attaque, prendre une attitude défensive : 4. Près de lui [della Rebbia], était son fusil chargé et armé, comme s'il s'était mis en défense contre une personne qui l'attaquait en face au moment où une autre le frappait par derrière.
Mérimée, Colomba,1840, p. 48. b) Emplois spéc. − ÉQUIT. Résistance opposée par un cheval à son cavalier. Il aurait presque voulu que le cheval recommençât une défense pour la volupté de lutter avec lui (Montherl., Bestiaires,1926, p. 417). − SP. Action de défendre son camp : 5. Alors que dans la défense individuelle stricte, chaque joueur est responsable de son adversaire direct, dans la défense de zone, chaque joueur prend en charge l'adversaire qui se présente dans la surface de terrain qui lui est plus spécialement impartie.
J. Mercier, Le Football,1966, p. 63. ♦ P. méton. Ensemble des joueurs chargés de cette opération. L'équipe (...) confiante que les trois hommes de la défense feront ce qu'il faut (Montherl., Olymp.,1924, p. 299). c) Emplois fig. : 6. ... Monsieur, vous, en qui j'ai surpris quelquefois des mouvements de franchise et de justice, prenez en main la défense de votre siècle et de la vérité!
Jouy, L'Hermite de la Chaussée d'Antin,t. 1, 1811, p. 281. − P. méton. Moyens de défense. Mon âme sans défense N'a point contre ses yeux cherché de résistance (Chénier, Élégies,1794, p. 82): 7. Son père [de Maxence] avait nourri son esprit, mais non son âme. Les premiers troubles de la jeunesse la trouvèrent démunie, sans défense contre le mal, sans protection contre les sophismes et les piperies du monde.
Psichari, Le Voyage du centurion,1914, p. 5. − Locutions ♦ Avoir de la défense (fréquemment empl. dans un tour négatif). Être capable de résister aux difficultés, aux railleries, aux sollicitations. Synon. se défendre.Vous n'avez pas plus de défense qu'un enfant (Bernanos, Joie,1929, p. 617).La radio surprend les gens à table ou dans leurs lits, au moment qu'ils ont le moins de défense (Sartre, Sit. II,1948, p. 291): 8. Il est bon à grand'chose, votre fils! C'est un fameux cadeau que nous avons eu là! Il est toujours battu par les polissons. Il n'a pas de défense contre leurs tas de farces. Quel innocent! On ne peut rien lui faire faire.
Duranty, Le Malheur d'Henriette Gérard,1860, p. 236. ♦ Faire une belle défense. Résister longtemps à une sollicitation. Peut-être que les femmes sont principalement soutenues par l'orgueil de faire une belle défense (Stendhal, Amour,1822, p. 83). − Arg. ,,Combinaison avantageuse, filon`` (Esn. 1966); cf. Simonin, Simonin ill., 1957, p. 108. SYNT. Défense de l'Église, de l'empire (français), de la patrie, de la république, du royaume, de la société; défense de la culture, des droits, des intérêts, de la liberté/des libertés, de la religion, de la vérité; défense de (ou contre) l'ennemi, contre le danger; attaque et défense; geste, plan de défense; défense commune, naturelle, républicaine, sociale; la meilleure, sa propre défense; livrer sans défense; assurer, contribuer à, entreprendre, organiser la défense. 2. En partic. Action de défendre un lieu contre une attaque militaire. La résistance du fort de Vaux sert un dessein plus vaste que la défense d'un coin de sol (Bordeaux, Fort de Vaux,1916, p. 4). − P. méton. Ensemble du dispositif mis en œuvre pour se défendre d'un ennemi. D'homicides guerriers, poussés par la vengeance, Inondent tout-à-coup le palais sans défense (Baour-Lormian, Ossian,1827, p. 148).Je veux que la place soit mise en état de défense absolue (G. Leroux, Parfum,1908, p. 55): 9. En 1863, après une lutte longue et meurtrière, les Maoris occupaient une grande position fortifiée sur le haut Waikato, à l'extrémité d'une chaîne de collines escarpées, et couverte par trois lignes de défense. Des prophètes appelaient toute la population maorie à la défense du sol et promettaient l'extermination des « pakeka », c'est-à-dire des blancs.
Verne, Les Enfants du capitaine Grant,t. 3, 1868, p. 84. ♦ En partic., souvent au plur. Ouvrage d'art destiné à fortifier un lieu contre une attaque. La vieille forteresse dont les défenses gothiques avaient encore bonne apparence (Gautier, Fracasse,1863, p. 359): 10. Aucune défense devant nous, pas un pieu, pas un fil de fer. Des bosses, des trous, une terre lacérée où germaient des débris, et, à douze cents mètres, le bois qu'il fallait enlever, morne pépinière de troncs déchiquetés.
Dorgelès, Les Croix de bois,1919, p. 281. − MAR. Objet (ballon, pneu, etc.) protégeant le bordé d'une embarcation contre les chocs et les frottements (cf. Barber. 1969). SYNT. Défense de la capitale, des côtes, du front, du pays, du sol, du territoire, de la ville; défense aérienne, anti-aérienne; mesures, moyen, organisation, ouvrages, préparatifs, système, travaux de défense. − Défense (nationale). Ensemble des moyens militaires mis en œuvre pour défendre l'intégrité du territoire national et assurer la sécurité de la population. Comité de (la) Défense nationale; conseil (supérieur) de la Défense; ministre de la Défense. Photographier des pièces secrètes intéressant la Défense nationale (Clemenceau, Iniquité,1899, p. 26). ♦ HIST. Gouvernement de la Défense nationale. Gouvernement provisoire de la France de septembre 1870 à février 1871. La bataille des gardes nationaux de la Commune et de la Défense Nationale (Goncourt, Journal,1871, p. 783). − Défense passive. Dispositif de sécurité utilisé en temps de guerre pour assurer la protection de la population civile : 11. Ledit ingénieur des P.T.T. venait de se distinguer quelques jours auparavant, pendant un essai d'obscurcissement de Paris par la défense passive, en allumant des feux de bengale sur les marches du Sacré-Cœur.
Abellio, Heureux les pacifiques,1946, p. 235. 3. P. anal., MÉD. et SC. HUM. Résistance d'un individu à des agressions physico-chimiques, biologiques ou bio-psychiques. a) PHYSIOL. Résistance de l'organisme à une agression interne ou externe. Réaction de défense. Dans sa défense contre le tréponème pâle, l'organisme travaille surtout du foie (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 257).Contre les parasites et les microbes, cette défense [des tissus] reste parfois sans résultats (E. Garcin, Guide vétér.,1944, p. 13). b) PSYCHANAL. et PSYCHOL. Opposition inconsciente de l'individu à tout ce qui menace l'intégrité de sa personnalité. Instinct, mécanismes, réflexe(s) de défense. Une réaction de défense et comme une riposte de la personnalité (J. Bousquet, Trad. du silence,1935-36, p. 52). B.− P. ext. et au fig. [Correspond à défendre I A 2] Action de défendre par la parole ou par l'écrit. 1. Usuel. Action de défendre quelqu'un ou quelque chose contre une accusation. Voilà ce que je dis à la critique pour ma défense (Janin, Âne mort,1829, p. 18). ♦ Prendre la défense de. Prendre parti pour. Personne n'ose prendre la défense de cet infâme trafic [la traite des nègres] (Say, Écon. pol.,1832, p. 230).La fameuse séance du Sénat où Sainte-Beuve a pris la défense de Renan (Flaub., Corresp.,1867, p. 291). 2. DROIT a) Action de défendre en justice. La défense d'un accusé. Les garanties de défense des détenues (Goncourt, Journal,1862, p. 1149). − P. méton. ♦ Moyens de justification mis en œuvre par la personne qui défend. Dire pour, préparer sa défense. Avez-vous quelque chose à ajouter à votre défense? (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 328).Le Poittevin fut chargé de présenter la défense et moi de soutenir l'accusation (Maupass., Contes et nouv.,t. 2, Le Voleur, p. 1228). ♦ Partie qui défend et ceux qui l'assistent. Avocat, droits de la défense. Entendre le témoin que la défense avait caché jusqu'ici (Champfl., Bourgeois Molinch.,1855, p. 211).Il s'est tourné vers les jurés, puis vers la défense, puis vers le public (Martin du G., J. Barois,1913, p. 382).En partic. Avocat. La défense agitait triomphalement les manches de sa robe (A. France, Crainquebille,1904, p. 27). b) Au plur. Donner, fournir des défenses (Ac.1798-1932).Répondre par écrit et par ministère d'avoué à la demande de sa partie. Synon. conclusions en défenses (Cap. 1936). C.− [Correspond à défendre I C] Injonction (à quelqu'un) de ne pas faire quelque chose. Synon. interdiction.C'était expressément défendu; mais ils éludèrent la défense (Dumas père, Monte-Cristo,t. 2, 1846, p. 711).J'avais pris, malgré la défense du docteur, un cachet de véronal (Mauriac, Nœud vip.,1932, p. 175). − [Souvent empl. sans déterm. et/ou dans des phrases nom.] Sur la porte on grava : « Défense à Dieu d'entrer » (Hugo, Légende,t. 1, 1859, p. 50).Quand on mangeait, défense d'ouvrir la bouche (Taine, Notes Paris,1867, p. 86). ♦ Littér. Faire défense de. Interdire de. Je lui ai fait défense (...) d'assister Madame de Lauingen (Bourges, Crépusc. dieux,1884, p. 18).On retourna son portrait contre le mur et fit défense de prononcer son nom (Sartre, Mots,1964, p. 3). SYNT. Défense absolue, expresse, formelle; défense d'entrer, de fumer; enfreindre une défense. − En partic., DR., souvent au plur. ,,Jugement qui défend de procéder, de passer outre à l'exécution de quelque chose`` (Ac. 1798-1932). Obtenir, faire lever, faire signifier des défenses (Ac. 1798-1932). On obtint défense de laisser paraître ces deux éloges (Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 5, 1859, p. 316). ♦ Arg. ,,Interdiction de séjour`` (Esn. 1966). − P. ext., BÂT. Corde de sûreté à laquelle s'attache un couvreur pour travailler sur un toit dangereux (cf. Chabat 1881). Prononc. et Orth. : [defɑ
̃:s]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. A. 1. Mil. xiies. « action de se défendre en justice » defense de plait (Lois de Guillaume le Conquérant, éd. J. E. Matzke, § 47); 1249 « moyens employés pour défendre sa cause » (Coutumes d'Amiens ds Bartsch, La Langue et la litt. fr., Paris, 1887, 452, 22) cf. 1595 (Montaigne, Essais, éd. A. Thibaudet, livre 1, chap. 3, p. 41 : Sans les [ses braves capitaines] vouloir seulement ouïr en leurs defences); en partic. 1851 « l'accusé et ses avocats » (Cournot, Fondem. connaiss., p. 423 : affirmé par l'accusation, nié par la défense); 2. a) 1176 « action de se défendre (d'un sentiment) » (Chr. de Troyes, Cligès, éd. A. Micha, 521); 1177-78 « id. (dans un combat) » (Id., Chevalier Charrette, éd. M. Roques, 874); b) 1176 « moyens utilisés pour se défendre (ici créneaux) » (Id., Cligès, 1832 : desfanses de la tor). B. a) 1165-70 « objection » metre desfanse (Id., Erec et Enide, éd. M. Roques, 1747); b) 1177 « injonction de ne pas faire quelque chose » (Id., Chevalier Lion, éd. M. Roques, 1668). Empr. au b. lat. defensa « défense », part. passé subst. fém. de defendere, défendre*. Bbg. La Landelle (G. de). Le Lang. des marins. Paris, 1859, p. 192. |