| DÉCLASSER, verbe trans. [Le suj. désigne habituellement une pers.] A.− Faire sortir quelqu'un ou quelque chose de sa classe, de sa catégorie initiale. 1. Lang. cour. a) [Le compl. désigne une pers.] Priver quelqu'un du rang social qu'il occupait, généralement pour le faire passer dans une catégorie sociale inférieure. Il est si assommant d'être éternellement déclassé, et hors de son vrai milieu (Amiel, Journal,1866, p. 191).La richesse ne suffit à classer un homme : ... la pauvreté le déclasse (Maurras, Avenir intellig.,1905, p. 55). − Emploi pronom. Perdre son rang, descendre dans une catégorie sociale inférieure. Une nation nombreuse ne meurt pas, elle se déclasse. Elle descend d'un rang sur l'échelle comparative des grands états (Vogüé, Morts,1899, p. 420). b) [Le compl. désigne une chose] Placer dans une catégorie de rang inférieur. Déclasser des documents, des fiches : 1. Entre Mégare et Corinthe, aujourd'hui, je déclasse les Poèmes antiques, Barbares et Tragiques; je les rangerai dorénavant sur le rayon que préside Boileau.
Barrès, Le Voyage de Sparte,1906, p. 133. 2. Lang. sc. et techn. [Le compl. désigne des entités naturelles] Retirer une catégorie d'êtres, de végétaux de la classe scientifique à laquelle elle appartenait. − Emploi pronom. (à valeur passive) : 2. ... nous avons sous les yeux la chauve-souris qui nous montre comment le quadrupède lui-même peut se déclasser et prendre rang parmi les oiseaux.
A. Pommier, De l'Athéisme et du déisme,1857, p. 17. B.− [Avec une idée de dévalorisation] 1. [Le compl. désigne gén. une pers.] Faire officiellement sortir quelqu'un d'un rang qui, en raison de son mérite ou de sa valeur, lui avait été antérieurement attribué. Déclasser un sportif. 3. Le travail, qui honore l'homme, déclasse la femme. Le monde est en défiance contre celle qui veut gagner sa vie honorablement...
É. Augier, Les Fourchambault,1878, p. 142. − Emploi pronom., péj. Vous vous déclassez, vous vous mettez en marge (Claudel, Corresp.[avec Gide], 1899-1926, p. 221). − [L'obj. désigne une production de l'esprit] Déprécier, discréditer. Il [M. Daudet] a déclassé violemment l'esthétique de Flaubert (Thibaudet, Réflex. crit.,1936, p. 121). − P. méton., absol. [Le suj. désigne une manière d'être] Ôter de la classe, de la distinction : 4. ... les étudiants osaient arborer des bérets de velours et des cravates Lavallière, mais cela commençait d'être mal porté et déclassait.
J. de La Varende, Amours,1944, p. 93. 2. [Le compl. désigne un inanimé] Enlever une chose d'une liste officielle pour la placer dans une catégorie inférieure. Déclasser un vin. − Spéc., ARM., MAR. Déclasser un fort, un bâtiment. Le déclarer inapte à assurer la défense et renoncer à son usage, à son entretien. On se mit à déclasser un grand nombre de places et de forts (Joffre, Mém.,t. 1, 1931, p. 32). Rem. On rencontre le part. prés. déclassant en emploi adj. Le cercle de la rue Royale, lequel était jugé « déclassant » (Proust, J. filles en fleurs, 1918, p. 772). Cette curiosité déclassante (La Varende, Saint-Simon, 1955, p. 33). Prononc. et Orth. : [deklɑse], (je) déclasse [deklɑ:s]. Enq. : (il) déclasse /deklas, (D)/. Ds Ac. 1932. Étymol. et Hist. 1. 1813 « rayer quelqu'un du rôle de l'inscription maritime » (Ch. Romme, Dict. de la mar. fr. d'apr. Dauzat 1973); 1819 (Boiste); 1842 « sortir de sa catégorie » (Reybaud, J. Paturot, p. 340); 1856 subst. (F. Séchard, Les Déclassés [titre d'une comédie] ds Lar. 19e); 2. 1836 (Land. : déclasser, ôter quelque chose de sa classe). Dér. de classer*; préf. dé-*. Fréq. abs. littér. : 33. |