| DÉCADENT, ENTE, adj. et subst. I.− Adj. Qui est en décadence; qui est l'indice ou le résultat de la décadence. Époque décadente. La bourgeoisie décadente et désargentée (Abellio, Pacifiques,1946, p. 223): 1. Le baroque et la préciosité du style seraient ainsi la survivance, formelle et maniérée, d'un ordre social décadent ou révolu. Sur le plan esthétique, ils en sont le mourant écho.
Lévi-Strauss, Anthropol. struct.,1958, p. 293. − [En parlant d'une forme d'art, d'une œuvre, notamment des productions du mouvement littér. « décadent » de la fin du xixes.; gén. avec l'idée de raffinement éventuellement excessif] Il absorbait les nouvelles érotiques et décadentes des journaux littéraires à un sou (Rolland, J.-Chr.,Buisson ard., 1911, p. 1281).Les films de Mary Deren ont été les vestiges décadents du vieux surréalisme (Sadoul, Cin.,1949, p. 192): 2. Je viens de lire à fond le Termite de Rosny. Lui, nom de Dieu! qui a la pensée métaphysique, la pensée obscure, il l'habille, cette pensée, d'un style décadent, d'un style aussi incompréhensible que celui de Francis Poictevin.
Goncourt, Journal,1890, p. 1122. ♦ P. méton. [En parlant d'une pers.] Le latin (...) est la langue de poètes infiniment délicats, presque décadents, comme on dit aujourd'hui (Renan, Feuilles détach.,1892, pp. 267-268).On allait à Greenwich Village pour y voir des femmes à cheveux courts et des jeunes gens décadents (Morand, New York,1930, p. 104). II.− Substantif A.− [Désigne une qualité] Qualité de ce qui est décadent. Le coup de pinceau donné par l'ébauchoir est une recherche de décadent souvent funeste (Péladan, Art ochlocratique,Salons 1882 et 1883, 1888, p. 39). B.− [Désigne une pers.] Personne qui appartient à une époque de décadence, qui se distingue par un raffinement propre à l'esprit décadent. Ses sens délicats et raffinés de décadente (Péladan, Vice supr.,1884, p. 4): 3. Voyez le xviiesiècle français. Il a eu ses décadents, mais ce ne sont pas eux qui ont façonné l'esprit du siècle.
Aymé, Le Confort intellectuel,1949, p. 16. − Spéc. Membre du mouvement littéraire et philosophique « décadent » de la fin du xixesiècle. Les décadents qui cuisinent des hachis de mots (Huysmans, Là-bas, t. 1, 1891, p. 33).« Voyons! vous n'allez pas me faire croire que les décadents ont du talent » (Renard, Journal,1891, p. 106). ♦ Le Décadent. Revue de ce mouvement, qui parut de 1886 à 1889. Rem. On rencontre chez Verlaine, Corresp., t. 2, 1887, p. 85, le subst. masc. décadard, fam. Membre du mouvement décadent. Je mets tous ces éphèbes d'accord, symbolos et décadards, avec ce grand mot : Liberté-libertas! Prononc. et Orth. : [dekadɑ
̃], fém. [-ɑ
̃:t]. Ds Ac. 1932. Étymol. et Hist. 1516 « qui est en déclin » (Guill. Michel, à la suite des Eglog. de Virgile, 31 ro, édit. 1540 ds R. Hist. litt. Fr., t. 9, p. 472 : saison décadente) − 1584 (Brant., Dames, IX, 458 ds Hug.); à nouv. 1834 Boiste qui fait référence à Brantôme; spéc. s'applique à une école littéraire et philosophique de la fin du xixes. av. 1872 subst. désignant une pers. (Gautier, Guide Louvre, p. 107); cf. Plowert : décadent. s.m. − Employé volontiers par Gautier, Flaubert et Goncourt dans le sens de raffinement littéraire. Formé à partir de décadence*. Fréq. abs. littér. : 125. |