| DÉCADENCE, subst. fém. A.− Vx, rare. État de ce qui commence à tomber, à s'écrouler : 1. Si j'habitais Marseille (...) j'irais me loger à la Tourette. C'est une terrasse magnifique, élevée de 100 pieds au-dessus de la mer; et l'on n'en est séparé que par un précipice naturel (...) Un vieux mur en décadence sépare seul de la mer profonde.
Stendhal, Mémoires d'un touriste,t. 3, 1838, p. 195. B.− Au fig., usuel. État de ce qui commence à se dégrader et évolue progressivement vers sa fin ou sa ruine. Décadence de l'art/des arts, des lettres, des mœurs. C'est bien triste d'assister à la décadence de ceux qu'on aime, de voir leurs forces s'en aller, leur intelligence disparaître (Flaub., Corresp.,1871, p. 289).La décadence est la grande minute où une civilisation devient exquise (Cocteau, Maalesh,1949, p. 145). ♦ En décadence : 2. On nous a assez dit que nous étions un peuple en décadence, qui ne fait plus d'enfants qui n'a plus de foi en soi-même, qui se décompose assez voluptueusement sur le territoire admirable dont il jouit depuis trop de siècles.
Valéry, Variété IV,1938, p. 70. SYNT. Décadence économique, morale; la décadence d'un empire, d'un état, d'une ville; des causes, des signes, des symptômes de décadence; être en (pleine) décadence; tomber en décadence. Histoire de la grandeur et de la décadence de César Birotteau (roman de Balzac, 1837). − P. méton. 1. Période de l'histoire correspondant à une régression sur le plan politique et/ou artistique. Vers la décadence de l'art byzantin, la pyramide renversée devient la seule forme en usage [pour les chapiteaux] (Lenoir, Archit. monast.,1852-56, p. 366). ♦ Spéc. Période correspondant aux derniers siècles de l'Empire Romain : 3. Les auteurs latins de la décadence, les tragédies de Sénèque, par exemple, ont souvent meilleur air, quand elles sont traduites en français, que les chefs-d'œuvre de la grande époque.
Renan, L'Avenir de la sc.,1890, p. 516. 2. Emploi d'auteur.
Œuvre ou trait caractéristique du style d'une époque de décadence artistique. Je marchai environ une heure (...) avant d'arriver au temple qui est d'une architecture pleine de magnifiques décadences (Du Camp, Nil,1854, p. 294). 3. Rare. Ensemble des doctrines du mouvement décadent de la fin du xixesiècle. Synon. plus fréquent décadentisme.Le « moment » 1885-1895 où le naturalisme comme l'esthétisme et la décadence essaient de s'implanter sur le sol anglais (Arts et litt.,1936, p. 4012). Prononc. et Orth. : [dekadɑ
̃:s]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1413 « état d'une construction qui se dégrade » (Denombr. du baill. de Caux, A.N. P 303, fo99 vods Gdf. Compl.); en 1835 Ac. note ,,Il n'est presque plus d'usage au propre``; 1468 « acheminement vers le déclin, la ruine » (Chastellain, Chron., éd. Kervyn de Lettenhove, t. 5, p. 179). Prob. empr. au lat. médiév. decadentia (plur. devenu fém. sing. de decadere, v. déchoir), v. Du Cange s.v. et s.v. avaluacio. Fréq. abs. littér. : 773. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 181, b) 1 333; xxes. : a) 1 145, b) 876. |