| CORSER, verbe trans. I.− Emploi trans. A.− 1. Donner plus de corps à quelque chose, le renforcer, le rendre plus consistant. [Aliments] Corser un repas, une ration; corser une sauce en ajoutant des épices; corser le potage de pommes de terre; corser le café d'un petit rhum ou d'un cognac. Rendre plus important (avec l'idée d'un accroissement imprévu, anormal, illicite...). Corser une facture, une note d'honoraire; corser une promenade par la visite de quelques monuments. Je lui donne quelques inédits pour corser sa brochure (Bloy, Journal,1901, p. 60): 1. Henry, pour corser le dossier Dreyfus, avait proposé à ses chefs d'y introduire quelques faux.
Clemenceau, Vers la réparation,1899, p. 406. − Spéc., PEINT. Corser un vernis. Le rendre plus épais. 2. P. ext. Rendre plus fort. a) GASTR. Donner un goût plus fort. Corser un plat avec des épices; corser un apéritif, un cocktail; corser un punch en ajoutant du rhum. Synon. assaisonner, relever.On fit apporter la bouteille de vinaigre sur la table, pour corser le beurre noir, qui semblait fade (Zola,
Œuvre,1886, p. 83). b) Au fig., fam. Rendre plus expressif, rendre truculent, piquant. (Dans l'expr. langagière) Corser un roman de quelques scènes osées; corser une histoire, un feuilleton, une pièce, un dénouement; corser son langage d'expressions argotiques. B.− Rendre plus complexe, compliquer. Corser un exercice par quelques questions supplémentaires; corser un récit, une intrigue, un roman policier. Il ne s'agissait pas ici de corser les choses (Villiers de L'I.-A., Contes cruels,1883, p. 275).Tout cela corsait le problème (Pesquidoux, Livre raison,1928, p. 239).Corneille [à propos d'Andromaque] a cru devoir corser cette situation déjà assez compliquée (Brasillach, Corneille,1938, p. 301). − Spéc., CRIT. LITTÉR. Corser son roman, son chapitre, sa dissertation. Corser un article, une pièce, un acte, le dénouement. Les travailler, les étoffer, les élaborer plus que d'ordinaire (cf. corsé II B 3). II.− Emploi pronom. A.− [En parlant de graines] Prendre corps, croître après germination. Afin que le grain achevât de se dilater sous la rosée et de se corser au soleil (Pesquidoux, Livre raison,1928, p. 83). − P. anal. [En parlant du vin] Prendre du corps* : 2. Le jus de la treille aime cela [être mis en bouteille], et sans ces entourloupettes et manigances, peut-être qu'il ne mettrait pas tant de complaisance à se corser, à se velouter, à se corporifier.
A. Arnoux, Calendrier de Flore,1946, p. 216. B.− Emploi intensif 1. Devenir plus consistant, plus intense. Les repas, les menus se corsent; la promenade se corse. Le beau temps de la veille s'était corsé et il faisait un soleil vigoureux (Benjamin, Gaspard,1915, p. 69). 2. Devenir truculent, piquant. L'histoire, l'intrigue se corse; son vocabulaire se corse d'emprunts argotiques (cf. corser I A 2 b). 3. Devenir plus compliqué. L'affaire, l'intrigue, le problème se corse. Décidément, ça se corsait! (Courteline, Train 8 h 47,1888, 1repart., 3, p. 36).Cette délicieuse inquiétude d'épiderme qui vous saisit quand l'action se corse (A. Daudet, Tartarin Alpes,1885, p. 105). Prononc. et Orth. : [kɔ
ʀse], (je) corse [kɔ
ʀs]. Ds Ac. 1932. Étymol. et Hist. A. 1. 1455-56 [ms.] courser « lutter en saisissant à bras-le-corps » (Florence de Rome, [ms. Bibl. nat. fr. 24384] 2578 ds T.-L.); 1572 corser [date éd.] (J. A. de Baif, Les amours ds Gdf. Compl.); 2. [1819 corsé part. passé adj. « qui a du corps » Boiste d'apr. Lar. Lang. fr.]; 1829 « id. (en parlant d'une femme) » (Stendhal, Corresp., t. 2, p. 488); d'où fig. a) 1830 « qui a de l'importance » une érudition corsée (Balzac, Bal Sceaux, p. 132); 1830, 15 avr. un dîner corsé (Id.,
Œuvres diverses, t. 2, p. 10); b) 1838, 24 mars « qui a un goût relevé » un bordeaux corsé (Stendhal, op. cit., t. 3, p. 210); 1846 fig. « amusant, piquant » (Balzac, La Cous. Bette, p. 343). B. 1782 « qui porte un corset » demoiselles corsées (Tableau de Paris, t. 4, p. 115 ds Fr. mod.,t. 24, p. 220); qualifié de ,,peu usité`` ds Lar. 19e; de ,,vx`` ds Lar. Lang. fr. Dér. de la forme a. fr. cors de corps*; dés. -er. Fréq. abs. littér. : 66. |