| CONTRADICTION, subst. fém. A.− [L'oppos. est dans l'esprit, l'attitude, etc., d'une pers.; souvent avec compl. prép.] 1. Action de s'opposer à soi-même ou d'opposer quelqu'un à lui-même en agissant dans un sens que contredisent ses pensées, ses paroles ou ses actes antérieurs. Être, se trouver, se mettre en contradiction avec soi-même : 1. C'était l'époque où je t'accablais de mes moqueries, où je m'acharnais à te mettre en contradiction avec tes principes...
Mauriac, Le Nœud de vipères,1932, p. 120. 2. Emploi abs. [Sans compl. prép.] Opposition que l'on manifeste contre quelqu'un en contredisant ce qu'il dit ou ce qu'il pense. Les amoureux sont métaphysiciens; Ils ne peuvent porter la contradiction (Alain, Propos,1926, p. 683).Tout le monde sait que Madame R. a occupé pendant vingt ans, sans contradiction, le trône de la beauté à Paris (Brillat-Savarin, Physiol. du goût,1825, p. 313): 2. Quoi que la pauvre mère dise, son fils, comme s'il avait été emmené malgré lui et voulait faire payer cher sa présence, contrebat immédiatement d'une contradiction ironique, précise, cruelle, l'assertion timidement risquée;...
Proust, Le Côté de Guermantes 1,1920, p. 280. − [Souvent en parlant d'un débat oratoire] :
3. Quand le docteur vint faire une réunion au café Blanc, on s'amena rigoler un coup. Le candidat modéré, le monsieur de Paris, était venu pour la contradiction, et le vieux Loménie était dans la salle.
Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 92. ♦ Avoir l'esprit de contradiction. Se mettre systématiquement dans ses actions et dans ses paroles en opposition avec ce que fait ou dit autrui : 4. Il ne manquait à cet éden agricole que l'arbre et la vigne, ces premiers nés du sol chez nous. Il n'en voulait point, par un esprit de contradiction poussé à la manie.
Pesquidoux, Le Livre de raison,1928, p. 187. B.− [L'oppos. est dans les choses, entités, etc.] Opposition résultant de l'union de choses incompatibles. Impliquer, contenir une contradiction flagrante, manifeste; chaos, tissu de contradictions; être, entrer en contradiction avec qqc. : 5. [ferrante] Ô mon Dieu! Dans ce répit qui me reste, avant que le sabre repasse et m'écrase, faites qu'il tranche ce nœud épouvantable de contradictions qui sont en moi, de sorte que, un instant au moins avant de cesser d'être, je sache enfin ce que je suis.
Montherlant, La Reine morte,1942, III, 8, p. 234. − Spéc., LOG. Relation existant entre deux notions dont l'une nie l'affirmation de l'autre. La dualité, qui est la contradiction de l'unité, en est aussi la conséquence (Baudelaire, Curiosités esthétiques,1867, p. 99). ♦ Principe de contradiction. Toute preuve logique repose en définitive sur le principe de contradiction, c'est-à-dire sur le principe qu'une chose ne peut à la fois être et n'être pas (Cournot, Essai sur les fondements de nos connaissances,1851, p. 565). Prononc. et Orth. : [kɔ
̃tʀadiksjɔ
̃]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. Ca 1120 contradictïun « action de parler contre, critique » (Psautier d'Oxford, éd. Fr. Michel, LXXIX, 7 [posuisti nos in contradictionem vicinis nostris]), seulement au Moy. Âge, cf. contredire 1; 2. ca 1370 log. « incompatibilité, opposition » (Oresme, Eth., 71 ds Littré); 3. 1541 « action de s'opposer à une affirmation » (Calvin, Instit., 791, ibid.); 1remoitié xvies. esprit de contradiction (Des Périers, Contes, XXXIX, ibid.). Empr. au lat. impérial contradictio « action de contredire (à l'école, au tribunal) » et « incompatibilité (en logique) », puis en lat. chrét. « différend, insulte ». Fréq. abs. littér. : 2 355. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2 576, b) 2 349; xxes. : a) 3 046, b) 4 726. Bbg. Laplatte (C.). Notes sur le vocab. judiciaire. Fr. mod. 1947, t. 15, pp. 171-172. |