| CONSOLATION, subst. fém. A.− Action de consoler, d'apporter un réconfort d'ordre humain ou divin, sur le plan moral, parfois matériel, physique, sensible; fait d'être consolé, de recevoir un tel réconfort. Mot, parole de consolation. La prière, (...), la consolation aux affligés, (...) remplissaient chacune des journées de sa vie (Hugo, Les Misérables, t. 1, 1862, p. 72): 1. De sa pauvre âme mutilée, tout s'échappait, sauf le centre, comme eût dit son frère. Augustin pensait que la possession de ce centre lui apporterait consolation et sérénité.
Malègue, Augustin,t. 2, 1933, p. 405. B.− P. méton. 1. Ce qui, d'origine humaine ou divine, console, apporte un réconfort moral, parfois matériel, physique, sensible. Les consolations de l'amitié, de la religion. Les consolations ou les déceptions que dispense une société civile détachée elle-même de tout lien avec la loi évangélique (Maritain, Humanisme intégral,1936, p. 313). SYNT. Consolation humaine, suprême; douce, maigre, seule consolation; avoir besoin de consolation; être privé de consolation; donner une consolation; en manière de consolation. − Constr. gramm. ♦ Avoir la (grande) consolation de + inf., que; c'est (pour qqn) une (grande) consolation de + inf.J'ai cette consolation que mon labeur avance (Mallarmé, Correspondance,1877, p. 153).C'est pour toi [Antigone], simple mortelle, une grande consolation que d'avoir le sort d'une divinité (Cocteau, Antigone,1932, p. 27). ♦ Chercher une consolation [à, de qqc. (d'affligeant)] dans qqc., en qqn; trouver (une) consolation à qqc. (d'affligeant) dans qqc., en + part. prés., à + subst. ou inf. (avec valeur positive).Chercher en soi des consolations à toutes les pertes (Maine de Biran, Journal,1817, p. 46).Si MmeDelanoë trouve un peu de consolation à cette lecture, je n'y vois pas d'inconvénients (P. Bourget, Le Sens de la mort,1915, p. 204). − Lang. biblique. Consolation d'Israël (St Luc, II, 25). Espérance du salut, de la venue du Messie et p. méton. le Messie lui-même (cf. Péguy, Le Mystère de la charité de Jeanne-d'Arc, 1910, p. 45). − Par antiphrase, iron. : 2. ... « le philosophe Crantor disoit que celui qui souffre du mal sans en estre cause, est fort soulagé en cet accident de fortune. » Belle consolation que la maxime de Crantor pour ce boulanger torturé!
Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 1, 1840, p. 70. 2. En partic. a) Geste, parole, écrit, pensée utilisés par une personne pour en consoler une autre; façon de se consoler. Écrire une lettre de félicitations ou de consolations (Flaubert, Correspondance,1878, p. 123).Je reste là, je bredouille une consolation : elle se sera trompée d'heure (Frapié, La Maternelle,1904, p. 118). − LITT. Écrit généralement rédigé pour consoler quelqu'un de la mort d'un proche, d'une situation affligeante, ayant parfois l'allure d'un traité moral. Il me récitait les Maximes d'Epictète, les Homélies de saint Basile et les Consolations de Boèce (A. France, La Rôtisserie de la Reine Pédauque,1893, p. 31). b) Chose concrète qui console, apporte réconfort, soulagement, joie, plaisir. Une lettre de moi! C'est (...) son bien, sa consolation (A. Dumas Père, Antony,1831, I, 4, p. 168). − P. méton. Personne qui apporte la consolation. La dernière fois que je l'ai vue, elle me disait encore que vous étiez la consolation de sa vie (Montherlant, Les Célibataires,1934, p. 870). c) Spécialement
α) JEUX − (Fiche de) consolation. Bénéfice supplémentaire payé par le perdant qui avait demandé à jouer, au gagnant, dans un jeu de cartes. ♦ P. métaph., fam. Dédommagement matériel, parfois réconfort moral. Polignac est venu me voir; il a bien recommandé qu'on me donnât sa carte : c'est la fiche de consolation (Chateaubriand, Correspondance gén.,t. 2, 1789-1824, p. 287). − (Lot de) consolation. Petite compensation accordée aux perdants d'un jeu, d'une épreuve sportive, p. ext. à des personnes desservies par le sort. Quant à ceux qui ne gagneront pas, ils auront comme consolation cette autre caisse qu'on leur partagera (Jarry, Ubu Roi,1895, II, 7, p. 53).
β) SP. (Épreuve de) consolation. Épreuve au cours de laquelle se rencontrent les perdants d'une compétition précédente. Consolation de la Médaille et Coupe de l'Œuvre (L'Œuvre,24 janv. 1941).
γ) Argot − Jeu de hasard à la fin duquel un bijou est offert au perdant; jeu de hasard organisé au retour des courses pour consoler les perdants (cf. Hogier-Grison, Les Hommes de proie, Le Monde où l'on triche, 1resérie, 1886, p. 134). − Eau de vie. J'ai toujours gagné assez pour (...) prendre mon café avec la consolation! (J. Vallès, Jacques Vingtras,L'Insurgé, 1885, p. 288). ♦ (Débit de) consolation. Le lendemain, avec son ivresse mal cuvée de la veille, il repartait, tapait aux volets des consolations (Zola, L'Assommoir,1877, p. 628). Rem. On rencontre ds la docum. le subst. masc. consolament (synon. de consolation B), calqué sur le lat. patristique consolamen « ce qui console », ou empr. au lat. médiév. consolamentum, a. prov. consolament, désignant le baptème cathare. On dirait que Mompou s'est rappelé les mots inscrits par Vermeer sur le clavecin de la « Leçon de Musique : Musica laetitiae comes, medicina doloris... » Cette médecine et ce consolament, cette joie qui pénètre les âmes, n'est-ce pas là, en un sens, toute la sagesse de Gabriel Fauré? (Jankélévitch, Le Je-ne-sais-quoi et le presque-rien, 1957, p. 102). Prononc. et Orth. : [kɔ
̃sɔlasjɔ
̃]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. [xies. consulaciun « atténuation d'une peine morale » (Alexis, éd. Storey, prologue; seulement transmis par L, xiies., prob. dû à un copiste)]; début xiies. consolatiun (Ps. Oxford, éd. F. Michel XCIII, 19 [consolationes tuae laetificaverunt animam meam]); 2. 1771 « sujet de joie, de satisfaction » c'est une grande consolation de... (Trév.); 3. 1835 jeux fiche de consolation d'où fig. « adoucissement à quelque disgrâce » (Ac.). Empr. au lat. class. consolatio « action de consoler, de soulager ». Fréq. abs. littér. : 2 184. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 4 410, b) 3 834; xxes. : a) 2 367, b) 2 046. Bbg. Lew. 1960, p. 127. − Sain. Lang. par. 1920, p. 401. |