Police de caractères:

Surligner les objets textuels
Colorer les objets :
 
 
 
 
 
 

Entrez une forme

options d'affichagecatégorie :
COHUE, subst. fém.
A.− Vieux
1. HIST. DU DR. Assemblée de justice. Les débats de la cohue (Hugo, Les Travailleurs de la mer,1866, p. 235):
1. À Rouen, quand un hérétique était abandonné au bras séculier, l'usage était de le conduire au conseil de la ville, qu'on nommait la cohue, pour lui signifier sa sentence. A. France, Vie de Jeanne d'Arc,1908, p. 393.
Rem. 1. Sens également enregistré par Lep. 1948. 2. Selon les dict. gén. du xixes. et selon Quillet 1965 et Lar. Lang. fr., le mot désigne dans cet emploi (cf. étymol.) le lieu où les petites justices se tenaient. Cf. Ac. 1835-78 : la cohue de tel lieu. Le procureur était à la cohue.
2. Marché. Le bateau était chargé de marchands qui se rendaient à la foire de Beaucaire, (...). J'ai débarqué sur le rivage où se tient cette cohue célèbre (M. de Guérin, Correspondance,1837, p. 318).
B.− P. ext., le plus souvent avec une nuance péj. et au sing. Réunion tumultueuse d'un grand nombre de personnes; foule confuse, désordonnée. Quelle cohue! Cohue de piétons, cohue tumultueuse. Quelle imprudence (...) de traverser une telle cohue! On dirait une émeute (A. France, L'Orme du mail,1897, p. 189).C'était une cohue furieuse et hurlante. (...). Toute cette foule criait, chantait, braillait (Maupassant, Contes et Nouvelles,t. 1, La Femme de Paul, 1881, p. 1217):
2. Tout le monde était contre lui. Depuis Ponce Pilate jusqu'au dernier des charretiers. Elle suivait de loin. De près. D'assez loin. D'assez près. Cette cohue hurlante. Cette meute qui aboyait. Et mordait. Cette cohue hurlante qui hurlait et tapait. Péguy, Le Mystère de la charité de Jeanne d'Arc,1910, p. 96.
3. Le public, debout, tape des pieds, hue, siffle, vocifère. Puis, (...) il se rue frénétiquement vers les portes. (...) des femmes, pressées dans la cohue, s'évanouissent; (...) une véritable scène de panique. R. Martin du Gard, Jean Barois,1913, p. 399.
Au plur., rare [Avec une valeur péj. accentuée] Des masses confuses, les débris de plus de deux cents divisions se repliant à l'état de cohues (Foch, Mémoires,1918, p. 322):
4. Moi, qui recherche dans les chapelles les coins les plus déserts, les endroits les plus sombres, moi qui exècre les cohues, je me mêle presque volontiers aux siennes [de Notre-Dame-Des-Victoires]. Huysmans, En route,t. 1, 1895, p. 117.
En cohue. En masse et dans la confusion et le désordre. Dans quelques heures, les bergers allemands nous chasseront tous vers l'est, en cohue, sans distinction de grade (Sartre, La Mort dans l'âme,1949, p. 41).
P. ext. [Sans les composantes confusion, désordre, tumulte] :
5. L'ostensoir avançait porté par le prêtre, comme s'il eût régné sur cette masse. (...). Et l'on eût dit qu'une main pesante courbait cette cohue sous le prêtre. Les hommes, découverts, les femmes, à genoux, inclinaient la tête et se signaient. Van der Meersch, L'Empreinte du dieu,1936, p. 111.
[Avec l'idée d'entassement confus] Par-dessus la cohue des morts, une mousseline de neige est posée (Barbusse, Le Feu,1916, p. 284).
P. méton. Tumulte, confusion, désordre, etc., caractéristiques d'une telle réunion. Cohue du marché. Ce fut une cohue à la sortie, une cohue bruyante, un charivari de voix criardes où chantait l'accent normand (Maupassant, Contes et Nouvelles,t. 1, La Maison Tellier, 1881, p. 1197).La gare est très mal éclairée, on ne voyait rien, on se poussait, on criait, dans la cohue du départ (Zola, La Bête Humaine,1890, p. 69):
6. ... la grande salle de la bourse se trouva pleine dès midi et demi, dans une extraordinaire agitation de voix et de gestes. Depuis quelques semaines, d'ailleurs, l'effervescence montait, et elle aboutissait à cette dernière journée de lutte, une cohue fiévreuse où grondait déjà la décisive bataille qui allait s'engager. Zola, L'Argent,1891, p. 317.
7. Et le soir, pour rentrer, la cohue des trains, l'empilement suffocant dans les honteux wagons de la banlieue, bas, étroits, et obscurs, le bruit, les rires, les chants, la grivoiserie, la puanteur, la fumée du tabac. R. Rolland, Jean-Christophe,Antoinette, 1908, p. 891.
P. anal. Cohue des voitures. Une véritable cohue de pointes, de pyramidions, de flèches comme aucune cathédrale gothique n'en a jamais compté (Verne, L'Île mystérieuse,1874, p. 403).Dans cette cohue de lueurs tombées du toit et de feux allumés autour du catafalque et sur l'autel (Huysmans, En route,t. 1, 1895, p. 21).Un ordre s'ébauchait dans la cohue des vagues (Queffélec, Un Recteur de l'île de Sein,1944, p. 128).
C.− Figuré
1. [Correspond à l'emploi p. ext. supra; avec une valeur péj. accentuée, pour désigner un groupe humain, social, professionnel, etc., ou un ensemble de choses d'une même catégorie] Cette innombrable cohue de beaux esprits qui ne firent jamais que des vers détestables (Sainte-Beuve, Tabl. hist. et crit. de la poésie fr. et du théâtre fr. au XVIes.,1828, p. 114).Dire que je vais rentrer dans la turpide et servile cohue du siècle (Huysmans, À rebours,1884, p. 293).Ces pauvres âmes si misérablement piétinées, (...) par la cohue des mufles (Huysmans, En route,t. 2, 1895, p. 183).Faire (...) d'une cohue d'intérêts et de passions contraires, un grand parti capable d'une action commune et puissante (A. France, Les Dieux ont soif,1912, p. 119):
8. ... avec la cohue de critiques et de chroniqueurs qui s'abattent chaque matin sur tout sujet, on va de bévue en bévue, de contre-vérité en contre-vérité; ... Sainte-Beuve, Pensées et maximes,1868, p. 135.
9. ... à Paris, il a sous les yeux (...) la cohue des intérêts rivaux, la mêlée des passions, une masse énorme d'hommes et de femmes qui vont et qui viennent, ... P. Bourget, Nouv. Essais de psychol. contemporaine,1885, p. 87.
2. [Correspond à l'emploi p. méton. supra; avec une valeur péj. accentuée, pour désigner au plan moral ou/ et intellectuel, la confusion, l'incohérence, l'agitation désordonnée, etc.] Le dispensateur de la paix ne trouvait en lui-même que désordre, cohue, la galopade des images emportées, un sabbat plein de grimaces et de cris (Bernanos, Sous le soleil de Satan,1926, p. 243):
10. Le professeur en était quitte, toutes plaidoiries entendues, pour donner un résumé des débats... Ce résumé, on peut le croire, ne terminait rien : la cohue d'opinions subsistait... Sainte-Beuve, Nouveaux lundis,t. 8, 1863-69, p. 74.
Prononc. et Orth. : [kɔy]. Ds Ac. 1694-1932. Passy 1914 transcrit [kɔhy] en faisant sentir l'h. On rappelle que h ne se prononce jamais en fr. mais que sa prononc. peut être tolérée dans l'emphase à laquelle se prête ce mot : quelle cohue! (À ce sujet cf. G. Straka, La Prononc. parisienne ds B. de la Faculté des Lettres de Strasbourg, 1952, p. 44). Étymol. et Hist. A. 1. 1232 lat. médiév. cohua, désigne la halle de Vouvant [Vendée] (Charte de G. de Lusignan ds Du Cange, s.v. cohuae, p. 395c); 1235 id. désigne la halle de Machecoul [Loire-Atlantique] (Cartulaire des Sires de Rays, éd. R. Blanchard, acte CXXXIII ds Arch. hist. du Poitou, t. XXX, 1899, p. 101); 1278 cohue de Chastau-Gontier [Mayenne] (Arch. de Thouars ds Gdf.); 2. 1318 lat. médiév. cohuta « (en Normandie) siège de l'assemblée des officiers justiciers réunis en tribunal [à l'orig. des officiers de petite justice se tenant aux halles] » (Document ds Du Cange s.v. : cohutam de Novoburgo [Le Neubourg, Eure] in qua placita nostra tenentur); [1321 désigne peut-être la prison attenant au tribunal (Document, ibid., s.v. cohuae, p. 396a : la garde du guichet et de la cohue de la vicomté de Pontiaudemer [Eure])]; 1377 (Ord., VI, 274 ds Gdf. : comparoir... en la cohue du chastel de Rouen) − 1771, Trév. B. 1638 « assemblée bruyante » [à propos de l'Académie de la vicomtesse d'Auchy] (Chapelain, Corresp., éd. Tamisey de Larroque, t. I, p. 203); av. 1660 « bruit confus, cris » (Scarron ds Rich. 1680). A terme du Nord-Ouest et de l'Ouest, empr. au bret. koc'hu, koc'hui « halle » (Henry; Troude), terme dont l'ancienneté est prouvée par l'empr. fr. et qui dès le m. bret. est attesté au sens de « réunion tumultueuse » (Henry), cf. cymrique cy-chwyf « agitation, tumulte », de chwyf « mouvement » (ibid.); B est soit dér. de A, soit, moins prob., un nouvel empr. au breton. Fréq. abs. littér. : 497. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 313, b) 674; xxes. : a) 1 335, b) 680. Bbg. Cellard (J.). Ds les pages de von Wartburg. Monde (Le). 1974, 1/2 septembre, p. 13. − Sain. Sources t. 1 1972 [1925], p. 382. − Thurneysen 1884, p. 96.