| CHEMINEMENT, subst. masc. A.− Action de cheminer*. Le cheminement lent du fiacre (E. et J. de Goncourt, Journal,1884, p. 338): 1. ... Veuillez vous rappeler ce chemin solitaire. Quand on nous aura mis dans une étroite fosse, quand on aura sur nous dit l'absoute et la messe, veuillez vous rappeler, reine de la promesse, le long cheminement que nous faisons en Beauce.
Péguy, La Tapisserie de Notre-Dame,1913, p. 686. B.− P. anal. 1. [En parlant de qqc. qui est en mouvement ou semble l'être parce que progressant] Déplacement, avance, progression graduelle. Le cheminement par la voie normale des informations financières (La Civilisation écrite,1939, p. 4014).Cheminement rationnel des produits en cours de fabrication (R. Villemer, L'Organ. industr.,1947, p. 247).On suit (...) en radioscopie le cheminement de la substance opaque à l'intérieur du canal rachidien (Quillet Méd.1965, p. 331): 2. ... elles [les grandes pluies] fouettent si fort que, petit à petit, elles détrempent le mortier entre les pierres et pénètrent à travers. Rien ne résiste à ce cheminement insensible, hormis le granit.
Pesquidoux, Le Livre de raison,1925, p. 147. SYNT. Cheminement des sables, des électrons; cheminement du courrier (cf. acheminement); cheminements de la lune. ♦ CH. DE FER. Cheminement du rail. Déplacement du rail dans le sens de la longueur dû au frottement ou à une déformation de la voie sous-jacente. Des semelles minces en bois comprimé sont placées entre rail et traverse pour absorber les vibrations, supprimer le cheminement du rail (J. Campredon, Le Bois,1948, p. 131). − TOPOGR. Méthode de levée. Cheminement au goniomètre, à la planchette déclinée (Rob.). Rem. Attesté ds Rob. et Lar. encyclop. 2. Au fig. [En parlant d'un élément, d'un produit de la vie intellectuelle ou affective] Modification graduelle, évolution, lente progression. Cheminement de la pensée, de l'esprit. La lenteur souvent exaspérante du cheminement de son récit (Gide, Journal,1943, p. 224).La science moderne, avec son cheminement sûr, mais de tortue (J. Péladan, Le Vice suprême,1884, p. 198): 3. ... une tenace volonté de conquête spirituelle, de patient cheminement, (...), intéressé au seul progrès intérieur. (...), son originalité est la marque d'un esprit qui se meut dans un monde particulier, bien à lui parce qu'il l'a conquis pas à pas, ...
Béguin, L'Âme romantique et le rêve,1939, p. 88. 4. ... Ce qui l'intéressait le plus dans les héros littéraires, ce n'était pas le cheminement de leurs sentiments, leurs modifications au contact de certains événements, mais le sillage poétique qu'ils laissent derrière eux, ...
Lhote, Peint. d'abord,1942, p. 31. C.− Spéc., TECHN. MILIT. 1. TACTIQUE. Itinéraire, protégé des vues et du tir adverses par les accidents naturels du terrain ou des ouvrages, qu'emprunte une troupe pour progresser vers les positions ennemies. Deux chemins creux fournissant un excellent cheminement à l'assaillant (Foch., Des Principes de la guerre,1911, p. 177).Je suivais, à la pointe des roseaux, le cheminement de l'attaque (Vercel, Capitaine Conan,1934, p. 240). 2. FORTIF., subst. masc. plur. Cheminements. Ensemble des travaux d'approche exécutés par une troupe pour progresser vers les positions ennemies à l'abri des vues et du tir adverses. Synon. vieilli approches; synon. mod. travaux d'approche, de sape.Une bonne direction d'attaque est donc celle qui fournit des cheminements défilés à l'infanterie (Foch, Des Principes de la guerre,1911, p. 215).Des petits cheminements abrités de sacs à terre (Barrès, Mes cahiers,t. 11, 1914-18, p. 169).De l'arrière aux tranchées, par vingt cheminements gonflés, les régiments d'attaque montaient en ligne (Dorgelès, Les Croix de bois,1919, p. 191). SYNT. Cheminements qui mènent à l'objectif; battre, nettoyer les cheminements. − Au sing. Un cheminement; cheminement qui sort de terre; quitter le cheminement. Dans le cheminement, dans le boyau, la terre gercée résonne sous tous ces pieds cloutés. Toute la tranchée danse, cette nuit (Dorgelès, Les Croix de bois,1919p. 93). Prononc. et Orth. [ʃ(ə)minmɑ
̃]. Pour [ə] muet cf. chemin. Ds Ac. 1878 et 1932. Étymol. et Hist. Ca 1288 cheminemant « avance, progression (ici d'une armée) » (Priorat, Végèce, 4835, A.T. ds R. Hist. litt. Fr., t. 6, p. 305); ca 1460 fig. (Villon, Testament, éd. L. Thuasne, xii, 92 : griefz cheminemens); 1845 spéc. milit. (Besch); 1899 topogr. (Nouv. Lar. ill.). Dér. de cheminer*; suff. -ment1*. Fréq. abs. littér. : 130. |