| * Dans l'article "CHÂTEAU,, subst. masc." CHÂTEAU, subst. masc. A.− FÉOD. Château fort. Forteresse souvent construite sur une hauteur et/ou difficilement accessible, aux murs flanqués de tours et entourés d'un fossé, servant d'habitation seigneuriale. Château féodal; les ruines du château : 1. Avant que la Révolution eût passé par là, c'était un vaste château avec tours et bastions, pont-levis et fossés, créneaux et plates-formes, vraie place forte qui écrasait de sa masse imposante l'architecture élégante et fleurie de son svelte et gracieux confrère.
Sandeau, Mllede La Seiglière,1848, p. 24. 2. Les Genêts avaient été, il est vrai, jadis un château, un vrai castel du moyen âge, avec fossés bourbeux, mâchicoulis, pont-levis et créneaux; il avait soutenu des sièges et enduré de longs blocus...
Ponson du Terrail, Rocambole,t. 1, L'Héritage mystérieux, 1859, p. 399. 3. Le lendemain, à la nuit tombante, j'arrivai au château de Murol. La vieille forteresse, tour géante (...) se dresse sur le ciel, brune, crevassée, bosselée, mais ronde, depuis son large pied circulaire jusqu'aux tourelles croulantes de son faîte.
Maupassant, Contes et nouvelles,t. 2, Humble drame, 1883, p. 402. SYNT. Grand, vieux château; château gothique, historique, médiéval, royal, seigneurial; château abandonné, délabré, démantelé, détruit, ruiné. La basse cour, la haute cour, le donjon, les fossés, les oubliettes, le pont-levis, les souterrains, les tours du château. 1. P. ext. Forteresse. Le château de Vincennes; la garnison, le gouverneur du château. 2. Spéc. et p. anal. a) HÉRALD. ,,Meuble d'armoiries représentant une forteresse flanquée de deux tours rondes, couvertes et crénelées, terminées chacune par une girouette`` (Grandm. 1852). Château ouvert, ajouré, maçonné, girouetté, masuré, découvert (Grandm. 1852). Cités (...) venues (...) inscrire allégoriquement leur donjon de sinople ou leur château d'argent dans son champ d'azur [de Guermantes] (Proust, Le Côté de Guermantes 1,1920, p. 14). b) MARINE − Construction élevée située à la proue ou à la poupe des anciens navires et qui faisait office de défense et de protection à l'origine. Château d'avant ou de proue, d'arrière ou de poupe. Les châteaux de poupe des galions de Vera-Cruz (T'Serstevens, L'Itinéraire espagnol,1933, p. 43).Cf. aussi accastillage. − Superstructure établie sur la partie centrale d'un pont supérieur, tenant la largeur du navire. Long château, court château. c) TECHNOL. Château d'eau. Bâtiment surélevé, en forme de tour surmontée d'un réservoir cylindrique, destiné à fournir l'eau sous pression. − Fontaine de grandes dimensions à bassins multiples. Auprès de nous s'ébruitaient les cascades du château d'eau de la ville (Gide, Les Nourritures terrestres,1897, p. 179). B.− 1. Vaste construction de prestige, avec tours ou tourelles, entourée d'un parc avec jardins, pièces d'eau, etc., servant de résidence royale ou seigneuriale. Château de Fontainebleau, de Versailles; châteaux de la Loire; visiter un château (cf. arcade ex. 9). SYNT. Château magnifique; château de la Renaissance, du XVIIIes.; ailes, appartements, cour, grilles, parc, tourelles du château. − Absol. Le château. La résidence royale. Il [Napoléon] n'était pas monté au château, on l'y avait porté (Las Cases, Le Mémorial de Sainte-Hélène,t. 1, 1823, p. 432). Rem. Dans la plupart des ex. du xixes., il s'agit du château des Tuileries, résidence royale sous la Restauration. ♦ P. méton. Le roi, la cour. Nous avons de cette bienveillance du Château des preuves que je vous détaillerai (Stendhal, Lucien Leuwen,t. 3, 1836, p. 298). ♦ La vie de château. Existence très agréable passée dans le luxe, les loisirs et où l'on est servi par une nombreuse domesticité. Vie de château, images de richesse et de bonheur, châtelaine charmante (Renard, Journal,1897, p. 428). Rem. Chez Balzac, le petit Château désigne la noblesse du faubourg Saint-Germain. Dans le grand salon à la Louis XIV (...) où se trouvait cette société d'élite, la crème de Paris, nommée alors le petit Château (Splendeurs et misères des courtisanes, 1844, p. 106). 2. P. ext. a) Maison de maître de grandes dimensions située au milieu d'une vaste propriété. Château flanqué de tourelles. Le château coquet, pavoisé, décoré de balcons en saillie, et riant au soleil avec ses briques rouges, ses colonnes à la rustique (Bourges, Le Crépuscule des dieux,1884, p. 230): 4. ... et, là-bas, le château, une grande bâtisse de construction moderne, blanche avec des tours trop grêles et ses toits en poivrière, se rapproche à chaque lacis de la route grise.
P. Bourget, Le Disciple,1889, p. 106. 5. Ces bois, étendus sur une centaine d'hectares, rejoignaient les deux ailes du château, une ancienne demeure, de style Louis XIII, à l'allure de ce qu'on appelle encore dans certaines campagnes une « maison de noblesse ».
Châteaubriant, M. des Lourdines,1911, p. 5. ♦ Château branlant (cf. Sandeau, Sacs et parchemins, 1851, p. 19). P. métaph. et au fig. [En parlant d'une pers., d'une chose] Ce qui semble sur le point de tomber. Le tout [un lit à baldaquin] était si massif et pourtant si peu solide, qu'il donnait l'idée d'un château branlant (Las Cases, Le Mémorial de Sainte-Hélène,t. 2, 1823, p. 272). − P. méton. Les habitants du château. Tout le château était juché dans la tour et se tassait contre la porte inébranlable (Boylesve, La Leçon d'amour dans un parc,1902, p. 136). b) [Suivi d'un nom propre] Dans le Bordelais, maison de maître dont le domaine est un vignoble. Château Lafite, château Yquem. P. méton. [Sans majuscule] Grand cru de ce domaine. Un choix de vins vraiment royal : (...) château-filhot 58 aux hors-d'œuvre, (...) château-lafite 48 aux entrées (Zola, Pot-Bouille,1882, p. 188). − Pop. et p. plaisant. Château-la-pompe. Eau du robinet (présentée comme un grand cru). C.− Domaines du jeu, du symbole, de l'imaginaire. 1. JEUX ♦ Château de cartes. Construction faite avec des cartes à jouer posées en équilibre sur plusieurs étages. P. anal. Maison de campagne peu solide (cf. Ac. 1835-1932). [Dans des compar.] Ce qui croule facilement. Ruinés (...) Ce qu'avait construit ton père s'est écroulé comme un château de cartes (...) tout y a passé (P. Vialar, Clara et les méchants,1958, p. 239). ♦ Château de sable. Construction faite par les enfants au bord de la mer avec le sable humide. Châteaux de sable qu'il élevait (...) à la marée montante pour lutter contre la lame (A. France, Les Désirs de Jean Servien,1882, p. 168). 2. Domaines de la mystique, de la litt., de l'onirisme. a) MYSTIQUE [P. réf. au Château de l'âme de Thérèse d'Avila où l'âme juste est comparée à un admirable château que Dieu choisit pour sa demeure; cf. Première demeure, chap. 1] Le château intérieur. Ce grand château de l'âme avec Dieu (Claudel, Feuilles de Saints,1925, p. 661).Le château du souvenir (Barrès, Mes cahiers,t. 12, 1919-20, p. 251).La musique de Mozart est une sorte de château magique où l'âme peut encore trouver asile, qui se sent trop malheureuse (Green, Journal,1942, p. 198). b) FOLKLORE. Château de la Belle au bois dormant (d'apr. le conte de Perrault). Château endormi d'un sommeil magique se réveillant au passage du prince charmant. P. métaph. Le quai d'Orsay, longtemps château de la Belle au bois dormant, s'éveillant à l'activité (De Gaulle, Mémoires de guerre,1959, p. 45). − Au fig. Châteaux en Espagne. Projets, rêves chimériques. Bâtir, faire des châteaux en Espagne loc. créée à l'époque des chansons de geste, les fiefs attribués en terre sarrazine devant ensuite être conquis de haute lutte : 6. floricour. − Le plus court est d'en rire; mais j'avais fait de beaux châteaux en Espagne sur cette rencontre.
rosalie. − S'il ne s'agit que de châteaux, nous ne sommes pas en reste avec vous, et ceux que nous avons bâtis de notre côté ne le cèdent pas aux vôtres.
Leclercq, Proverbes dram.,Le Désœuvrement des comédiens, 1835, 6, p. 445. c) [Titres d'œuvres littér.]Le Château (de Kafka). Le Château de ma mère (de Pagnol). Petits châteaux de Bohême (de Nerval) : ,,Château de cartes, château de Bohême, château en Espagne, − telles sont les premières stations à parcourir pour tout poëte`` (Nerval, Petits châteaux de Bohême,[Œuvres, t. 1], Paris, Gallimard, 1952 [1853], p. 99): 7. Puis un château de brique à coins de pierre,
Aux vitraux teints de rougeâtres couleurs,
Ceint de grands parcs, avec une rivière
Baignant ses pieds, qui coule entre des fleurs;
Puis une dame, à sa haute fenêtre,
Blonde aux yeux noirs, en ses habits anciens,
Que, dans une autre existence peut-être,
J'ai déjà vue... et dont je me souviens!
Nerval, Odelettes, Fantaisie, [Œuvres, t. 1], Paris, Gallimard, 1952 [1853], p.48. Rem. Le château est soit un symbole de sécurité et de protection, soit un monde mystérieux, fermé, inaccessible et hostile. D'apr. Symboles 1969, il figure encore ,,parmi les symboles de la transcendance : la Jérusalem céleste prend la forme dans les œuvres d'art, d'un château fort hérissé de tours et de flèches au sommet d'une montagne... Il est censé abriter un pouvoir mystérieux et insaisissable (...). [Il] symbolise la conjonction des désirs.`` Prononc. et Orth. : [ʃ
ɑto]. Au plur. des châteaux. Ds Ac. 1694 et 1718 s.v. Chasteau; ds Ac. 1740-1932 sous la forme moderne. Étymol. et Hist. A. 1. [Fin xes. a. prov. castel « village fortifié » (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 427)]; [xes. ds FEW, s.v. castellum]; ca 1100 plur. chastels « place fortifiée, citadelle » (Roland, éd. J. Bédier, 2611); 1174 plur. chastaus (G. de Pont-Ste-Maxence, St Thomas, éd. E. Walberg, 2214); 1212-18 forz chastiaus (G. de Villehardouin, Conquête Constantinople, éd. E. Faral, § 320); 1835 château fort (Ac.); spéc. ca 1236 faire chastiaus en Espaigne (G. de Lorris, Rose, éd. F. Lecoy, 2430; v. aussi Neuphilol. Mitt., no1-2, 1914, pp. 107-110); 2. av. 1188 chastel « grande et belle demeure » (Partenopeus de Blois, éd. J. Gildea, 943); a) 1606 « résidence royale » (Nicot); d'où 1836 « la cour » (Stendhal, loc. cit.); b) 1690 « résidence seigneuriale » (Fur.). B. Spéc. 1. 1165-70 mar. chastel (B. de Ste Maure, Troie, éd. L. Constans, 7065); 2. ca 1275 hérald. chastel (Walford's Roll, Leland's version, copy b [7] ds G. J. Brault, Early blazon, Oxford, 1972); 3. 1651 faire des châteaux de cartes (Scarron, Virgile travesti, éd. V. Fournel, livre 6, Paris, 1858, p. 211b), à nouv. ds Ac. 1835; 1690 fig. (Fur. : On appelle château de carte, une maison fort enjolivée, qui paroît beaucoup, & qui est en effet peu de chose); 4. 1704 château d'eau (Trév.). Du lat. castellum (dimin. de castrum « camp ») attesté dans la lang. class. au sens de « redoute » dep. le iies. av. J.-C. ds TLL s.v., 527, 58; cf. César, ibid., 525, 21 et de « château d'eau », puis en lat. médiév. au sens de « citadelle » (776 ds Mittellat. W. s.v., 338, 15) et de « ville fortifiée, oppidum » (ca 778, ibid., 338, 68). Fréq. abs. littér. : 7 122. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 14 391, b) 10 717; xxes. : a) 10 743, b) 5 802. DÉR. Châtelé, ée, adj.,hérald. [Qualifiant une bordure, un lambel] Chargé de plusieurs châteaux. La bordure de Portugal et le lambel d'Artois sont châtelés (Ac.1835-1878).Lar. 19ejuge le terme ,,peu us.; on dit plus souvent chargé ou semé suivant le cas``. Présent ds Ac. 1798-1878.− Dernière transcr. ds DG : chá-t'-lé. − 1resattest. ca 1297 castellé (Chifflet-Prinet Roll, Additions, 7 ds Brault 1972); 1396-97 chastellé (Armorial de France de la fin du XIVes., no11 ds Le Cabinet hist., 1resérie, t. 5, 1859, p. 14); de l'a. fr. chastel (château* terme d'hérald.), suff. -é*. BBG. − Chaurand (J.). Notes à propos de qq. distinctions médiév. : cité, ville et château. R. intern. Onom. 1963, t. 15, pp. 169-172; 1964, t. 16, pp. 241-243. − Gottsch. Redens. 1930, p. 302, 428. − Marichal (P.). De l'expr. château en topon. fr. In : Congrès internat. de topon. et d'anthropon. 1939, pp. 32-38. − Termes techn. fr. Paris, 1972, p. 22, 132. |