| * Dans l'article "CAUCHEMAR,, subst. masc." CAUCHEMAR, subst. masc. A.− Vieilli. État d'oppression ou d'étouffement qui survient durant le sommeil. Le cauchemar d'un malade : 1. À l'aspect de ces difficultés, il fut découragé. Le monde social et le monde judiciaire lui pesaient sur la poitrine comme un cauchemar.
Balzac, Le Colonel Chabert,1835, p. 76. Rem. Le cauchemar a été autrefois attribué à l'intervention d'un démon, d'un incube, de génies malfaisants. Smarra est le nom primitif du mauvais esprit auquel les Anciens rapportaient le triste phénomène du cauchemar (Nodier, Smarra, 1821, p. 21). − P. ext., usuel. Rêve pénible ou effrayant qui réveille le dormeur en le laissant dans un malaise ou dans l'angoisse. Sommeil peuplé de cauchemars : 2. Dans mon enfance j'étais sujet à de fréquents cauchemars, qui me laissaient terrorisé; je me réveillais en criant ou dans les larmes et craignais de me rendormir.
Gide, Journal,1929, p. 939. 3. Si calme, si gentil! comme un ami qu'un cauchemar vous a montré étendu mort et sanglant et qu'on retrouve au réveil, souriant, futile, animé, si inconscient de la menace.
Gracq, Un Beau ténébreux,1945, p. 101. SYNT. Cauchemar atroce, horrible; cauchemar de descente, de poursuite; abominable, sinistre cauchemar; s'éveiller d'un cauchemar; se débattre contre un cauchemar. B.− P. anal. Ce qui provoque la peur, la panique, l'horreur, l'aversion. − [En parlant d'une pers.] Être le cauchemar de qqn; le cauchemar de ma jeunesse. Celui qu'il [Bixiou] aimait le plus à vexer était le jeune La Billardière, sa bête noire, son cauchemar (Balzac, Les Employés,1837, p. 102). − [En parlant d'une atmosphère, d'une situation, d'un état psychol.] Visions de cauchemar : 4. Ce qui paraît vrai, ce qui paraît solide, c'est ce cauchemar du travail forcé, des brutalités, de l'injustice; ce qui paraît faux et fragile, c'est l'ordre, la liberté, le bonheur.
Green, Journal,1946, p. 80. SYNT. Le cauchemar de l'écrasement, de la guerre, de l'invasion; une journée, une maison, une prison, un silence, un visage de cauchemar; forêts de cauchemar; sombrer dans un cauchemar; sortir d'un cauchemar. ♦ Par hyperbole, fam. Ce qui crée des soucis excessifs. − C'est un cauchemar cette chimie; sûr et certain que je vais me faire coller (S. de Beauvoir, Les Mandarins,1954, p. 201). Prononc. et Orth. : [kɔ
ʃma:ʀ] ou [ko-]. [ɔ] ouvert ds Fér. 1768, Fér. Crit. t. 1 1787, Gattel 1841, Nod. 1844, Fél. 1851 et Pt Rob.; [o] fermé ds Land. 1834, Littré, DG, Dub., Lar. Lang. fr.; [o] ou [ɔ] ds Passy 1914, Barbeau-Rodhe 1930, Pt Lar. 1968 et Warn. 1968. Pour l'hésitation entre [ɔ] et [o], cf. aussi Mart. Comment prononce 1913, p. 116, Fouché Prononc. 1959, p. 76 : ,,La prononciation hésite entre [o] et [ɔ] dans (...) cauchemar, causticité, caustique, cautère, (-iser, -ation).`` Cf. encore Kamm. 1964, p. 85 et, pour une liste de mots, Buben 1935, § 44. Ds Ac. 1694-1932; variantes cochemare ds Ac. 1694, cochemar ds Ac. 1718-1740. Qq. dict. admettent également la forme cochemar. Cf. Fér. 1768, Fér. Crit. t. 1 1787 (qui note qu'on l'écrit aussi cochemare) et Gattel 1841. Fér. 1768 et Fér. Crit. t. 1 1787 signalent que Nicot a dit cauchemare; ils ajoutent que les Picards disent cauquemare et les Lyonnais cauquevieille. Pour d'autres formes provinciales cf. Lar. 19e: chauchi-vieilli (Isère), chauche-vieille (Rhône); cf. Littré : chaouche-vielio (Languedoc). Étymol. et Hist. 1. Ca 1375 cauquemare (Sym. de Hesdin, Val. Max., fol. 54ads Gdf. Compl. : Quant il semble que aucune chose viengne a son lit, qu'il semble qu'il monte sur lui, et le tient si fort que on ne peut parler ne mouvoir, et ce appelle le commun cauquemare, mais les medecins l'appellent incubes [cf. incube au sens de « cauchemar, suffocation » 1584-90 Du Bartas ds Hug.]); ce malaise a souvent été attribué à l'action de sorcières, d'où quauquemaire « sorcière » 1440-42 (Lefranc, Champ. des Dames, Ars. 3121, fo120d ds Gdf.); 1564 cauchemare (J. Thierry, Dict. fr.-lat.); 1677 cauchemar (Miège, A new dict., fr. and engl.); 1718 (Ac. : C'est un homme qui donne le cochemar); 1835 (Ac. : Cet homme est un véritable cauchemar); 2. p. ext. 1833 « rêve effrayant » (G. Sand, Lélia, p. 112). Composé, pour le premier élément, de la forme verbale cauche, de cauchier « presser », qui, étant donnée l'orig. pic. du composé (cf. 1580, Bodin, Demon., 108 vods Hug. : Au pays de Valois et de Pycardie, il y a une sorte de sorcieres qu'ils appellent cochemares), représente prob. un croisement entre l'a. fr. chauchier « fouler, presser » attesté sous cette forme dep. la 2emoitié du xiies. (Li Sermon saint Bernart, 159, 22 ds T.-L.), du lat. calcare (v. côcher) et la forme pic. correspondante cauquier. Le second élément est l'a. pic. mare (1285-1300 Gloss. abavus [Marchiennes, Nord], 1407 ds Roques, p. 37 : incubus : mare), empr. au m. néerl. mare « fantôme qui provoque le cauchemar », Verdam, auquel correspondent l'ags. mare « spectre » [angl. nightmare], l'a. h. all., m. h. all. mar [n. h. all. Mahr] (De Vries Nederl.; Kluge20). Fréq. abs. littér. : 1 033. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 463, b) 1 420; xxes. : a) 2 304, b) 1 850. DÉR. 1. Cauchemarder, verbe intrans.a) Fatiguer comme un cauchemar; ennuyer, importuner. Emploi pronom., pop. S'inquiéter, se tourmenter. Hein! Est-elle assez canulante! Il faut qu'elle se cauchemarde (Zola, L'Assommoir,1877, p. 470).b) Faire des cauchemars. La nuit (...) il cauchemarde. Il roule, à bicyclette (...) Un pneu éclate avec un soupir aigre (...) Il pique une tête dans la Loire (Genevoix, La Boîte à pêche,1926, p. 160).Rem. On rencontre en outre ds la docum. l'adv. cauchemardement. À la manière d'un cauchemar. C'est une suite de récits cauchemardement fantastiques (E. et J. de Goncourt, Journal, 1894, p. 606).− [kɔ
ʃmaʀde] ou [ko-], (je) cauchemarde [kɔ(o)ʃmaʀd]. Au sujet du timbre de -au-, cf. cauchemar. − 1reattest. 1840 (Cogniard Frères, Roland furieux, XIII ds Quem. Fichier); de cauchemar, dés. -er, avec intercalation de -d- sur le modèle de dérivés de mots en -ard, tels que bavard/bavarder. − Fréq. abs. littér. : 2. 2. Cauchemardant, ante, adj.a) Qui donne le cauchemar; affreux; obsédant. Une laideur cocasse, farce et cauchemardante (Gyp, Souvenirs d'une petite fille,1928, p. 53).Le second mouvement, (...), devient une sorte de cauchemardante marche funèbre (S. Lifar, Traité de chorégr.,1952, p. 70).b) Pop. [En parlant d'une chose ou d'une pers.] Importun, ennuyeux à l'excès. La loquacité de chacune de ces deux vieilles abandonnées est cauchemardante. Elles radotent éperdument (Gide, Voyage au Congo,1927, p. 838).− Fréq. abs. littér. : 2. 3. Cauchemardesque, cauchemaresque, adj.Qui produit l'impression d'un cauchemar; terrifiant, fantastique. Un rêve biscornu et cauchemaresque (E. et J. de Goncourt, Journal,1894p. 915);dans le genre cauchemardesque, la poésie des Chants de Maldoror (...) a délivré une région du rêve et de la fantasmagorie la plus douloureuse, la plus hagarde, qui aurait dû faire oublier les Fleurs du mal (Aymé, Le Confort intellectuel,1949, p. 39).− [kɔ
ʃmaʀdεsk] ou [ko-]. Au sujet du timbre de -au-, cf. cauchemar. Aucune transcr. de cauchemaresque. Lar. 20eet Dub. : cauchemardesque; Lar. encyclop. : cauchemardesque ou cauchemardeux; Rob. Suppl. 1970 : cauchemardesque, cauchemardeux et cauchemaresque. − 1resattest. a) 1919 cauchemardesque (Benoit, L'Atlantide, p. 174); b) 1882 (E. de Goncourt, La Faustin, p. 319); a de cauchemar, suff. -esque* avec intercalation de -d- d'apr. cauchemarder; b de cauchemar, suff. -esque*. − Fréq. abs. littér. Cauchemardesque : 2. Cauchemaresque : 6. BBG. − Migl. 1968 [1927], p. 317. − Pamart (P.). Écriture artiste et créations verb. Qq. glanures à travers le j. des Goncourt. Vie Lang. 1970, p. 306 (s.v. cauchemaresque). |