| CABALE, subst. fém. I.− OCCULTISME A.− Somme de spéculations ésotériques qui, à partir des vingt-deux signes de l'alphabet hébraïque représentant chacun à la fois une lettre et un chiffre, donnent à certains passages de la Bible un sens allégorique et mystique : 1. Elle prit sur une tablette une boîte de jetons blancs, en compta vingt-deux, puis, avec la pointe d'une agrafe de perles, elle y grava l'une après l'autre les vingt-deux lettres de l'alphabet hébreu. C'étaient les arcanes de la Cabbale qu'elle avait appris en Galilée. « Voilà en quoi j'ai confiance. Voilà ce qui ne trompe pas, dit-elle. »
Louÿs, Aphrodite,1896, p. 108. 2. Dans la kabbale hébraïque, trois sens peuvent être découverts en chaque mot sacré; d'où trois interprétations ou kabbales différentes. La première, dite gématria, comporte l'analyse de la valeur numérale ou arithmétique des lettres composant le mot; la seconde, ... etc., établit la signification de chaque lettre considérée séparément; la troisième, ... etc., emploie certaines transpositions de lettres.
Fulcanelli, Les Demeures philosophales et le symbolisme hermétique...,t. 2, 1929, p. 209. 3. Pourtant, il ne faudrait pas confondre la cabale, dont nous voulons parler, avec la kabbale ordinairement envisagée et demeurée purement hébraïque; aussi bien, pour les différencier, convient-il d'appliquer, à chacun des deux termes, l'orthographe qui lui est propre et que réclame d'ailleurs leur étymologie différente : le premier se réfère au grec kaballés, qui veut dire cheval, tandis que le second vient de l'hébreu kabbalha avec le sens de tradition.
E. Canseliet, Alchimie,1942, p. 202. − P. anal. [En parlant de l'interprétation de textes et doc. autres que la Bible] :
4. La cabale hermétique s'applique aux livres, textes et documents des sciences ésotériques de l'Antiquité, du Moyen Âge et des temps modernes. (...) [elle] est une véritable langue. Et, comme la grande majorité des traités didactiques de sciences anciennes sont rédigés en cabale, (...), le lecteur n'en peut rien saisir s'il ne possède au moins les premiers éléments de l'idiome secret.
Fulcanelli, Les Demeures philosophales et le symbolisme hermétique...,t. 2, 1929, p. 209. B.− P. ext. Science occulte dont un des objets est la communication avec des êtres surnaturels. Rem. Attesté dans la plupart des dict. généraux. II.− [P. réf. au secret qui entoure les spéculations de ceux qui s'adonnent à cette forme d'occultisme] Intrigue secrète ourdie contre quelqu'un, pour l'atteindre dans sa réputation, ses actions ou ses œuvres. La première chose qu'on organise (...) ce sont les discordes, les jalousies, les intrigues, les cabales de toute espèce (Fourier, Le Nouv. monde industr.,1830, p. 26): 5. Fréron disait de lui, de Diderot, de Duclos et de Grimm qu'ils formaient une « cabale » et une « clique », et les signalait charitablement tous ensemble à Malesherbes comme des « enthousiastes, des fanatiques, et des gens odieux au gouvernement et à la société ».
Guéhenno, Jean-Jacques,Roman et vérité, 1950, p. 36. − P. méton. Association de ceux qui montent une cabale. SYNT. Cabale atroce, puissante, violente; la cabale des dévots, des jansénistes, des princes; la cabale d'Andromaque; cabale financière, politique; être un homme de cabale, l'instigateur d'une cabale; briser, subir une cabale; monter une cabale contre qqn. − En partic., THÉÂTRE ,,Coterie organisée dans une salle de spectacle pour faire échouer une pièce ou bien nuire au succès d'un acteur`` (H. Génin, Le Lang. des planches, 1911, p. 21). ♦ Faire cabale : 6. Les saltimbanques, enthousiasmés et exaspérés, contemplaient Gwynplaine en grinçant des dents (...). Ils (...) firent cabale, sifflèrent, grognèrent, huèrent. Cela fut pour Ursus un motif de harangues hortensiennes à la populace...
Hugo, L'Homme qui rit,t. 2, 1869, p. 124. PRONONC. ET ORTH. : [kabal]. Ac. Compl. 1842, s.v. cabbale, renvoie à cabale; cf. aussi Guérin 1892; cf. encore Lar. 19e: cabbale ,,s'écrit quelquefois pour cabale``. Orth. kabbale dans les ex. 2 et 3. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. 1532 « doctrine, tradition transmise » (Rabelais, Pantagruel, Prologue, éd. Marty-Laveaux, t. 1, p. 215); 1611 au propre « interprétation juive de l'A. T. » (Cotgr.); 2. 1546 « science occulte » (Palmerin d'Olive, 39b d'apr. Vaganay dans Rom. Forsch., t. 32, p. 21); 3. 1546 « manœuvres secrètes » (Rabelais, Tiers Livre, éd. Marty-Laveaux, t. 2, p. 78 : caballe monastique).
Empr. à l'hébr. qabbāla « tradition reçue, doctrine ésotérique », du verbe qibbel « recevoir par tradition » (v. Devic). STAT. − Fréq. abs. littér. : 200. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 498, b) 238; xxes. : a) 162, b) 199. |