| BROUILLARD1, subst. masc. A.− 1. MÉTÉOR. Ensemble de gouttelettes d'eau en suspension dans l'air qui se forme au niveau du sol par suite du refroidissement des couches inférieures de l'air : 1. ... comme il était tombé toute la nuit une pluie fine, il restait encore un brouillard humide qui retardait son [du soleil] apparition.
Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,t. 2, 1848, p. 158. 2. Je suis sorti sur le balcon. Le soir est tombé. Les brouillards gris qui traînent sur la terre durant la chaleur du jour se sont écartés.
Guéhenno, Journal d'un homme de 40 ans,1934, p. 257. 2. P. anal. a) Atmosphère rendue opaque comme par un brouillard. Brouillard de fumée : 3. Et, comme, en passant près de la fontaine, le voyageur y plongea le bout de son bâton, − l'eau bouillonna soudain. Et l'on vit s'élever dans l'air un brouillard de fumée, noire et puante.
Murger, Les Nuits d'hiver,1861, p. 220. 4. ... la vapeur des haleines avec les fumées des candélabres faisait un brouillard dans l'air.
Flaubert, Trois contes,Hérodias, 1877, p. 191. b) Voile qui nimbe les corps et les objets et en estompe les contours. Avoir un brouillard devant les yeux : 5. Elle [Valérie] se posa de manière à rendre Crevel ... déchaussé de sa cervelle jusqu'aux talons, tant elle fut drôle et sublime de nu visible à travers le brouillard de la batiste.
Balzac, La Cousine Bette,1846, p. 294. 6. C'étaient des cheveux blonds, d'un blond cendré, d'un blond de poudre, et il y en avait, et ils étaient fins, un brouillard d'or autour de la tête.
A. Daudet, Le Petit Chose,1868, p. 261. − P. métaph. [Avec une idée de menace] :
7. L'avenir lui paraissait gros de nuages gris; des brouillards perpétuels s'étaient amassés autour de sa tête, au lieu du rayon de soleil qui dorait jadis son existence.
Champfleury, Les Aventures de Mlle Mariette,1853, p. 189. B.− Au fig. Confusion dans la prise de conscience ou dans le souvenir : 8. Dans le brouillard d'un mal de tête, idées pour la symphonie. Ne pas prendre le ton dithyrambique d'hier; en faire quelque chose de très lié, d'organique, de charnu. Commencer par un cri?
P. Schaeffer, À la recherche d'une mus. concr.,1952, p. 58. 9. Le pardon est la totale franchise, mais le malentendu est la fuite dans les brouillards de l'approximation; ...
Jankélévitch, Le Je-ne-sais quoi et le presque-rien,1957, p. 171. − Locutions ♦ Foncer dans le brouillard. Disparaître, s'éclipser rapidement. Arg. milit. Foncer dans le brouillard. Monter à l'assaut. ♦ Être dans le brouillard. Ne plus savoir exactement ce que l'on fait. Arg. Être dans le brouillard. ,,Être gris, commencer à y voir trouble`` (France 1907). PRONONC. ET ORTH. : [bʀuja:ʀ]. Buben 1935, § 212, rappelle : ,,Brouillard, a. fr. brouillas, anciennement brouas, dérivé de brou, d'origine germ. [fait partie des mots] dans lesquels un r analogique a été ajouté par substitution de suffixe à l'époque où les consonnes finales cessaient de sonner. Purement graphique et muet au commencement, cet r est devenu plus tard sonore comme dans les autres mots où il était étymologique.`` ÉTYMOL. ET HIST. − 1remoitié xves. broillars (Ch. d'Orléans, Ballades, XCVI, 10, éd. P. Champion, Paris, 1956, p. 151); 1538 brouillard (Est.).
Altération par changement de suff. (-ard*, péj. cf. blafard, hagard, etc.) de l'a. fr. brouillas « brouillard » (ca 1210, bruillat, G. de Coincy, Mir. Vierge, 11, 5 dans T.-L.; 1379 brouillas, J. de Brie, Bon Berger, 103, ibid. − 1690, Fur. : quelques uns disent encore brouillas, 1771, Trév. : brouillard, autrefois brouillas), dér. de brouiller* étymol.; suff. -as* (v. Nyrop t. 3, § 179 et FEW t. 15, 1, p. 300a). STAT. − Fréq. abs. littér. : 2 413. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2 591, b) 4 699; xxes. : a) 3 710, b) 3 301. |