| BIENVEILLANCE, subst. fém. A.− MOR. [La bienveillance comme vertu ou comme comportement général] :
1. Selon Hutcheson, le principe de la vertu dans l'âme, est la bienveillance... Il la définit ainsi : « Une affection qui vous porte à désirer le bonheur de notre prochain ».
Cousin, Cours d'hist. de la philos. mod.,t. 4, 1847, pp. 149-150. 1. Disposition généreuse à l'égard de l'humanité. Bienveillance universelle : 2. ... que ta première passion soit le mépris des traîtres et la haine des tyrans; que ta devise soit : protection, amour, bienveillance pour les malheureux, guerre éternelle aux oppresseurs!
Robespierre, Discours,Sur la guerre, t. 8, 1792, p. 110. 3. Je ne suis pas indigne du jour sacré qui se lève pour moi. Je me sens le cœur plein de bienveillance, de paix, d'amour universel. Que ne puis-je de cette mer de bonheur dont je me sens inondé donner au monde une goutte!
Michelet, Journal,1849, p. 15. 4. ... si l'on tient compte des difficultés sans nombre de la condition humaine, la bienveillance générale est la vraie justice.
Renan, Feuilles détachées,1892, p. 19. − P. métaph. : 5. Geneviève couchait au-dessous de ma chambre; (...) les mêmes parfums, les mêmes bruits devaient l'atteindre, et peut-être avait-elle cédé à la douceur de l'abandon devant tant de tranquillité et de bienveillance qui flottaient sur les champs comme une buée matinale.
Bosco, Le Mas Théotime,1945, p. 82. 2. Qualité d'une volonté qui vise le bien et le bonheur d'autrui. Bienveillance mutuelle : 6. ... « Vieillard, n'espère plus d'exciter aucune sympathie dans le cœur d'un homme! la coupe de la bienveillance est tarie pour toi; la tendresse, l'affection, la douce et compatissante amitié, se sont retirées devant tes rides et tes cheveux blancs. »
Chênedollé, Journal,1833, p. 169. 7. La bienveillance n'est-elle pas en quelque sorte le « charme » de la bienfaisance? Entre l'acte inspiré par l'amour et l'apparence conforme il peut n'y avoir aucune différence, tant est douteux et ambigu le bon mouvement, qui est l'âme intentionnelle de la bonne action...
Jankélévitch, Le Je-ne-sais-quoi et le presque-rien,1957, p. 66. B.− Usuel [La bienveillance comme attitude concrète dans les relations d'une pers. avec une autre qu'elle peut favoriser ou ne pas favoriser] Disposition particulièrement favorable à l'égard de quelqu'un. Anton. dédain, hauteur, hostilité : 8. ... Monsieur le Président, (...) je rends hommage à votre bienveillance, à votre courtoisie, à votre sentiment de la gravité de la situation.
R. Martin du Gard, Jean Barois,1913, p. 387. − En partic. [En parlant de l'attitude d'un supérieur à l'égard d'un inférieur] :
9. « Nous vous prions très humblement, Monseigneur, (...) de nous accorder votre bienveillance et votre protection. Nous tâcherons de ne pas nous en rendre indignes, par notre soumission à tous les ordres de Votre Grandeur. »
Tocqueville, L'Ancien Régime et la Révolution,1856, p. 116. 10. « − Monsieur le Ministre, je viens solliciter de votre haute bienveillance l'accès de la magistrature. »
A. France, L'Orme du mail,1897, p. 173. − Loc. Par mesure de bienveillance; par pure bienveillance : 11. Par mesure de bienveillance, les salariés dont le conjoint bénéficie soit d'une pension d'invalidité en application d'une législation de Sécurité Sociale, soit d'une rente d'accidents du travail, peuvent, (...) continuer à percevoir l'allocation de salaire unique.
Le Figaro,19-20 janv. 1952, p. 4, col. 7. SYNT. a) Bienveillance aimable, amicale, attentive, exquise, naturelle, native, souriante, sympathique; généreuse, grande, parfaite, tendre, touchante bienveillance. b) Un esprit, un mouvement de bienveillance; être rempli de bienveillance. c) Honorer qqn de sa bienveillance; marquer, montrer, témoigner de la bienveillance à qqn; réclamer la bienveillance de l'auditoire; faire appel à, mériter la bienveillance de qqn; recommander qqn à la bienveillance de qqn; accueillir, écouter, recevoir qqn avec, sans bienveillance; manquer de bienveillance. PRONONC. : [bjε
̃vεjɑ
̃:s]. Antérieurement à DG, tous les dict. consultés, à l'exception de Land. 1834, recommandent de ,,mouiller les deux ll``. ÉTYMOL. ET HIST. − Ca 1175 bienvoillance « disposition favorable envers qqn » (B. de Ste Maure, Troie, 24988 dans T.-L.); av. 1307 bienveillance (Guiart, Roy. lign., t. 1, v. 924 dans Gdf. Compl.); 1680 spéc. « disposition favorable d'un supérieur envers un inférieur » (Rich.).
Dér. du rad. de bienveillant* (suff. -ance*), sur le modèle du lat. benevolentia (Térence, Heaut., 1, 1, 63 dans Forc.) d'où concuremment, benevolence, benivolence (xiie-xvies. dans T.-L., Gdf.). STAT. − Fréq. abs. littér. : 1 130. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2 461, b) 1 460; xxes. : a) 1 166, b) 1 220. BBG. − Feugère (F.). La Volière de Marie de France. Déf. Lang. fr. 1970, no54, p. 10. |