| BECQUET, BÉQUET, subst. masc. A.− Vx. ,,Petit bec`` (Ac. Compl. 1842, Quillet 1965). B.− [P. anal. de forme (ou de fonction)] 1. ICHTYOL., PÊCHE. Nom vulgaire du saumon, du brochet. 2. Objet de forme pointue. a) ALPINISME. ,,Saillie de roches dont la pointe est dirigée vers le haut et autour de laquelle on peut fixer une corde. Les becquets sont utilisés pour poser des anneaux de corde lors d'une descente en rappel ou pour s'amarrer en position d'assurance`` (Gautrat 1970). b) ART CULIN. ,,Nom d'un des meilleurs morceaux du porc, la chair attachée à la mâchoire inférieure, que l'on consomme d'ordinaire fumé`` (Ac. Gastr. 1962). c) CORDONN. ,,Morceau de cuir pointu du soulier dont on renforce la semelle`` (Chautard 1937). d) P. ext. du précédent − CORDONN. ,,Clou à tête en goutte de suif plus ou moins bombée, et qui s'emploie pour les chaussures de fatigue, les brodequins des soldats. Les béquets sont fabriqués avec du fil de fer ou du fer en bandelettes plates`` (Lar. 19eSuppl. 1890). − COUT. Petite pièce triangulaire (en forme de bec) qu'on adapte à un vêtement (d'apr. DG). − IMPR. Morceau de papier ajouté en marge d'un manuscrit, pour y introduire une addition ou une modification; indication marginale de ce changement. ,,Bande de papier collée sur une feuille de mise, sous un cliché ou sous les lettres, pour égaliser la pression aux endroits faibles`` (Comte-Pern. 1963); (cf. aussi G. et H. Coston, L'A.B.C. du journ., 1952, p. 192). − MENUIS. ,,Morceau de bois rajusté à une cassure`` (Lar. 19e-20e). e) Argot − Arg. d'artiste. [Béquet, p. abrév. beq et, par déformation du précédent, bec] ,,Petit morceau de bois à graver`` (A. Delvau, Dict. de la lang. verte, 1866, p. 29). − Arg. du théâtre. Fragment de texte qu'un auteur ajoute ou modifie au cours des répétitions : 1. ... j'ai lu dans un journal que M. Maurice Donnay, pour donner à M. Grand (qui débutait à la Comédie) un moyen d'éviter le trac, avait ajouté à son rôle (au début) ce qu'en argot dramatique on appelle un béquet, c'est-à-dire un récit, qui commence par ces mots : « laissez-moi le temps de me remettre, etc... » Charmant, n'est-ce pas?
J. Rivière, Correspondance[avec Alain-Fournier], 1906, p. 58. 2. Puisque béquet ou becquet vient de petit bec le mot a dû faire son entrée au théâtre en raison du rapprochement qu'on peut faire entre les oiseaux allant prendre la becquée et les acteurs qui − lorsque se fait la distribution des fragments du nouveau texte − viennent à tour de rôle chercher près de l'auteur les bouts de papier contenant les quelques lignes qui leur sont partagées : quelques fureteurs attribuent à une fantaisie de Voltaire l'introduction du mot « béquet » dans les coutumes du théâtre.
H. Genin, Le Lang. des planches,1911, p. 16. PRONONC. ET ORTH. − 1. Forme phon. : [bεkε], [bekε]. Pt Rob. transcrit [bekε] (pour les 2 graph. becquet ou béquet). Pt Lar. 1968 transcrit [bεkε] dans le cas de becquet, [bekε] dans le cas de béquet. Warn. 1968 donne uniquement la prononc. avec [ε] ouvert (cf. aussi Littré qui écrit becquet). 2. Forme graph. − La majorité des dict. admet becquet ou béquet. Cf. Lar. 19e, Nouv. Lar. ill. (qui soulignent que pour le nom vulgaire du brochet et du saumon on dit aussi béchet), Lar. 20e, Rob., Lar. encyclop. et Quillet 1965; Guérin 1892 et DG écrivent uniquement béquet. Ac. Compl. 1842, Besch. 1845 et Littré traitent séparément becquet (nom vulg. du saumon) et béquet (petit bec). ÉTYMOL. ET HIST. − 1. Ca 1170. Zool. bechez « petit bec » (B. de Ste Maure, Ducs Normandie, II, 1436 dans Gdf. Compl. : Ausi cum oisel sunt joios ... Comunaument, grantz et petis A faire el pareir le lur niz Enportoent les ramelez Parmi le pui en lor bechez); 1587 bequet (J. du Chesne, Le Grand Miroir du Monde, L. III, p. 102 dans Hug.), qualifié de ,,vx`` dep. Ac. Compl. 1842; 2. 2emoitié xiiies. ichtyol. « brochet » (Doon de Mayence, éd. A. Pey, 9795 : Lus, perches et barbiaus et maint bequet noant); fin xiiies. bechet (B. et J. de Condé, Dits, éd. Scheler, II, 185, 144 dans T.-L.); 1378 becquet dans Archives de St Quentin dans IGLF Litt.; 3. 1808 technol. béchet (Boiste); p. ext. 4. 1906 arg. du théâtre béquet, supra ex. 1.
Dér. du rad. de bec* étymol. 1 et 3; suff. -et*. Sur la forme du rad. cf. becquer. STAT. − Fréq. abs. littér. Béquet : 3. |