| BAILE2, BAÏLE, BAYLE2, subst. masc. I.− HIST. (infra étymol.) Personne remplissant des fonctions analogues aux fonctions modernes d'administrateur, de tuteur, de régent, de syndic. Baile du royaume : 1. Autour de son lit [de Beaudoin], à Nazareth, se rassemblèrent ses proches, sa mère, son beau-frère Guy de Lusignan, le patriarche Héraclius. Dans ce conseil de famille le malheureux souverain délégua à Guy la « baylie », c'est-à-dire la régence du royaume. Tout de suite le nouveau « bayle » se montra un chef médiocre.
Grousset, L'Épopée des croisades,1939, p. 227. Rem. Attesté ds Ac. Compl. 1842, Lar. 19e− Lar. encyclop., Guérin 1892 (s.v. baile ou bayle), Quillet 1965. II.− Régionalisme A.− En Provence, chef des bergers : 2. − Non, je ne suis pas mort, dit le berger, je peux pas mourir en Crau, moi. (...). J'ai dit au maître : « Je voudrais un effet de votre bonté. Faites-moi monter à la montagne; pas comme baïle, je suis trop vieux, pour suivre tout simplement. »
Giono, Le Grand troupeau,1931, p. 262. Rem. Attesté ds Lar. 20e(s.v. baile et bayle), Littré (s.v. bayle), Guérin 1892 (s.v. baile ou bayle), Lar. 20e, Lar. encyclop. (s.v. baîle ou bayle), Quillet 1965 (qui l'écrit bayle en ce sens). − P. ext. Chef, supérieur : 3. Tais-toi, Ponce Clumane, dit Zidore à lèvres cousues, mais si nettement que chacun l'entendit, tais-toi, bayle des charretiers.
A. Arnoux, Rhône, mon fleuve,1944, p. 196. Rem. Attesté ds Lar. 19e, Guérin 1892 (s.v. baïle ou bayle). B.− Maître-valet dans les métairies du midi (de la France) : 4. L'exploitation peut se confondre organiquement avec la propriété. Elle revêt alors soit la forme d'une entreprise à salariés, gérée directement par son propriétaire ou indirectement par l'intermédiaire d'un intendant : bayle, maître-valet, etc. (grande propriété), soit la forme d'une entreprise familiale (petite propriété).
Traité de sociol.,1967, p. 260. Rem. Attesté ds Lar. 20e, Lar. encyclop. (s.v. bayle). PRONONC. ET ORTH. : [bεl] (Barbeau-Rodhe 1930 [bε:l]) et [bajl] (Pt Lar. 1968). Var. graph. bayle (Littré, Guérin 1892, Lar. 20e, Lar. encyclop., Quillet 1965), baïle (Lar. encyclop.). ÉTYMOL. ET HIST. − [Ca 1180 bail « celui qui dirige, qui administre » (Antioche, éd. P. Paris, I, 21 ds T.-L. : chascuns soit obëis A dant Pieron l'ermite, qui vous est baus et guis); ca 1207 « gouverneur, régent » (Villeh., 385, Wailly ds Gdf., s.v. bail : Fu receuz Henris en la seigneurie comme baus de l'empire); 1288 « tuteur » (Renart le nouvel, 2312, éd. Méon, ibid. : Et si aquerrai un los tel Dedans un an, que se moroit Li rois, que on de moi feroit Souvrain bailliu, et si seroie Baus des enfans); Fur. 1690 note encore ,,on a appelé aussi autrefois bail un mari, parce qu'il a la tutelle et administration des personnes et biens de sa femme``; bail jusqu'au xvies. (Cotgr. 1611 au sens de tuteur)] 1. 1592 bayle « administrateur d'un territoire » (Monluc, Commentaires, 1. VII ds Hug. : Pour le bien, j'en ay prou : il est vrai que si j'eusse esté nourry en l'escole du bayle de Lesperon, j'en eusse davantaige ... Sur le grand chemin le bayle avoit faict bastir une très belle maison); 1605 baille « id. » (Le Loyer, Hist. des Spectres, VI, 13, ibid.); baile (Cotgr. 1611); en partic. a) 1704 (Trév. : Baile [...] Ce mot se dit aussi dans le Languedoc et dans le Roussillon, et signifie une sorte de Juge Royal [...] On prétend assujettir les enrôllez au payement des entrées, quand les Consuls ou les Bailes l'ordonnent); b) 1751 dr. (Encyclop. t. 2 : Baile [...] usité particulièrement en Béarn, où il se dit de certains huissiers subalternes qui ne peuvent exploiter que contre les roturiers à la différence des veguers qui exploitent contre les gentilhommes); 1752 (Trév. : Baile ou Bayle étoit aussi un Officier des anciens Dauphins, préposé à la recette de leurs droits seigneuriaux); c) 1838 hist. eccl. (Ac. Compl. 1842 : Baile ou Bajule. Titre de dignité ecclésiastique, s'est dit de L'official des évêques et des abbés. Dans les monastères, il se disait Du procureur; et Du religieux qui remplissait les fonctions de moniteur); 2. a) 1867 (Lar. 19e: Baile [...] On nomme encore ainsi, en Provence, le chef des bergers employés à la garde d'un même troupeau); b) 1928 (Lar. 20e: Baile [...] Maître-valet, dans les métairies du midi de la France).
1 peut-être empr. à l'a. prov. baile, baille « officier chargé d'une administration » : baile 1140 (Acquisition par Peire Girau Raspau pour le prieuré de St-Jean d'Aureil ds Brunel 1926, p. 41); baille 1176 (Accord entre E. de Maur, prieur de l'église de St Antonin, et Fort Sanz, baile et maître de la maison du Temple dans le pays, ibid., p. 139); du lat. baiulus « porte-faix » en lat. class. (Plaute, Poen., 1301 ds TLL s.v., 1686, 70); en lat. médiév. « tuteur » (viies., Fredeg. lib. 4c. 86, Scr. rer. Merov., II, p. 164 ds Nierm. t. 1); « gouverneur » (Desjardins, Cart. de Conques, p. 157, no182 [a. 937], ibid.); fréquemment attesté dans des emplois relig. (Du Cange, s.v. bajulus2). 2 empr. au prov. mod. baile « maître, chef des travailleurs » : baile-pastre « chef des bergers d'un grand troupeau » (Mistral), de même orig. que 1. [L'a. fr. bail est directement issu du latin]. STAT. − Fréq. abs. littér. : 3. BBG. − Darm. Vie 1932, p. 92. − Wind 1928, p. 55, 141. |